Interview faite par Aurélie P. Lawless à Paris.

6h33 est clairement ce que l'on pourrait considérer comme un OVNI musical. Véritable matériau forgé d'éléments composites, l'ensemble de "Deadly Scenes" est néanmoins aussi solide que de l'acier trempé. Pour les moins farouches et fermés d'esprit d'entre nous, l'album risque très probablement de trouver un écho plus que favorable. Nico, guitariste du groupe, lève le voile sur les mystères enveloppant ce nouvel album.

La pochette de l'album a de quoi susciter la désapprobation des plus purs d'entre nous si j'ose dire. Qui a manigancé tout cela ?

Nico : Alors, c'est une décision un petit peu collective. On s'est posé une question : est-ce que l'humain naît mauvais ou il le devient ? Ce gamin dans le berceau qui tend la main pour attraper tous ces éléments qui représentent les péchés et la tentation : est-ce qu'il tend la main car il est tenté ou parce qu'il est mauvais et qu'il est naturellement attiré vers le péché ? Voilà, en gros !

Je ne te cache pas qu'un détail a retenu mon attention et provoqué mon amusement. En effet, parmi les objets autour du berceau : flingue, couteau, et autres dangerosités, il y a aussi un soutien-gorge... Serait-ce donc l'arme la plus offensive parmi le panel proposé ?
(rires) Parfaitement ! C'est comme dans la musique en plus, il y a plusieurs couleurs...

Ah oui d'accord... Bon eh bien je retiens cette info de premier ordre pour cette interview ! Je pense que ce sera la phrase-clé. Merci de ton soutien (c'est le cas de le dire !), j'ai toutes les infos qu'il me faut désormais, bonne journée ! (rires)
Merci à toi, bonne journée ! (rires)

Bon après ce mini-interlude, revenons en à nos moutons. Dirais-tu que l'identité "visuelle" véhiculée par un groupe est aussi important que sa musique ?
Oui je pense qu'il y a vraiment un lien, ou du moins qu'il en faut un entre les deux. Surtout que, je ne sais pas quel âge tu as, mais je suis, disons, "de la vieille école", en quelque sorte. Enfin. Tout ça pour dire que j'ai commencé par écouter de la musique avec des vinyles puis j'ai acheté des CDs... On ne découvrait pas tout sur internet. Le CD, tu découvrais le livret avec et tu avais ce lien justement. Puisqu'au final tu te faisais une image à travers ce-dit livret... Donc pour moi ça a toujours été lié. Je ne comprends pas qu'aujourd'hui on puisse avoir un fichier MP3 sans même savoir la gueule qu'a la pochette, selon moi ça n'a pas de charme, je trouve qu'il manque quelque chose. C'est comme quand tu achètes un DVD par exemple et imagine t'as pas la jaquette ? Bah c'est pareil, la jaquette est là pour représenter le film, si elle est pourrie, ça te donne pas envie de regarder le film !



Vous n'avez jamais eu envie de faire quelque chose d'un peu plus... Disons, "grand public" ou "immédiat" en termes de compositions ?
Si, parfois. Je pense qu'il y a un petit peu de tout dans "Deadly Scenes" et dans ce qu'on a fait avant. Il y a toujours un morceau, voire deux, qui sont un peu plus accessibles. Au sens où ils s'appuient un peu plus sur une structure attendue, type "couplet-refrain-couplet-refrain". On essaye donc de faire un mix avec des morceaux plus conceptuels d'autres plus faciles à accrocher. Mais faire un album style "rock'n'roll" et tout, ça on n'y arriverait pas je pense ! On aime bien parce que c'est immédiat, c'est sympa, c'est marrant, sur scène c'est cool, mais ce n'est clairement pas notre domaine d'expertise. On n'arrive pas à prendre totalement notre pied avec ça, il faut qu'on expérimente des trucs, notre came c'est plutôt ça !

J'ai envie de te poser une question un peu pénible, à quelle "scène" le groupe appartient ?
Eh bien je dirais... Que c'est de la fusion. Que le groupe c'est de la fusion. C'est-à-dire qu'on nous dit souvent "on arrive à vous programmer à la fois partout et nulle part". Donc parfois on se retrouve à jouer dans des festivals de grind ou de black metal, et aussi bien ouvrir pour Shaka Ponk ou Devin Townsend. Si le mec a un coup de cœur pour nous il nous programme sans trop faire attention si on matche ou pas avec les autres groupes... Et la plupart du temps, on ne matche pas d'ailleurs ! On utilise tellement de genres... Mais on fait ça de manière naturelle, on se torture pas le cerveau. Personnellement j'écoute du metal depuis des années, mais j'écoute énormément de choses à côté ! On mélange pas mal de funk, parfois du classique, et on nous a déjà signalés qu'il y avait quelques "pointes" Tim Burtonesques (le beau néologisme ! Ndlr) sur certains passages... Ca doit être dû au côté théâtral qu'on assume pleinement !

