Interview faite par Ichigo avec le groupe.

En Belgique, et surtout en Wallonie, s’il y a bien un groupe de metal que tout le monde connaît, c’est bien Mystica. Ayant écumé tout ce qui ressemble à une salle ou un club depuis dix ans avec leur black d’abord et mordern death par la suite, ayant perdus des fans mais en ayant gagnés d’autres, ayant essuyé des changements de line-up régulièrement sans perdre de leur bonne volonté, la page Mystica est tout de même sur le point de se tourner. Avant que l’aventure ne se termine pour de bon en Octobre toutefois, j’ai pensé qu’une interview récapitulative de ces dix ans pourrait faire du bien à tout le monde, que ce soit aux fans, aux détracteurs ou au groupe lui-même. Je vous laisse donc découvrir par vous-même ces pages teintées d’humour mais surtout très fortement imprégnées d’émotions !

Pour commencer, quelle synthèse feriez-vous de ces dix ans passés ?

Bart (chant) : Lorsqu’on a commencé MYSTICA à l’époque, on était une bande de potes et on s’était fixé comme objectif d’avoir un maximum de concerts mais rien que la Wallonie nous aurait déjà bien satisfaits car le but était de jouer. En moins d’un an, on a dépassé cet objectif pour la carrière du groupe (rires). Tout ça n’a été que du bonheur depuis le début.
Cathy (guitare) : Le principal aussi, c’était qu’humainement ça se passe bien, autant sur scène qu’avec les quelques fans qu’on a.
Bart : Voilà, on a dépassé tout ce qu’on aurait pu imaginer il y a dix ans, on en reparle encore avec ceux qui étaient à la base de MYSTICA, on aurait jamais pensé qu’on aurait pu faire autant et aussi vite. Six mois après la formation, on donnait notre premier concert mais bon, ça c’est normal ; mais dans la première année on a quand même ouvert pour Soilwork, pour Anorexia Nervosa qui cartonnait bien à l’époque et dont j’étais super fan, on a fait la première partie d’Immortal, et dans l’année on avait un label. Puis six mois après, on a sorti le premier album. On n’avait jamais pensé à ça, on pensait être un groupe qui allait sortir des démos et jouer dans des bars jusqu’à épuisement.

Peux-tu faire la comparaison des buts que vous aviez tout dernièrement par rapport à ceux que vous aviez au tout début ?
Bart : Oui, comme je le disais, au début on n’espérait pas grand-chose à part se marrer et faire de bons lives. Et comme ça a démarré assez vite pour trouver de bons concerts, ça a été une expérience inouïe de côtoyer des groupes dont on était super fans. A ce moment là, le but était devenu de donner un maximum de gros shows et de rencontrer un maximum de groupes qu’on adorait. Puis quand on a eu le label, on s’est dit que ça pourrait marcher, qu’on pourrait avoir des opportunités de partir en tournée. On a même cru qu’un jour on pourrait devenir professionnels mais la réalité nous a rattrapés et en 2001 on a eu des propositions pour faire des mini tournées avec Behemoth ou avec Marduk, des concerts au Brésil ou au Mexique et des trucs ainsi. Mais c’est arrivé trop tôt, on n’était pas prêts pour lâcher nos boulots, on a fait le maximum qu’on a pu en travaillant, car aucun dans le groupe n’était prêt à lâcher sa vie. On a pris tous nos congés, avec ou sans solde mais comme à l’époque on n’était pas payés non plus pour jouer, on faisait énormément de route, ça nous coûtait énormément et à la fin du mois on avait du mal à joindre les deux bouts. Donc on avait deux possibilités : soit tenter le tout pour le tout et risquer de nous retrouver à la rue quelques mois après, ou freiner le bazar… ce qu’on a fait. Donc ça a mis quelques tensions dans le groupe et en 2002, on a donné notre dernier concert avec le line-up du début. Cathy et moi nous sommes retrouvés tous seuls, comme souvent mais là c’était la première fois. Sur ces dix ans, c’est peut-être le seul regret qu’on a à avoir avec tous les membres de l’époque, on ne s’est pas serrés les coudes. C’est arrivé trop vite pour nous et y’en a qui se la pétaient plus que d’autres, moi en premier. Ce n’était pas notre plus glorieuse période et on savait qu’il fallait qu’on fasse de gros efforts pour passer au cap supérieur, on n’était pas prêts à les faire, mais on espérait quand même avancer. Malheureusement la mauvaise entente due à ces facteurs là a fait que le groupe c’est un peu séparé.
Cathy : Oui, c’était encore un problème jusqu’à maintenant. On n’a jamais su avoir de musiciens fidèles.
Bart : Et ce par le fait que je suis très exigeant. Je cherche des personnes avec qui je vais absolument bien m’entendre. Je m’en fous d’avoir le meilleur guitariste et le meilleur batteur si je ne peux pas me marrer avec eux. Mon but c’était aussi de m’amuser un maximum en faisant quand même de la musique qui tenait la route, et ça c’est un objectif qu’on a toujours voulu garder jusqu’à maintenant… Eh bien c’est pas facile de tomber sur un gars qui joue bien, qui est sympa et avec qui l’entende est bonne. On a joué avec d’excellents musiciens, qui étaient sympa aussi…mais bon, moi j’ai un humour assez spécial et donc il n’est pas question d’avoir quelque chose de trop sérieux. C’est ce qui a été notre point faible.



