Utbyrd est un groupe de black metal symphonique norvégien. Si j’ai bien suivi l’histoire, il s’agit de leur premier album et il est produit de manière indépendante et enregistré à Bodø. Rien que là c’est original, je ne pense pas encore avoir chroniqué de groupe qui ait enregistré à Bodø. Le groupe projette d’ailleurs de sortir "Varskrik" en vinyle, ce qui leur vaut déjà un bon point de sympathie de ma part. Oui, l’addiction aux vinyles est tragique, parlez-en à vos proches, merci. Et j’avoue que mon esprit s’est pris à imaginer ce qu’un vinyle d’Utbyrd donnerait, surtout avec un artwork que je trouve aussi franchement réussi. Chapeau l’artiste.

Utbyrd ouvre l’album sur "Karsten Og Draugen". Et dès ce premier titre, j’ai senti que ça allait me plaire. On ne va pas se mentir : être un groupe de black symphonique, c’est devenu un peu difficile. C’est souvent du quitte ou double, soit c’est très bien et inspiré, soit c’est clairement surcôté, pas original et vivant sur la nostalgie de certains gros noms qui ne font plus forcément rêver (non je ne citerai pas de noms, n’insistez pas!). J’ai donc rarement vu des avis mitigés sur des groupes symphoniques, c’est l’amour ou la haine, et il n’y a que très peu de modération à ce sujet. Mais je trouve qu’Utbyrd ne se perd pas dans une tentative de copie nostalgique. Le groupe essaie, et se permet même quelques expérimentations en vocaux clairs, tout à fait appréciables. Avec "Dauing", la place est un peu plus laissée à des orchestrations travaillées, et on retrouve avec plaisir certaines expérimentations vocaliques qui arrivent à point nommé. Avec "Sjøormen", le côté épique et majestueux est encore plus mis en avant. En même temps, en parlant de serpent de mer... je vais sans doute encore m’égarer, mais maintenant dès qu’on me parle de monstre marin, mon cerveau me flashe directement une reproduction de la Carta Marina d’Olaus Magnus. Si vous ne l’avez pas encore vue, je vous le conseille, portez votre regard sur les mers et océans. Mais quoi qu’il en soit, si un titre parvient à m’évoquer des souvenirs précis et à donc nourrir mon imaginaire, je le considère comme une réussite. Vient ensuite "Deildegasten" qui permet une nouvelle démonstration de la part des musiciens. Rien d’étonnant sachant que certains d’entre eux (voire la quasi totalité) évoluent dans des formations comme Iskald ou Skaur. "Skogen" propose ensuite un rythme entièrement différent, qui s’autorise peut-être plus de libertés. Et la dernière partie du morceau est proprement étonnante, très en accord avec le thème de la forêt et des éventuelles créatures étranges qui peuvent y évoluer. Une écoute intéressante donc. "Utbyrd" proposera également ses moments de bravoure, avec un final tout aussi inattendu. L’album s’achève sur "Blikkstille Vann" qui, dès le début, s’affirme peut-être comme LE morceau que je retiendrai. Ici, tous les aspects développés précédemment sont repris. Il y a un mix entre la violence et l’aspect beaucoup plus mesuré et fantastique de l’instrumental.

Je ne le répéterai jamais : le risque avec le symphonique c’est de vouloir en faire trop. Mais je n’ai pas eu cette impression avec Utbyrd. On sent une certaine expérience des musiciens qui se lancent à corps perdu dans ce projet, mais qui, malgré tout, parviennent à garder une simplicité. Utbyrd ne part jamais dans le grandiloquent forcé, et propose un résultat tout en mesure et en fluidité. Je suis donc curieuse de voir comment ce groupe va évoluer, mais le premier contact reste définitivement bon.