Interview faite par Matthieu à Noisiel.

Juste après le set du Naheulband, me voilà en route pour le théâtre, où j’ai eu la chance de m’entretenir avec Heri Joensen. Un peu froid au premier abord, c’est tout à fait serein qu’il prend place en face de moi sur le banc qui nous est réservés.

Salut Heri, heureux de te rencontrer ! Peux-tu vous présenter, le groupe et toi ?

Heri : Je suis Heri Joensen, je joue de la guitare et chante dans le groupe TÝR, venu des Îles Féroé.

Comment tu te sens d’être de retour en France ? Qu’est-ce que tu penses du public français en général ?
Je suis content d’être de retour ici, la dernière fois que je me souviens d’avoir joué en France, je ne me souviens pas exactement où mais je me souviens que c’était avec Sabaton, on a joué dans des salles super cool, les shows étaient vraiment bien. Je garde un très bon souvenir de salles plus grandes en France. On a joué dans des endroits un peu plus petits en France avant. On a aussi joué au Hellfest, au Motocultor et dans d’autres festivals un peu plus petits. De manière générale, j’aime beaucoup ça. On aime les Français, ils semble nous aimer aussi heureusement, alors c’est bon ! (rires)

Vous jouez aussi au Hellfest cette année il me semble !
En effet on y sera.

Comment fonctionne le processus de création musicale dans Týr ?
On rassemble des idées chacun de notre côté, on les envoie aux autres. On bosse les détails, on décide de ce qui sera cool, de quel élément ne l’est pas, de ce qu’on va utiliser ou non. Comme ça, on a pas mal de matériel quand arrive le moment de faire un album, on pioche les meilleures idées et on les bosse. Je pense pouvoir dire que je fais la majorité de la musique, mais tout le monde ajoute ses idées. Evidemment j’aime utiliser des mélodies traditionnelles, qui est la base de notre musique. Ce n’est pas le cas de Gunnar (bassiste, ndlr), il a une approche vraiment différente de la musique. La majorité du temps, ça se passe sur Internet, on ne se réunit pas souvent tous ensemble pour travailler sur nos chansons. C’est comme ça qu’on fait !

Le groupe a presque vingt ans de carrière, pensais-tu que vous tiendriez aussi longtemps ?
Ouais, je veux dire que quand j’ai commencé le groupe on pensait vraiment faire ça pour le reste de notre vie. Je suis un peu plus vieux maintenant, mais je me sens en forme et je sens qu’on peut faire ça jusqu’à la fin !

Avez-vous prévu un évènement spécial pour célébrer cet anniversaire ?
On en est pas encore tout à fait aux vingt ans, on a créé le groupe en… 1998 je crois. Peut-être que je devrais faire quelque chose pour l’an prochain.

Certains groupes le font, d’autres pas !
Ouais, on devrait faire quelque chose ! Je garde ça à l’esprit !



Il y a eu une annulation sur la dernière tournée (avec Sirenia et Unleash The Archers) à cause de ta participation à la chasse aux baleines (appelée Grindwaljagd), comment avez-vous réagi au boycott du groupe par certains fans et leurs réactions négatives ?
Oui, en allemagne ils l’appellent Grindwaljagd. Je crois que… cinq concerts ont été annulés, et… J’ai fait une vidéo, enfin deux en fait pour expliquer ce qui se passe. Ces éco, appelons les des éco-terroristes, au moins les organisateurs, se fichent éperdument des baleines ou de n’importe quelle forme de vie sauvage, ils veulent juste de l’argent. On a parfois été considérés comme des antéchrists par les catholiques. En fait, ça les arrange de trouver une raison pour nous empêcher de faire ce qu’on aime. Ils veulent nous empêcher de jouer parce qu’on propage un message non catholique ou les valeurs d’une culture pré-catholique. Ils ont pris des photos des baleines pour générer une relation avec ce mode de vie. Les gens qui ont participé à la campagne ont peut-être de la compassion pour les baleines, je ne peux pas le nier. Il se trouve qu’ils sont juste venus au mauvais endroit, et ce que j’ai fait en publiant des vidéos pour expliquer tout ça c’est pour empêcher de faire annuler la majorité des concerts. Ca a marché. On a eu peur que tous les concerts soient annulés pour nous, mais la plupart ne l’ont pas été, on a reçu une énorme attention médiatique grâce à ces gars, donc je pense que ça a plutôt bien marché pour nous. Je pense qu’on peut s’attendre à quelque chose de similaire quand on fera une nouvelle tournée, une sorte de boycott, mais on a surtout eu l’attention des médias alors je pense qu’ils ont raté leur objectif.