Quels sont les points positifs et négatifs que tu retiens de ces dix ans ?
Bart : A part qu’on se soit pris le chou en 2001, tout a été positif. Même si les changements de line-up à la longue nous ont épuisés, je ne regrette pas. Faire du metal c’est rencontrer énormément de personnes, donc c’est bien parce qu’à un moment avec MYSTICA sans faire de concerts, on rencontrait plein de gens (rires). Souvent on a pensé avoir trouvé l’élu, et puis deux mois après il nous disait "Ecoute, c’est pas possible, je ne peux pas faire autant de concerts parce que ma femme ne veut pas" ou c’est nous qui les mettions dehors parce qu’entre l’anniversaire de tata, les matches de football et les émissions à la télé, ils n’avaient pas beaucoup de temps à consacrer à la musique. Mais tout est positif, je suis bien content d’avoir rencontré un maximum de groupes que je n’aurais jamais osé côtoyer. On a joué avec Vader, Cathy est fan d’eux depuis des années, on a joué avec Marduk, c’était un grand rêve aussi. Le seul truc pour lequel on est un peu déçus, c’est de n’avoir jamais réussi à jouer avec Hypocrisy (rires)… et avec Dimmu Borgir. Pourtant avec Hypocrisy c’était à deux doigts de se faire : en 2002 ils ont tourné avec Immortal, c’était une tournée Metallysee, mais à ce moment là, Cathy et moi n’étions que deux et donc c’était pas possible d’engager des dates. Le tourneur n’a pas voulu nous ajouter sur la tournée parce qu’il savait qu’on n’avait pas de line-up stable. Voilà donc c’est un des regrets… Maintenant dans les points forts même si c’est pas un très gros groupe, on s’est bien marré avec les gars de Grief Of Emerald, des Suédois. Avec eux, on a fait notre première vraie tournée même si c’était avec nos voitures bien chargées, on jouait tous les soirs dans un club devant 30 ou 40 personnes, c’était vraiment des moments inoubliables. Puis les trois groupes avec lesquels on s’est super entendus durant ces dix années, c’était Grief Of Emerald, avec Devian et avec In-Quest. Même si In-Quest est un groupe belge et que nous aussi, il y a dix ans c’était encore inaccessible de pouvoir partager des scènes régulièrement avec eux et puis finalement je pense que c’est le groupe avec lequel on a le plus joué, on a bien fait 15 ou 20 dates avec eux.

Peux-tu revenir sur cette fameuse première partie d’Immortal ? Quels souvenirs en gardez-vous ?
Bart : C’était encore à l’époque où on contactait Metallysee, et eux de leur côté, ils faisaient jouer les groupes qu’ils trouvaient sympa. Je me rappelle avoir téléphoné, tout gêné et pas professionnel du tout pour leur demander s’ils n’auraient pas des dates pour nous. Et ils nous ont répondu qu’ils avaient deux dates avec Immortal, si nous étions intéressés.
Cathy : C’est quand même bien ça, tu téléphones et on te propose direct deux dates avec Immortal comme ça. Mais bon tu dois quand même prendre ta voiture et ton matériel.
Bart : Il faut dire aussi que le tourneur n’avait jamais entendu une seule note de ce que MYSTICA faisait. Il savait que Vincent avait été dans Enthroned auparavant, mais bon finalement il n’a pas fait ce concert là vu qu’il est parti avant ça. Donc ce qui fait qu’on avait deux dates, normalement on devait jouer au Biebob et aux Pays-Bas, mais le Biebob a refusé qu’un groupe belge ouvre sur cette date là. Aux Pays-Bas on était vraiment à genoux, c’était la première fois qu’on quittait la Belgique pour un concert, en plus le concert était sold out bien avant la date du concert donc c’est la première fois qu’on allait jouer devant des gens (rires). Le contact avec Immortal par contre ne s’est pas passé comme on le souhaitait, on était tellement fans et on attendait tellement de choses que… c’est pas les gars les plus sympa qu’on ait rencontrés, on va dire. Pour MYSTICA ça nous a plus apporté sur le plan humain de nous dire "Wow, on joue avec un groupe qu’on adore" que ça nous a ouvert des portes. Parce que oui, on a joué devant 500 personnes ce soir là, mais il faut se dire quand même que MYSTICA était loin d’être au point à ce moment là et je ne suis pas sûr qu’on ait vraiment marqué les esprits ce jour-là.



