Interview faite par Byclown à Paris.

Bonjour, c’est votre première interview pour french-metal.com donc j’ai pas mal de questions à vous poser mais avant de commencer, merci de vous présenter et de présenter votre groupe.
Nico (guitare / programmation) : Salut moi c’est Nico, je suis guitariste dans le groupe et je m’occupe aussi de la programmation. Concernant le groupe, et cette alliance, que dire… On a sorti notre premier album en 2011 et peu de temps après notre chanteur est parti. Du coup on en a profité pour pouvoir retravailler avec Arno certains morceaux (Arno ayant participé sur un morceau du premier album) ainsi qu’avec Guillaume, le chanteur de Scarve. Pour le coup, fort de cette "panne de chanteur", on en a profité pour carrément faire un EP avec Arno, et c’est d’ailleurs à cette époque que nous avons rencontré notre chanteur actuel Rorchar. L’EP s’est tellement bien passé qu’on est carrément parti sur un album, celui qui sort actuellement, avec 90% du chant assuré par Arno et 10% par Rorchar, notre nouveau chanteur officiel.

Pour cet EP, vous avez utilisé de "l’ancien matériel" qui était normalement réservé à l’ancien chanteur ou alors tous les morceaux étaient-ils neufs ?
Nico : Sur les 3 morceaux de l’EP, seul un morceau avait été fait avant l’arrivée d’Arno, mais rien n’avait été fait au niveau des paroles. Pour les deux autres morceaux, rien n’avait été fait du tout, on est donc parti de zéro pour cette collaboration.

Bien, tout dites-moi quand et comment est né le groupe. Pourquoi avoir choisi ce nom ?
Nico : (sourire) J’ai toujours un peu honte de le raconter mais enfin bon, ça fait partie de l’histoire du groupe. On a fondé le groupe à trois lors d’une soirée de zicos bien trop arrosée. J’étais avec deux potes dont un de longue date et on parlait musique tout en vidant des verres, et, inévitablement, a un moment on s’est dit qu’il fallait qu’on fasse un groupe ensemble, histoire de jouer du "n’importe quoi". Une fois l’accord passé, toujours à cette même soirée, et encore plus enivrés, on a essayé de trouver le nom du groupe, et comme tu le sais, c’est toujours le truc le plus dur de la terre à faire ! L’un de nous a levé la tête pour réfléchir et a regardé l’heure, perdu dans ses pensées. Il était 6:33 et c’est comme ça que le nom du groupe est né ! Le lendemain, après avoir sérieusement décuvé, on s’est rappelé et on a décidé de conserver ce nom de groupe étranger. Voilà tu sais tout.

(Arrivée discrète dArno Strobl)

A l‘image de votre nom de groupe plutôt singulier, votre musique est elle aussi plutôt singulière et riche de pas mal d’influences différentes. Dites m’en plus sur vos influences musicales.
Nico : Y'a un peu de tout, mais il est vrai que certaines influences ressortent plus que d’autre dans notre musique, comme Devin Townsend par exemple. Il y a un gros côté "musique de film" car pour ma part je suis un grand fan de Elfman et de Morricone. Je pense que ce sont les influences qui ressortent le plus dans notre musique.
Arno : Me concernant cela va du jazz au death metal. J’écoute autant John Coltrane que Napalm Death. Tout a une influence sur ma façon de chanter.
Nico : Dans cet album on a vraiment voulu mettre toutes nos influences. Je pense que le seul truc qu’il n’y a pas sur l’album c’est du trip hop, des trucs calmes.
Arno : J’écoute beaucoup de hip hop, et on n’en retrouve pas dans l’album, à cause de Nico qui déteste ça. (rires) Sans lui je pense qu’il y en aurait dans l’album.
Nico : Je me rappelle un jour tu es venu et tu as sorti un truc "Et si on faisait un petit passage à la Wu Tang ?". Euh non en fait. (rires)
Arno : C’est vrai que j’aime le hip hop, mais Nico n’aime pas ça. On a vraiment essayé de conjuguer toutes nos influences. J’ai même essayé de pousser un peu dans le chant grindcore mais je me suis fait stopper par Nico et Manu.

Bien, nous sommes ici pour parler de "The Stench From The Swelling" qui est votre premier album avec 6:33. Le premier EP "Giggles, Garlands & Gallows" a été unanimement salué par la critique. Face à tant de bons sentiments, vous êtes-vous mis encore plus de pression quant à la sortie de l’album complet ?
Nico : On a eu une petite pression une fois l’album fini. On a eu le nez dedans pendant longtemps, du coup on a perdu les repères et le discernement nécessaire, on n’a pas pris assez de recul, et il y a des moments, je me souviens où on se regardait en se demandant "Tu le trouves aussi bien que l’EP ?". On essayait de se rassurer mutuellement.
Arno : À mon niveau je n’ai jamais eu aucun doute. Je trouvais les 3 titres de l’EP énormes, et quand j’ai écouté les 4 titres qui allaient compléter l’album, je n’ai eu absolument aucun doute. Ca fait prétentieux de dire ça mais je pense que là on a sorti un album vraiment énorme.

