Le groupe
Biographie :

Torment est un groupe de death metal nancéen formé en 2017 et actuellement composé de : Simon Guerard (basse), Emile Corvini (batterie), Thomas Frain (guitare) et Felix Poncelin (chant). Torment sort son premier album, "Occult", en Octobre 2020 chez Great Dane Records.

Discographie :

2020 : "Occult"


La chronique


Il y a des formations qui proposent des réalisations pour le moins surprenantes, surprenantes dans le sens où, de la découverte du visuel jusque pendant l’écoute, le résultat détonne. C’est un phénomène appréciable de nos jours, car nous vivons une période particulière durant laquelle tout a plus ou moins déjà été fait, et dès qu’un nouveau mouvement émerge des bas-fonds de l’underground, on se retrouve avec des centaines de clones qui proposent la même tambouille. Torment, groupe de metal nancéen, s’inscrit dans une démarche ambigüe, tout est arrivé en 2020 pour cette formation, responsable de deux singles disponibles sur son Bandcamp, avant de sortir chez Great Dane Records son premier full-length dans la foulée, autant dire que là où certains cumulent les splits et tous les dérivés possibles pour promouvoir leur musique, Torment a décidé de prendre la voix d’accélération afin d’éviter de s’emmerder dans les embouteillages discographiques.

Avant de revenir sur ce qui rend la réalisation de ce quartette de djeuns si particulière, il est nécessaire de s’attarder sur quelques détails non négligeables. Déjà, si nous observons le logo assez lisible dont le lettrage laisse deviner un visage morbide, d’un point de vu typologique, celui-ci possède toutes les caractéristiques d’un logo de death metal bien traditionnel, genre on s’attend à un énième ersatz d’Obituary, Master ou Grave, le style de trucs qui pullulent actuellement. La pochette, aussi, pourrait nous laisser penser que le groupe défend une musique bien old school, que nenni, et même si sur Encyclopedia Metallum, Torment est sensé jouer du death, réduire "Occult" à "juste" du death metal serait un affront vis-à-vis du travail de ces habitants de l’Est, autant dire qu’il s’en passe des trucs avec Torment. Stylistiquement, le groupe propose un metal qui possède de toute évidence des accents de death metal, tout en sonnant metal moderne, avec des parties qui privilégient le groove, et d’autres catchy, avec une interprétation très actuelle. Le plus surprenant, c’est le chant, à dominante black metal, de ce fait, catégoriser Torment dans le death devient déjà moins évident, parce qu’en termes de sonorités black, le chant sonne vraiment black ! On retrouve ce côté trollesque aigu qui nous renvoie immédiatement vers la Norvège et l’odeur subtile du bois de sapin brûlé par des fanatiques antichrétiens. Là où le doute plane, c’est quand vous avez un background musical entraînant à la Soilwork ou Mnemic, comme sur le titre "Swarm", et que vous entendez ce chant par-dessus. Ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres, mais ce premier album cultive de nombreux paradoxes moderne / rétro, basique / expérimental… "Occult" fourmille de clichés qui s’imbriquent, laissant entendre de nombreux détails qui rappellent forcément quelque chose et qui, mis bout-à-bout, participent au style forgé par le groupe, un style qui se cherche tout au long du disque et qui mérite d’être mieux défini dans les productions futures.

Après une intro tribale très étrange, le groupe engage "Deathwish", un titre qui démarre lourd, avec des mises en place basse-batterie assez chiadées, il y a un petit côté deathcore là derrière. "Human Parasite", titre suivant, est déjà plus mélodique mais traduit toujours un feeling pessimiste et sombre, la basse est plus libre, le chant prend diverses intonations, plus graves, il y a un peu de The Haunted ou de Arch Enemy période Gossow là derrière, et la fin est carrément djent. "Last Winter" continue sur la lancée avec des blast beats assommants et des breaks de batterie omniprésents qui accentuent admirablement le riffing, on ressent quelques influences Carcass, surtout avec le solo de guitare assez mélodique. "Rituals" et son arpège introductif permet de reprendre notre souffle, avant de surprendre par son orientation plus black metal au final. La suite du titre s’engage dans divers univers sonores, encore une fois, Torment expose dans sa musique de nombreux éléments qu’il enchaîne avec un certain aplomb, alors qu’à d’autres moments, on ressent moins la conviction. "Rebirth" est un titre lourd et pesant, et continue de développer une atmosphère dramatique et fataliste, ce track est peut-être le plus progressif de l’album. "Psychotic", septième titre de l’album, possède l’intro la plus lourde du skeud, avec son chant un poil plus death / grind par moments, et dégage ensuite une énergie frénétique assez entraînante. Le titre suivant, "Silent Scream", n’est pas une reprise de Slayer, le groupe joue toujours autant pied au plancher. "Swarm" est le titre le plus groovy de l’album, "Locked Away" le plus heavy dans le sens stylistique du terme et "Occult", morceau éponyme, est un bon résumé de ce dont le groupe est capable.

Après plusieurs écoutes, on constate que ce premier album propose de bons moments et laisse présager un avenir plutôt radieux car il faut le reconnaître, ces musiciens ont du niveau, ça joue carrément bien même si on peut déceler parfois quelques petits décrochages, notamment dans le drumming au niveau de l’endurance, sur certains passages. Cela accentue le paradoxe car le groupe joue un metal assez moderne et les caractéristiques actuelles de ce type de musique imposent une interprétation au poil, encore plus précise qu’un métronome ne peut l’être. La production est efficace, même si je trouve le mix de la batterie un poil aigu et la caisse claire un peu en retrait. La basse est bien présente et les guitares sont parfaitement incisives malgré le fait que, selon la densité des autres instruments, elles perdent un poil en présence. Par contre, encore un bémol, un poil dans le potage, le petit truc gênant, c’est qu’à certains moments, on a l’impression que les instruments ne travaillent pas en accord, du coup on perd un peu en impact, et cela transparait sur chaque plage du disque. Torment a des idées, c’est certain, mais il lui faut encore progresser pour gagner en cohérence compositionnelle. Mais bon, quand même, pour leur première tentative discographique, Torment nous gâte avec une galette de 11 titres bourrés de bonnes intentions, rien que ça ! Le mix de chant black et de death mâtiné d’éléments modernes fonctionne, même si nous avons là un joyau brut, qui nécessite d’être poli. Le groupe a un bel avenir devant lui et "Occult" fait office de rampe de lancement, gageons qu’en prenant de la bouteille, en synthétisant de manière plus précise ses influences, le quartet puisse réellement se démarquer, car il associe divers ingrédients que l’on n’a pas forcément l’habitude d’entendre associés ensemble. Ainsi, l’approche n’en est qu’à sa phase expérimentale et on ressent au travers des compositions que la formation se bride un peu, qu’elle se retient, peut-être par crainte de trop en faire ? En affinant son sens compositionnel et en assumant mieux son univers musical, Torment risque de faire mal, et "Occult" sera le témoignage de la mise en route de cette machine à tout péter.


Trrha'l
Janvier 2021


Conclusion
Note : 13,5/20

Le site officiel : www.facebook.com/tormentofficial