A part le line-up, y a t il eu des évolutions ou changements que tu as pu observer entre le premier et le dernier album ?
Du premier album, il ne reste que Gunnar et moi, on avait un chanteur différent et un autre batteur aussi. Il a joué avec nous jusqu’avant le dernier album et quand le chanteur est parti après le premier album j’ai commencé à chanter. Depuis qu’on est un groupe, on a toujours eu un batteur permanent, mais depuis le dernier album on se débrouille avec des batteurs de session ou de scène. Terji (deuxième guitariste, ndlr) nous a rejoints après le premier album, alors que j’avais enregistré jusque là toutes les guitares. On a eu différents chanteurs et guitaristes avant que le groupe soit stable.

Pourquoi as tu choisi de te concentrer sur la mythologie à une époque où la plupart des gens sont plus axés sur la modernité, la technologie et le progrès ?
En fait c’est parce que j’ai toujours adoré la mythologie et l’histoire depuis que j’ai dix ans. J’aime ça et j’ai envie de me battre pour ça, et y combiner le heavy metal pour la simple et unique raison que j’aime ça. Il y a quelque chose de logique dans cette combinaison, alors que d’autres groupes l’ont fait avant. Je ne les connaissais pas, des groupes comme… Bathory et… un groupe anglais…

Venom ?
Ouais, Venom ! Des groupes polonais aussi, dont je n’avais jamais entendu parler avant le premier album. Il y a pas mal de comparaisons avec des groupes, donc il y a finalement quelque chose de logique dans cette combinaison. C’est un concept que j’aime et je le fais tout simplement parce que j’aime les deux. C’est un bon mélange.



Tu as dit un jour que “la mission musicale de Týr est de casser les murs existants entre les différents genres de metal nés au fil des ans”. Qu’en est il maintenant ? Penses-tu qu’il y ait encore des conflits entre les fans de certains genres ?
(rires) Ouais, j’ai abandonné ce projet. C’est impossible. Ca m’embête vraiment parce que c’est impossible de ne pas catégoriser un groupe. J’ai réalisé que les étiquettes et les genres venaient principalement des labels et des médias, parce qu’ils ont besoin de classer et ranger les groupes. C’est vraiment inutile pour un musicien, parce que tu fais la musique qui te plaît et tu laisses quelqu’un d’autre lui donner un nom. Au début c’est arrivé qu’on essaye de simplement garder le terme heavy metal au lieu de rock‘n’roll. L’album "Long Live Rock‘N’Roll" (Rainbow - 1978, ndlr). C’est un terrible échec. On n'a pas vraiment besoin de termes pour notre musique. Le positif pour un musicien, c’est que tu peux ignorer les étiquettes qu’on colle sur ta musique. Quand tu fais quelque chose de vraiment original, les généralistes vont créer un nouveau nom pour ça. Comme ça, on peut classer ta musique, et les maisons de disques pourront le vendre. On a besoin des généralistes, et on a besoin des maisons de disques. Alors j’ai simplement accepté l’idée et je vis avec, je ne me bats plus pour ça.

Quel serait le line-up avec lequel tu rêverais de tourner ?
Hmm… (il réfléchit) J’aimerais partir en tournée avec… Metallica, Iron Maiden et Judas Priest. Et nous qui ouvrons ! Les gens se demanderaient ce qu’on fout là, mais ce serait une putain de tournée !

Ton dernier coup de coeur musical ? Ou un groupe à nous recommander ?
J’ai vu Powerwolf sur scène avant qu’on arrive. C’était un show impressionnant que j’ai vu depuis un bon moment. (il réfléchit) Devin Townsend Project aussi, j’aimerais vraiment partir en tournée avec eux et je les ai découverts avant de faire la dernière tournée avec Sirenia. Ce n’est pas vraiment un nouveau groupe mais ils sont vraiment impressionnants ! Je n’ai pas vraiment envie de chercher de nouveaux groupes par moi-même.

Un dernier mot, en danois ou féroïen, à tous vos fans ?
On parle surtout féroïen, assez peu danois aux Îles Féroé. Un dernier mot avant de mourir ? Ou juste pour finir l’interview ? (rires)

Non, juste pour finir l’interview !
Ouais : “Túsund takk tyri at tit komu til konserting ! Vit síggjqst eina aðru ferð !”

Ce qui veut dire ?
Merci à tous d’être venu au concert, on se voit la prochaine fois !


Le site officiel : www.tyr.fo