Interview faite par E.L.P à Paris.

Eh bien nous y voilà ! J’ai l’impression que l’on ne va plus se quitter dis donc, plusieurs fois que l’on se croise en 2 semaines, voila qui se termine bien, d’autant que ça fait de nombreux mois que j'entends parler de toi sans pour autant avoir eu la chance de te croiser, aussi bien au Mennecy Metal Fest ou lors de votre récente date au Divan du Monde... Donc, pour rentrer dans le vif du sujet, tu es guitariste, chanteur...
Stéphane Buriez (chant / guitare) : J’essaye ! (rires)

Et journaliste à tes heures perdues.
Stéphane : Plutôt présentateur, je me considère plus comme ça, avec l’émission que j’anime, que comme un "journaliste" à proprement parler.

Très bien, mais alors, avec toutes ces casquettes, pourrais-tu nous expliquer un peu plus en détails, qui est vraiment Stéphane Buriez ?
Stéphane : Ah ! Tout ça, et bien plus encore (rires) ! Un homme qui travaille beaucoup...

Un intermittent très occupé ?
Stéphane : Voilà, c’est ça, un intermittent très occupé, comme tous les intermittents d’ailleurs, quoiqu’on en pense ! C’est vrai que le fait d’avoir un groupe qui fonctionne te permet aussi de t’ouvrir sur d’autres choses. J’ai, toujours aimé faire du son par exemple. J’ai commencé à le faire avec LOUDBLAST d’ailleurs, à travailler sur les premières maquettes des Loud’ pour ensuite acheter le premier matériel, faire des démos, continuer en achetant plus de matos, avoir un plus gros studio et finir par produire des groupes pour arriver à faire, petit à petit, des prods qui fonctionnent (Black Bomb Ä par exemple)... ! Donc voilà, le groupe, les prods, et ensuite cette belle aventure qu’est l’émission. On me l’a proposée et j’aurais très bien pu refuser, mais je pense que le metal n’est pas assez représenté à la TV, ou mal en tout cas.

Il y en a certains qui ont dû commencer un peu comme moi avec la petite émission qui passait, à l’époque sur MCM en fin de soirée le jeudi ou le vendredi, mais c’est vrai que ça restait et reste assez pauvre.
Stéphane : Donc voilà, quand après, on te propose d’animer une émission metal en prime-time, même si ce n’est "que" sur l’Enôrme TV, une chaîne du câble, certes, mais en devenir, avec des gens qui s’activent énormément derrière, et qui y croient, alors là, ça me parle ! Je connais le risque, le risque que ça ne prenne pas, que ça ne marche pas...

Je pense qu’il y a largement la fanbase pour en tout cas !
Stéphane : On rempile pour une troisième saison de toute façon donc ça s’annonce bien ! À côté de ça, nous allons sortir un nouvel album avec LOUDBLAST donc au milieu de tous ces projets j’ai pas mal freiné les prods cette année puisque je commençais à manquer de temps.

J’imagine que le temps consacré au retour sur le devant de la scène avec Loudblast vous a demandé, à tous, énormément d’implication !
Stéphane : Oui, mais c’est que je n’avais plus de temps pour moi surtout, je ne peux pas continuer à passer mon temps à travailler. J’essaye de me conserver quelques week-ends et de reprendre le cours des choses "normales" de la vie.

Et tu as bien raison ! Justement, pour parler un peu de "Burial Ground", vous revenez cette année avec ce nouvel album prévu pour le 28 Avril prochain, si je ne dis pas de bêtise, chez Listenable Records. Auriez-vous, si cet album devait être le dernier, une sorte d’épitaphe. Un bilan à dresser sur toutes ces années d’existence du groupe et le chemin parcouru ?
Stéphane : Ce sera difficile, vu que ce ne sera pas le dernier ! (rires)

Je ne peux qu’adhérer et confirmer, vu la qualité de cet opus ! (rires) Ce serait impossible !
Stéphane : À ce jour, je pense que, quoiqu’il arrive, LOUDBLAST c’est ma vie... Donc je ne peux qu’être le plus heureux des hommes ! Professionnellement parlant tout se passe très bien, énormément de choses se déclenchent, et, là, on finit par sortir un putain d’album sur lequel on a travaillé très dur, tout ça commence à devenir concret, on va enfin pouvoir le toucher cet album, avoir notre travail dans mains. Maintenant, c’est le début d’autre chose avec l’ouverture de nouvelles perspectives !

