Interview faite par Antoine au Cargö à Caen.

Alors première question, comment ça va ?
Yann (guitare) : Franchement je pense que ça ne peut pas aller mieux !
Rapha (batterie) : C'est clair !
Yann : C'est carrément mortel, tout se passe très très bien.

Malgré les attentats, tout ça...
Rapha : Justement, après tout ça, ça fait du bien.
Yann : J'ai été et je le suis toujours choqué et limite traumatisé. Mais je continue d'aller à des concerts, je suis allé voir Obituary il y a deux semaines, No One cette semaine. Je n'ai pas peur mais tu ne peux pas t'empêcher de penser à ce que les gens ont vécu. Je suis carrément traumatisé, j'ai peur pour mes enfants, tout ça.
Rapha : Mais bon on ne peut pas s'arrêter de vivre à cause de ces abrutis !
Yann : Ouais, on connaissait beaucoup de gens qui étaient à l'intérieur du Bataclan qui s'en sont sortis, d'autres pas.
Rapha : Et ceux qui s'en sont sortis à mon avis... Ils en ont pour un moment...
Yann : Comme le disait Rapha, nous on continue !
Rapha : Après je pense que faire des concerts, d'en voir et de jouer, pour nous en tant que musiciens ça nous fait du bien. Ça fait visiblement du bien aux gens parce que les salles sont pleines et les gens sont vraiment à fond. Maintenant je sais que je ne peux pas m'empêcher avant de monter sur scène d'avoir une pensée, mais une fois que c'est parti, c'est parti ! Tu as toujours ça en tête, c'est sûr que quelque chose a changé ce jour-là.

Comment se passe l'arrivée de Fred Duquesne au sein du groupe ? Bien que vous bossiez ensemble depuis "Une Somme De Détails", la relation est quand même différente maintenant.
Yann : Il était producteur et ami, sa fille est née il y a 5 ans à quelques jours de mon fils, on habite dans le même quartier, nos enfants étaient gardés ensemble, je passe tous mes dimanches avec lui et les enfants. Ça fait 4 albums qu'il produit donc quand Nico est parti on n'a même pas cherché quelqu'un d'autre. En plus, je kiffe son jeu et c'est mortel, je suis vraiment fan de jouer avec lui.

Il a pris part à la composition de l'album ?
Rapha : Il est arrivé sur la fin.
Yann : On a fait "Chiens De La Casse" ensemble, c'est tout.

Est-ce que votre duo de guitares change par rapport au moment où tu jouais avec Nico ?
Yann : Ils ont des jeux vraiment différents, Nico a un jeu un peu punk alors que Fred a un jeu plus comme le mien, plus massif, après c'est pas pour se passer de la pommade mais je mets un point d'honneur à la précision, Fred il a ça aussi, du coup quand tu mets les deux ensemble ça le fait direct.

N'est-ce pas "dommageable" de choisir un gratteux qui joue déjà dans un autre groupe qui monte de plus en plus (Bukowski) et qui en plus est producteur ?
Yann : C'est un peu dommageable pour Buko, j'ai posé la question à Fred parce que je ne voulais pas faire de mal à Buko mais il continue les deux. Quand les deux groupes jouent, si c'est dans la même salle il fait les deux mais si c'est dans des salles différentes il privilégie Mass. Je lui ai dit que je ne voulais absolument pas qu'il arrête Buko.
Rapha : Tant que tu peux faire les deux il n'y a pas de problème !
Yann : Ouais c'est ça !
Rapha : Après effectivement si on fait le Hellfest et qu'il a un concert de Buko le même jour, il faudra faire des choix mais c'est tout vu !
Yann : Après Buko vu que c'est un trio à la base, ils peuvent limite faire sans lui alors que nous on ne peut pas faire sans lui. De toute façon dès le départ on en a parlé ensemble.

