Interview faite par Margot Adan et Braindead à Paris

Delain, excellent groupe de metal symphonique Hollandais créé par Martijn Westerholt, ex-pianiste des légendaires Within Temptation, fête ses dix années de succès avec la sortie de "We Are The Others", leur troisième opus et.une tournée qui passera par Paris le 11 Mai à L’Alhambra. French Metal a eu le privilège de rencontrer Charlotte, qui n’a pas hésité de sa propre initiative et sur son temps personnel, à venir nous parler de Delain, dressant le bilan de cette première décennie, évoquant l’avenir du combo au sein d’une industrie musicale en pleine métamorphose. Rencontre avec une frontwoman pétillante, hors norme, passionnée et ouverte, qui a su manié un genre musical des plus exigeants avec élégance et modernité.

Tu es à Paris pour nous présenter le "We Are The Others Tour" ; cette tournée intervient elle uniquement dans le cadre de la promotion de votre nouvel album, ou est-ce aussi l’occasion de célébrer vos 10 ans d’existence sur scène avec votre public ?

Charlotte Wessels (chant) : (Surprise) Ah… C’est une question intéressante. Non en fait, nous sommes ici pour faire la promotion de l’album.

Vos shows sont remplis de générosité, de positivisme et d’émotions ; à cette occasion, y aura-t-il des surprises ? Des guests ?
Oui il y aura probablement des guests et peut-être quelques surprises, mais je n’en dirai pas plus. (sourire)

Interpréterez-vous les titres phares de "Lucidity" et "April Rain" ?
Oui nous allons jouer des compos d’"April Rain" et certaines de "Lucidity", mais pour le moment la setlist n’est pas encore définitive.

Pourquoi n’avoir composé que 3 albums en 10 ans ?
C’est assez marrant parce que parfois l’écriture se fait rapidement et on passe beaucoup de temps à enregistrer, à faire des arrangements. Cette fois-ci on a eu du retard à cause de problèmes externes rencontrés (Ndlr : Roadrunner est en train d’être racheté par Warner repoussant ainsi la sortie de certains albums). Mais j’aimerais écrire davantage et plus vite, et je suis persuadée que nos fans pensent la même chose. Nous voulons avoir le courant créatif en permanence. "Lucidity" a été écrit en 2006 et si on prend ça comme point de référence, 3 albums en 6 ans, ce n’est pas si mal (rires).

Et malgré tout, vous êtes mondialement connus, jusqu’à devenir le renouveau du metal symphonique ; comment expliques-tu ce succès ? Est-ce parce que vous dépoussiérez le genre par ta voix et votre modernisme ?
(Charlotte semble gênée par ce compliment puis ravie) Vous savez parfois je parle avec des amis, des producteurs ou des gens qui composent des chansons, sur ce qui fait qu’une création devient un succès ou non, et c’est imprévisible car il y a beaucoup de facteurs à prendre en compte. C’est aussi ça la définition du succès ; nous pouvons vendre, faire des tournées, des albums. Je veux dire qu’il y a beaucoup de musiciens qui ne peuvent pas en dire autant, c’est la façon dont l’industrie du disque fonctionne actuellement. Mais d’un autre côté, essayer de faire passer à la radio des groupes de metal symphonique est très difficile. Il y a différentes définitions du succès et finalement je pense que c’est être capable d’exprimer tout ce que l’on a besoin à travers ses chansons, toucher les gens, les jouer en live. Si on regarde dans cette direction alors, oui, je pense pouvoir dire que l’on a du succès.

Vous donnez beaucoup de concerts, à une époque où l’industrie du disque connait une crise sans précédent, ne penses-tu pas que la solution passe par le live ?
(Rapidement) Non. Non, je ne pense pas. Bien sûr, jouer en live devient de plus en plus important pour les artistes, pas seulement pour se faire connaître mais aussi financièrement, car avec le téléchargement on ne gagne plus vraiment grand chose avec les cachets des chansons, du moins pas autant qu’il y a dix ans. Il y a beaucoup de gens qui disent que la solution actuelle à tous les problèmes et surtout pour les musiciens qui ne gagnent plus assez d’argent est de faire du live. Nous avons un artiste qui composent les chansons et écrit beaucoup. Il a d’ailleurs co-écrit avec nous sur nos 3 albums, mais ne joue pas en live. Donc, vous ne verrez jamais quelque chose comme ça. Ecrire les chansons et créer pour un groupe ça a de la valeur. Jouer en live est de plus en plus important mais ce n’est pas la solution au problème.

Comment préparez-vous vos shows ? Improvisation ou scénarisation et répétitions ?
Pour ces chansons rien n’est encore défini, (mystérieuse) mais je prépare tout sans pour autant le dire, je garde ça pour moi. Je suis toujours excitée et nerveuse dans le bon sens du terme avant les shows, je veux savoir même si j’essaye de ne pas y penser ce que je dois faire mais je n’ai pas l’habitude de penser aux choses que je pourrai dire. C’est pourquoi je prépare toujours les choses dans ma tête avant le concert et c’est très rassurant.et quand le concert a été mauvais, je demande l’avis de mon entourage.



