La review

TAAKE + BÖLZER + ONE TAIL, ONE HEAD + ORKAN
Le Petit Bain - Paris
11/10/18


Review rédigée par Matthieu


Le black metal est à l’honneur ce soir au Petit Bain, puisque TAAKE est venu répandre son blasphème, accompagné de BÖLZER, ONE TAIL, ONE HEAD pour leur dernière tournée, ainsi qu’ORKAN qui aura la lourde charge d’ouvrir ce plateau. L’entrée se déroule dans le calme, mais la fosse est étrangement vide.



C’est donc devant un parterre d’une trentaine de personnes à peine qu’ORKAN entre en scène. Presque invisible, Rune Nesse (batterie) nous offre un blast très propre alors que devant nous, Einar Fjelldal (chant) nous fixe d’un regard froid sous sa capuche. Son chant, très propre, même pour du black metal, permet à Sindre (basse) et Gjermund Fredheim (guitare) d’aligner des riffs tout aussi malsains qu’atmosphériques. L’ambiance sombre ne redescendra pas entre les titres, puisque le chanteur ne s’adresse que peu à nous entre deux poses très théâtrales et presque miséreuses mais qui décrivent à la perfection la noirceur des rythmiques du groupe. De leur côté, les musiciens ne sont pas en reste, puisque le bassiste enchaîne les poses charismatiques alors que le guitariste headbangue à chaque coup de médiator. Bien trop rapidement, Einar hurle "Paris, it’s the last song for us !" avant de retirer sa capuche, puis finalement son t-shirt, avant de revenir sur le devant de la scène avec… un invité surprise que je n’ai pas réussi à identifier. Quoi qu’il en soit, ce dernier titre marquera définitivement les esprits, et je ne peux que vous conseiller de vous ruer à un live d’ORKAN si vous le pouvez.



Changement radical d’ambiance lorsque ONE TAIL, ONE HEAD entre en scène, puisque j’ai à peine le temps d’admirer le maquillage à la fois grossier mais également très morbide des musiciens (chacun arborant une trace rouge sur le front à la manière d’une blessure d’arme à feu), que je me prends le premier coup dans le dos de la soirée. En effet, les fans du groupes ont décidé de profiter de leur dernière tournée pour retourner le pit de manière totalement désordonnée, voire parfois irrespectueuse du reste de la fosse, au grand dam des premiers rangs, ainsi que du reste des spectateurs. Sur scène, ⷚ (batterie) matraque ses fûts sur la rythmique black teintée de punk qu’envoient Åsli (guitare) et Andras Marquis T. (basse). Au centre, Luctus (chant) harangue la foule, les incitant à de plus en plus de violence entre deux hurlements. Si le guitariste et le chanteur se placent très souvent sur les retours, au plus près de la fosse, le bassiste recule afin de créer un son de plus en plus sale avec la résonnance de son ampli. Pendant que la fosse hurle les paroles tout en se déchaînant dans la fosse, le chanteur repousse calmement les objectifs pointés sur lui lorsqu’il en voit, mais n’hésite pas à fixer les premiers rangs de son regard à glacer le sang, ou à poser une main sur une tête qui ne headbangue pas, tout en plaçant son pied de micro sur les retours. Le show se poursuit dans la haine et la violence, alors que le guitariste pousse également quelques hurlements. Soudain, Luctus s’écrie "Paris, it's the last song we will ever play in this city", et il n’en fallait pas moins aux moshers pour continuer leur cirque de manière beaucoup plus violente sur le dernier titre avant de quitter la scène.

Setlist : "In the Golden Light", "Arrival, Yet Again" "Worlds Open, Worlds Collide", "Passage", "One Tail, One Head", "Instrumental", "Rise In Red", "The Splendour Of The Trident Tyger", "Firebirds".



A nouveau, l’atmosphère va radicalement changer, puisque c’est le duo suisse BÖLZER qui va entrer en scène. Cette fois-ci pas de maquillage, c’est sans aucun artifice que HzR (batterie) prend place derrière son kit, suivi par KzR (guitare 0 /chant) qui se place derrière son pied de micro avec son instrument à la main. Et rapidement, un épais rideau bleu (qui se dissipera peu à peu au fur et à mesure du set) se met en place, nous faisant apercevoir des silhouettes. Mais cette imposante silhouette devant nous dispose également d’un énorme pédalier d’effets, qui lui permet d’allier aux blasts de son partenaire un son parfois imposant, parfois plus aérien, mais toujours ardemment maîtrisé grâce à son instrument hors norme. L’homme alterne également avec une facilité déconcertante un scream puissant et incisif avec une voix claire épique et enchanteresse. Les premiers rangs ne peuvent se retenir de headbanguer, tandis que le pit s’est évidemment calmé devant le black / death contemplatif du duo. Bien que peu communicatif, le chanteur nous lancera un "Paris, how are you ?" avant d’entamer un autre titre. Se reculant parfois pour headbanguer loin de son micro le temps d’aligner quelques harmoniques et de nous laisser entrevoir son visage, KzR revient vite sur le devant de la scène pour jouer avec ses effets. Absorbé par ces hypnotiques rythmiques, je ne pensais pas que le show se terminerait si rapidement, mais les deux gaillards quittent la scène sous les applaudissements.