Et ceux de vos dates avec Marduk ?
Bart : Avec Marduk c’était vraiment différent…
Cathy : C’était à la Loco, à Paris.
Bart : Oui, Metallysee nous avait dit qu’on pourrait jouer sur les backline qu’il y aurait là-bas, et quand on est arrivés, en fait il n’y en avait pas pour nous. Donc on avait trois possibilités : soit annuler notre concert, soit essayer de trouver un magasin de musique et demander si on pouvait louer ou emprunter quelques trucs, soit supplier Marduk pour qu’on puisse jouer sur leur matériel… ce qu’on a fait. On a d’abord eu un non, et puis le batteur est venu nous voir alors qu’il était vraiment froid et nous a dit qu’il n’avait quand même pas envie qu’on ne joue pas, et donc il a bien voulu nous prêter son matos. C’était notre premier concert à Paris, l’album "Blinded By My Blood" était déjà sorti mais on n’était pas connus du tout à Paris. Et pourtant sur scène, avec les rideaux fermés et en attendant le feu vert, on a déjà entendu les gens crier "MYSTICA". Les gens étaient vraiment là pour s’amuser parce que c’est sûr qu’ils ne nous connaissaient pas et qu’ils ne savaient pas ce qu’on faisait. Internet n’était pas développé comme maintenant où on peut écouter des morceaux sur MySpace et donc à entendre ces gens crier "MYSTICA", avant de pousser mon premier cri, je n’arrivais pas à contrôler mes mains. Notre show s’est super bien passé, des pogos dès le premier morceau. Je ne remercierais jamais assez le public parisien, ça a vraiment été notre meilleur concert à l’époque. Après ça, on quitte la scène pour croiser les gars de Marduk qui nous disent que pour un début c’était vraiment bien ! Wow, alors dans une situation pareille tu les regardes la bouche ouverte et tu ne sais pas quoi dire… Puis on était à nouveau prévus avec eux à l’Hof Ter Loo (Ndlr : Anvers) et à Tilburg deux semaines après sur les Christmas Festivals. Bob n’a encore pas voulu qu’un groupe Belge ouvre pour la tournée, il nous a mis dehors gentiment par la sécurité.
Cathy : Mais on a quand même pu voir le concert…
Bart : Mais ce qui m’a vraiment marqué, c’est Legion qui est venu nous dire qu’il était vraiment déçu que nous n’ayons pas pu jouer. Il se souvenait de nous et donc pour nous c’était… y’a pas de mots pour l’expliquer (rires). Et on a rejoué le lendemain avec Marduk au 013 à Tilburg mais là on n’a pas eu de contact avec Marduk parce qu’il faut savoir qu’à l’époque le festival se faisait sur deux scènes séparées et que les backstages n’étaient pas communs. Donc on n’avait pas accès aux backstages de la grande scène. Ceci dit, on est plus fan de Legion que de Marduk, donc pour moi le groupe a été fini lorsque Legion l’a quitté. On a eu à nouveau l’occasion de rejouer avec eux et leur nouveau chanteur, mais là rien ne s’est passé, ni musicalement ni humainement.

Pourquoi avez-vous choisi de reprendre un titre de Rotting Christ ("Sorrowful Farewell") ?
Bart : En fait, Hugues de l’émission Rock Your Brain chez Radioquartz nous a contactés pour voir si on était intéressés d’apparaître sur une compil rock et metal pour un label grec. In-Quest et Suicide Of Demons ont aussi été contactés pour cette compil je pense. Et puis en allant sur le MySpace de ce label, on a vu qu’ils allaient faire un tribute de Rotting Christ. Donc c’est un groupe que Cathy et moi adorons, mais qui ne collait plus du tout à ce que MYSTICA faisait à l’époque. On a contacté le mec du label, il est venu écouter et nous a dit qu’il était fan de notre morceau "Carol Anne". Là on a été surpris parce que ça n’avait rien à voir avec ce qu’il pouvait attendre d’une cover de Rotting Christ. Alors on est rentrés en studio exprès pour enregistrer le morceau pour cette compil mais il faut savoir que deux semaines avant, on ne savait pas encore comment on allait jouer et arranger ce titre pour qu’il sonne "MYSTICA" tout en restant dans l’esprit de Rotting Christ vu que nos univers sont vraiment opposés. Donc on a enregistré ce morceau qui finalement n’est jamais sorti sur ce tribute : le label a traîné, il n’a pas eu tous les groupes qu’il voulait donc le projet est un peu tombé à l’eau. Enfin, la reprise s’est retrouvé sur la compil de French Metal, on était rentrés en studio rien que pour un titre et donc on voulait que ça figure quelque part et pas uniquement sur MySpace.

