Chez les Suédois de Trident on prend son temps ! Un premier album en 2010, un EP en 2015 et "North", le deuxième album en 2020. Bon, il faut dire aussi que certains membres font partie de pas mal de groupes et concilier les agendas ne doit pas être une partie de plaisir. En tout cas, Trident ne se fout pas de nous et nous livre une bonne heure de musique pour se rattrapper de sa longue absence.

Si la pochette de "North" ressemble comme deux gouttes d'eau à celle du "Blood On Ice" de Bathory, la musique en est assez loin et je ne doute pas du fait que certains vont tomber dans le piège. Trident manie les ambiances épiques et les mélodies froides avec aisance certes mais sa musique est bien plus proche de Necrophobic ou de Dissection que de Bathory. On se retrouve donc avec un death / black mélodique froid et véloce assez proche de ce que le groupe proposait sur "World Destruction". Quand on sait qu'il y a Johan Norman dans le groupe, on comprend mieux ces influences puisque le bonhomme a joué sur le "Storm Of The Light's Bane" de Dissection et au sein de Soulreaper qui comprenait deux ex-membres de... ben Dissection évidemment ! On retrouve donc l'amour du groupe pour les ambiances froides et les morceaux longs puisque Trident nous balance une fois de plus de bons petits pavés de six ou sept minutes. Après la petite intro épique et orchestrale de rigueur, "Death" ne laisse aucun doute sur la fameuse inspiration Dissection et même si l'ambiance générale se montre parfois plus belliqueuse et plus dure que chez ces derniers, les mélodies et les arpèges ne tromperont personne. Encore une fois, vu les membres impliqués, c'est tout à fait normal de retrouver cette patte et vu que les morceaux sont très bons, je ne vais certainement pas m'en plaindre. Le savoir-faire ne s'est clairement pas éteint depuis l'époque et Trident sème des passages plus empreints de death au milieu des ces mélodies typées black et assez froides, cela donne des passages bien plus puissants avec des riffs plus lourds ou des blasts plus appuyés comme sur "Imperium Romanum" où le groupe passe la vitesse supérieure le temps de quelques passages destructeurs.

Le mélange est parfaitement équilibré et le groupe jongle habilement entre les deux styles pour donner de la vie à ses morceaux et rendre l'heure de "North" intéressante. Si on devait encore amener Dissection sur le tapis, disons que Trident sonne à la fois plus black et plus death, un morceau comme "Summoning" par exemple sonne presque malsain avec ses arpèges proches d'un certain Mayhem là où "Imperium Romanum" précédemment cité montrait un visage plus lourd, plus brutal et plus direct. Le groupe passe du feu à la glace avec une aisance qui frise l'insolence et qui permet à "North" de se doter d'une certaine profondeur et d'une efficacité implacable. Le petit détail qui fait plaisir, c'est cette basse qui, pour une fois, ne se retrouve pas noyée dans le mix et qui claque bien au milieu de ce son d'ailleurs assez puissant. On retrouve évidemment des guitares tranchantes mais Trident ne tombe pas dans le piège de la production qui essaie de singer le son de l'âge d'or (oui les groupes de black metal qui se prennent pour des Norvégiens, c'est vous que je vise), les membres du groupe ont assez d'expérience pour savoir ce dont leur musique a besoin pour sonner correctement. On est donc loin d'une resucée des gloires du passé et d'un son qui se retrouverait suranné, Trident a évolué avec son temps et si la façon de composer de ses membres est aisément reconnassable, on n'a jamais l'impression d'entendre des musiciens coincés sur leur passé. "North" nous fait tout simplement entendre un groupe qui se fait plaisir à créer un style de metal dont il est l'un des derniers représentants et le résultat est très bon. Pas un morceau à jeter ici, ni même de passages chiants ou répétitifs, le savoir- faire est resté intact et on se prend une bonne grosse baffe comme on n'en avait plus prise depuis un bon moment dans ce style !

Vous n'avez donc aucune raison de passer à côté de "North" qui ressuscite un black / death mélodique que l'on n'entendait plus depuis très longtemps en plus de balancer des morceaux de très bonne qualité. Trident montre la patte reconnaissable entre mille de certains de ses membres tout en montrant que ces derniers ont évolué avec leurs temps sans jamais trahir l'esprit originel.

