La review

SKÁLMÖLD + HYPOCRAS + DRAKWALD
Le Monastère Royal De Brou - Bourg-en-Bresse (01)
14/05/2016


Review rédigée par Carcharoth


Après nous avoir proposé l'été dernier un merveilleux Ragnard Rock Festival (Simandre-sur-Surdan), la très sympathique équipe de la Compagnie d'Edoras nous propose ce soir un concert en tout point exceptionnel étant donné que, dans le cadre de "Bas les Masques", événement culturel de la ville de Bourg-en-Bresse, c'est bien les murs du cloître du Monastère Royal de Brou que les Islandais de SKÁLMÖLD vont venir faire trembler ! A noter que l'association n'est pas seule à l'origine de cette démarche, le conservateur du monument étant lui aussi très actif pour permettre cette rencontre improbable entre un lieu autant historique que religieux et une culture metal, viking et païenne qui pourrait faire hérisser bien des poils. Pour l'occasion, les Loups de Fenrir, compagnie de reconstitution de combats historiques, ont fait le déplacement, de même que DRAKWALD venu de Tours et HYPOCRAS tout droit arrivé de Genève. Connaissant la beauté du monastère pour y avoir travaillé il y a bien des années lors de sa restauration et ayant tout particulièrement apprécié la prestation de SKÁLMÖLD lors de la première édition du RRF, c'est donc avec une certaine fébrilité que me voilà devant les portes du cloître par un vent glacial tout droit venu du Nord...
C'est d'ailleurs avec une ponctualité rare que les fameuses portes vont s'ouvrir. Et ce qui m'a tout de suite frappé, c'est la politesse et le respect des metalleux présents ce soir lors de leur entrée dans le bâtiment. Quand on répète à longueur de temps que nous de sommes pas des barbares assoiffés de sang... Dommage que France 3 n'ait pas tourné son reportage à ce moment ! Une fois la porte franchie, on tombe dans le premier cloître où est installé le camp des Loups de Fenrir ainsi que quelques échoppes d'artisanat (cornes, cuir...) et un bar à Hypocras de fort bon aloi. Puis on passe dans le deuxième cloître pour y trouver le bar, le stand de merchandising ainsi que celui d'Adipocere, toujours fidèle au poste, mais surtout une superbe scène augurant d'un excellent concert, d'autant que maintenant, nous sommes à l’abri du vent et on peut enfin profiter de la douceur ambiante et de la magie des lieux ! Le décor est en place, les protagonistes s'échauffent, bref, place au spectacle...



C'est donc DRAKWALD qui va ouvrir le bal avec son pagan metal à tendance extrême, teinté d'influences autant death que black : tout pour me plaire ! Et autant le dire tout de suite, même si je ne connaissais pas le groupe avant, j'ai été tout bonnement séduit. Par les compositions bien sûr, par l'attitude, et aussi par le son, puissant et bien léché. Car c'était bien là la crainte de beaucoup d'entre nous : comment va donc sonner ce cloître dans le cadre d'un concert en plein air ? Eh bien nous pouvons saluer le travail des ingénieurs du son car le résultat dépassait ce soir toutes mes espérances ! De quoi profiter pleinement de chaque note et de la bonne énergie dégagée par DRAKWALD... Et même si le groupe ne déroge pas à certaines règles inhérentes au genre, les compositions guerrières, en particulier celles du nouvel album "Riven Earth", sont plutôt matures et bénéficient d'un excellent feeling et d'une énergie tout ce qu'il y a de plus communicative, à l'image des chœurs qu'on aimerait entonner avec eux. Ainsi, le public, même si encore clairsemé, va rapidement être conquis par les Tourangeaux, répondant dans la joie et la bonne humeur aux invectives de Thibaud, chanteur et bassiste hirsute de la formation. Ce dernier va même offrir au Monastère Royal de Brou son tout premier wall of death auquel participeront les Loups de Fenrir : mémorable ! Pour en revenir à la musique, le groupe a vraiment tout pour plaire : charisme, compositions accrocheuses, technique sans faille, et ils arrivent même avec beaucoup de réussite à intégrer cornemuse et flûte (irlandaise ?) dans un son déjà bien dense (respect au dénommé Bertrand). Ainsi, DRAKWALD sait être autant rapide et vindicatif que mid-tempo et épique, mais le groupe a aussi les armes en main pour faire danser le public : ça doit être ça le talent ! Bref, ce fut une bien belle découverte pour moi, et je n'ai pu m'empêcher d'acheter leur nouvel album sorti tout juste une semaine avant ! A noter que ce soir, le groupe n'avait pas son batteur habituel, remplacé par un certain Quentin qui déboîte sévère à l'image du petit tapis de double placé lors d'un petit interlude à la batterie...