En parlant de ça, êtes-vous contents du travail de David Potvin sur ce morceau ?
Bart : Oui, le son éclate tout ! Ce que je regrette, c’est que dans mon incompétence car oui j’ai mes limites (rires), je lui ai envoyé une mauvaise version qui n’était pas la version totale du mix, dans laquelle on peut m’entendre tousser. Quand j’ai entendu ça sur la compil, je me suis arraché tous les cheveux, d’où ma perte (rires). Mais c’est bien que tu me parles de David parce que, je ne l’ai rencontré qu’une seule fois, lorsque je l’ai fait jouer avec Lyzanxia à La Louvière (Ndlr : Janvier 2007), et le feeling est super bien passé. On reste en contact et lorsqu’il a su qu’il allait travailler sur un morceau de MYSTICA, il était tout emballé et nous pareillement. Donc voilà, c’est vraiment un chouette mec et j’espère qu’à l’avenir, on aura l’occasion de faire plus de concerts de Lyzanxia qu’on en a fait jusqu’à maintenant… ou avec One-Way Mirror que j’adore vraiment aussi.

Qu’est-ce que ça fait d’avoir travaillé avec Tue Madsen ?
Bart : J’adore le son qu’il a ! Je l’ai découvert sur le premier album de Mnemic, qui pour moi a été une claque, tant au niveau du son qu’au niveau du groupe qui est encore aujourd’hui celui que je préfère. Alors je voulais un son ainsi, et j’avais vu qu’In-Quest étaient allés là-bas aussi donc je me suis dit que peut-être que le gars était accessible et qu’il était possible de travailler avec lui. Malheureusement, avec nos emplois du temps et le budget que nous n’avions pas en conséquence, le seul membre de MYSTICA qui soit allé au Danemark pour le mastering, c’est le CD. Il est parti tout seul par la poste, et Tue a fait des essais, il nous les a envoyés par Internet. Il nous demandait notre avis mais de toute façon, même si ça avait été de la merde, on aurait dit que ça allait parce qu’on avait vraiment envie de travailler avec lui. Quand on a reçu le CD, on s’est pris une grosse claque… parce qu’entre les morceaux envoyés et les morceaux reçus, y’a pas photo ! Il était prévu d’enregistrer le troisième album avec lui et il était d’accord. Mais à présent il a développé son art avec beaucoup de styles de metal et donc je ne sais pas s’il aurait toujours été d’accord de travailler avec un groupe aussi petit que le nôtre. Enfin de toute façon, on n’enregistrera pas de troisième album avec MYSTICA donc bon.

Sinon de quoi tu parlais en général dans tes paroles ?
Bart : C’est toujours un mélange entre fiction et film d’horreur. Je suis un grand passionné de films d’horreur, et j’essaie toujours de transposer ça sur la vie de tous les jours qui est en fait le film d’horreur le plus réaliste qu’on ait pu faire (rires). C’est un gros mélange d’expériences, de trucs qu’on peut voir dans les JT, dans les gazettes, dans tout ce qui se passe malheureusement sur la terre et de ma grosse inspiration cinématographique.