Donc tu écris et rajoutes constamment de nouvelles pages à ton expérience musicale ?
Stéphane : Oui, c’est ça, on avance, on ne regarde pas derrière. Ce qui est derrière est loin maintenant, c’est très loin. On s’attelle, depuis 2009, à construire, à reconstruire quelque chose, et c’est vraiment ça qui nous importe dans la mesure où des morceaux, nous en avons déjà écrits et composés une bonne centaine, donc maintenant, le plus important pour nous reste de regarder devant, et voir ce qui va arriver avec le sourire !

Et précisément, que pourrait renfermer l’avenir avec tous ces projets, ces scènes, cet album, aussi bien pour vous que pour le groupe ?
Drakhian (guitare) : Une meilleure notoriété, une meilleure reconnaissance à l’étranger surtout.

C’est vrai que vous parlez souvent de cet impact plus "global", dans vos dernières interviews web/parutions papier.
Drakhian : Disons qu’à l’étranger, LOUDBLAST reste un groupe connu quasi exclusivement dans le milieu des musiciens, des groupes. On n’a pas le même pignon sur rue vis à vis du public (en Europe par exemple), que celui que l’on a ici, où l’on est bien acceptés, où l’on fait presque partie des meubles sur la scène FR...

C’est peut-être un peu rude comme terme de "faire partie des meubles", non ?
Drakhian : Oui, c’est vrai. Ce que je voulais dire c’est qu’en France, la plupart des gens connaissent et reconnaissent LOUDBLAST. Ce serait vraiment très intéressant de voir ce qui pourrait se passer si la chose arrivait à se répéter à l’étranger et dans le reste de l’Europe.

Et donc vous parliez, avec ce fameux "reste du monde", de toucher aussi les États-Unis, c’est bien ça ?
Stéphane : Exact, l’album sort donc en Europe le 28 Avril et sortira courant Juin aux États-Unis. Après ça, on espère que d’autres licences tomberont. De toute façon nous sommes là et nous avons envie que l’album soit partout pour que l’on puisse le suivre et le jouer dans le monde entier !

Tout reste à faire avec la naissance de ce nouveau "projet" qu’est "Burial Ground" ! Et surtout, avec cette nouvelle collaboration au niveau du label, via Listenable Records. Pensez-vous que ça vous sera bénéfique ? Que cette signature fonctionnera comme un moteur pour l’album ?
Stéphane : Voilà, tout est à faire, et en ça, notre signature chez Listenable nous a ouvert beaucoup d’autres perspectives.
Drakhian : Ce sera à coup sûr, un déclencheur !

Vous me disiez faire partie du paysage de la scène française depuis maintenant quelques années, et justement, certains portent énormément de crédit à Loudblast et te considère, Stéphane, comme un mentor...
Stéphane : Je suis un gourou ! (rires) Drakhian : Le Skippy du metal français ! (rires)

Quel est ton point de vue sur tout ce crédit qui t’est porté ? Qui est porté au groupe ?
Stéphane : Ce qui est sûr, c’est que je fais ce que j’aime sans me dire "Tiens, ça, ça va me permettre de briller !".

C’est que maintenant beaucoup de gens te regardent.
Drakhian : Après, il ne faut pas oublier le revers de la médaille non plus, parce que tous ces regards font aussi de Stéphane une cible de choix.

Et justement, as-tu beaucoup de ce genre de détracteurs ? Des haters qui te cassent allègrement du sucre sur le dos ?
Stéphane : Bien sûr ! Toujours malheureusement !... J’ai, en revanche (et heureusement d’ailleurs), moins de haters que de gens qui me soutiennent, qui ont une vision bien plus positive et peut-être plus juste de ce que je fais et de qui je suis.

