Le groupe
Biographie :

Way To End est un groupe de black metal avant-gardiste de Caen composé de Hazard (chant / guitare), Rust (guitare / chant), Vaerohn (basse / chant) et Decay (batterie / chant). Le premier album, "Desecrated Internal Journey", a été enregistré au Echoes Studio de Poitiers et est sorti chez Debemur Morti Productions en 2009. Le deuxième album, "Various Shades Of Black", est sorti en Avril 2013 chez Les Acteurs De L'Ombre Productions. Le troisième album, "Senestre", est sorti en Février 2017 en autoproduction.

Discographie :

2009 : "Desecrated Internal Journey"
2013 : "Various Shades Of Black"
2017 : "Senestre"


Les chroniques


"Senestre"
Note : 15/20

Attention, ouverture d'esprit exigée pour ce troisième album de Way To End, projet mené par Hazard et rejoint par Vaerohn qui nous livre "Senestre".

Si la base de Way To End est black metal, on s'éloigne cependant bien vite des classiques du genre, "La Dictature Du Moyen" s'ouvrant d'ailleurs sur des arpèges très musique classique dans l'âme pour enchaîner sur un metal extrême connoté black mais assez technique et tordu. Dès "Prédication - Offrande", on retrouve le fameux côté cirque ou fanfare dégénérée qu'on peut aussi entendre chez Pensées Nocturnes, mélangé au black metal assez technique pratiqué par le groupe cela donne un résultat bien dissonant et dérangeant. La violence est bien entendu au rendez-vous aussi et quelques blasts des familles viendront rassurer les quelques bourrins qui pourraient se perdre par là, même si cet album ne s'adresse pas à eux. On sent un gros boulot derrière ce "Senestre", le groupe ne pratique clairement pas un metal conventionnel et les oreilles averties devraient reconnaître l'utilisation de gammes et d'harmonies assez inhabituelles. Tout cela contribue évidemment à donner une personnalité particulière à Way To End qui n'a de toute façon jamais donné dans le black metal classique. Il y a clairement là une volonté de proposer quelque chose de plus riche, de plus exigeant que les autres groupes, en tout cas il est clair que la musique de Way To End ne pourra pas parler à tout le monde. D'autant qu'il y a un côté très décalé, une pointe d'humour cynique qui se glisse au milieu de ces morceaux dissonants.

Un morceau comme "Le Fou Des Foules" donne l'impression d'entendre des notes sorties d'une boîte à musique complètement déglinguée avec une fois de plus ce côté fanfare malade. Il y a un sens du grotesque dans cet album, toujours sur le fil du rasoir, à cheval entre ridicule assumé et authentique folie. On passe d'ambiances torturées à des mélodies complètement décousues, on a l'impression que la troupe du cirque du coin est en train de partir en vrille à tous les niveaux. Malgré cela, Way To End maîtrise son chaos, le groupe sait où il va même si ce n'est pas toujours évident pour nous de le suivre. Mais un peu de personnalité dans une scène formatée fait toujours du bien et on ne va pas reprocher à Way To End de n'en faire qu'à sa tête. D'autant qu'on est loin d'un album hermétique, il va certes vous falloir plusieurs écoutes pour le cerner mais il n'y a là rien d'insurmontable. Si les morceaux sont relativement techniques et touffus, ils ne tombent jamais dans le piège du bordel sans nom et il reste toujours quelque chose pour accrocher l'oreille à un moment ou à un autre. Niveau production, c'est assez clair pour que l'on entende distinctement tout le monde mais ça conserve une petite couche syndicale de crasse sur les guitares.

"Senestre" est une fois de plus un album bien particulier et assez barré. Il est donc évident que cela ne plaira pas à tout le monde et que les puristes du black risquent de faire une violente allergie à son contact.


