Interview faite par mail par Paradoxis

Bonjour les MOPA ! Pouvez-vous présenter le groupe à nos lecteurs qui ne vous connaissent pas encore ?
Y. (batterie) : MOPA est un trio atypique qui rassemble un piano classique aux accents lyriques, une batterie très rock, très efficace et très frappée et un chant hurlé aux accents désespérés. On se plait à dire qu’il s’agit de la réunion de trois personnes qui incarnent trois formes de tristesse bien distinctes : celle du pianiste fondée sur une aspiration à des temps meilleurs, à l’opposé la détresse exprimée par un hurleur qui vomit son dégoût du monde moderne le tout lié par la meurtrissure plus physique incarnée par un batteur qui semble à chaque coup vouloir pousser nos membres loin d’ici et de toute cette merde.

Depuis combien de temps le groupe existe-t-il ? Et pourquoi ce projet si atypique ?
Le projet est en lui-même assez récent, puisque nous jouons ensemble depuis maintenant un peu plus de six mois, mais le concept, dans sa genèse a été longuement pensé par le hurleur et le pianiste cinq années durant. La mise en route du projet a été effective avec mon arrivée. A partir de là, tout est allé très vite. Il y a eu une sorte de réaction en chaîne qui nous a amené a enregistrer un premier album qui suscite un engouement certain et qui s’accompagne de nombreuses dates un peu partout en france. Je ne pense pas avoir entendu ni vue de précédent au moins dans la forme du projet, je ne me rappelle effectivement pas avoir croisé de groupes alliant un piano classique a un chant hurlé avec une batterie massive. Je pense que l’originalité du projet réside dans sa froideur glaciale transcrite avec beaucoup de sincérité et d’honnêteté. En effet on joue à travers ce projet les humains que nous sommes. Les émotions exprimés sont sincères. On est pas là pour faire joli ou pour caresser les gens dans le sens du poil et je pense que ça se ressent a l’écoute. C'est transparent et c’est sûrement ce qui touche.

Et d'ailleurs pourquoi "My Own Private Alaska" ?
Une idée récurrente du point de vue de la philosophie du groupe, c’est déjà de surprendre artistiquement parlant et de jeter violemment un pavé dans la mare vaseuse du paysage musical actuel. Le concept qu’on propose est un point de vue très personnel et très égoïste d’une musique qui a l’ambition d’amener le piano et un chant dit screamo en dehors de là où on a l’habitude de les entendre. D’où le "My Own Private" qui montre une volonté de se situer ailleurs. L’Alaska représente pour nous une sorte d’eldorado glacial des valeurs et des modes de vie. Un endroit encore pur, vierge, peut-être même hostile, face à la civilisation, au monde moderne et à certaines de ses pires valeurs. Nous revendiquons aussi quelques références cinématographiques : notamment celle du film de Gus Van Sant "My Own Private Idaho", un film que nous adorons. Mais la principale référence vient du film "Insomnia" de Christopher Nolan avec Al Pacino et Robin Williams, dont toute l’intrigue se déroule avec l’Alaska pour théâtre.

Comment s'est passée votre rencontre ? Qui a lancé l'idée de ce concept ?
Nous nous côtoyons depuis longtemps en tant qu’artistes et personnes à travers des projets différents. La genèse de ce projet comme je te l’ expliquais auparavant est mûrie de longue date avec des morceaux de piano à un stade très avancé et presque définitif pour l’un, et des texte, un ton et un discours bien arrêté pour l’autre. J’ai été intégré a ce projet il y a un peu plus de six moi alors que nous apportions la touche finale au mix de l’album de mon autre groupe auquel participait T. Il mon proposé de les rejoindre et de compléter une alchimie qui aujourd’hui fonctionne très bien et dans laquelle je me retrouve complètement. J’ai l’impression de tenir quelque chose d’unique avec ce projet qui m’enthousiasme réellement et je pense que nous avons beaucoup de respect les uns envers les autres en tant qu’êtres et en tant que musiciens. Et cela aussi s’entend.