Je pense en tout cas que cet album ne pourra que faire taire certaines de ces vilaines voix qui te tournent le dos !
Stéphane : Oui, on l’espère aussi, ça permettra peut-être de convaincre les septiques !
Drakhian : De toute façon ça ne fera jamais taire tout le monde, mais ce n’est pas le but en soi non plus, en tout cas pas chez nous !
Stéphane : Et puis, quand tous ceux qui peuvent avoir tendance à nous cracher dessus n’auront plus rien à cracher, nous, on sera toujours là ! (rires)



Et c’est beau de voir que vous avez la peau dure ! C’est vraiment très agréable de constater que même au bout de 29 ans, vous prenez toujours autant les choses à coeur, avec la même passion créatrice et humaine.
Stéphane : Evidemment puisque, comme nous l’avons dit, nous ne regardons pas derrière, nous nous préparons toujours à ce qui va se passer. Je pense aussi que c’est ce qui fait notre force : ne pas s’encroûter, ne pas rester figés sur notre petit îlot français, à ruminer ce qui s’est déjà joué...

Et cette remise en question, ce moteur vous poussant à aller de l’avant t’a poussé à t'intéresser de plus près à la scène française au sens large. Qu’est-ce qui t’a donné envie de l’aider ? D’où t’es venu ce besoin de te pencher sur ce sujet assez épineux qu’est le metal français ?
Stéphane : Je n’ai pas ressenti ce besoin à vrai dire, pour moi c’est plutôt "Action Not Words". Les gens parlent beaucoup... Trop... Trop souvent ! J’essaye de moins parler mais d’observer et d’agir. Quand je produis des groupes français parce que je les trouve bons, je le fais même s'il n’y a pas de budget parce que ça fait avancer les choses. C’est comme avec l’émission, j’ai cette chance de pouvoir présenter des "new comers" à chaque fois, parce qu’ils ont du talent. La France a du talent ! (rires)

Mais cette scène émergente a justement besoin de ce genre de coup de pied, c’est important d’avoir ce type de tribune pour pouvoir montrer et exprimer son talent !
Stéphane : La France n’est pas autre chose que le pays qui nous entoure, NOTRE pays. On a d’incroyables groupes comme Bliss Of Flesh par exemple, qui méritent que l’on parle d’eux ! Et la télé reste un peu le miroir aux alouettes, les gens ne te voient plus de la même façon une fois que tu es passé dedans...

Cet embryon de notoriété que l’on peut acquérir une fois passé au travers du petit écran ?
Stéphane : Oui, mais je ne pense pas que ce soit la bonne approche, je ne le vis pas comme ça du tout.

Tu restes effectivement très accessible en tout cas !
Stéphane : Et je le resterai, mais par contre, je ne suis pas accessible avec les cons (rires).

Comment en êtes-vous arrivés, après 29 ans sur planches, à tous ces constats sur l’être humain présents dans l’album ? Est-ce dû à ces 29 ans d’observation, de rencontres et de réflexion pour sortir à chaque fois le plus profond de vous-mêmes ?
Stéphane : Ce n’est pas réellement "mon" constat, c’est un travail en commun.

On sent cette obsession latente, d’où vient-elle ?
Drakhian : Je pense que c’est tout simplement parce que l’on a les yeux ouverts (rires). La définition même du musicien, ou de l’artiste, c’est de regarder le monde, de le filtrer et de l'analyser au travers de ces émotions. En regardant un peu autour de soi, on voit très rapidement les constats auxquels ça peut nous amener !

C’est vrai que, sur la scène parisienne notamment, on a une fâcheuse tendance à constater que de nombreux groupes assez jeunes et génériques parlent toujours de la même chose, en ayant un peu perdu de vu cet aspect plus philosophique, cette recherche humaine que vous essayez d’approcher...
Stéphane : On n’essaye pas de l’approcher, on l’approche ! En tout cas avec notre vision des choses...

Avec vos propres émotions, oui, c’est en tout cas ce qui transparaît de certaines compositions de "Burial Ground" !
Stéphane : Voilà, ce sont les visions de 4 personnes qui arrivent à s’imbriquer.