Cinq ans après un premier album remarquable et remarqué, la Bête que l'on croyait endormie daigne sortir de l'ombre afin de déposer une nouvelle offrande entre nos deux oreilles qui, je l’avoue, ne s'y attendaient pas, ou en tout cas, ne l'attendaient plus... Car après tout ce temps, Trident a fini par se faire oublier !!! Si le groupe revient aujourd'hui, c'est pour nous proposer un mini-album sobrement intitulé "Shadows" qui, je l'espère, permettra à un deuxième album de voir le jour car voilà bien le problème des EPs : après 20 minutes, on en veut encore et toujours plus !!! Mais qu'en est-il vraiment ??? L'attente valait-elle le coup ??? As-t-on envie d'en entendre plus ou ces 20 minutes sont-elle un vrai calvaire ??? Réponse tout de suite !!!

Ce mini-album commence de manière très efficace avec "Aftermath", un morceau de 7 minutes où l'on retrouve tout de suite la patte Johan 'Reaper' Norman (anciennement Dissection, Sacramentum, Soulreaper...) avec une intro typiquement suédoise, un bridge dantesque avant d'entrer (rapidement) dans le vif du sujet !!! La remarque qui saute aux oreilles, c'est que Trident a gagné en puissance et en vitesse, mais aussi en précision : le son est parfaitement adapté à la musique pratiquée par le combo, avec une batterie rouleau-compresseur et des leads mélodiques subtilement mis en avant... Pas de doute, on se situe bien à la frontière du black et du death metal, avec cette approche typiquement suédoise : une rythmique efficace à l'extrême, des mélodies imparables, des blasts ravageurs parfaitement gérés par Goat, le batteur de Death Tyrant, mais aussi des passages plus lourds parfaits pour headbanguer comme des damnés !!! Même si on se situe musicalement dans la droite ligne de "World Destruction", il semble, et c'est tant mieux, que Trident, en plus d'avoir acquis de l'expérience, se soit doté d'une grosse paire de couilles !!!

La recette n'est certes plus très originale, mais elle fonctionne encore admirablement bien, d'autant que la concurrence n'est plus vraiment rude sur ce créneau !!! Et de ce côté, l'expérience du Sieur Norman fait encore une fois la différence... Après toutes ces années et ses nombreux groupes, il a su garder à la fois le cap et la foi et continue ainsi à nous proposer des riffs incisifs et accrocheurs qui font instantanément mouche !!! Et c'est ce qui va une nouvelle fois se produire sur le morceau suivant, "Dark Nordic Rage", résolument rentre-dedans... Cette rage nordique sue par tout les pores du morceau, comme quoi on peut avancer en âge et garder la hargne !!! Le style pratiqué se situe pour moi entre le premier album de Trident et les deux albums de Soulreaper, entre puissance et noirceur, entre vitesse et mélodie, mais toujours avec le souci du tempo ou de la note juste... Rien n'est laissé au hasard et on sent bien là toute l'expérience des musiciens qui composent ici des morceaux d'une grande intelligence, et forcément, d'une maturité à toute épreuve !!!

Place maintenant au morceau éponyme, résolument mid-tempo et par conséquent beaucoup plus mélodique... Mais ne boudons pas notre plaisir, cela fonctionne une nouvelle fois à la perfection et ce morceau s'avère d'ores et déjà être un vrai tube !!! Les mélodies, comme les harmonisations de guitares, sont particulièrement travaillées, et l'ensemble bénéficie, surtout sur le refrain, d'un certain groove plutôt sympathique rendant l'ensemble assez dynamique... Le genre de morceau qui va vous rester en tête un petit moment, et qui permet de donner du relief et de la profondeur à ce mini-album !!! On retrouve aussi quelques riffs assez old school, ce qui offre à l'auditeur un excellent mix qui ravira tous les fans de blackened death metal suédois... La fin du morceau, plus lourde mais aussi plus atmosphérique, présente encore un autre aspect du talent propre à Trident, et le solo est à l'image du morceau, épique, riche, varié et parfaitement exécuté !!! Comme quoi, qu'importe le style pratiqué, la horde à Norman est au rendez-vous... Dommage qu'il n'y ait plus qu'un morceau à découvrir !!!

Ce dernier morceau s'intitule "Thy Kingdom" et la rythmique des premiers riffs me fait étonnamment penser à Immortal !!! Mais au bout d'1 minute 20, la comparaison s'arrête net et on retrouve bien le Trident brutal et mélodique des deux premiers morceaux, même si celui-ci, sur les parties les plus rapides, semble un peu plus confus... Pas au niveau du son, mais il y a tellement de notes à entendre et elles sont jouées à une telle vitesse qu'on a du mal à tout saisir, d'autant que nos oreilles s'étaient déshabituées avec le morceau précédent... Mais avec l'arrivée d'un solo magistral, le malaise se dissipe aussi vite qu'il est apparu : c'est une pure merveille qui ne laissera personne indifférent !!! Dommage que l'on finisse le morceau sur ce côté Immortal, bien trop fade après cette envolée lyrique de toute beauté... Peut-être, et même sûrement le morceau le moins abouti, et par conséquent le plus dispensable !!! C'est d'autant plus regrettable car l'écoute de ce "Shadows" se termine sur une impression mitigée alors que tout le reste était particulièrement enthousiasmant... Mais il fallait bien que cet EP ait des défauts, non ???