Murderworks
Mai 2017




"Various Shades Of Black"
Note : 15,89/20

2009 avait vu la naissance du premier album de Way To End, un album très particulier qui était touchant par son étrange personnalité et son côté très "avant-gardiste" (terme passe-partout qui permet de classer quasi n'importe quel style qui se veut hors des normes et des codes musicaux standards) dans la veine black metal qui reste la vague musicale extrême la plus proche de ce que joue Way To End. Et donc peut-être incompris dans sa démarche, cet album a été salué certes par un peu de monde tout de même, mais qu'en est-il de la popularité du groupe aujourd'hui ? Parce que finalement le but de la sortie d'un album n'est-il pas quelque part de permettre à un groupe de répandre le plus loin et le plus longtemps possible la portée de sa musique dans les chaumières des amateurs les plus ouverts et des curieux les plus aventureux ? Sans doute qu'à l'instar de certains groupes qui n'existent plus aujourd'hui et qui ont sorti des albums reconnus par l'ensemble des auditeurs bien plus tard comme des joyaux intemporels (que tout le monde s'évertue à chercher maintenant dans n'importe quel point de vente), Way To End deviendra de ceux-là. Mais pourquoi attendre, ils sont là, et ils viennent depuis le mois d'Avril de nous offrir fraîchement un second album, alors profitons de l'instant présent et savourons ce qui est à savourer avant qu'il ne dépérisse pour se fossiliser et que nous fassions des fouilles bien des années plus tard à la recherche d'un vestige tant convoité.

Donc "Various Shades Of Black" porte bien son nom. Un nom qui lui apportera peut-être la notoriété qui a été réservée aux bestsellers de Fifty Shades Of Grey même si on est loin du roman érotique. Nouvel album, nouveau label, après un temps passé chez Debemur Morti, Way To End a fait le choix de venir chez Les Acteurs De L'Ombre Productions pour cette récente et délicieuse infamie. Encore une nouvelle fois enregistré et mixé par Raphaël Henry au Echoes Studio, mais en revanche placé entre les mains de Neb Xort au Masterlab studio, ce "Various Shades Of Black" surpasse littéralement "Desecrated Internal Journey" qui pourtant avait placé la barre assez haut il faut le reconnaître. Comme pour "Desecrated...", la production met en valeur les aspérités authentiques des chansons, et si sa couleur générale met en avant la plupart du temps la basse, et que le son des guitares peut sembler très glacial, limite glauque, c'est parce que les constructions des chansons le sont. Et donc finalement ce que l'on peut trouver étrange ou dérangeant dans les sonorités de l'album, n'est pas vraiment dû à la production en elle-même qui n'a fait qu'exacerber justement ce côté avant-gardiste et ultra difficile d'accès des titres, grâce à leur "construction déconstruite" dans une logique minutieuse et détaillée, supportée par des vocaux tiraillés et torturés. Des vocaux qui, comme pour le premier album sont effectués par Hazard son géniteur, mais aussi Rust l'autre guitariste, Decay à la batterie et également Vaerohn (Pensées Nocturnes) venu remplacer depuis 2010 l'ancien bassiste dont je n'écrirai pas le pseudonyme par paresse. Il est à noter également la participation vocale de N Sandoval (Numenor) sur le dernier titre : "Various Shades Of Black".

Alors voilà, armés d'informations plus ou moins indispensables pour le découvrir, nous voilà prêts pour affronter "Various Shades Of Black". Un album composé de onze titres pour une durée de cinquante minutes qui puisent souventes fois dans le classique et le néo-classique, pour permettre à leur black metal de concevoir un mouvement vraiment à part, qui donne à Way To End ce côté totalement asocial qui fera que l'on apprécie sa musique ou pas, bien que l'on se devra d'en reconnaître la créativité.