Au début, Mystica était plus considéré comme un groupe de black. Au fur et à mesure, la musique a viré vers le death. Etait-ce naturel ou volontaire ?
Cathy : Oui ça c’est fait naturellement. Au départ il y avait Vincent d’Enthroned
Bart : En fait on était tous fans de black sauf Laurent qui n’aimait pas du tout. Donc dès le départ, quand il est rentré dans le groupe, c’était à condition qu’on fasse quelque chose de plus death. On a tous dit oui mais on savait très bien qu’on voulait faire du black. Mais il a rajouté des parties qui font qu’on était vraiment entre le black et le death. Les musiciens qui étaient dans l’underground black metal ont quitté le navire assez tôt.
Cathy : J’ai abandonné le synthé et j’ai pris la guitare !
Bart : Le fait qu’il n’y ait plus de synthé a déjà fait que ça a évolué de manière beaucoup plus death sans être un groupe de death mélodique ou de brutal death. Puis quand on est rentrés en studio pour "Human Mutants", on s’est dit "C’est fini, on veut plus avoir notre cul entre deux chaises ! Nous, notre objectif, c’est de faire un groupe qui sonne comme Vader" et… on n’a vraiment pas réussi (rires) ! Donc en studio d’abord, on n’a pas réussi à se mettre d’accord avec le producteur pour avoir le son qu’on voulait. Beaucoup de choses ont été changées, beaucoup de choses ont n’ont pas été enregistrées, le line-up a changé aussi. Donc en fait, "Human Mutants" est l’album qui sonne le plus black alors que c’était pas notre objectif du tout. Ok, on a fait les photos maquillés, ce que je voulais absolument et on ne regrette pas. Puis après on a eu des problèmes avec le label, le CD n’est pas sorti tout de suite. Au moment où l’album est sorti, le line-up était de nouveau complètement changé, Cathy et moi nous étions retrouvés déjà deux fois rien qu’à deux et les nouveaux musiciens n’étaient venus ni pour du black ni pour du death mais pour une musique beaucoup plus accessible. Le changement musical s’est fait naturellement, avec le changement de line-up et le fait que Cathy et moi sommes assez ouverts musicalement. On écoute aussi bien du black à la Immortal et Marduk que des trucs beaucoup plus accessibles comme Dagoba et Fear Factory (on a toujours été fan de ces derniers). Donc nous, ça ne nous a pas gênés, on faisait ce qu’on sentait alors que nos nouveaux musiciens ne voulaient entendre parler ni de black ni de death. D’ailleurs quand "Carol Anne" est sorti, on s’est rendus compte en lisant les critiques et en allant sur les forums plus underground que c’était pas une évidence pour tout le monde en fait. Il faut dire aussi que la plupart de nos fans du début du coup nous ont largués et craché à la gueule assez violemment. Pourtant ce n’était pas le but de faire quelque chose de "commercial" et pour "avoir plus de fans", même si avec "Carol Anne", c’est vrai qu’on a commencé à attirer plus de gens en ajoutant des samples et en ralentissant les tempos. Mais je ne regrette pas ce virage !

Quel a été l’impact de votre organisation sur le groupe ?
Bart : Je me la suis pété, mais dix fois plus qu’avant (rires) ! Non sérieusement, quand on a commencé MYSTICA, c’était vraiment dur de trouver des dates en Wallonie pour du metal extrême donc les groupes de ce genre se retrouvaient sur des affiches pas entièrement metal ou alors avec des groupes de hardcore, ce qui ne passait pas bien en général. Donc je me suis dit que j’allais prendre les choses en mains pour essayer de faire bouger le truc. J’ai créé un fanzine, on a fait des compilations et organisé plein de concerts. On invitait des groupes, on faisait des échanges, principalement avec des groupes Flamands vu que y’avait pas grand-chose qui se faisait en Wallonie à part Enthroned. Ce qui nous a permis d’ouvrir certaines portes dans la région (Ndrl : La Louvière et Charleroi). Je n’ai pas la prétention de dire que j’ai remué la Wallonie en entier, mais ici dans la région oui : on a découvert que les gens avaient des attentes, beaucoup allaient en Flandre pour des concerts et maintenant pouvaient aussi venir ici. Au début, MYSTICA a joué plus en Flandre qu’en Wallonie de par ses organisations, je pense que sans ça, le groupe aurait splitté dès le premier changement de line-up… Comme la plupart des groupes de l’époque, qui baissaient vite les bras dès qu’il n’y avait pas de place pour eux. Le premier truc qu’on a fait d’un peu plus gros, c’était la tournée avec Grief Of Emerald où on s’est dit qu’on allait avoir un album, qu’on voulait jouer avec un groupe qu’on aime donc on a fait venir les Suédois qu’on ne connaissait pas humainement. Avec le groupe et leur label, on a monté une petite tournée de dix jours qui s’est réduite à cinq vu qu’on n’avait pas tous les contacts qu’il fallait. Et puis le gros changement dans l’organisation, c’est quand j’ai collaboré avec la Taverne du Théâtre, où là vu qu’il y avait plus d’argent, on a voulu faire des trucs plus gros. Et donc évidemment, c’était une organisation plus grosse avec des groupes plus importants. Effectivement pour MYSTICA, ça a aussi ouvert des portes.