La dernière chanson s'intitulant "Deadly Scenes" tout comme l'album, semble fonctionner comme un show TV à l'américaine faisant l'apologie de la violence. J'imagine qu'un message satyrique se tient en embuscade à travers cette composition ?
Oui évidemment, très gros message satyrique ici. J'imagine par exemple un père qui va raconter une histoire à ses gamins sur fond de "Vous aimez les histoires violentes ?" et les gamins répondent "Ouiii" en choeur. Ce long morceau de 13 minutes peut actuellement être découpé en 3 mini-parties où chaque partie narre l'histoire d'une personne qui va se retrouver dans une certaine situation et devra faire un choix. Et le chant pourra aussi être séparé en deux. Ces trois scénettes mettent en scène des personnes donc, mais ce n'est pas tant l'histoire qui aura un intérêt... Plutôt ce combat que chaque personne a, tiraillé entre sa bonne et sa mauvaise conscience. Ca donne un petit côté schizophrène à cette chanson ! Puisque les voix se disputent entre elles... Comme dans un dessin animé, où les deux se cognent dessus !

Tu n'as pas peur justement avec des morceaux de 13 minutes de faire pâlir les groupes de "prog'" ou de "stoner" avoisinant ?
(rires) A la base les groupes que j'écoutais étant plus jeune, ce sont tous des groupes de prog' ! Donc j'ai un amour du prog' depuis des années, Pink Floyd, tout ça... Pour moi ces longs morceaux sont ceux où je m'amuse le plus au final !



L'épreuve de la scène se passe-t-elle sans encombre dans ce cas précis ? Le public parvient-il à suivre ? Je pense notamment au cadre d'un festival, où l'audience n'est pas forcément familière avec tous les horizons musicaux...
C'est assez difficile pour ne rien te cacher. Il y a énormément de jeux de voix déjà, et même, je chante dedans alors que je n'ai pas l'habitude de chanter... Après on a déjà eu des compos toutes aussi longues sur des albums précédents que nous sommes parvenus à jouer en concert ! Donc ce n'est pas impossible qu'on en fasse de même avec cette chanson précisément. Mais je pense que dans ce cas je laisserai le chant à quelqu'un d'autre. En ce qui concerne le public, quand il connaît le morceau, 13 minutes, c'est de la rigolade. Dans un festival ça dépend ! On s'arrange toujours pour qu'au sein-même du morceau il y ait une petite coupure. Ca fait effet de "morceau dans le morceau" donc les gens se demandent "mais... Ils ont changé de morceau là ou pas ?", ils sont certes un peu perdus mais ils essayent d'accrocher le truc ! (rires)

Je t'avouerai que parfois une "petite pause" est la bienvenue dans ces cas-là. Après faut pas abuser des bonnes choses. Par exemple, j'ai été voir Slash & Myles Kennedy au Zénith, et le mec au chapeau nous a fait un solo de 30 minutes, montre en main. T'avais les 2/3 du public à l'agonie quoi...
Sérieux ? Ah ça me rappelle le gars de Black Label Society (Zakk Wylde ! Ndlr) qui nous avait fait ça aussi à un Hellfest... Et pourtant je suis gratteux... Mais après il y a solo et solo, si tu fais ton truc tout seul dans ton coin, ça n'a aucun intérêt selon moi (rires) !

Si tu avais l'occasion de reprendre un standard de la musique, comme une chanson de Patrick Sébastien, là, comme ça, quel serait-il ?
Alors, ne plaisante pas trop parce qu'on a beaucoup d'humour et ça pourrait être totalement dans nos cordes ! Sinon, je ne sais pas si vous connaissez Diablo (le jeu vidéo, ndlr) mais on a repris une chanson d'un des tous premiers jeux sur PC et c'était super sympa ! Ce qu'on aime particulièrement dans les reprises, c'est reprendre des trucs qui ont rien à foutre là en fait (rires) ! Des morceaux qui s'éloignent totalement du metal, le plus possible... Ca n'a pas vraiment d'intérêt de reprendre un morceau déjà metal à la base.

Cette interview s'achève je le crains. Quelque chose que l'on pourrait vous souhaiter en particulier ?
Oui pourquoi pas : faire des tournées sympa, gagner un peu de sous histoire de rentrer dans nos frais. Avoir de la drogue et des femmes, tout ça ! (rires)


Le site officiel : www.633theband.com