Avez-vous cette impression du "devoir accompli" ? Vous sentez-vous en harmonie avec ce que vous avez réussi à exprimer tous les 4 ?... Plus "humains" et libérés ?
Stéphane : Plus "humains", je ne sais pas, c’est compliqué...
Drakhian : À titre purement personnel, je n’ai jamais ressenti la musique comme une sorte d’exutoire. On ne peut pas se laver les mains au travers de son album et aller mieux après, c’est plus l’expression fixée, à l’instant T, d’un moment de nos vies, de ce que l’on a ressenti de fort à ce moment-là.

Sans nécessairement changer de façon de penser à la suite de la création, mais plus la percevoir comme une catharsis peut-être ?
Drakhian : Pas vraiment, puisque nous nous exprimons au quotidien. C’est vrai que l’album reste un instant un peu magnifié, mais ce que je veux dire c’est que ma vision des choses reste la même, aussi bien dans l’album que sur scène en dans le privé.

C’est comme ça que l’on arrive à des résultats assez entiers, des albums francs.
Drakhian : Oui, je pense qu’on a vraiment pas triché sur cet album !...

Et c’est en tout cas ce que l’on ressent. Pour ma part je ne connaissais le groupe que de nom sans avoir vraiment pris le temps, par le passé, de poser mes oreilles sur les contenus que vous avez proposé au fil du temps, mais le fait d’avoir reçu cet album pour en préparer cette interview, de pouvoir me l’approprier et l’étudier m’a fait entrevoir quelque chose d’intègre et d’honnête.
Drakhian : Ce que "Burial Ground" peut avoir de plus fort que nos albums précédents, c’est le fait qu’il n’y ait aucun morceau faible. Pas de titre "poubelle" mais pas de morceaux plus forts non plus, pour rester le plus juste et le plus intense possible. C’est un album qui se ressent, qui s’écoute du début à la fin et que peut se lire, comme une histoire. On ne l’a pas pensé en se disant que tel morceau allait être un tube et que les autres feraient de "l’à peu près" !

Sur cette base d’expression, donc, pour toi, Stéphane, en tant que guitariste / chanteur, quel serait ton meilleur moyen, en tant qu’artiste, de t’exprimer sur toutes ces émotions ? Peut-être y en a-t-il un que tu portes plus en ton coeur ?
Stéphane : En toute honnêteté, c’est vrai que cet album a été totalement différent... J’ai toujours été guitariste, je composais, guitare en main, je cherchais, à partir d’un riff, la meilleure structure de ma compo’, les meilleures arrangements. Mais cet album là s’est joué d’une autre façon, je me suis vraiment plus lâché sur les voix et le chant.

Tu as pu rompre toutes tes barrières ? Tous ces éléments de retenue ?
Stéphane : En un sens, oui, mais c’est grâce aux autres membres du groupe, qui m’ont poussé, plutôt que de me laisser dans mon carcan death metal habituel, à sortir de cette routine, de cette zone de confort. Ils ont insisté sur le fait que j’avais d’autres choses à proposer, à tester en tout cas. Le fait d’avoir su passer outre ces barrières d’habitudes m’a aidé à trouver ce que je n’avais jamais réussi à trouver avec mes lignes de chant. Tout s’est finalement imbriqué à la perfection. Pour la première fois !
Drakhian : Il y avait déjà une belle corrélation entre les morceaux et la qualité des textes donc le fait que Stéphane ait su proposer un chant beaucoup plus instinctif, beaucoup moins retenu, sans s’imposer un cahier des charges, lui a fait sortir quelque chose de plus vrai.

Comment avez-vous, par rapport aux influences de chaque membre du groupe sur cet album, géré ce dynamisme dans la création ?
Stéphane : C’est vraiment nous 4 qui avons créé l’album, chacun a eu son mot à dire, sa touche à apporter.

Et cette démarche peut paraître assez rare, de nos jours, d’autant que l’on entend souvent parler de groupe avec un seul moteur, un esprit fort guidant les autres...
Stéphane : Ça a longtemps été le cas dans le groupe par le passé, c’est vrai, mais nous sommes arrivés, depuis fin 2009, à cette nouvelle dynamique de 4 têtes pensantes, c’est un travail personnel et commun qui fait que l’expression est intégralement celle de l’entité, de l’ensemble LOUDBLAST !