D’ailleurs, en parlant musique, vous êtes bien conscients que catégoriser votre musique relève du casse-tête chinois tant tous les morceaux vont dans tous les sens ? Comment définiriez-vous votre musique ? Plutôt rock ? Plutôt metal ?
Arno : Les deux je pense.
Nico : Oui clairement.
Arno : Funk, variété... D’un titre à l’autre ça peut prendre une tournure vraiment différente !
Nico : J’ai compris que notre album avait quelques passages rock lorsque je l’ai fait écouter à mon père et qu’il m’a sorti "J’aime bien CERTAINS passages". (rires)
Arno : A mon sens, cette diversité c’est ce qui rend la chose intéressante et enrichissante car ça nous permet d’avoir l’aval des métalleux, comme des rockeurs, comme des gens qui écoutent d’autre styles de musique.



Est-ce la direction que vous vouliez prendre dès le départ avec cet album ou est-ce juste le fruit de votre travail en commun qui a donné un résultat aussi décousu ?
Nico : Tout d’abord il faut savoir que, musicalement parlant, je fais à peu près 90% de la compo. Heureusement, ou malheureusement d’ailleurs, c’est un mode de fonctionnement qu’on a eu dès le début du groupe. Je dis malheureusement car pour moi c’est clairement une période solitaire. Concernant la manière de composer, je ne m’interdit rien. Je peux me dire "Ok là je vais faire un morceau couplet / refrain  basique", mais lorsque je ne décide pas ça, je commence l’écriture d’un son et je ne sais absolument pas où ça va mener, ce qui a d’abord été le cas avec le 3 titres. Le morceau part et va où il veut, je laisse aller, et c’est moi qui décide quand arrêter, lorsque je sens que tout a été dit dans la chanson. Souvent je regarde le compteur et je vois marqué 10 minutes et je me dis "Merde, encore !!" (rires)

Voilà bien un truc qui ferait réagir Barney, de Napalm Death, qui aime à dire "Pourquoi faire un truc en 5 minutes lorsque je peux le faire en une minute ?". Mais bon, c’est juste pour l’anecdote car vous ne faites pas le même style de musique.
Arno : Oui c’est sûr, maintenant, malgré la longueur de nos morceaux, je ne pense pas qu’il y ait de "redites" dans l’album. Je ne pense pas qu’il y ait de "longueurs"  dans le disque. Je pense que tu peux l’écouter du début à la fin sans te faire chier. Y'a pas de passages où tu te dis "Ca on l’a déjà entendu deux fois, fait chier". C’est un challenge réussi, même sur des morceaux de 10 minutes.
Nico : Toute proportion gardée et sans aucune arrogance, on peut dire que notre musique est un peu prog…

En même temps, chacun sa définition du prog, certains diront qu’Opeth est du prog…
Arno : Oui exactement, et Opeth est un bon exemple, mais ce groupe, au même titre que Dream Theater se répète dans les morceaux. Il serait dur de trouver dans leur discographie un morceau avec chaque plan ou chaque riff répété une seule fois, généralement les riffs reviennent souvent dans leurs morceaux de 10 minutes. Cela n’est pas le cas avec l’album de 6:33. Même dans des pièces de musique qui ne sont pas des chansons car elles durent 10 minutes, il y a plusieurs chansons à l’intérieur, avec des refrains, des choses qui se retiennent… Je suis très attaché à l’idée de chanson. J’ai 41 ans, j’ai été élevé aux chansons couplets / refrains à outrance et c’est vrai que je retrouve ça même dans nos morceaux de 10 minutes où tu peux retrouver des lignes de voix, des choses que tu vas retenir tout de suite.

Tout à l’heure je disais que vos morceaux paraissaient décousus alors qu’en réalité ils sont sur-cousus, avec un grand souci du détail et une vraie cohérence. Maintenant il est clair que des gens qui n’écouteraient pas du prog, par exemple, qui seraient perdus en écoutant du Dream Theater, seraient clairement désappointés en écoutant votre musique.
Nico : Justement, c’est ce qu’on essaye de susciter comme émotions, comme interrogations auprès des gens. Ca part dans tous les sens sur ce type de long morceau, mais il est vrai qu’il doit y avoir une réelle cohérence, un fil rouge.
Arno : Sur les deux "GGG", qui sont les deux morceaux de la fin d’album, et qui sont d’ailleurs les deux morceaux les plus longs de l’album, il ne faut pas oublier qu’ils racontent une histoire, et que la musique et les sentiments des paroles vont de pair. Lorsque dans l’histoire, on parle d’une poursuite, la musique elle aussi fait penser à une poursuite.