Autant dire que le pari est risqué pour les tous jeunes HYPOCRAS s’appropriant maintenant la scène car pour briller ce soir, il va falloir être bon ! Heureusement pour eux, la nuit a commencé à se faire une place, et, contrairement à DRAKWALD, les "petits Suisses" (pour reprendre une blague du chanteur) vont bénéficier de lights très léchées, rendant les lieux encore plus magiques qu'auparavant. D'autant que le groupe a opté pour des peintures de guerre qui, même si elles ne sont pas très originales, rendent plutôt bien sur une scène éclairée... Là encore, on a affaire à un pagan metal à tendance extrême, mais le groupe semble bien jeune et manque cruellement du charisme de leurs prédécesseurs. Heureusement, la fougue de la jeunesse est au rendez-vous, mais il y a malgré tout quelques manquements évidents qui gâcheront un peu la fête... Déjà, il manque une deuxième guitare, car lorsque le guitariste part en solo, cela crée un vide que la basse ne parvient pas à combler. Ensuite, le batteur semblait par moments un peu à la peine et certains passages pouvaient alors paraître un peu brouillons et peu carrés, les cordes essayant tant bien que mal de se caler... Peut-être aussi quelques problèmes de retour, je ne saurais dire, n'étant certes pas à la place du groupe. Concernant les compositions, elles sont généralement assez bonnes, même si elles ne sont pas exemptes de quelques erreurs de jeunesse, et la flûte s'intègre plutôt bien à l'ensemble. HYPOCRAS aura quand même réussi à se mettre le public dans la poche car, malgré le côté un peu cliché du groupe, il reste assez facile d'accès pour un public d'humeur festive... Gageons qu'avec un peu plus d'expérience, les Genevois sauront à l'avenir nous proposer un show plus abouti ! Malgré tout, leur deuxième place sur l'affiche demeure pour moi un mystère, DRAKWALD méritant à mon humble avis bien plus de jouer avant SKÁLMÖLD... HYPOCRAS a en tout cas su jouer le rôle de groupe d'ouverture à merveille et tout le monde se trouve maintenant dans un excellent état d'esprit pour accueillir les Islandais, ce qui est bien l'essentiel !