Finalement, 5 ans d'attente pour seulement 20 minutes de bonheur, c'est long, surtout quand les 4 dernières minutes sont de moindre qualité... Certes, les 3 premiers morceaux de ce mini-album sont redoutables et pourraient mettre toute concurrence à terre s'ils faisaient partie d'un album composé exclusivement de perles du même acabit !!! Mais il est clairement difficile de juger ce que pourrait donner un tel album longue durée tellement ces 20 minutes passent vite, d'autant qu'à vouloir trop bien faire, Trident a laissé apparaître quelques faiblesses, mais rien de dramatique heureusement... J'espère juste que le groupe n'attendra pas de se faire oublier pour sortir son deuxième album car s'il est aussi efficace que cet EP, il promet d'être une pure tuerie que je ne suis pas sûr de vouloir attendre trop longtemps... Johan Norman, vous êtes prévenu !!!

"World Destruction"
Note : 15/20

Trident marque d’office le retour de Johan Norman (Dissection, Soulreaper) sur le devant de la scène metal extrême, retour attendu si je ne m’abuse depuis 2003 et la sortie du "Life Erazer" de Soulreaper. Et quel retour étant donné le passé du monsieur et la qualité des musiciens qui l’entourent, membres de Necrophobic ou de Grief Of Emerald pour les plus connus. Difficile donc de ne pas avoir la bave aux lèvres à l’annonce du premier album de ce "all-star band" Suédois !!! A l’écoute de ce "Word Destruction" (titre original s’il en est !), on oublie vite les individualités pour se concentrer sur le groupe en lui-même car oui, Trident a sa propre personnalité. Non pas qu’on ne ressente jamais l’influence des groupes cités, mais tout cela semble digéré avec beaucoup de talent et une démarche finalement plus "roots". On est donc assez loin des standards suédois actuels et Trident nous replonge avec bonheur dans le son de la fin des années 90.

Alors bien sûr, cet album n’est pas l’album le mieux produit de ces dernières années, mais ce son purement suédois colle à merveille à la démarche du groupe qui sent bon l’authenticité. C’est d’ailleurs ce qu’il faut chercher avec Trident, non pas l’originalité mais ce son suédois si propre à ce style, cette énergie diabolique, ces mélodies imparables que nos oreilles réclamaient inconsciemment depuis des années. Tous les ingrédients sont là pour nous faire tripper, nous, passionnés de la première heure, comme un vent de fraicheur au sein d’une scène souvent saturée de groupes sans âme. Cet album est vraiment là pour les amateurs de mélodies, de groove heavy et de blasts, les autres étant priés de passer leur chemin. Bien sûr, vu le passé de Johan Norman, on retrouve ce qui a fait sa renommé, les riffs se situant parfois entre Dissection et Soulreaper, mais on peut aussi faire un parallèle avec des groupes comme Lord Belial ou Sacramentum… Voilà des références qui en imposent, surtout si vous y rajoutez le chant de Necrophobic, cette fois-ci un peu plus death et old-school, comme si, sur certains passages, John Tardy avait mangé des Krisprolls !!! Mais le pari reste risqué compte tenu de l’exigence du public et du nombre de groupes se revendiquant de cette scène Suédoise. Et bien ce pari est réussi grâce à des musiciens d’expérience, techniquement excellent et d’une maturité suffisante pour tourner ces influences à leur avantage en les intégrant à leur son propre, et non l’inverse. Voilà ce qu’on appelle de l’art…

Malgré tout, cet album n’est pas dénué de défauts, comme au niveau du son, par exemple, qui mériterait un mix plus avantageux du point de vue du potentiel mélodique des guitares, voir plus de puissance vue le style. De même, avec un album de plus de 50min, il est inévitable de faire face à certaines longueurs, mais dans l’ensemble, cet album est tellement parsemé de purs moments de bravoure qu’elles sont vite oubliées. Bref, "World Destruction" reste une vraie bonne réussite, faite à la sueur de 5 fronts Nordiques, avec les tripes et ce savoir-faire purement suédois qui nous donnera j’en suis sûr du plaisir pendant encore longtemps. Pour un prmeier album, l’essai est concluant et laisse présager le meilleur pour la suite… Merci donc monsieur Norman de garder la foi et longue vie à Trident !!!

Carcharoth Mars 2010