Question inévitable : pourquoi avez-vous décidé de mettre fin au groupe ?
Cathy : Ben parce que le line-up n’est pas stable et qu’on en a un peu marre. On espère qu’avec le nouveau projet, ça soit plus stable que MYSTICA que tout le monde connaît, que certains aiment et d’autres détestent. Les idées sont faites maintenant donc c’est difficile d’encore trouver des musiciens qui veulent jouer avec nous.
Bart : En fait avec MYSTICA, à chaque départ d’un membre, on se remettait en question et on repartait à zéro. On se disait qu’on faisait un ou deux concert en Wallonie et qu’on repartait comme avant. Mais on faisait un ou deux concerts en Wallonie et puis le line-up changeait de nouveau et on restait de nouveau trois mois sans jouer. C’était épuisant et j’avais plus envie d’être la tête pensante d’un groupe. J’ai de plus en plus envie d’être dans un groupe pour le fun et pas pour me dire qu’il y a des concessions à faire ou ceci ou cela, ce qu’un groupe demande pour passer à l’échelon supérieur, donc il est temps de faire autre chose. Avec le nouveau projet, là où on a trouvé notre équilibre, c’est que chacun a sa place : le guitariste compose avec le batteur, le bassiste va s’occuper de tout ce qui est design, moi je m’occuperai de tout ce qui est contact. Comme ça, chacun essayera de garder sa place afin de faire avancer le groupe ensemble, que ce soit enfin un groupe et pas une personne qui essaye de faire vivre un truc. Mais on n’a pas dit qu’on arrêtait, on a dit qu’on faisait un break… prolongé (rires).

Suite à l’incident de Jumet en Novembre (Ndlr : une personne armée braque un festivalier devant la salle et menace de tuer tout le monde), tu avais déclaré que tu arrêtais et l’organisation et le groupe. Pourtant quelques mois après, tu as pourtant relancé les deux, ce qui a provoqué quelques remous. Pourquoi ce choix ?
Bart : J’ai vraiment été choqué par ce concert même si ce n’est pas MYSTICA qui a été "touché", mais l’organisation et moi humainement. Quand on organise, c’est la famille et les amis qui sont là à travailler et on se dit qu’un fou qui arrive et qui tire dans le tas peut, doit, va très probablement toucher quelqu’un de très proche. Là on se remet en question et on se demande "Est-ce que ma passion pour le metal peut aller jusque là ? Est-ce que je peux sacrifier ma vie ? Est-ce que je peux sacrifier la vie de ma fille, de mes proches, de mes amis ?".
Cathy : Non, il a vraiment voulu tout arrêter…
Bart : Oui, je ne voulais plus organiser, je ne voulais plus me retrouver dans une salle de concert, je ne voulais plus sortir. Je suis allé voir un psy qui m’a dit que si je restais dans cette optique là, c’était toute ma vie que j’allais foutre en l’air vu que la musique c’est quand même 50% de ma vie. Donc on s’est dit qu’on allait s’y remettre mais pour moi il n’était seulement question que d’organiser ici à Chapelle vu que c’est là que j’habite, et ne plus jouer. Et puis David du Night Metal Fest qui m’a contacté pour me dire "Ecoute Bart, ça fait des années que tu me supplies pour jouer ici, et cette année vous êtes à l’affiche. Je m’en fous, tu fais ce que tu veux mais ce concert, tu le fais". On a accepté de le faire, ainsi que le concert pour le Sin Cession. On s’est bien marrés bien que d’autres concerts avaient été annulés mais il y a quand même une grosse partie de mon envie à l’époque qui était morte, qui n’allait pas revenir… et quand on a fait la finale du Sin Cession je me suis dit que c’en était trop et que je n’avais plus envie de ça. C’est là qu’on s’est dit qu’on arrêtait vraiment MYSTICA, mais on allait offrir aux fans et surtout à nous-mêmes un dernier show qu’on allait pouvoir travailler et se dire que c’est la dernière fois qu’on venait. Le concert de Jumet a effectivement changé beaucoup de choses chez moi, humainement c’est clair que je ne suis plus le même, que j’ai quand même des craintes et que je ne vois plus les gens de la même façon. Y’a des groupes dont j’étais fan dont j’ai été vraiment déçu de l’attitude mais dont je ne citerai pas les noms, ça a été fait en temps voulu ; y’a des gens à qui je faisais vraiment confiance, qui m’ont vraiment trahi ; je ne suis plus le Bart "tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil". Donc il y a des trucs qui j’espère reviendront mais qui ne sont plus là pour le moment. Pour tout ce qui est rumeurs, évidemment quand on a dit qu’on arrêtait, ça a fait plaisir à beaucoup de gens qui en avaient marre de nous voir sur toutes les affiches intéressantes en Wallonie et qui on pu se dire qu’enfin, la place était à prendre…Mais il faudra encore attendre quelques mois avant que la place soit à prendre. On espère vraiment qu’avec ce nouveau projet on pourra reprendre cette place qu’on laissera vacante.