Dans quel état d'esprit étiez vous pendant la composition ?
Nous étions tous dans une période difficile de nos vies ajouté au fait que nous sommes trois êtres à la fois tristes et révoltés et très tourmentés. Même si notre tristesse et nos révoltes diffère, je pense qu’au moment de composer et d’enregistrer ce disque, on avait tous le ventre profondément noué. C’est sûrement de là que vient cette violence exacerbé, ce nihilisme désabusé et cette mélancolie qui nous suit partout. On a également beaucoup cherché à transcrire cette sincérité et cette spontanéité dans les prises de cet album qui a un caractère assez profond dans les émotions exprimé, dans l'urgence de l’exécution comme si on était pressé de tout laisser, de tout casser, de revenir à la pierre.

J'imagine que MOPA est une sorte d'exutoire pour vous trois, mais paradoxalement cela ne vous abîme-t-il pas plus de perpétrer cette douleur devant des spectateurs ?
MOPA, à jouer, c’est très physique et très usant pour nous tous, chacun repousse ses limites tous le temps pour exprimer des chose qui viennent du plus profond. Je pense pas qu’il y aurait un intérêt a jouer cette musique si on la jouait autrement que comme si on allait crever dans la minute. De toute façon ça nous transporte et il s’en dégage une émulation glacée qui nous frappe a chaque fois que l’on joue ensemble. On se pousse les un les autres comme un cercle d’énergie folle qui ne fait que s’amplifier, on apprécie beaucoup d’avoir du mal à s’en remettre. On joue le piano souvent jusqu’a la tétanie, la batterie au point d’assourdissement, et le cri jusqu'à en avaler sa langue et c’est en cela que c’est un projet bien plus violent du moins plus extrême je pense que beaucoup de chose que l’on peu entendre ailleurs. On est pas la pour jouer a l’économie encore une fois, ça perdrait tout son sens, ça n’aurait plus aucun intérêt.



Que vous expriment les gens en général à la fin d'un concert ?
A travers pas mal de dates, on a remarqué que les gens sont très attentifs et a la limite du religieux. Ils semblent très surpris et très interpellés par la formule évidemment (trois chaises un piano). On a pour l’instant beaucoup de retours très enthousiastes des personnes qui se reconnaissent, s’identifient et sont touchés... qui pleurent même parfois, ce qui nous ravit. On commence également à croiser de plus en plus de gens qui connaissent les morceaux, les textes, ce qui nous enthousiasme et nous encourage a persévérer, à rester sincère, à continuer de s’asseoir.

Quelles ont été les conditions pour enregistrer l'EP ?
Tout s’est passé extrêmement vite. Dès qu’on a vu qu’on pouvait composer un morceau toutes les 2/3 répèt', on s’est dit qu’on aurait rapidement de quoi sortir un album. Imagine, ça fait 5 ans qu’on mûri le projet dans nos têtes, donc en pouvait plus d’attendre de nouveau ! Il fallait faire ça dans l’urgence car en plus de l’adrénaline du passage à l’acte, on sentait bien qu’il se passait quelque chose de spécial à travers cette musique ; une espèce de fraîcheur qu’il fallait chopper avant qu’elle ne se fane. On a donc enregistré en trois après midi (une par "instrument"). Ca s’est fait le mieux du monde car on savait quand même où on allait ayant tout "préprodé" dans nos têtes depuis si longtemps. Ca peut paraître paradoxal de dire qu’on mûri la chose depuis 5 ans et qu’à la fois il se passe quelque chose de frais lorsqu’on joue, mais le passage de la théorie à la pratique sublime tout et apporte chez nous un air frais qui fait du bien à nos oreilles et notre cerveau ! De plus, on a collaboré avec des gens d’une rare compétence et intelligence pour le son : Baptiste B. d’Aeria Microcosme (qui nous fait aussi le son en live) et Laurent de Fire At Will nous ont préparé des sessions idoines par rapport à ce qu’on projetait. (sauf le piano à queue mais ce sera pour la prochaine fois !)