Pendant que les tant attendus SKÁLMÖLD s'installent sur scène, les Loups de Fenrir auront l'occasion de nous faire quelques démonstrations de combats épiques, nous mettant dans de bonnes dispositions pour le début d'un final qui s'annonce grandiose. En effet, avec l'augmentation du niveau sonore, les pierres séculaires de l'édifice religieux ont dû trembler de toutes parts ! Bon, même si c'est la règle de laisser la tête d'affiche jouer plus fort, je ne suis pas toujours d'accord avec cette coutume. Peut-être aussi que cela venait de mon placement, face au guitariste Baldur et à côté des enceintes à la gauche de la scène, mais l'écoute du concert s'est en tout cas avérée moins agréable qu'auparavant... Mais qu'importe, en tant que connaisseur de l’œuvre des Islandais, il m'était aisé de reconnaître les morceaux et d'apprécier leur interprétation scénique.
Étonnamment, avec l'arrivée de SKÁLMÖLD, le froid a refait son apparition, Baldur apparaissant d'ailleurs de manière plutôt surprenante en t-shirt et avec des chaussettes aux pieds. Mais qu'importe, l'énergie des lieux autant que du public est telle que le t-shirt finira très vite par tomber, pour le plus grand plaisir de ces dames ! Afin de ravir un public déjà acquis à sa cause, le groupe proposera ce soir une playlist quasi parfaite faisant la part belle et égale à chacun de ses trois albums avec des morceaux comme "Gleipnir", "Loki" ou l'incontournable "Kvadning" pour finir le show en beauté. Le concert de ce soir m'aura aussi permis de redécouvrir "Með Vættum", leur dernier album en date qui m'avait un peu laissé sur ma faim, et il faut reconnaître que les morceaux passent plutôt bien sur scène. Et puis bon, SKÁLMÖLD est toujours absolument impérieux concernant l'aspect technique de leur musique, chaque musicien étant absolument parfait à son poste. Mais le pire, c'est qu'ils arrivent à être carrés et puissants tout en prenant un plaisir visible et communicatif sur scène ! Le jeu de scène est certes tout en sobriété, mais ce qui est vraiment plaisant, c'est de voir chaque membre sourire presque en permanence, jouant les uns avec les autres autant qu'avec le public qui ne demande que ça. Les Islandais étant en plein enregistrement de leur nouvel opus, je pense aussi que ça devait leur faire un bien fou de sortir un peu du studio et partir à la rencontre de leur public (le meilleur étant d'après eux en France) et d'un lieu d'exception (le plus bel endroit où il leur a été donné de jouer d'après leur chanteur Björgvin). Toujours est-il que d'excellentes compositions mélangeant metal extrême, heavy metal et légendes vikings islandaises, exécutées divinement et ce, dans la bonne humeur, font à coup sûr un excellent show qui je pense aura mis bien des étoiles dans les yeux du public présent ce soir !
Bien sûr, je me doute bien que tout le monde n'a pas aimé, mais au moins, le concert en lui-même ne souffre pratiquement aucune critique, d'autant que le Monastère apportait quelque part une aura plus que particulière à l’événement. Et il faut reconnaître à SKÁLMÖLD la capacité à jouer pour tous les goûts, du heavy métalleux old school à l'amateur de sensations fortes en passant par le viking qui sommeille en chacun de nous et qui sera touché par chaque passage un tant soit peu épique, à chaque fois mis en valeur par des chœurs irréprochables de justesse. Et quand on se rend compte que ce travail de titan a l'air aussi facile à réaliser, on ne peut que respecter les Islandais qui auront su à deux reprises maintenant laisser leur empreinte sur le public de l'Ain. Et en attendant de les revoir sur scène, j'espère sincèrement être agréablement surpris par ce nouvel album à venir... L'avenir me dira si je me suis bercé d'illusions ou pas ! Et pour les curieux, vous trouverez sur Facebook une petit vidéo du groupe testant a cappella l'acoustique de l'église l'après-midi même du concert : classe et spontané, j'adore !

C'est en tout cas sur ces notes d'espoir que se terminera la chronique de cette formidable soirée qui m'aura empli de joie autant que de sérénité... Sûrement l'aura magique dégagée par le splendide Monastère Royal de Brou ! Toujours est-il qu'après un festival unique en son genre, c'est un simple concert que la Compagnie d'Edoras aura su rendre magique et totalement à part, et pour un vieux de la vieille comme moi, c'est assez rare pour être souligné. Comme on pouvait s'y attendre, les métalleux ont une nouvelle fois fait preuve d'un total respect pour ceux présents dans le public ainsi que d'un professionnalisme sans faille pour ce qui est de l'orga ou des groupes. Le choc des cultures a donc eu lieu sans violence aucune, mais chacun aura pu rentrer chez lui avec des images plein la tête et le cœur léger. Espérons donc que par ces temps si troubles, un tel événement puisse à nouveau avoir lieu... Cette rencontre s'est en tout cas avérée être une véritable communion entre un genre musical et un lieu, le tout dans un état d'esprit festif empreint de légèreté... Comme s'il soufflait sur chacun comme la brise d'été qu'on ressent en festival. Finalement, cet événement en plein air apparaît comme le parfait warm-up lançant en quelque sorte la saison des festivals. Et c'est maintenant avec une impatience non dissimulée que je vais attendre la seconde édition du Ragnard Rock qui s'annonce d'ores et déjà dantesque !