Déjà un nouveau disque, on ne vous arrête plus ! Vous avez des temps morts entre les sorties studio / live et les tournées qui sont quand même assez longues ? Parce qu'on vous voit partout !
Yann : Je t'avoue que j'aimerais que ça me prenne encore plus de temps ! C'est vraiment un plaisir, un exutoire irremplaçable c'est pour ça que l'on n'a pas envie que ça s'arrête ! Même si c'est compliqué de conserver un groupe comme MASS HYSTERIA pour nous, parce que quand on ne tourne pas, on n'en vit pas comme avant vu que les gens achètent moins de disques, c'est un peu plus compliqué mais je préfère galérer quand on ne tourne pas et faire des trucs à droite à gauche et puis repartir après en tournée. C'est la passion qui prend le dessus !
Rapha : C'est vrai qu'on a l'impression de nous voir beaucoup parce que tout se goupille plus que d'habitude entre la sortie de l'album, notre promo, l'album de la semaine (Ndlr : passage TV sur Canal+ qui met en avant un album pendant une semaine), la couv' de Rock Hard et notre tournée ultra compacte. Après c'est vrai que si on pouvait jouer tous les jours ce serait plus que cool !



L'artwork de "Matière Noire" me rappelle très fortement "Une Somme De Détails" avec la femme nue, le fond uni, c'est un clin d'oeil voulu ?
Yann : Pas du tout, c'est une idée qui nous est venue avec Eric (Ndlr : Eric Canto, le photographe du groupe). Ça n'a rien à voir avec "Une Somme De Détails", au contraire. Pour moi, "Une Somme De Détails", tu vois, tu bosses avec des gens et c'est pas ce qui était prévu au départ et puis la photo arrive, je trouvais que c'était un peu léger alors qu'on retrouvait un son plus vénère et je trouve que la pochette aurait pu être plus percutante. Là je trouve que ça faisait un peu Placebo tu vois. C'est ce qui me dérangeait un petit peu, ceci dit elle est très belle. Là, sur "Matière Noire", il y a le côté percutant qui manquait à "Une Somme De Détails". J'étais parti de l'image de "Carie", du film de Stephen King et je trouvais l'image chanmée !
Rapha : Film de Bryan de Palma du livre de Stephen King, soyons précis !
Yann : Exact ! Je suis aussi passionné de photos, des trucs très épurés à la Mondino. Je ne voulais pas mettre du sang parce que c'est vu et revu et je me suis dit que ce serait cool si c'était noir et donc j'ai proposé ça à Eric et il a amené le truc exactement comme je l'imaginais. C'est très appréciable de travailler avec lui parce qu'il a un talent de ouf !

Concernant le collector, c'est une idée que vous aviez eu dès le départ ?
Yann : Pour l'aspect liquide ? C'est la maison de disques. J'ai envie de proposer des trucs, en tant que musicien tu te dis si on te propose ça, ça va te coûter trop cher donc tu le penses mais tu ne le dis pas. Alors quand c'est la maison de disques qui te dit "ça ne vous dirait pas de faire ci, de faire ça ?", alors là tu dis oui ! Il y avait le coût des deux pochettes à la maison de disques, du liquide, du clip, franchement Verycords je les remercie 1000 fois parce qu'ils nous ont fait une sortie d'album que l'on n'avait pas eu depus Sony je pense. C'est un label qui assure grave !
Rapha : En fait ils croient à l'album. (Ndlr : ce n'est pas sans raison !)
Yann : Je le dis haut et fort, là-dessus, ils sont mortels ! Ils ont fait des pures sorties, je suis fier d'être chez eux.

