Après "Fragmentation" en 2008, vous sortez "Uchronopolis" votre nouvel album. Si j'en réfère à votre MySpace, vous avez créé un univers bien particulier, "dieselpunk" si je reprends vos mots. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce concept ?
Krank_ (chant) : L'idée me trottait depuis quelques temps d'orienter la composition d'un album sur les principes d'un concept fort. J'ai commencé le travail scénaristique, l'approche visuelle et la conceptualisation pour ensuite en discuter avec les autres qui ont tout de suite accroché à l'initiative. Le postulat de base est simple : "que se passe-t-il si l'on plonge des personnages aux caractères et ambitions différentes dans une cité qui est sous l'emprise totalitaire d'un parti unique". Comme si le Candide de Voltaire avait lieu dans le 1984 de Georges Orwell. Tu mélanges tout ça en y ajoutant une pointe de rétrofuturisme et tu obtiens "Uchronopolis" !
Noisy_ (guitare) : Le but était de créer une esthétique bien particulière en termes sonores et visuels. Construire des sons très industriels, de mécaniques rouillées que l'on peu aisément s'imaginer en écoutant l'album tout en ayant comme objectif plus que des bruits de tuyaux et de presses hydrauliques samplées.
Liv_ (batterie) : Nous avions envie de faire évoluer notre son et nos compositions, avoir un fil conducteur, une trame générale qui s'orientait dans un univers plus rétro-futuriste. Ce nouvel album nous a justement permis de nous détacher quelque peu des attraits technopunk de "Fragmentation" pour aller vers des compositions tantôt plus sombres et plus violentes pour certaines mais aussi plus aérées et plus cinématiques pour d'autres.

Il semble que cet album soit rempli de références littéraires, cinématographiques et musicales. Quelles sont ces références qui ont aidée à construire votre album et quelles sont vos références personnelles en la matière ?
Krank_ : J'ai clairement écrit le concept en m'inspirant des différentes sources qu'elles soient littéraires ou cinématographiques. Principalement de "1984", "Candide", "Metropolis", "Brazil", "Le Comte de Monte Cristo" ou encore "The Truman Show".
Liv_ : Pour ma part "Uchronopolis" fait clairement écho à des films comme "Appleseed", "1984", "Equilibrium" ou "Metropolis"... A toutes ces œuvres où la ville post industrielle, post apocalyptique et technologique est décrite et perçue comme une véritable entité à part entière.
Noisy_ : Je suis très attaché à "1984". Ce livre m'a vraiment aidé à construire mes idées sur les libertés personnelles et les excès sécuritaires des gouvernements. Poussés à leur paroxysme on retrouve un peu du livre dans la cité d'"Uchronopolis".

"Uchronopolis" a bénéficié d'un packaging et d'un artwork assez réussi. Qui a réalisé l'artwork ? Pourquoi avoir choisi un digipack en 4 volets ?
Krank_: Après avoir fini de dessiner grossièrement toutes les planches qui allaient constituer l'artwork de notre album et qu' Erstaz_ ait terminé ses illustrations, il fallait trouver quelqu'un qui puisse non seulement cerner le projet mais aussi transformer ces planches en réel artwork. Nous avons opté pour Clément Thiery un jeune designer rencontré en concert avec qui nous travaillons régulièrement depuis.
Liv_ : S'il y a un chiffre récurent sur cet album c'est certainement le 4 ; les quatre volets symbolisent les différentes étapes de narration de ce conte que l'on retrouve dans les quatre interludes qui découpent l'album et opposent quatre points de vues, celui de la Nova Corp, parti unique de la ville, celui des Black Flash qui représentent l'opposition au régime mais aussi celui de Key, la créature humanoïde en marge de ces deux camps ainsi que celui de son créateur iconoclaste Jack Dantes.