Within Temptation, Dimmu Borgir, Metallica ont déjà joué en live avec un orchestre ; aimerais-tu en faire autant ? Peut-être un méga concert avec Nightwish, Within Temptation ou Tarja ?
J’aime vraiment beaucoup le concept orchestre, pas tellement à cause de la proximité avec le groupe mais surtout parce que dans ce genre de musique il y a souvent beaucoup d’instruments classiques impliqués dans les compositions, mais ceci dit, lorsque l’on est en live je préfère utiliser des samples, vous voyez ? Si beaucoup groupes ne l’ont pas fait avant, c’est qu’un orchestre avec vous sur scène est non seulement impressionnant mais aussi très dur à mettre en place car la voix peut vraiment être étouffée par un son massif non équilibré. J’adorerais vraiment vivre cela un jour avec un grand orchestre mais à cause de cette raison, et parce que comme vous le disiez, certains groupes l’ont déjà fait, ce n’est pas ma priorité numéro une.

"We Are The Others" est donc votre troisième album, un line-up définitif, un style reconnaissable et moins d’expérimentations ; Pouvons-nous dire que c’est l’album de la maturité pour Delain ?
Vous savez, à ce point je dirais oui, définitivement oui ; parce qu’arriver aussi bien à nous souder les uns aux autres a été un défi pour obtenir le meilleur de nous-mêmes. Et je pense que nous l'avons fait, mais d’un autre côté, nous étions très anxieux et on ne savait pas ce que nous ferions dans vingt ans. (rires) Maintenant si je le compare aux précédents albums, nous somme plus matures et je peux être vraiment satisfaite ; quand j’écoute les chansons, je les adore… (Pensive et satisfaite)

Quand tu analyses ces dix dernières années, que retiens-tu de l’expérience Delain ? De vos collaborations prestigieuses avec Liv / Arien / Sharon ; aurais-tu souhaité changer quelque chose ?
Nous je ne souhaiterais rien changer. Je ne sais pas si l’on pourrait revenir en arrière mais ce n’est jamais bon de vouloir changer des évènements passés ; regarder le passé c’est bien, mais je préfère me fixer vers l’avenir. Je garde de très bons souvenirs de ce que l’on a fait. Il y a des choses qui se sont réalisées très vite, comme par exemple lorsque Marco Hietala (Ndlr : le bassiste et voix masculine de Nightwish) est venu avec nous sur scène comme invité d’honneur à l’un de nos shows ou Sharon qui s’est jointe à nous de nombreuses fois ; ces moments magiques où des gens ont collaboré à nos albums, en fait tout cela a été très spécial. (rires)

Que penses-tu de la scène metal actuelle, entre les jeunes groupes qui font du copier-coller sans imagination ni personnalité et les légendes qui se reforment sans trop de conviction ?
Je ne pense pas qu’ils fassent du copier-coller sans imagination. Bien sûr, si vous comparez la musique actuelle, elle est très différente d’il y a 10 ans ou 20 ans ; et nous pourrions penser que ce n’est pas vraiment toujours de la musique mais qui peut en juger, c’est une histoire de goût. Les choses évoluent très vite et ne sont pas toujours faciles à comprendre. Je ne dirai jamais qu’un genre est meilleur qu’un autre. Ma nièce, par exemple, est une pro deejay. J’ai collaboré avec elle et j’ai dû comprendre ce style si bruyant ! J’ai passé plusieurs heures à travailler dessus et je pense finalement l’avoir assimilé. C’est aussi une question d’appréhension, mais bien sûr on ne vous demande pas de tout aimer, mais je suis persuadée qu’il y a une vraie recherche derrière chaque chose.

Vous tournez beaucoup en France ; est-ce parce que nous faisons les meilleurs crêpes ?
(Elle semble surprise puis rit aux éclats) En fait, je viens juste d’en manger une il y a une heure. Oui c’est à cause des crêpes mais pour un tas d’autres choses aussi ; j’adore visiter la France et tout particulièrement Paris, je veux dire tous nos shows à Paris jusqu’à présent, ont été très spéciaux. Le public est vraiment formidable, c’est mon point de vue bien sûr, et je ne dis pas cela pour chaque ville. On adore jouer ici, revenir et jouer de nouveau

10 années d’existence ! Où te vois-tu dans 10 ans ?
Ah (les yeux au ciel), peut-être 5 autres albums et beaucoup de tournées ; personnellement j’adorerais avoir d’autres projets musicaux aussi bons. Je pense à tout cela et j’espère si cela est possible, pouvoir aussi terminer mes études.

C’est tout le bien que nous souhaitons à cette jeune artiste, souriante et disponible ; nous la retrouverons début Mai sur les planches de L’Alhambra ; auparavant Charlotte aura goûté aux plaisirs de son week-end Parisien et pourquoi pas à quelques crêpes bien méritées.


Le site officiel : www.delain.nl