Tu parlais d'un clip à venir ?!
Yann : Ouais en fait bien avant les évènements, "L'Enfer Des Dieux", c'est le morceau qui ressortait le plus et donc on a décidé de le cliper et ce sera un dessin animé en fait. C'est pour ça que c'est long parce que normalement tu sors ton clip en même temps que l'album mais là on a décidé de faire le dessin animé donc quand on a rencontré les deux gars qui sortent de l'école, ils nous ont dit "ouais les gars, un dessin animé ça ne va pas pouvoir être fait en 2 semaines". Ce sera prêt mi-Janvier je pense.
Rapha : Ce morceau-là a été décidé fin Août début Septembre bien avant qu'il ne se passe tout ça, malheureusement ça colle un peu trop.
Yann : Mais on a hâte de voir parce qu'on a vu quelques briefs et ça nous a vraiment plu donc j'espère qu'on ne va pas être déçu au final, en tous cas je ne pense pas. Encore une fois on rêve d'un dessin animé depuis longtemps mais là c'est le label qui a proposé.
Rapha : On va voir comment ça va être développé mais il y a un côté science-fiction qui est vraiment cool, l'histoire est cool, bref je suis pressé de voir ça !

Yann tu en parlais, vous avez un son de plus en plus puissant, plus musclé, un peu comme sur "Une Somme De Détails", avez-vous une "limite" dans votre façon de sonner ?
Yann : Non ça fait un moment qu'on ne s'en met plus, qu'on ne se pose plus de questions, de se dire que le refrain n'arrive pas trop tôt, qu'il est trop long si jamais on passait à la radio, etc... Perso passer à la radio j'en ai rien à foutre. Si quelqu'un veut nous placer tant mieux mais on ne va pas faire nos morceaux en fonction de ça. On a des breaks qui durent presque 3min, tant que le break est mortel on s'en fout.
Rapha : On fait comme on veut maintenant.
Yann : On fait comme on veut, ce qui m'importe c'est que ça fasse plaisir aux gens qui écoutent Mass.
Rapha : Là encore une fois, le label, ils n'ont presque rien entendu avant que ça sorte. Je pense que c'est la meilleure chose à faire avec les musiciens, c'est pas de leur casser les couilles tous les jours à leur dire ce qu'ils doivent faire. Au final, je pense que ça arrive beaucoup en ce moment sur des groupes américains où j'ai l'impression qu'ils sont tous sur le même label bien connu, ils signent des beaux contrats et on leur dit après vous allez faire des albums de telle manière, comme vous avez l'habitude de faire, il ne faut pas que ça sorte du cadre. Je ne citerais pas de nom mais ça me fait cette impression-là. Donc oui c'est bien, mais c'est calibré, cadré mais je n'ai pas envie qu'on marche comme ça.

Quand on entend les guitares sur "Vector Equilibrium", c'est très pêchu mais si vous nous avez habitués à des titres pêchus, là c'est encore différent !
Yann : C'est le quatrième album avec Fred et on a toujours envie de faire mieux donc on se prend la tête, on travaille le son avec lui. Mais en rentrant en studio on s'était dit qu'on allait atomiser "L'Armée Des Ombres" alors qu'on se disait que ça allait être dur de faire mieux. Et puis finalement on l'a fait sincèrement, du mieux qu'on pouvait, et moi je le préfère à "L'Armée Des Ombres" alors que j'en étais ultra satisfait, j'adore ce disque. Je suis fan !
Rapha : Je le préfère aussi, mais je ne m'attendais pas à autant de réactions surtout pour cet album-là.
Yann : On l'a fait comme on a fait les autres, des fois tu te plantes mais t'es tellement dans le truc que jusqu'au moment où la maison de disques vient l'écouter tu ne sais plus. Quand Medhi du label vient, justement ça me fait plaisir de le voir avec des yeux genre "Mais putain les gars qu'est-ce que vous avez fait là ?". En tous cas il se trouve qu'on a fait le disque comme d'habitude et qu'il est cool !