On s'aventure donc dans un univers qui met mal à l'aise comme pouvait nous mettre mal à l'aise l'ambiance d'un Silent Hill (le jeu et plus particulièrement le premier volet pour ceux qui s'y sont frottés), où l'on traverse l'univers de l'oeuvre dans des changements de tempo et de mouvements véritablement hypnotiques. L'écoute de cet album ne peut assurément pas se faire en une seule fois, et surtout, qu'une seule fois. Il faudra un temps d'adaptation, un temps d'accoutumance et puis finalement d'addiction. A défaut de faire cela, on subira l'album sans vraiment rien y comprendre et en passant sans doute à côté des émotions que voulait ou pourrait proposer le groupe. "L'Apprenti" en début d'album, (comprenant "Sous Les Rangs", son introduction), sous ses airs de composition inspirée par le black et la musique classique, demeure encore "accessible". C'est au niveau des vocaux que l'auditeur lambda risquera d'y perdre son âme et de ressentir la lourdeur pesante et oppressante du style de Way To End. Des vocaux qui tout au long de l'album, on l'aura souligné, ont fait montre d'un travail remarquable dans leurs variations, notamment sur le chant clair où l'on peut prendre pour exemple parfait ceux du onzième et dernier titre "Various Shades Of Black". Un chant clair proche de ceux des premiers Ulver ou des premiers Arcturus, permettant à Way To End de monter encore d'un cran dans une qualité sans faille. "Evolution Fictive" déjà beaucoup plus black sus ses rythmiques mais aussi dans ses vocaux, remet en place l'auditeur dans la ligne conductrice de Way To End. Un fil rouge qui dit qu'on est face à un groupe qui s'aventure et qui explore des mondes abstraits où envolées lyriques et agressivité lugubre marchent main dans la main sur un pont qui mène dans l'antre du black metal. Et plus on avance dans l'album, plus on s'enfonce dans... le noir. Plus on écoute les chansons suivantes, plus on s'enterre dans les ténèbres... "Alors creuse" nous dit Way To End, parce que "Vain" non seulement est encore plus violente, mais présente une mélancolie tellement aspirante sur ses vocaux qu'à partir de cet instant on sait qu'on ira jusqu'au bout de l'album mais qu'on n'en sortira jamais indemne... Ce que "Desecrated..." n'avait pas, "Various..." y a pensé.

Way To End a rajouté des interludes poétiques qui donnent de l'oxygène nécessaire à la bonne écoute, au bon déroulement de l'album , permettant ainsi à l'auditeur de se poser un peu pour reprendre ses esprits et avoir l'élan nécessaire pour poursuivre jusqu'à la fin. C'est pour cela que "Aganippe" aère et que "Ixtab" avec son caractère litanique presque messe noire, terrifie. Plus recherché que son prédécesseur, cet album brille par sa noirceur. "La Figure Dansante De L'Incompréhension" reprend son influence classique et morbide, tandis que "A Mon Ombre", avec des vocaux clairs, ici aussi proche des Arcturus, va chercher musicalement dans le stellaire et les ambiances presque Falkenbach tout en conservant la touche artistique de Way To End.

En fait, même si chaque morceau conserve sa propre identité, c'est "La Ronde Des Muses Fanées" qui me rappellera l'ambiance et l'atmosphère d'un Pensées Nocturnes. Et c'est le dernier titre "Various Shades Of Black" qui fermera la marche de main de maître car ce titre si prenant, si beau tout simplement est le meilleur morceau de l'album. Une chanson qui offre une fenêtre sur un monde fabuleux où les vocaux sont à leur paroxysme dans la perfection et où les thèmes transportent l'auditeur à l'intérieur même de l'esprit de Way To End.

Agrémenté d'une pochette somptueuse réalisée par SLO relativement proche dans son côté ténébreux de celle de Atrophy sur l'album "Lexical Occultation 1618 : The Veil From Beyond", celle-ci matérialise parfaitement la portée de Way To End. Voici un album d'une réelle splendeur, très difficile d'accès plus ou moins comme l'était son prédécesseur, auquel il faudra s'acclimater. Les années lui donneront de la force et comme pourraient le dire les œnologues, cet album a un "bon potentiel de garde". Mais c'est maintenant qu'il faut s'en apercevoir, alors goûtez-y...


Arch Gros Barbare
Septembre 2013




"Desecrated Internal Journey"
Note : 13/20

Le black metal aura vu depuis sa naissance bon nombre de courants différents à l'intérieur même de sa propre vague, de sa propre "famille". Si on a pu s'emmerder sur les milliers, en fait ils appellent ça "légion" de clones Darkthronien, inefficaces et insipides, prétextant être "true evil", sur les centaines de groupes aussi, qui se veulent techniques ou symphoniques , pompant honteusement sur Emperor ou Dimmu Borgir, et enfin sur les innombrables autres groupes qui se vantent d'être brutaux comme Marduk ou les vieux Immortal, qui véritablement a-t-on pu retenir ? Seuls les groupes avec une âme, les groupes qui proposent une approche différente, personnelle, avec un minimum d'identité, pour non pas survivre à travers cette mare immonde, mais plutôt montrer simplement sa capacité à créer un univers à part, un univers qu'on aime ou pas mais qu'on reconnaît immédiatement par sa singularité. C'est pour cela qu'aujourd'hui encore on cite régulièrement Ved Buens Ende, parce que ces gars là on su laisser leur empreinte à jamais dans l'histoire du metal avant-gardiste. Je parle de Ved Buens Ende parce que Way To End, me rappelle ce groupe. Pas en inspiration évidemment car leur musique est différente, mais en terme de capacité originale. Way To end attire l'attention parce que son black metal ne laisse pas indifférent. Cela me rappelle aussi la démarche des In The Woods des débuts, avant leur déviance atmosphérique ambient.

