"Omegon"
Note : 18/20
Renaissance de Wormed prévue pour 2024. Créé en 1998 en Espagne, le groupe connaît
un démarrage assez lent, puis se retrouve confronté au décès de son batteur en 2018. Cette
année et sous l’égide de Season Of Mist, qui les accompagne depuis quelques années
déjà, Phlegeton (chant, Altarage, Lifelost, Human Mincer), Guillemoth (basse, Human
Mincer), Migueloud (guitare, Human Mincer, ex-Cancer), V-Kazar (batterie, Bizarre,
Cancer, ex-Aposento) et D-Kazar (guitare) mettent à feu "Omegon", leur quatrième album.
"Automaton Virtulague" nous présente d’abord une introduction cybernétique avant de laisser
les musiciens déverser toute la violence dont ils sont capables dans une rythmique
saccadée et complexe. Les sonorités old school sont présentes, notamment au niveau du
chant et de la batterie, mais les guitares adoptent des patterns plus dissonants comme sur
"Pareidolia Robotica" où on constate l’extrême technicité des musiciens à diverses allures,
notamment sur les explosions dévastatrices. Quelques effets sont ajoutés par moments à la
voix, mais le groupe met également l’accent sur les vagues de fureur avant que "Protogod" ne
vienne prendre sa place pour nous ensevelir sous sa rythmique infernale d’où émergent
parfois quelques leads et breaks pesants. Le son disparaît dans le néant, puis est remplacé
par "Pleoverse Omninertia" et ses accents death progressif plus éthérés, rapidement
écrasés par la puissance brute, le sous-accordage et autre palm mutes étouffants avant de
laisser "Malignant Nexus" nous offrir un moment de ce qui s’apparente le plus à du répit
pendant quelques instants, puis la batterie revient de plus belle renforcer l’interlude.
On
passe à "Virtual Teratogenesis" qui revient dans les riffs épais mais travaillés, notamment
avec le batteur survolté qui n’hésite pas à déployer tout son talent tout en restant précis
avant que "Aetheric Transdimensionalization" ne vienne frapper et nous envoyer toute son
intensité en pleine face, non sans de nombreux changements de rythme. Le final spatial
nous conduit à "Gravitational Servo Matrix" où le matraquage reprend en alternance avec la
légèreté brumeuse pour finalement la rejoindre et la corrompre avant de nous laisser sur
"Omegon", le titre éponyme, et ses sept minutes et demie de dévastation méticuleuse où la
double pédale, les samples, les guitares ravageuses et les hurlements se rencontrent et
collaborent pour nous abandonner dans un trou noir.
Wormed nous offre un album surpuissant cette année, marquant son retour avec une pierre
en pleine face. "Omegon" n’hésite pas à piocher dans le chaos du death progressif pour
appuyer sa violence, mais il le fait bien.
"Krighsu"
Note : 19/20
Embarquement immédiat pour la quatrième dimension. Direction la Galaxie d'Andromède pour un voyage à la vitesse de la lumière dans le monde futuriste proposé par Wormed. Trois ans après "Exodromos", les Madrilènes produisent la suite logique sur cet excellent "Krighsu". On peut tout de suite noter un changement au niveau du line-up, avec l'arrivée de G-Calero à la batterie (Gennotype, The Bridal Procession, Cadaverized Ferocity). Pour le reste, on retrouve ce qu'il y a de mieux sur ce groupe de brutal death : Guillemoth à la basse (Wrong, Human Mincer, Apostles Of Perversion, Bloodoline), J. Oliver et Migueloud pour les guitares (Hybrid, Body On Sections) et surtout l'indémodable Phlegeton au chant (Banished From Inferno, Unsane Crisis, Human Mincer etc...). De quoi nous remplir les yeux d'étoiles plus rayonnantes encore qu'Alpha du Centaure, à l'image de cette sublime pochette futuriste ultra réussie et bien colorée.
Je ne sais même pas par où commencer, tant on en prend plein les neurones de tous les côtés. Avant d'entrer en détails dans l'aspect musical, je suis vraiment sidéré par le concept qu'il y a autour. Cela va jusque dans leurs lyrics, qui tournent autour de l'astronomie, la science en général, la biologie et j'en passe. On ressent une sorte de côté intello qui s'exprime sauvagement, un besoin de savoir et de connaissances qui les pousse à se déchaîner sur leurs instruments. Respect à tous ces petits astéroïdes qui alimentent ces grandes planètes.
Dès la première écoute, les premières secondes même, on est secoué dans tous les sens tellement ça carbure au plutonium chez nos amis espagnols. C'est vraiment du non stop full bourrin sans trou noir ni détour, de la pure brutalité exprimée avec rage et Voix Lactée. Mais malgré cela, la production reste impeccable, ça en devient presque beau comme une éclipse, tant Wormed maîtrise son art sur le bout des doigts de fée. On est loin des pistes grind d'une ou deux minutes. Non ici, tous nos sens sont en éveil et la navette spatiale qui nous fonce dans la gueule à chaque instant réussit à nous surprendre jusque la dernière piste, "Molecular Winds", dont les quelques accalmies toutes relatives (pratiquement les seules de l'album) produisent une ambiance post-apocalyptique nettement convaincante. Ouais, je fais des longues phrases, comme les poètes de chez Thrashocore, mais avec des trucs intéressants à dire, tant les vents solaires de la planète Krypton m'embarquent dans leur univers parallèle.
La voix archi gutturale, les riffs super rapides et parfaitement réussis techniquement, le tout dans une ambiance sombre et violente, voilà qui résumerait à merveille ce que nous présente Wormed. Pourtant, on ne saurait limiter ceci à cela, car contrairement à beaucoup de groupes du même style, les Espagnols parviennent à se détacher grâce à une certaine originalité, notamment grâce à un ce petit côté psychédélique, cette énorme touche de science-fiction abyssale, ce monstre d'anticipation mécanique qui sent bon les machines à voyager dans le temps. Ainsi, au-delà d'une musique à caractère hautement bandant, Wormed nous transporte à ses côtés sur la plus haute marche du podium pour ce qui est de l'album brutal death de ce premier semestre 2016. Congrats.
|