Tu penses que c’est quelque chose qui vous manquait ? Que vous aviez perdu ?
Stéphane : Oui, oui, dans la mesure où il arrive que les choses s'étiolent. Vient un moment ou tu n’as envie que d’une chose : avancer et si à ce moment-là, certaines personnes finissent par être plus boulets qu’autre chose, tu n’as d’autre choix que d’en couper la chaîne... !

Donc là tout s’est bien passé, plus de boulets mais des petites plumes composant avec toi en toute légèreté ?
Stéphane : C’est effectivement ça depuis 2009, oui ! On se sent extrêmement bien, fiers et confiants à la veille de la sortie de cet album ! Ce n’est certainement pas quelque chose qui va passer comme ça dans nos vie et en sortir aussi rapidement qu’il y est entré ! (rires)

Je pense qu’il fera date dans votre discographie, dans le sens où vous avez eu l’audace de proposer quelque chose de nouveau pour vous, de différent !
Stéphane : Sans le vouloir (rires), on a réussi à synthétiser toute l’essence de LOUDBLAST !
Drakhian : Après ce n’est pas nous qui avons la légitimité pour le dire, c’est surtout au public de juger si notre intégrité lui plaira... (rires)
Stéphane : Faut admettre que pour le moment, le feedback est plutôt agréable et sympathique !

Pour reprendre un peu sur tous ces différents esprits à l’oeuvre sur l’album, pourriez-vous nous parler un peu plus en détail des personnalités extérieures qui sont venues se greffer au projet ? J’imagine que vous avez tous beaucoup de contacts dans la grande famille de la scène ?
Stéphane : Il y a effectivement pas mal de guests. On tenait à faire jouer nos amis les plus proches en priorité.

Pour rester sur une idée de "famille" ?
Drakhian : Il y en a eu beaucoup, comme Aðalbjörn, le chanteur de Sólstafir qui est venu poser, le temps d’un refrain, une voix hurlée, absolument déchirante sur "The Path". Frédéric Leclercq, le bassistes de DragonForce, qui est, là, venu nous poser 2 magnifiques solos de guitares, étant guitariste émérite et vertigineux de son état, sur "Darkness Will Abide" (rires). Il y a aussi Heimoth du groupe Seth, qui nous a fait le plaisir de jouer une partie acoustique.
Stéphane : Voilà quelques noms, mais il y en a encore d’autres à découvrir. On aurait pu avoir plein de guests si tu veux, mais le fait est que là, comme Heimoth par exemple, qui a écrit un texte de "Burial Ground" (comme il l’avait fait, d’ailleurs, pour "Frozen Moments"), ce n’était que des gens vraiment impliqués dans nos vies et dans cet opus.
Drakhian : On ne voulait en aucun cas avoir des guests pour avoir des guests. Il fallait inviter la famille !
Stéphane : Surtout quand cette famille est de qualité (rires) !

Ça recoupe aussi ce que tu disais sur les "cons" tout à l’heure, tu ne cherches pas à t’associer avec !
Stéphane : Non, voilà (rires), on les évite ! On essaye de les sentir de loin...

Et du coup, ce plaisir du studio et de la compo fait que nous nous retrouvons avec des morceaux assez longs d’un manière générale, avec des titres de (souvent), plus de 4 minutes, des pièces assez solides et monolithiques. Des pièces qui prennent leur temps...
Drakhian : Chaque morceau raconte une histoire, et l’album en lui même, à sa lecture, en raconte une autre.

10 chapitres à ce même livre, donc, que les 10 titres de "Burial Ground". Cette volonté est-elle chevillée au travail sur les ambiances qui a été, sur cet album, assez énorme, il faut bien l’admettre ? On est en présence d’atmosphères très détaillées, taillées à la serpe (comme sur "A Bloody Oath" ou "I Reach The Sun") quelle était votre approche sur ce point ? Sur ces ambiances bien...
Stéphane & Drakhian : (d’une voix caverneuse) Bien dark, bien plombantes... ! (rires)

Exactement, des ambiances pesantes dont on ne peut que s'imprégner. Était-ce quelque chose que vous aviez gardé en tête ? Ou est-ce venu directement pendant le travail studio / compo / preprod’ ?
Drakhian : Oui et non, disons que la base de toute composition reste toujours la découverte d’un riff, d’un "chemin", sans que l’on se dise «tiens, on va faire ça, ça et ça pour que ça sonne comme ça et que ça donne tel ou tel type d’ambiance. Après c’est vraiment un ensemble, le choix du riff, de sa place au sein du morceau, les arrangements, le chant, un ensemble très intuitif...