Setlist : "Steppes", "Zeus", "Seducer Of Hearts", "The Archer", "Hero", "Phosphor", "C.M.E.", "Chlorophyllia".



A nouveau, les techniciens s’activent sur la scène, puisque c’est bientôt au tour de TAAKE de divertir le public parisien. Alors que les lumières s’éteignent, la fosse se fait plus compacte et les musiciens entrent en scène. A la batterie, Brodd arbore un maquillage clairement différent du corpse paint de ses camarades, mais qui lui donne un air menaçant. Gjermund Fredheim, Aindaichai (guitares) et V’gandr (basse) entament alors une rythmique lente, mais c’est lorsqu’Hoest (chant) apparaît que le concert ne commence réellement.
Si le premier titre ne fait que peu réagir les spectateurs, un féroce "Paris !" agitera d’un seul coup la fosse, pendant que le frontman se penchera dans la fosse pour hurler. Il ne faudra que peu de temps à un slammeur pour rejoindre la scène, et encore moins de temps pour que celui-ci ne soit gentiment expulsé par le pied de micro du chanteur. "Everytime Paris is the best audience of the tour. We stay up there, you stay down there, or people will be hurt…" lance Hoest, visiblement excédé de ce comportement. Cela ne l’empêchera pas de tendre régulièrement le micro aux fans, dont certains connaissent visiblement les paroles. Totalement déchaîné, le chanteur se frappe le torse puis le crâne avec son micro. Du sang ruisselle de son front, se mêlant à son corpse paint et à ses terrifiantes lentilles opaques, terrifiant certains fans, mais la performance scénique de l’homme est magistrale. Ne s’arrêtant que de courts instants pour boire du cidre ou le contenu d’un gobelet, l’homme revient rapidement grimacer à quelques centimètres du public, avant de jouer avec ses musiciens, passant un bras sur leurs épaules puis les faisant même parfois chanter avant d’observer la fosse avec un rictus cruel. Tous plus charismatiques les uns que les autres, les musiciens attirent également les regards en headbanguant et jouant un peu avec le public, mais tous les regards sont tournés vers Hoest, qui a transformé la scène en scène de crime en faisant goutter de son sang sur le sol. Chaque pause entre les morceaux lui donne l’occasion de souffler un peu avant de repartir dans sa folie, et si son air de possédé peut effrayer, il sied également à merveille à la musique parfois mélancolique mais toujours brutale du groupe. "We just have one more, because you people set fire to eden !" hurle-t-il avant de débuter un autre titre, tout aussi violent, et qui déclenchera de nombreux mouvements de foule. Malheureusement victime d’un problème de son avec son instrument, Gjermund Fredheim part réquisitionner la guitare de remplacement de son collègue afin de terminer ce morceau avec brio.
Le groupe sort alors de scène, puis revient pour nous jouer "Myr", sur lequel Aindaichai se lancera dans un solo de banjo, contrastant avec le black metal torturé du groupe. Les Norvégiens prolongeront tout de même un peu la dernière composition avant de partir sobrement de scène. L’outro samplée fait espérer les spectateurs, mais non, le groupe ne reviendra pas.

Setlist : "Jernhaand", "Havet I Huset", "Orm", "Fra Vadested Til Vaandesmed", "Nordbundet", "Du Ville Ville Vestland", "Umenneske", "Hordalands Doedskvad 1", "Nattestid Ser Porten Vid, Part I", "Myr".

La soirée fut intense. Si je ne m’attendais absolument pas à une telle violence lors du set de ONE TAIL, ONE HEAD, le groupe a été d’une efficacité remarquable ! Si ORKAN et BÖLZER, de par leur univers plus planant, n’ont pas eu le même accueil, TAAKE a également déchaîné le bateau ce soir, et c’est épuisé mais heureux que je regagne mes pénates franciliennes. Je dirais bien que Garmonbozia a du flair pour proposer des affiches de qualité, mais ça vous le savez déjà !