Malgré ça, vous avez toujours une appréhension avant de sortir les disques ?
Yann : Oui parce que l'on a vraiment envie que ça plaise au public, quand on l'a fait écouter chez Deezer on s'est dit "est-ce que ça va plaire ?" mais là c'est vrai que c'est assez unanime. Des fois tu as des gens qui vont te dire que c'est de la merde, alors là certainement aussi, mais je ne l'ai pas beaucoup lu.
Rapha : De toute façon on sait très bien qu'on ne peut pas plaire à tout le monde !
Yann : J'ai reçu des messages de potes à moi, je sais qu'ils n'écoutent pas ça, ils écoutent plutôt Converge ou des trucs vachement plus pointus et quand ces gars-là te disent que l'album est cool, ça fait super plaisir.

Et votre méthode pour composer, est-ce qu'elle est toujours la même ?
Yann : Au final quand tu regardes bien, c'est toujours un peu la même depuis le début. On avait une façon de fonctionner un peu différente quand les mecs qui faisaient les machines faisaient partie du groupe. On pouvait avoir des idées, eux mettaient des boucles et on mettait un riff dessus.

Mouss a parlé du titre "Matière Noire" par rapport à l'univers, et aussi le côté politique. Mais est-ce qu'on ne peut pas y voir aussi la matière noire comme tout ce qui pourrait nous souiller ?
Yann : Oui après chacun est libre de l'interpréter à sa façon, Mouss fait vachement le parallèle avec la matière noire, la masse qui n'est pas palpable dans l'univers, il fait le parallèle avec les gens qui votent blanc : ils ne sont pas pris en compte. C'est comme ça que lui l'a écrit dans son texte.
Rapha : Effectivement la matière noire c'est aussi tout ce qu'il y a de mauvais, tout ce qui se passe en ce moment, tout ce qui plombe les gens.

Pourquoi un morceau comme "Plus Que Du Metal" ?
Yann : En fait on en parle souvent de ce truc, quand on est au Hellfest tout le monde met son métier de côté et tu mets ta veste à patchs. Tu retrouves toutes les classes sociales, venues écouter une musique qui les passionne. Avec Mouss on s'est dit, je ne sais plus trop quand, mais on s'est dit "C'est plus que de la musique". Donc Mouss a employé "C'est plus que du metal" pour dire que cette musique quand tu l'as dans la peau c'est presque une religion.
Rapha : C'est comme une religion mais sans la connerie ! (rires)
Yann : Moi je le vis comme ça, mes dieux c'est Hetfield c'est Kerry King, c'est Angus Young. Ce morceau est venu pour expliquer ça.
Rapha : C'est aussi pour parler de la relation qu'il y a entre nous et nos fans. Je trouve que Mass fédère de plus en plus de gens différents, des gamins, des adultes, des jeunes, des vieux. Ce soir on connaît des gens qui viennent qui ont des postes hyper importants dans le commerce, un autre qui va être soudeur et ils vont discuter, ils vont devenir potes, etc... et ça je trouve que c'est cool !
Yann : Ouais je trouve ça mortel et comme il dit, on a des cercles d'amis qui sont arrivés à se connaître grâce à Mass ou au metal et c'est pareil pour tous les groupes. Je sais qu'on a des fans de Mass qui sont aussi fans de Metallica et qui suivent Metallica dans le monde et puis ça créé des fans clubs, etc... et les gars ont beau être éboueur ou banquier ou n'importe quoi, ils vont devenir potes parce qu'il y a la musique !
Rapha : Dans les groupes plus mainstream, les gens ils vont les voir comme ça mais ils ne vont pas se prendre un patch, dévaliser le merch, acheter des bouquins qui parlent de ça, acheter les revues tous les mois, c'est vraiment plus dans le metal ça !

Sur "Vae Soli" on entend de l'harmonica (ce qui apporte une ambiance plus mélancolique), des choeurs sur "Vector Equilibrium". Toujours une volonté de surprendre et de faire autre chose ?
Yann : J'avoue pour l'harmonica, je faisais les machines avec le gars qui s'en occupait et j'avais ce truc d'Enio Moricone dans la tête. Lui, tu ne peux pas le prendre sinon tu as des soucis mais je lui ai demandé d'essayer un truc dans le style et voilà ça collait.
Rapha : Oui ça colle, c'est vraiment selon le titre.
Yann : Mais effectivement comme tu dis même à l'époque avec Pascal on le faisait, on ne s'interdira pas de mettre une clarinette si ça le fait !