Dès l’apparition du point A, le point B était déjà en vue à sa suite directe ?
Drakhian : Oui. Après, c’est difficile de dire ça sans paraître grande gueule ou quoi, mais nous avons cette expérience, cette culture musicale, cette collaboration de 4 âmes qui contribue à faire ressortir de la façon la plus fluide, du moins on l’espère, ces atmosphères qui rendent le message assez lisible finalement. Sans pour autant dire que l’album est typé "easy listening", bien au contraire.



Ça va effectivement bien au-delà, puisque l’on n’est pas en présence d’un gros death metal 'bête et méchant', il y a toute cette recherche que l’on ressent derrière, même sans être fan du genre ou "expert" en Loudblast ! Moi qui suis bien plus orienté death melodique ou du moins, vers des formations aux ambiances autrement plus vives et marquées, j’y ai trouvé, à ma grande surprise et à mon grand plaisir, certains axes aussi puissants, dans "Burial Ground", que dans certains de mes albums habituels.
Stéphane : C’était pas fait exprès ! (rires) Disons que c’est quelque chose qui s’est imposé à nous, naturellement.

Ce serait donc à mettre sur une nouvelle maturité de la formation ?
Drakhian : Oui, clairement ! D’autant que ça s’est aussi trouvé intimement lié à nos vies, aux différentes périodes que l’on a pu traverser récemment et qui n’étaient pas forcément très agréables... Une ambiance très particulière.

Du coup on se rapproche finalement de ce côté "exutoire" dont nous parlions tout à l’heure, non ?
Drakhian : Cette approche était toujours basée sur le principe de coucher nos âmes sur le papier pour finir par vivre à coté d’elles, pour les embrasser et les partager entre nous ou avec vous, donner plus de profondeur et de sens aux choses.

Ce qui reste en soit plus poétique et surtout plus sensible, c’est vrai... !
Stéphane : Tout le processus en était empreint aussi, il n’a pas été réalisé de façon "classique", c’est la chose que l’on peut affirmer avec le plus de certitude ! Tout s’est désossé pour se recoller par la suite...
Drakhian : On a rétabli l’ordre cosmique des choses dans cet album ! (rires)

Un gourou cosmique donc (rires), ça commence à devenir intéressant ! (rires)
Drakhian : Et on te fait signer le formulaire et les dons à la fin ! (rires)

Toujours sur le point de ces ambiances, la chose dont beaucoup de membres de la scène actuelle pourront entrevoir serait celle de l’ombre Gojira qui plane sur certaines d’entre elles, ce qui commence à devenir la "French Metal Touch", finalement, mais était-ce un rendu que vous aviez envisagé ou que vous gardiez en tête ?
Stéphane : Je ne pense pas que l’on soit influencé par Gojira, ce serait plus le contraire si on suit la chronologie (rires).
Drakhian : Je sais que ce qui peut nous rapprocher, puisque Stéphane, les autres et moi avons énormément de respect pour ce groupe, serait ce point fondamental de faire de la musique par passion. Une musique qui vient des couilles, des tripes et du coeur !

Des morceaux comme "I Reach The Sun" ou "The Void", par exemple, et sur certains points d’accordage également !
Drakhian : C’est en ça que l’on peut retrouver une sorte de feeling "à la française", avec des artistes qui réfléchissent et qui bossent pour mettre leurs tripes dans un disque, sans pour autant faire de parallèles directs entre eux, malgré le respect que l’on peut leur porter...

