La review

ENSLAVED + LOST IN KIEV + WOLVE
Le Trabendo - Paris
25/11/17


Review rédigée par Matthieu


Quoi de mieux pour accueillir les Norvégiens d’ENSLAVED que d’attendre au beau milieu d’une forêt ? En effet, le Trabendo est un peu perdu dans un bosquet au Nord de Paris, mais ce sont les Franciliens de WOLVE et LOST IN KIEV qui auront la lourde tâche de nous réveiller. Pour une fois, j’arrive presque au dernier moment devant la salle, et je constate que la file d’attente n’est pas à la hauteur du groupe. Le public parisien se serait-il réfugié au Zénith, tout proche ? Peut-être… En tout cas, les portes s’ouvrent, et je découvre avec joie un pit photo dans cette petite salle assez mal foutue (il faut le dire).



Alors que je m’installe devant ces barrières, qui ne sont même pas à un mètre de la scène, les musiciens de WOLVE prennent lentement place. Décrit comme un groupe de rock alternatif, le groupe propose une musique qui est à mon sens tout autre. Leur courte setlist (je n’arrive toujours pas à dire si c’est trois ou quatre morceaux) tend parfois vers un post-rock des plus planants, alors que certains passages sont clairement axés sur un rock indie / pop-rock des plus basiques. Le mélange, quoi qu’intéressant, ne prend pas dans le public. En effet, l’univers éloigné des Français réduits à une scène minuscule, du fait de la place occupée par les instruments de la tête d’affiche, peine à intéresser l’amateur de black metal, et ce n’est absolument pas la faute de Julien Sournac (chant / guitare) et sa bande, qui se démènent sur scène. Composé de Julien, un chanteur / guitariste calme et qui débute son concert avec un archet à la place d’un médiator, un batteur surdoué qui mène littéralement le show à la baguette en maîtrisant son instrument à la perfection, un bassiste qui semble évoluer uniquement dans un monde qui lui est propre en offrant des riffs de qualité ainsi que d’un guitariste/choriste, le quatuor distille sa musique sous un rideau de lumière et sans se soucier des retours d’une fosse presque vide, qui les applaudira chaleureusement à la fin de leur set, après un long larsen.



Les musiciens quittent la scène, mais sont rapidement remplacés par d’autres. A nouveau le rideau tombe sur la scène qu’occupe LOST IN KIEV, tantôt obscur, tantôt beaucoup trop lumineux, mais qui convient parfaitement à l’univers du groupe. Alors que Yoann frappe ses fûts comme un beau diable, les riffs de Maxime (guitare / synthé), Jean Christophe (basse / synthé) et Dimitri (guitare) résonnent dans la salle, qui s’est un peu remplie. Les riffs lointains et imposants sont accompagnés par des samples, qui remplacent un chant totalement absent des compositions. Ce détail ne freinera cependant pas mon entrée en force dans l’univers planant des quatre Français qui occupent toute la scène, encore une fois réduite par les instruments des maîtres de cérémonie. Côté setlist, ce sont quatre morceaux qui seront parfaitement interprétés par nos concitoyens, avec pour le dernier d’entre eux une apparition éclair de leur vendeur de t-shirts. J’ignore totalement qui est cet homme, mais sa voix colle parfaitement à l’univers sombre, pesant et atmosphérique des quatre Français, ce qui l’enrichit d’autant plus. Le voile de mystère qui entoure leur set ne se lèvera qu’au dernier moment, alors que le groupe quitte la scène, suivi par des applaudissements beaucoup plus chaleureux.



Le pit photo est désormais surpeuplé, et c’est sur un son qui frôle la perfection que les Norvégiens d’ENSLAVED débutent leur set après un très court moment. Débutant par un extrait de leur dernier album, "E", Ivar Bjørnson (guitare / choeurs), Grutle Kjellson (basse / chant), Arve Isdal (guitare) et Håkon Vinje (claviers / chant clair) hypnotisent un public qui préfère regarder le groupe plutôt qu’headbanguer sous les frappes massives de Cato Bekkevold (batterie). Les rythmiques progressives et flirtant avec le jazz côtoient le black metal atmosphérique du groupe, puis "Roots Of The Mountain" mettra tout le monde d’accord, en mêlant des rythmiques black metal pures avec des passages planants. Les choeurs jouent un rôle primordial dans la musique d’ENSLAVED, et le live leur rend hommage. Les vois d’Håkon, Ivar et Grutle se mêlent dans un mélange toujours contrôlé et qui pioche aléatoirement dans la discographie du groupe. Et c’est justement ce que je leur reprocherais. Le fait que Grutle parle énormément entre les titres est appréciable, osant parfois une petite blague comme lorsqu’il nous déclare qu’il adore Trust, mais les univers des titres sont parfois trop éloignés pour être réellement cohérents, et les riffs violents succèdent aux passages lents et techniques. Cependant, les musiciens assurent un show impeccable, en jouant entre eux, et lorsqu’ils quittent la scène, c’est très rapidement que Cato revient nous interpréter un solo de batterie qui sera observé par les autres membres, qui prennent place sur un retour. Lors du dernier titre, Arve se placera à la limite du public pour jouer une bonne partie de sa rythmique, ce qui stimulera la fosse (seul moment où le public osera faire un peu plus qu’applaudir timidement, déclenchant presque un pit digne de ce nom). Le groupe quitte alors la scène sous des hurlements de joie et un lancer de médiators rituel.

Setlist : "Storm Son", "Roots Of The Mountain", "Return To Yggdrasil", "The River's Mouth", "Convoys To Nothingness", "Vetrarnótt", "One Thousand Years Of Rain", "Sacred Horse".
Rappel : solo de batterie, "Allfoðr Oðinn", "Isa".

La cohérence de l’affiche est à revoir. Si les trois groupes ont été excellents, l’univers de WOLVE était éloigné de celui de LOST IN KIEV, qui était déjà à des lieues de celui d’ENSLAVED. Mais tous, connus et attendus ou non, ont assuré un show dans lequel ils se sont donnés à fond, ce qui est tout à leur honneur. Je quitte alors la salle rapidement, non sans un petit passage par le stand de merchandising (un t-shirt à 15€, ça ne se refuse pas), puis me heurte à la violence du froid de la nuit qui me ramène difficilement sur Terre. Ce n’était pas ma première expérience avec le groupe norvégien, et ce sera loin d’être ma dernière, vu la qualité scénique et sonore à laquelle nous avons eu droit ce soir !