Comment définiriez vous votre musique ?
Je ne sais pas trop… Je ne sais même pas si c’est notre rôle, musiciens, de définir notre musique. Alors c'est vrai qu'il est de bon ton de dire qu'on est contre les étiquettes... Mais ça me laisse perplexe quand je vais sur MySpace par exemple et que je regarde le style que les groupes s'attribuent... C'est vrai que dans ce site, personne n'aime les étiquettes et pourtant aucun groupe ne décrit son groupe avec les attributs " autre / autre / autre " ! Enfin si, j'en ai vu mais j'ignore si c'est pour ces raisons là. C’est le genre de question que doivent se poser les labels ou les gens pour développer ou communiquer sur le groupe mais dans l’idéal, le musicien devrait s’en foutre. En général, quand je décris mon groupe et notre album, je dis qu'il s'agit d'une batterie, d’un mec qui hurle et d'un piano classique. Et c'est tout. Parfois je rajoute qu'on joue assis en se regardant mais dans la plupart du temps, les gens se retrouvent hébétés, ou au moins interpellés.

Quelles sont vos influences majeures ?
Elles sont diverses selon les musiciens, mais on s’accorde pour parler de Chopin, Erik Satie pour le piano, Will Haven, et Nostromo diront certains pour le chant, et Helmet / Nirvana pour la batterie. Il y a en a sûrement d’autres mais généralement c’est vous, auditeurs et médias qui faites les liens et ce, qu’ils soient fondés ou non !

Le fait que M. (chanteur de Psykup et de Agora Fidelio) ait déjà une certaine renommée dans le domaine metal / rock, vous facilite-t-il les choses pour trouver des dates etc... ?
M. (chant) : J'ai vraiment voulu ne pas me servir de ce que tu appelles cette renommée, pour développer MY OWN PRIVATE ALASKA. Je voulais prendre ce projet dès la base. Ex nihilo. Ca rejoignait bien aussi le concept. Si les gens s'intéressent à nous comme ça, c'est pour notre musique. Et nous sommes parvenus à faire identifier peu à peu M.O.P.A. comme un groupe autonome, très indépendant par rapport à nos créneaux habituels. C'était même vital. Il y a tellement d'a priori dans les milieux musicaux, que si tu n'aimes pas le groupe X, tu ne vas pas écouter un projet parallèle du chanteur de X, alors que finalement, tu passes à côté de quelque chose... C'est ce qui se passe avec M.O.P.A. où pas mal de personnes nous écoutent sans apprécier ou même connaître mes 2 autres projets, c'est très bien ici. Je ne tiens pas à me mettre en avant et faire buzzer le groupe ainsi.

Avez vous déjà eu des retombés quelles qu'elles soient par rapport à vos concerts et votre EP ?
On a d’excellents retours par rapport à l’album d’horizons très divers, les albums partent bien en nombre et relativement vite, ce qui est très positif pour une production autonome. Les programmateurs on l’air également très enthousiastes car les dates pleuvent et nous somme généralement très bien accueillis. On commence effectivement à ressentir un buzz certain autour de ce projet. On a également ce mois-ci des chroniques assez élogieuses dans Noise Magazine et D-Side, ce qui nous conforte dans cet enthousiasme lattent.

Niveau disponibilité, ce n'est pas trop difficile à gérer pour M. et Y. avec leurs autres groupes respectifs, pour les dates et les répèt' ?
Pour l’instant on arrive à s’organiser et à assurer nos dates sans le moindre souci. C’est une question de volonté et d’organisation appuyée par le plaisir et l’envie de partager ensemble cet aventure ce qui relègue tout problème au second plan.

Y-a-t-il des groupes avec qui vous aimeriez vous partager la scène ?
Pour l’instant on a partagé la scène avec des groupes tel que The Ocean, groupe que l’on apprécie tous énormément et dont la majesté nous fascine. Après on a tous des rêves de plateaux artistiques fabuleux mais il nous reste encore du temps pour les réaliser. Les dates et les tournées, c’est surtout partager de bons instants, d’agréables moments avec des personnes intéressantes (public, artiste, accueil peu importe) ça peut être très enrichissant humainement et c’est là l’essentiel.

Auriez-vous un mot personnel à faire passer ? Ou parler de quelque chose qui vous tient à coeur ou que vous auriez apprécié que je vous demande ?
T. (piano) : Faites moi penser à ce que je foute mon piano dans la gueule de Philipe Manoeuvre si je le vois...


Le site officiel : www.myownprivatealaska.com