Donc pas de "références" modernes comme les Gojira, mais pas d’influences plus "classiques" non plus ?...
Stéphane : On n'a pas écouté énormément de musique pendant notre phase de compo, il fallait que l’on garde les idées claires (rires). Ce que j’ai écouté pour ma part se résume à Carcass et Ghost... Sans avoir eu le temps de me laisser influencer par beaucoup d’autres (anciens comme nouveaux). Il y a toujours des influences comme Celtic Frost, qui ressortiront toujours d’une façon ou d’une autre dans notre musique de toute façon !
Drakhian : Et puis, qu’on le veuille ou non, on aura toujours tous des influences qui nous guident, il y a, de base 4 personnalités, 4 ambiances totalement différentes au sein du groupe, qui se mélangent... ! Alex’ (Alexandre Lenormand, basse) qui a beaucoup composé sur "Burial Ground", a des goûts incroyablement riches et éclectiques par exemple. Du doom, du black, du heavy... Un peu de tout ! Charge à nous, après, de les affûter pour vouloir en sortir, avant tout le meilleur album de LOUDBLAST possible.

Ça, pour ce qui est des influences doom / black, on peut aisément les sentir, c’est évident !
Drakhian : Et puis, qu’est-ce qui, au fond, arrive à définir un morceau si ce n’est la première couche, sa base ? La structure reste la plus importante. On peut avoir une base death et y rajouter une structure un peu black comme j’ai plus eu l’habitude d’écouter, et donc dans ce sens sur ma participation aux structures pour "rationaliser" les élans fougueux de mes autres collègues ! (Drakhian & Stéphane rient)

Sans pour autant vous brider, c’est ça ?
Drakhian : Oui, voilà, pour faire rentrer les choses dans cette sorte de carcan que l’on considère, nous, comme "écoutable".
Stéphane : "Listenable" ! (rires)

Quel superbe placement de produit ! (rires) Tu me parlais de Carcass tout à l’heure, ça tombe très bien puisque j’aurais aimé que vous m’expliquiez un peu, comment, à l’heure actuelle, avec ce regain d’intérêt pour des groupes plus anciens, plus matures, de heavy, de death ou de thrash, qui reviennent un peu sur le devant de la scène, vous comptiez apporter, contribuer à cette scène qui n’a plus à faire ses preuves ? Quelle serait votre moyen de vous démarquer (si toutefois cette idée était dans vos têtes bien sûr) ?
Stéphane : C’est typiquement ce que l’on cherche à faire avec cet album, se démarquer du death "académique", proposer un album que l’on repère au milieu de tout ce qui sort aujourd'hui.
Drakhian : Ce serait un peu arrogant de dire que cet album ne ressemble à rien de ce qui a déjà été fait, mais il ne ressemble pas à beaucoup de choses précédemment sorties en tout cas (que ce soit pour LOUDBLAST ou le reste). Il s’inscrit dans cette nouvelle lignée musicale.

Donc pas de volonté première en tout cas d’"exploser"au travers de cet album ? De simplement se démarquer ?
Stéphane : Non, tant mieux ou tant pis si cet album est perçu comme ça, mais nous n’avons jamais pensé au groupe de cette façon-là.
Drakhian : Je reste persuadé que le mec qui va composer seul dans son garage, aura cette même visée, cette même volonté créatrice ou cette même démarche artistique que la nôtre en tout cas ! Les gens qui ont des choses importantes et intéressantes à dire ne se posent pas avec un papier et un cahier des charges, ce ne serait pas de l’art, de la musique peut-être, mais pas de l’art...

Pour faire une dernière parenthèse avec le point dont vous parliez plus haut, celui des influences et de ce qui crée le death. Quels seraient les éléments qui, une fois décantés, pourraient être caractérisés comme piliers du death ? ...de votre death ? Essentiellement sur cet aspect plus black, plus doom...
Drakhian : Oui, ce sont mes "moteurs". Je n’écoute presque exclusivement que ça depuis de très nombreuses années, Alexandre aussi, et Stéphane a essayé de s’y mettre depuis maintenant quelques temps. Le but du jeu était de faire fondre tout ça pour faire que se mélangent ces éléments death old school et ces éléments plus modernes, plus black, parfois plus travaillés.