Au niveau de la composition et de l'enregistrement quelles sont les différences avec vos précédentes productions ?
Ersatz_ (clavier, programmation) : Tout d'abord nous n'avons pas utilisé les mêmes outils pour la programmation electro et cette fois-ci les morceaux ont tous été composés suivant la même ligne directrice, contrairement à "Fragmentation" qui était un patchwork de différentes époques. "Uchronopolis" est à mon sens plus cohérent et réfléchi que le précédent.
Noisy_ : La production s’est faite de A à Z en famille. Nous avons enregistré au Studios RMS avec notre ingé-son live Olivier Bertrand, liberté et contrôle artistique total donc, le mastering ensuite a été supervisé par Zoé membre d'Herrschaft, très bon groupe d'indus avec qui nous avons déjà eu le plaisir de partager des kilomètres. Les compositions ont avancé extrêmement rapidement et sont toutes liées par la symbolique de l'histoire ou par les ambiances qui entrecoupent l'album. En fait si tu y réfléchis bien, c'est un album complètement opposé à "Fragmentation" qui a été conçu comme une sorte de compilation de 8 années de travail.
Liv_ : Techniquement parlant, la production diffère de nos précédentes sorties. Au niveau rythmique, ce fut la première fois que j'enregistrais mes parties de batterie. Cela a indéniablement donné un son plus lourd et plus fourni. Les séquences electro sont toujours présentes mais elles n'ont plus la fonction de "squelette" comme c'était le cas sur "Jigger" ou "Fragmentation", elles sont dorénavant plus utilisées comme des ornements sonores.

"Uchronopolis" est ponctué de plages entièrement ambiantes ce qui est plutôt rare pour un groupe de metal indus. Pourquoi avoir fait ce choix ?
Noisy_ : Je ne trouve pas ça "rare", surtout de la part d'un groupe d'indus, j'en connais même qui en font des albums de plages ambiantes, mais encore une fois le but est de lier tout l'album, le rendre presque étouffant et oppressant pour bien situer l'auditeur dans la moiteur du camp des Black Flash ou dans l'état d'esprit étriqué des habitants d'"Uchronopolis".
Ersatz_ : Oui les plages ambiantes retranscrivent l'univers de la ville et elles suivent également les chapitres de l'histoire, ce qui permet à l'auditeur de s'y retrouver un peu plus; vu qu'on a peu de morceaux calmes. C'est aussi un moyen de nuancer l'album.

Quel est votre morceau préféré de l'album et pourquoi ?
Liv_ : Le choix est difficile, mais je dirais "Tainted Cortex" pour son côté punk "in your face". J'aime beaucoup la jouer en live car il y a des breaks répartis tout le long de la compo et elle est très évolutive. Au niveau du live, nous avons intégré des passages claviers dont j'ai la charge et passer du synthé pendant le passage electro avant de revenir sur les fûts pour le grand final c'est un petit plaisir assez nouveau et jouissif !
Noisy_ : "Totalitarize Me" c'est pour moi un nouvel aboutissement dans la composition au sein de DEXY CORP_ , c'est à la fois un tube en puissance, un morceau scénique enthousiasmant et avec un sens textuel vraiment profond.
Ersatz_ : Mon morceau préféré est "Uchronopolis" car il est très sombre, j'aime beaucoup la structure du morceau et les lignes de chant. Il colle très bien en dernière position sur l'album car il plombe vraiment l'ambiance ! (rires)
Krank_ : Je me range à l'avis d'Ersatz_ pour exactement les mêmes raisons !

Depuis que vous êtes sur Black Rain (votre label), vous semblez vous rapprocher de l'Allemagne. Qu’en est-il réellement ?
Liv_ : Je t'avoue ne pas être étonné que nous soyons signés sur un label allemand plutôt que Français. On sait tous que la culture musicale de manière générale y est plus ouverte quand il est question d'indus goth ou metal même si une évolution se fait sentir ici, on est encore à la traine.
Noisy_ : Tourneur Allemand, dernière tournée en première partie d'Alien Sex Fiend, des ventes d'"Uchronopolis" qui égalent les Françaises, un MySpace statistiquement plus visité par des Allemands que par des compatriotes... C'est assez déroutant en fait, nous nous battons plus pour que la scène indus Française perce au grand jour, mais les facilités d'accès aux scènes, aux promoteurs dans les pays de l'Est nous aident à être plus pris au sérieux dans notre propre pays.
Krank_ : Au vu des conditions scéniques Françaises, nous nous orientons de plus en plus vers l'Allemagne. Les conditions y sont meilleures, le public plus réceptif.

Le site officiel : www.myspace.com/dexycorp