En studio justement, vous êtes du genre à tester plein de choses ou vous avez des idées assez précises ?
Yann : En studio pas trop, en fait une fois que les morceaux sont finis on a le champs libre, j'aime bien être là avec le gars qui fait les machines. Il fait des trucs, il nous fait écouter si ça plaît pas on renvoie et il fait d'autres choses. En fait, on construit les choses comme ça jusqu'à ce que ça nous plaise complètement.
Rapha : Mais quand on arrive en studio en général on n'a pas trop le temps d'expérimenter ne serait-ce que pour des questions de budget, tu ne peux pas te permettre de passer 6 mois à bidouiller des trucs, pas nous en tous cas ! Donc oui quand on rentre en studio c'est quasiment fini. Il y a des choses qui changent mais c'est léger.



Qu'est-ce que ça fait d'être sur les routes après toutes ces années (22 ans) et de voir que vous êtes toujours un groupe autant demandé par ses fans (public grandissant d'ailleurs) ?
Yann : C'est assez fou !
Rapha : Je ne sais pas trop l'expliquer...
Yann : On ne sait pas trop l'expliquer parce que tu sais, les 22 ans on ne les a limite pas vu passer : tu fais tes trucs, tu fais ton album, tu fais tes tournées, etc... Je n'ai pas envie que ça s'arrête et effectivement c'est vrai qu'on en a vu arriver, repartir, et tu as des mecs comme nous ou Lofo (Ndlr : Lofofora), on était d'ailleurs au Québec avec eux, il faut savoir que Lofo c'est un des groupes que je respecte le plus, je ne suis pas un des plus grand fans de leur musique même si à l'époque un album comme "Peuh" m'avait mis une bonne claque mais ces mecs-là ils nous ont mis le pied à l'étrier, ils nous ont amenés en tournée et ils sont toujours là aussi et ça le fait grave ! J'ai vu No One (Ndlr : No One Is Innocent) il y a une semaine et j'ai pris une grosse claque ! Tu vois No One, Lofo, Mass et même je peux citer les Tagada Jones et les Black Bomb (Ndlr : Black Bomb Ä)...
Rapha : Tous ces groupes-là ça commence à faire 20 ans ou presque, Lofo ça fait plus...
Yann : Respect à Loudblast aussi, Loudblast c'est encore plus vieux.
Rapha : La longévité ça paye, surtout ici, les gens se rendent bien compte que c'est pas pour faire un coup. Et puis je pense qu'on sait mieux jouer maintenant, qu'on sait mieux écrire maintenant, c'est normal aussi. Et puis j'ai envie de m'éclater sur scène, que ce soit la fête et ça les gens le sentent aussi.

Vous avez parlé de "l'âge d'or de la misère et de la désinformation" sur le morceau "Tout Est Poison", qu'est-ce que vous entendez par là ? Vous pensez qu'il y a une prise de conscience ces derniers temps ?
Yann : Je pense que la globalité de ce morceau c'est de se dire qu'il ne faut pas abuser des bonnes choses, le poison est la dose, il ne faut jamais abuser parce que tu te brûles les doigts au bout d'un moment.
Rapha : Après il faudrait demander à Mouss mais j'imagine que c'est aussi par rapport à Internet, la télé, etc...
Yann : Après si on parle côté politique c'est comme ça que je vois le truc : c'est un microcosme de gens au pouvoir qui font leur business et que nous en-dessous...
Rapha : On ne sait pas le quart de ce qui se trame en fait !
Yann : Ouais tu ne sais pas tout ce qui se passe.
Rapha : Et après tu as tout ce cercle des experts, tu les vois c'est toujours tous les mêmes sur toutes les chaînes pour donner leur avis et t'expliquer que c'est ça qu'il faut faire, qu'il faut penser, etc...