Que peux-tu me dire sur ces deux derniers concerts à venir alors ? Les tous derniers de Mystica seront assez spéciaux, j’imagine ?
Bart : Le premier, celui de Chapelle donc de ce Samedi (Ndlr : interview réalisée le 24 Août, le Chap’Hell Metal se déroulant quant à lui le 29) est vraiment celui qui au niveau du temps aurait dû être le dernier. On va faire un récapitulatif de ces dix ans, des anciens membres qu’on a été rechercher d’à peu près toutes les époques vont revenir, entre ceux qu’on voulait et ceux qui voulaient (rires). Ca sera un show unique pour nous, un show festif vu qu’on va se retrouver avec des gens avec qui on a gardé contact pendant des années. On a continué à garder contact avec la plupart des gens qui sont partis ou qui on été virés de MYSTICA et donc c’est un peu une "famille MYSTICA".
Cathy : Oui, quoi qu’on puisse dire, on s’est bien marrés avec tout le monde même si on a eu plus d’affinités avec certains et moins avec d’autres bien sûr…
Bart : Certains sont partis parce qu’ils n’avaient pas le temps de se consacrer à un groupe comme le nôtre, d’autres sont partis à cause de privations familiales, d’autres ont quitté le groupe parce qu’ils n’avaient pas le niveau… soit supérieur au nôtre, soit inférieur. Donc oui MYSTICA, c’est un peu comme une famille, même si cette famille s’est souvent disputée. Cela dit, en dix ans on n’a pas été loin des 25 musiciens donc on va en repêcher quelques uns qui viendront à tour de rôle jouer quelques morceaux. On va rejouer des morceaux qu’on n’a plus joués depuis des années, on va jouer un set d’une heure, ce qui ne nous était jamais arrivé… vraiment jouer pendant une heure. On a déjà eu des shows d’une heure mais je parlais la moitié du temps donc… Puis on avait un dernier concert en novembre normalement pour le Décibel Rock, et puis quand on a été confirmé pour le Mass Deathtruction Festival, on s’est dit que c’était vraiment une chouette affiche parce que déjà elle va attirer des gens donc ça sera l’occasion de terminer sur un point positif et pas de jouer dans une salle à moitié vide ; puis personnellement je suis super content de retrouver Hate et Hacride… plus que Arch Enemy. Oui, Arch Enemy c’est le prestige de jouer avec eux, mais je ne suis pas un grand fan. Voilà le bilan de ces deux derniers concerts !

