Interview faite par mail par Gloomy

Salut Tairrie ! Merci beaucoup de prendre le temps de répondre à notre interview ! Comme il s’agit ici de la toute première que tu donnes à notre webzine, French Metal, pourrais-tu s’il-te-plaît présenter ton groupe à nos lecteurs ?
Tairrie B Murphy (chant) : Bonjour, et merci de m’accueillir ! Je suis la vocaliste de MY RUIN, groupe essentiellement metal de Los Angeles.

Le nouvel album de My Ruin, “A Southern Revelation”, est sorti en Décembre. De quoi es-tu la plus fière à son sujet?
Le fait d’avoir été dans une très mauvaise situation à cause des relations épouvantables avec notre ancien label Tiefdruck Musik et que malgré tout, sans soutien ni budget, nous nous sommes montrés capables d’écrire et d’enregistrer un album qui récolte d’incroyables retours à la fois des fans et des critiques. Nous sommes fiers de ne pas avoir laissé ce qui nous avait déçus avec notre album précédent, "Ghost And Good Stories", détruire le groupe. A la place, cela nous a servi d’inspiration.

Pourrais-tu nous dire quel est le morceau que tu préfères ou qui t’est le plus personnel, et pourquoi ?
Chaque chanson est écrite d’un point que vue qui m’est propre ; je suis donc attachée à chacune d’entre elles de manière unique. Nous sommes actuellement en pleines répétitions pour la future tournée Angleterre / France qui commence dans deux semaines (Ndlr : interview réalisée le 5 Janvier 2012) où nous jouerons sept morceau du nouvel album : "Tennessee Energy", "Highly Explosive", "Walk Of Shame", "Deconsecrated", "The Soulless Beast", "Seventh Sacraments" et "Middle Finger". Je suis donc très attachée à celles-ci en particulier pour le moment.


© Scott Chalmers

Au fait, quelle est cette “révélation” mentionnée dans le titre ?
La "révélation" est la connaissance de notre situation et la manière dont nous avons géré les difficultés concernant Tiefdruck Musik et Daniel Heerdmann, le propriétaire du label. Cette "révélation" concerne aussi notre départ de la sombre situation dans laquelle nous nous trouvions et notre combat pour retrouver la force et la lumière afin de conserver l’entité de notre groupe malgré les circonstances particulièrement stressantes de "l’envers du décors". C’est moi qui ai eu l’idée du téléchargement libre du nouvel album alors que celui-ci était en plein mixage. Nous nous sommes dit que ça serait un beau cadeau pour nos fans, ainsi qu’un grand "Fuck !" envers Tiefdruck. Nous avons enregistré "A Southern Revelation" au studio Soundtrack Black avec Joel Stooksbury, un bon ami à nous, à Knoxville, Tennessee, qui est la ville natale de mon mari et guitariste Mick Murphy. Mick a co-produit l’album avec Joel, et a joué toutes les parties guitare, basse et batterie. Pendant que nous étions là et que Mick était en plein travail, je continuais à écrire quelques morceaux. Le livre des Révélations et le livre de Daniel, tous deux tirés de la Bible, ont été des muses importantes et lyriques ; ils ont beaucoup inspiré certaines parties du contenu de l’album, ainsi que son thème général. C’est notre septième sortie, et le nombre 7 joue un grand rôle dans la Bible. Beaucoup de choses se sont passées, et ça nous a parlé directement, nous rappelant notre situation et le combat que nous menions contre ce qui nous semblait être le mal incarné. Le processus a été très cathartique d’un bout à l’autre. C’était agréable d’être capable de se débarrasser de toute la haine qui n’avait cessé d’accroître entre nous.

La musique de My Ruin est très brutale et agressive, accompagnée de paroles puissantes et profondes. Mais tu es quelqu’un qui défend clairement l’amour et la paix. Est-ce que My Ruin t’aide à te libérer de tes démons ?
Oui, mais MY RUIN aide aussi à les créer. J’ai toujours eu et aurai toujours une relation d’amour / haine avec mon groupe. Crier est une libération et une bonne manière de décharger ma rage, mais MY RUIN n’est pas juste un autre groupe en colère avec une nana contrariée au chant. Je ne me suis jamais reconnue dans cette description. Il y a de la beauté dans la brutalité de notre musique qui est unique à MY RUIN. Cette particularité est le résultat d’un processus naturel, et a pris une place plus importante au fil des ans. Alors oui, je crie plus que je ne chante, mais j’essaye aussi d’inclure une bonne portion de passages parlés dans le mix afin de servir de balance au style vocal plus violent. J’en fais de même depuis 1993 avec mon premier groupe Manhole, je fonctionnais comme ça aussi durant mes années au sein de Tura Satana, qui m’a définitivement poussée à former MY RUIN. Je suis extrêmement passionnée et protective par rapport à la musique que Mick et moi créons. Ca m’a servi de thérapie pendant des années. C’est difficile de m’imaginer sans cela.