Mais donc quand Mouss écrit ses textes, vous les abordez avec lui ?
Yann : Si, carrément, je ne sais pas comment l'expliquer mais je regarde le fond du texte.
Rapha : Je n'aime pas trop que l'on m'explique les textes en fait.
Yann : J'aime bien quand ça sonne bien, que la phrase est belle, que je peux l'interpréter à ma façon. Tu vois Mouss "L'Enfer Des Dieux" il ne voulait pas la faire. Parce qu'on était à la fin du studio et je lui ai dis "T'es sûr que tu ne veux pas essayer ce truc, il a l'air mortel, on a des instrus, montre ce que tu as là". Et il a sorti une phrase qu'il a pris de Nietzsche qui dit "L'enfer des dieux c'est leur amour des hommes". Et je lui ai dis "Mais mec, ça tu le mets !", j'ai trouvé la phrase trop belle, et en réponse à Nietzsche on a écrit l'inverse "L'enfer des hommes c'est leur amour des dieux".
Rapha : Mais ça ne parle pas que de religion, j'y tiens !
Yann : Et donc il a écrit un couplet, un deuxième et puis ça a donné ça. Le thème de départ c'est quand même ça.
Rapha : Après comme je le disais, je n'aime pas trop que l'on m'explique les textes. Je préfère imaginer les trucs. Des fois j'ai eu des traductions de texte, que ce soit de groupes comme Metallica ou Slayer et c'est pas du tout ce que je pensais. Du coup je préfère ne pas lire les textes, je me fais sûrement des phrases qui ne veulent rien dire mais moi ça me va !

Pour l'avenir de la société, vous qui avez une musique toujours positive et pêchue, vous êtes plutôt optimistes ?
Yann : Oui, oui je vais reprendre le truc de Dupontel qui est hyper connu où il t'explique d'éteindre ta télé et oui, il y a plein de positif à prendre, il faut arrêter de regarder BFM TV, de se dire "Oh putain c'est la galère et tout ça". Moi j'ai envie de positiver pour mes enfants, tu vois on est dans une société où dès le CP on te met des notes et on te dit que si t'es pas bon en ça, t'es nul ! Alors que je suis désolé mais tu as plein d'enfants qui ne sont pas doués à l'école mais qui sont hyper doués avec leurs mains. Si tu leur dis qu'ils sont nuls ils n'auront pas confiance en eux. Donc en fait si tu regardes trop la télé tu vas déprimer et tu vas te dire "Merde ça crève de faim là-bas mais ça on ne peut rien y faire". Alors que si tu éteins ta télé et que tout seul tu décides de donner, en bas de chez toi, une couverture au SDF, tu vas lui filer un café, tu fais du positif ! Et si tout le monde fait ça c'est la philosophie de Pierre Rabhi qui est de créer un truc positif déjà autour de soi, de sa famille, de ses amis. Déjà, ça, c'est mortel !
Rapha : Après il faut s'informer, ne pas être niais, en sachant ce qui se passe.
Yann : La vie est courte, il faut en profiter !

Suite aux récents attentats à Paris et notamment au Bataclan, est-ce que vous donnez un autre "sens" à vos concerts ? Au final, ça aurait pu être pendant le concert de n'importe quel artiste... Est-ce que vous en profitez encore plus ?
Rapha : Personnellement un grand oui !
Yann : C'est clair ! Surtout qu'effectivement vu ce qui s'est passé on y pense tout le temps. J'avais mes places pour Deftones le lendemain et je suis étonné que l'on n'ait pas perdu plus de proches parce que je connais beaucoup de monde qui y était et ça aurait pu être pire. Mais oui on y pense tout le temps, surtout quand on joue "L'Enfer Des Dieux" !
Rapha : Il y a un petit côté mission tu vois, en hommage aux personnes et pour montrer qu'il faut continuer à jouer, à aller voir des concerts, à aller au cinéma, dans les théâtres, dans les bistrots, enfin à vivre quoi ! Parce qu'ils veulent c'est qu'on arrête de vivre justement mais ça ils n'y arriveront pas !