C’est ce qui fera, je pense la force de cet album : prendre à contre-pied toutes les idées et les codes prédéfinis pour le genre.
Drakhian : Parce que LOUDBLAST ne veut plus faire du old school ! On fait le old school de la prochaine décennie ! (rires)

Le dernier aspect serait celui, au-delà du contenu, du contenant, avec l’artwork... Pourquoi cette transition sur l’univers de la pochette entre le côté "primitifs flamands" de "Frozen Moments Between Life And Death" (aux accents de Bosch, Dali...etc) et celui-ci ?
Stéphane : Tout simplement parce que Bolek Budzyn a fait toutes nos pochettes depuis "Sublime Dementia" et que nous cherchions le moyen de coller avec bien plus de proximité, à notre travail.

De vraiment allier le fond à la forme ? Puisque le style graphique est en tout, opposé à celui de l’"ancien Loudblast", c’est comme si l’on passait de Bosch aux Idées Noires de Franquin !
Stéphane : On a vraiment eu du mal à trouver cet artwork... Le premier que nous avions choisi était peut-être trop tourné vers l’heroic-fantasy, et ne collait pas à l’univers de cet album. C’est la dernière chose que nous avons eu à trouver, puisque l'album était déjà bouclé, mixé, masterisé, tout était prêt, sauf ce visuel... Nous l’avions déjà vu quelques mois avant et puis finalement, après avoir regardé les 3 propositions, nous l’avons choisi, il était véritablement le plus représentatif de notre contenu, de "Burial Ground" !

Quelque chose effectivement de très étrange, à la fois "malsain", torturé du moins, mais reposant au travers ces nuances de gris, de noir...
Drakhian : C’est ce que je pense aussi ! Et puis, les ténèbres sont apaisantes !

Je l’ai approché et l’ai plus ou moins interprété et appréhendé de la même façon que "Sweven", le second album de Morbus Chron (récemment sorti chez Century Media), sur cet aspect ténébreux mais reposant, avec cette amplitude et cette élévation... Il y a matière à se questionner sur soi-même en tout cas !
Stéphane & Drakhian : Tu veux qu’on t'interviewe ? (rires) Allonge toi et on en parle, raconte-nous tes rêves ! (rires)
Drakhian : C’est une des représentations possibles de l’esprit qu’implique l’album. On a la chance d’avoir pu prendre le temps, le recul, pas comme "Frozen Moments" où il nous fallait sortir un album rapidement pour faire nos preuves et dire "Loudblast se reforme pour faire 2, 3 concerts, point". Il fallait composer quelques chose de nouveau, sur lequel on puisse réfléchir plus profondément.

Comme si "Frozen Moments" était en quelque sorte une démo de ce que l’on a maintenant ? Quelque chose qui pose les jalons du travail accompli aujourd’hui avec "Burial Ground" ?
Stéphane : Oui, clairement, maintenant nous sommes présents et bien présents !

Pour soutenir tout ça, vous aviez, entre autre, la Brutal Coallition.
Stéphane : Oui, une superbe tournée aux côtés des potes de Benighted qui s’est terminée il y a peu. Des dates formidables !
Drakhian : L’orgie, pour reprendre un terme cher à nos amis de Benighted... ! (rires) Mieux que l’orgie humaine, l’orgie amicale. Heureusement, il y a toujours l’omerta du bus qui nous protège tous ! (rires)

Et donc quelques dates à venir ? Des affiches ? Des festivals ?
Stéphane : Oui, on a déjà pas mal de dates qui sont en train de se booker, dont quelques unes en France heureusement, mais en Belgique aussi par exemple ! Le Hellfest, le festival de Dour pur la Belgique, en Allemagne cet été, à la Réunion, au Québec... etc
Drakhian : Quelques dates à Dubaï aussi, pour continuer dans l’exotisme.
Stéphane : Et une grosse tournée européenne à la rentrée pour se diffuser un maximum, et l’ancrer dans l’année qui vient, ou du moins travailler d’arrache pied pour !...

Et c’est bien là tout ce que l’on vous souhaite en tout cas ! Je vous laisse donc le mot de la fin, encore merci pour ces quelques instants que vous nous avez accordés !
Drakhian : Polisson.
Stéphane : Marmotte.
Steffie (Listenable Records) : Bisous.

Un grand merci à Steffie pour sa réactivité et sa gentillesse, ainsi qu’aux Loudblast pour ces longs moments de partage !


Le site officiel : www.loudblast.org