Tes paroles semblent très engagées. Penses-tu que la musique est une manière d’encourager les gens à la réflexion à propos de sujets divers ?
Je ne suis pas là pour prêcher ou pour essayer de faire en sortant que les auditeurs se conforment à ma manière de penser aux sujets de choses qui me tiennent à cœur pour des raisons personnelles. Je fais juste ce que je fais, et si quelqu’un peut trouver sa propre inspiration dans mes mots ou se sentir proche d’une de nos chansons, c’est merveilleux, mais j’ai toujours soutenu la liberté de penser et le fait de s’accrocher à la personne qu’on est vraiment plutôt que de suivre et de se comporter comme un mouton. Le monde a besoin de plus de leaders et de franchise.



J’ai lu une de tes anciennes interviews où tu disais que la Bible était une grande source d’inspiration pour toi. En effet, ne sont pas rares les textes de My Ruin qui traitent de religion. Personnellement, cette déclaration m’a touché, surtout parce qu’elle est diamétralement opposée à ce que l’on a l’habitude d’entendre des groupes de metal.
Merci, mais avant que tu ne penses que je suis chrétienne (Ndlr : le raccourci n’était pas fait), je tiens à dire que je ne suis pas quelqu’un de religieux. Je me réfère simplement à la Bible pour les histoires intéressantes et l’imagerie. J’ai toujours été fan de l’iconographie catholique ; je m’en sers d’ailleurs beaucoup dans ma création de bijoux pour BGD (Blasphemous Girl Designs) – des customisations. Je crois que la Bible est une muse fantastique et j’ai souvent incorporé de ses éléments dans mon écriture au fil des années. Je trouve que c’est une lecture fascinante, capable de calmer autant que d’effrayer avec ses récits de jugement et de rédemption.

J’aime beaucoup en savoir plus sur les influences des artistes ; c’est pourquoi j’aimerais connaître les tiennes. Personnalités, livres, films,… sois libre de parler de tout ce dont tu désires !
Mes influences sont particulièrement vastes, donc je vais juste lister une série de choses qui me viennent à l’esprit à l’instant : mon mari, les jours de pluie, la musique et les paroles de Nick Cave, les cœurs effrayés, Frida Kahlo, Jésus-Christ, Silent Films, l’art du collage, le travail acharné, l’insomnie, Patti Smith, les gangsters, l’intégrité, Knoxville Tennessee, les vrais amis, Pat Condell, les tempêtes de neige, Sedluc Ossuary, les livres de prières, les gros concerts rock, Los Angeles, Milagros, la puissance d’une guitare, les Saints Patrons, les médias, l’honnêteté, The Borgias, mon imagination, les reliques, les églises désacralisées, les cheveux noirs, les ex-votos, Olvera Street, les catacombes de Paris, les pilules bleues, Cary Grant, Westside Connection, les films et photographies vintages, Dark Knight Of The Soul, les philosophies personnelles, Fireball Whiskey, Hencho en Mexico, Elvis, The Hill Of Crosses, Teen Angels, The Verve et les anciennes relations.

J’ai remarqué que de nos jours, une question revient couramment dans les interviews. Comme "A Southern Revelation" est disponible gratuitement sur votre site officiel, je ne pouvais pas ne pas la poser moi-même : quelle est ton opinion sur le téléchargement illégal ? Penses-tu que ça tue vraiment l’art ?
C’est malheureusement la réalité de la situation actuelle et le triste état de la musique de nos jours. Nous avons appris que nous devions jouer avec nos propres règles et adopter les changements de l’industrie. Nos albums sont téléchargés illégalement depuis des années, et nous ne pouvons rien faire. Nous avons signé chez de nombreux labels en qui nous avons eu confiance pour la promotion et la commercialisation de notre musique et qui, finalement, ont fait un travail vraiment merdique (excepté Century Media US en 2003 et nos deux premières sorties chez Snapper Musik UK en 1999/2000). Nous avons eu de la chance que quelqu’un entende parler de MY RUIN. Lorsque nous avons signé avec Daniel Heerdmann pour notre dernier album, "Ghosts And Good Stories", sorti en 2010, nous étions vraiment enthousiastes, confiants par rapport au nouveau contrat et notre collaboration avec Tiefdruck Musik. Au début, nous entretenions de bonnes relations, et ce gars était très enthousiaste ainsi qu’un grand soutien pour le groupe. Pourtant, tout a changé une fois l’album dans les bacs. Nous ne comprenons toujours pas ce qu’il s’est passé. Tout ce que nous savons, c’est que toutes les promesses et les prévisions que nous avions faites sont tombées à l’eau ; nous nous sommes rendus compte que tout était faux et pourri à tous les niveaux. Nous n’avions plus aucunes réponses à nos questions, et tout a commencé à devenir louche. Nous avons également dû annuler une grosse tournée au Royaume-Unis et sur le continent Européen à cause de ses mensonges et de son manque de professionnalisme. Cette tournée avait été planifiée de longue date, et les tickets étaient déjà vendus. Peu de temps après, nous avons décidé de couper les liens avec le label. Nous avons dû repenser tous nos plans. Heureusement, nous avons construit une belle et solide amitié avec Mona Miluski, qui était responsable de la publicité chez Tiefdruck à ce moment. Elle a vu ce qu’il se passait et comme Daniel Heerdmann nous traitait (apparemment, il avait déjà agi de la sorte avec pas mal de groupes avant MY RUIN, et même après, d’après ce que nous avons entendu). Mona a quitté Tiefdruck pour monter sa propre compagnie, Platinum PR. Elle nous a proposé de s’occuper de notre promotion, et "Ghosts And Good Stories" a reçu quelques-unes des meilleures critiques de notre carrière, malgré le drame avec Daniel Heerdmann et sa tentative de sabotage. Mona travaille toujours avec nous actuellement, et nous sommes à la fois fiers et reconnaissants de l’avoir dans notre équipe.