Vous allez faire des dates à l'étranger en 2016 ?
Yann : Il y a la Belgique, l'Allemagne, on retourne à Nouméa en fin d'année prochaine, on est sur le Japon et l'Australie pour essayer de sortir l'album et de tourner !

Et ces dates que vous tentez à l'étranger, c'est grâce à Verycords ?
Yann : Non, Nouméa on y était déjà allé il y a deux ou trois ans...
Rapha : Fais gaffe tu vas te faire engueuler ! (rires)
Yann : Nouméa c'était grâce à des gens qui nous écoutent là-bas et qui ont tout fait pour qu'on puisse y aller et là c'est les mêmes personnes qui s'en occupent.
Rapha : L'année prochaine ça fera 5 ans en fait.
Yann : 5 ans oui ! Et donc comme on va là-bas ce serait débile de ne pas tenter d'aller au Japon et l'Australie vu que l'on est à côté.
Rapha : On verra bien quand on sera sur place, mais c'est pour le kiff aussi !

A ton avis qu'est-ce qui fait que la grande majorité (pour ne pas dire la totalité) des autres groupes qui jouaient dans la même sphère musicale que vous à vos débuts ne sont plus là aujourd'hui alors que vous, vous êtes toujours là et devenez de plus en plus "gros" ?
Yann : Je réponds toujours que c'est la passion ! Parce que même si l'on vend de moins en moins d'albums, il y a toujours autant de monde en concerts donc c'est qu'il y a un problème quand même. Après en concerts on reste dans une moyenne plutôt cool ! Pour ce style de musique en tous cas on n'a pas trop à se plaindre ! Donc voilà ça donne envie de continuer, on le fait et on verra bien ! Peut-être que ça s'arrêtera un jour mais pour l'instant on joue !

Une petite dernière, on voit ces dernières années que le Hellfest devient le "festival à la mode". Est-ce que ça va démocratiser le metal ou est-ce qu'il va rester marginal à votre avis ?
Yann : Franchement je suis fier que ce putain de festival soit en France ! Parce que connaissant assez bien les organisateurs ce sont des vrais mecs, je suis archi fan de Ben Barbaud, de son intégrité, c'est un gars passionné qui est passé par plein de galères sur ce festival. Je crois que le Hellfest devient aussi gros que les Vieilles Charrues, le plus gros festival français. C'est génial ! Parce que tu vois il y a aussi les autres festivals, les Download, Sonisphère, c'est bien aussi ces festivals là mais en fait tu as le Hellfest qui est un festival de passionné pour les passionnés et tu as les autres festivals qui sont là pour faire de l'argent. Le Hellfest j'adore y aller ! Avec Rapha on y va tous les ans, qu'on y joue ou pas, on y va les 3 jours. Et puis les têtes d'affiches ce n'est pas forcément ça qui m'attire, je suis tout le temps fourré à la Terrorizer, la Valley et la Warzone, je découvre plein de trucs. J'adore y aller, c'est ultra bien organisé, etc...
Rapha : Après je ne sais pas si ça va beaucoup démocratiser le metal, un peu sûrement.
Yann : Après c'est sûr que tu en vois des mecs se pavaner, mais c'est pas la majorité !
Rapha : De toute façon si tu regardes niveau télé ou radio en France, je parle en grosse télé ou grosse radio, il n'y a absolument rien ! Donc ça prouve bien qu'il y a encore du boulot ! Et si c'est pour avoir des sujets de merde comme on en a eu, je préfère encore qu'ils n'en parlent pas !

Un grand merci à Yann et Rapha d'avoir répondu à mes questions ainsi qu'à Roger et John d'avoir rendu l'interview possible !  


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