Quels sont vos coups de cœur au niveau musique ?
Cathy : Oui il me casse les oreilles avec les trucs à chanteuses pour le moment et moi j’aime bien les trucs qui gueulent bien (rires). Non, sérieusement on est très ouverts à tout style musical. Sinon il me casse bien les oreilles avec le nouveau Behemoth aussi, et c’est vrai qu’il est excellent ! Et puis je suis tombée folle amoureuse de Volbeat.
Bart : Moi, rien à voir, mais j’adore Delain (rires). Non mais Cathy et moi, et je pense que c’est ça qui a fait évoluer MYSTICA musicalement, c’est qu’on a toujours écouté beaucoup de metal de manière très variée et qu’on en est pas encore arrivé à se dire qu’il n’y a vraiment plus rien de bien qui sort. Non, moi chaque moi ou chaque semaine je découvre de nouveaux groupes que je trouve excellents. Quand je sature dans un style, je vais creuser dans un autre.
Cathy : Moi j’aime bien retourner dans mes vieux thrash et tout ça, je ne cherche pas donc heureusement qu’il est là pour me faire découvrir les nouveautés. Donc c’est lui qui me les fait écouter sinon je retourne à mes vieux bazars genre Metallica.
Bart : Et généralement, je lui fais découvrir des groupes dont elle pense "Mais c’est quoi cette merde ?!" et puis finalement je l’ai tellement fait chier à les écouter qu’elle finit par adorer… au moment où moi j’en suis totalement lassé (rires). Mais je pense vraiment que le jour où je trouverai qu’il n’y a plus rien de bien qui sort, soit j’aurai vraiment pris un coup de vieux et on ne pourra plus offrir quelque chose qui nous intéressera ou soit sera bloqué dans un style. Même lorsqu’on écoutait presque tout le temps du black et de l’extrême à fond, il y avait des groupes de néo qui nous plaisaient. Donc oui peut-être je ne suis pas intègre, mais moi l’intégrité c’est pas écouter des trucs super underground pendant un an et demi et puis larguer totalement le metal. J’ai pas de honte à dire que j’ai été fan un jour de Korn. Puis sinon dans les coups de cœurs y’a One-Way Mirror et Lyzanxia que j’ai découverts ces dernières années et que j’adore ; même Dagoba, beaucoup de gens me disent "Ouais mais c’est de la merde, tu peux pas écouter ça si t’es musicien, tu peux pas !" (rires)… heureusement sur La Louvière y’avait toi qui disais le contraire et y’avait moi donc ça va. Puis je suis impatient quant à la sortie du nouveau Immortal, du nouveau Epica, du nouveau Hypocrisy aussi qui va bientôt sortir, le nouveau Devildriver est vraiment splendide. On est ouverts, et même dans les groupes belges. Ca, avec l’organisation, on a toujours essayé de chercher des groupes que personne ne voulait, pas forcément que des gros groupes ou que des groupes locaux. J’ai toujours voulu faire découvrir des trucs, c’est ma passion : une affiche He :ll Metal où la moitié, on se demande ce que Bart a encore été trouver… Et puis finalement, quand on les a vus, on se dit que Bart avait raison et que c’était terrible. Pourquoi mettre The Outburst au milieu de groupes metalcore ? Tout simplement parce que moi je suis ouvert et que celui qui n’est pas content, il peut aller manger à ce moment là.

Et des coups de gueule ou déceptions ?
Bart : Des déceptions… il y a dix ans, il n’y avait pas tous ces forums et tous ces trucs qui sont à la mode maintenant comme les MySpace et les Facebook. Et j’ai l’impression que la scène était quand même plus sincère à l’époque. Maintenant on trouve beaucoup de gens qui se cachent derrière un pseudo sur des forums et qui cassent pour le plaisir de casser, qui cassent des personnes, qui cassent des groupes et qui cassent des organisations. Pourtant il y a des groupes que je vais trouver mauvais et que d’autres vont trouver excellents alors pourquoi dire que c’est de la merde ou de ne pas aller voir tel groupe parce que ce sont des gros cons ? Je sais pas, c’est une attitude que je ne comprends pas et que je n’accepte pas vu que pour moi, déjà y’a pas de groupe mauvais… Enfin si mais à partir du moment où le groupe s’implique à fond et met du cœur dans son truc, ou ça plaît ou ça plaît pas, mais le travail est là quand même. Pourquoi aller casser un groupe qui débute ? Pourquoi casser un groupe parce qu’il est un peu différent ? Pourquoi aller casser un groupe parce qu’il joue beaucoup ? Ca c’est un truc que je ne comprends pas dans la scène… Puis oui, il y a beaucoup de gens qui ne m’aiment pas, il y a beaucoup de gens qui disent que je suis un gros con mais y’a pas besoin de le dire, tout le monde le sait alors pourquoi continuer à le dire ?! Donc oui, on a eu beaucoup de critiques, beaucoup de gens qui ne nous trouvaient pas intègres, qui ne nous trouvaient pas ci, qui ne nous trouvaient pas ça… Et au bout des dix ans, nous on a continué à avancer et on voit que beaucoup des gens qui nous ont tapés dans le dos ou même en face ne sont plus là. Alors oui, c’est facile de dire que c’est de la merde et que ça a été mal organisé, mais fais-le ! Essaye de faire mieux et essaye après de comparer avec ce que les autres font, mais reste pas chez toi à mater les vidéos sur Youtube pour dire que ce groupe là était vraiment très mauvais à ce concert là, bouge toi et fais quelque chose à la place. Voilà un peu mon coup de gueule, mais ça on ne changera pas, hein !

Merci d’avoir répondu à toutes mes questions, donc je te laisse le mot de la fin pour cette interview !
Bart : Merci à tous ceux qui nous ont suivis, à ceux qui ont cru en nous ! Merci s’il y a au moins une personne qui appréciait ce qu’on faisait il y a dix ans et qui apprécie toujours ce qu’on fait maintenant… si on a réussi à ne pas te choquer totalement, alors voilà, cette interview est pour toi ! Et merci à toi d’avoir cru en nous, en MYSTICA pendant des années et de faire notre dernière interview !


Le site officiel : www.myspace.com/mystica666