© Don Jackson Wyatt

Encore une question à propos du monde musical : est-ce que tu écoutes les groupes de metal dit "de la nouvelle génération" ? Que penses-tu d’eux, et de l’évolution de la musique metal ?
Non, je n’en écoute pas. La plupart de ce qui se fait actuellement en musique n’est juste pas mon truc ; je ne parviens pas à m’identifier à la plupart des nouveaux groupes que je vois et que j’entends. J’ai des goûts très précis, bien qu’éclectiques, en matière de musique. De Kiss à PJ Harvey, de Goatsnake à Grinderman. Le groupe le plus moderne que j’écoute doit être Ghost, bien qu’il sonne comme un mix old-school de Blue Oyster Cult et de Mercyful Fate. Je préfère les classiques des seventies et le stoner rock, et j’adore les débuts du rap gangster de Los Angeles. J’ai toujours adoré. Ca me calme les nerfs, que tu le croies ou pas.

Au printemps dernier, My Ruin était sur les routes d’Angleterre avec Headcharger. Quels souvenirs en gardes-tu ?
Oui, Headcharger était notre invité spécial sur la tournée de "Ghosts And Good Stories". Je suis tombée gravement malade en plein milieu, ce qui m’a obligée à être sous médicaments ; tout ce que j’avais à faire, c’était de me concentrer pour garder la voix et pour être capable de me produire chaque soir sur scène. Nous avons vécu quelques jours difficiles pendant cette tournée, mais mon meilleur souvenir était notre date à Londres : le concert comme l’after party étaient géniaux ! C’est là aussi que nous avons rencontré notre nouvel agent Mick Wood de STC touring qui promeut notre prochaine tournée.

Ton groupe est maintenant sur le point de tourner en Europe, en passant d’ailleurs brièvement par la France. Comment te sens-tu, peu avant ton départ ?
Je me sens vraiment très bien ! MY RUIN est une machine bien huilée, et les répétitions tuaient ! Nous sommes vraiment enthousiastes à l’idée de reprendre la route et ébranler les scènes ! Nous nous réjouissons vraiment !

J’ai remarqué que vous n’alliez vous produire qu’une seule fois sur une scène Française pendant cette tournée (le 4 Février 2012 à Vauréal, le Forum). Aimerais-tu avoir l’opportunité de réaliser une tournée plus importante dans ce pays ?
Oui ! Nous adorons jouer en France. Nous sommes en discussions pour booker une tournée plus tard dans l’année qui comprendrait plus de dates en France et en Europe. Nous n’en avons pas été capables cette fois-ci, mais notre concert et son after / meet & greet du 4 Février au Forum de Vauréal devraient être géniaux ! La dernière fois que nous avons joué près de Paris, c’était de la folie !

My Ruin existe depuis 13 ans. Quel est ton meilleur souvenir ? Et ton pire ? Quel nouvel objectif cherches-tu à atteindre avec ton groupe ?
Nous passons toujours un très bon moment lorsque nous sommes en studio, mais je dois dire que la réalisation de notre nouvel album "A Southern Revelation" est de loin notre meilleur souvenir. C’était une expérience inoubliable à tous points de vue que d’être à Tennessee. C’était aussi la première fois que nous enregistrions hors de Los Angeles. Mon pire souvenir doit être notre tournée Anglaise ReligiosiTour en 2008. J’aimerais oublier beaucoup de ces moments sur la route et les faire disparaître définitivement de ma mémoire. Les mauvais souvenirs viennent de l’obligation de collaborer avec les mauvaises personnes, comme ça a malheureusement été souvent le cas durant les 12 dernières années. Pour le reste, nous faisons juste ce que nous faisons, jour par jour et album par album. Qui sait ce que réserve le futur ? Mais le voyage est la destination.

L’interview touche maintenant à sa fin. Une fois encore merci beaucoup pour ta disponibilité ! Comme le veut la tradition, le dernier mot te revient de droit !
J’aimerais juste remercier tous nos fans Français pour leur amitié et pour leur soutien à travers ces années, et j’invite tous ceux qui lisent cette interview et découvrent MY RUIN pour la première fois de visiter notre site à www.myruin.net afin de télécharger notre septième album gratuitement. Dans un monde où l’amitié est une mode et l’honnêteté est la plus sacrées des maladies, c’est nos sept poignards de Megiddo,  notre meurtre de la bête.


Le site officiel : www.myruin.net