Way To End arrive sur cette scène "larsenée" de groupes plus plats et transparents les uns que les autres. Je ne dis pas "Desecrated Internal Journey" c'est la révélation, non, mais il a le mérite de nous sortir de notre léthargie par son insolence métallique. En effet, nous n'avons aucun recul avant cet album puisqu'il s'agit pour ces normands de la première production , qui surgit immédiatement (pas au milieu de la nuit... quoique...) en format CD album. Vous me direz, nous ne pouvons que nous en réjouir, car l'intérêt pour cet album est d'autant plus croissant puisque sa musique est alléchante. Premier album donc d'un black metal sans étiquette qui ne prévient pas sur sa maturité et sa complexité. Maturité parce que sortir un album comme ça, est osé, mais si en plus son contenu créatif débute par un "ready made" au piano, comme s'il fallait dès le départ désorienter l'auditeur afin qu'il ne sache pas où il a mis les pieds, ceci montre une certaine expérience créative. Et c'est forcément ce résultat qui est arrivé dès le premier véritable titre "A Step Into The Void". Les accords de guitares déstabilisent littéralement mais après plusieurs fines écoutes, on s'aperçoit que rien n'est mal joué, tout est, au contraire, carré dans un monde en délire, torturé, froid, et noir.

Mais cette idée se fait principalement sur ce titre, où l'on retiendra également un son de basse magistralement présent si moins complexe que les guitares sur ce titre. Car en règle générale la basse de Way To End me rappelle aisément celle de Asmodée ou encore Dominant Obscurity Les chansons suivantes resteront dans une ambiance plus black metal "traditionnel", même si rien se semble traditionnel ou conventionnel chez Way To End. Certains passages sont très saturés, avec une pointe de mélodie mélancolique et limite musique classique par moment, toujours en gardant à l'esprit cette idée de torture mentale, autant dans les thèmes de guitares que dans le chant qui prend plusieurs facettes. Complexité parce qu'on n'enfermera pas Way To End dans une vague hermétique, leur black metal peut apporter des passages plus agressifs, où il n'y a de la place que pour le blast, mais également des segments techniques, plus Emperor, voire même Dissection. Tout est largement explorable chez Way To End car les titres se laissent facilement rallonger pour atteindre à chaque fois les six minutes.

Ils se payent même le luxe de proposer en dernier titre, des idées plus "épiques", plus renaissance noire, un genre de romantisme noir teinté de classique dépressif, avec "No Dreams". Au-delà de cette inspiration très intéressante, je n'ai pas trouvé que la production était explosive, mais parmi les groupes de black metal, j'ai toujours pensé que c'était le style qui voulait ça. On ne peut pas donner à un groupe qui officie dans la noirceur, la véritable noirceur (pas celle du croque-mitaine vampirique Anglais ou celle du grand méchant démon Norvégien) un son de "poser", non on ne peut pas. C'est pour cela que je pourrais critiquer et dire que le son n'est pas fameux, mais il n'en sera rien car un son excellent n'aurait certainement pas donné le charme que peut avoir cet album. Et enfin à côté de tout ça, pourquoi une fois de plus faire tout un mystère sur qui fait quoi ? D'où viennent-ils ? Qui sont-ils ? Car à moins que ses membres soient de véritables misanthropes et je ne le pense pas car sinon il ne feraient pas faire de chroniques, à moins que les membres soient vraiment timides, et j'ai encore des doutes là-dessus, il se pourrait alors que cette démarche soit purement tactique afin d'accroître la curiosité sinon la notoriété. En tous les cas Way To End présente là un album fort intéressant, original sous tous les aspects et qui mérite qu'on y laisse une écoute attentive, c'est leur musique et c'est mon avis...


Arch Gros Barbare
Janvier 2010


Conclusion
Le site officiel : www.facebook.com/waytoend