Combien de temps mettez-vous en général pour composer une chanson ?
Nico : C’est très variable. Ca peut prendre un mois, et a contrario, je peux m’arrêter de bosser sur le morceau pendant un mois et revenir dessus après. Les premières compos, initialement de "GGG" ont été commencées bien avant qu’Arno n’arrive. Apres j’ai énormément galéré sur certains morceaux… c’est assez dur de quantifier tout ça. Tout dépend du temps pendant lequel je décide me couper du monde.

Et du coup, puisque tu composes toute la musique, est ce toi aussi qui compose les parties de batterie ?
Nico : Sur le premier album, j’ai fait la batterie moi-même et c’’est bien un truc que je regrette car je ne suis absolument pas batteur. Sur le second album c’est Emmanuel qui a composé la batterie.



En parlant de live, j’ai eu l’occasion de vous voir au Paris Metal France Festival, sans batteur. Qu’en est-il de ce souci de batteur ?
Arno : C’est voulu, on n’a pas de batteur dans le groupe, c’est juste de la batterie programmée. Vu le type de musique qu’on joue, c’est super dur de trouver un mec ultra motivé pour jouer avec un métronome dans l’oreille, et puis il y a tellement d’éléments, de programmation, qu’il faudrait vraiment que le mec ait une manière de jouer spéciale.

Quels sont les thèmes que vous abordez dans vos chansons ?
Arno : Ce sont des choses assez personnelles… C’est difficile de rentrer dans les détails. On a tous, Nico comme moi, passé des périodes difficiles durant la réalisation de l’album. Nico a écrit "I Like It" qui contrairement aux apparences est loin d’être un titre joyeux, j’ai écrit le titre éponyme de l’album, et aussi d’autres titres super perso qui sont de grosses métaphores. Flo a écrit "Burning". Y'a pas réellement de lignes directrices à part les deux "GGG". J’ai justement eu envie que l’on rajoute sous le titre de l’album "A True Story", justement pour le côté personnel de certains textes. Je n’avais pas non plus envie qu’on assimile 6:33 à un groupe "rigolo". Evidemment, de par certains aspects, ce qu’on fait est rigolo, je parle là de certaines mélodies, de certains changements rythmiques, mais au niveau de l’esprit, on est loin de groupes comme Ultra Vomit ou Gronibar, qui sont par ailleurs des groupes que j’adore et qui sont pour nous de supers potes. C’était important pour nous que le groupe soit pris au "sérieux" par les gens.

Et du coup, les paroles ont été écrites après ou pendant l’écriture de la musique ?
Arno : Après. J’ai toujours fonctionné comme ça, depuis des années et quelque soit le groupe avec qui j’ai pu collaborer. Tu me donnes une musique et je mets des textes dessus. Des fois y’a un vers en trop, bon bah je l’enlève !
Nico : Les seules choses que je t’ai entendu dire c’est "Tu peux rallonger cette partie ?". C’est vraiment la seule doléance que tu as eu concernant l’adaptation de la musique par rapport à tes textes.
Arno : Ce qui était vraiment rarissime. Perso j’ai toujours bossé comme ça donc ça me choque pas.

En écoutant votre musique je ne peux m’empêcher de penser que vous vous accorderiez bien avec Christophe Godin et Ron Thal. Vous êtes d’accord avec ça ?
Nico : Tu n’es pas le premier à nous le dire et tu as totalement raison. Déjà Christophe Godin me fait trop rire ! Ensuite, en tant que guitariste je ne peux que m’incliner devant lui tellement il est fort. J’ai tous ces albums, que ce soit avec Gnô, Morglbl, Metal Kartoon.
Arno : Perso, je ne connais que "Uncoo l" de Bumblefoot et c’est un album que j’adore. Christophe est devenu un pote récemment et il n’est pas impossible que nous fassions quelque chose ensemble…

Parlez-moi un peu des dates qui vont venir accompagner la sortie de cet album ?
Arno : Alors il y a le 2, le 6, le 24…
Nico : (rires) Mais n’importe quoi !! Le pire c’est que dans le tas y’a une date qui est bonne alors je commençais à douter ! Alors il y a le 11 Mai à Lille, sans Arno, et à la rentrée, le 7 Septembre à Saint Nazaire pour un festival.

Un autre clip en préparation ?
Nico : On est en train de bucher sur "Burning" pour le moment mais rien de sûr.

Un groupe dont vous aimeriez faire la première partie ?
Nico : Perso j’ai fait Devin Towsend et c’était trop bon ! C’était le mec pour qui je voulais ouvrir !
Arno : Electric Light Orchestra, ou Chicago.

Le mot de la fin ?
Arno : (Epanadyplose) (Ndlr : Je ne sais pas ce que veut dire le mot, mais l’usage des parenthèses est un running gag entre Arno et Nico. Celui-ci confond toujours les guillemets et les parenthèses)


Le site officiel : www.facebook.com/6h33official