"Rotting Incarnation Of God"
Note : 17/20
Très prolifique depuis quelques années, c’est Profanatica qui revient taper du poing sur la
table avec "Rotting Incarnation Of God", le cinquième album de la formation. Créé en 1990 par
Paul Ledney (batterie / chant, Havohej, ex-Incantation) et deux autres anciens membres
d’Incantation , le groupe connaît des débuts difficiles et se sépare en 1992 après quelques
démos, un EP et un split. Mais en 2001, la bête revient sur le devant de la scène, et ce n’est
qu’après quelques changements de line-up que Paul décide de mener seul le groupe.
Evoluant dans un black / death sale et malsain à souhait, il fait appel à Adam Besserer
(guitare, Disfigurment), Richard Olsen (basse, Disfigurment, Berator) et Raheem
Amlani (clavier) pour enregistrer le dernier album. Préparez-vous à la messe noire.
On débute avec "Liturgy Of Impurity", un titre qui met directement dans l’ambiance. Les
sonorités old school crasseuses rencontrent un blast puissant et intransigeant ainsi que des
riffs dissonants et une voix rocailleuse. Le groupe sait parfaitement où il va, et le blasphème
se poursuit sur "Prayer In Eclipse", un morceau qui plaira aux amateurs de son gras et de
rythmique purulente autant qu’aux amateurs de sons obscurs. Piochant dans le meilleur du
death et du black metal, la composition ralentir, repart, s’arrête puis déverse à nouveau un
flot de noirceur sur le monde avant de s’arrêter brusquement. Plus longue que la
précédente, "Broken Jew" restera à une vitesse constante sans négliger l’alternance de
patterns à la batterie, qui donne envie de remuer la tête en rythme. Même constat pour
"Washed In The Blood Of Lord", qui use d’un son de basse imposant pour placer cette
rythmique saccadée et ce blast furieux. On reste dans la crasse avec "Sacramental Cum", le
morceau le plus long de l’album, qui ne renie nullement les racines old school des deux
styles que la formation mélange. Mais le groupe prend plus le temps de développer ces
harmoniques sanglantes, ce qui prouve qu’on est loin du matraquage bête et méchant
d’instruments.
Retour dans les frappes rapides et puissantes grâce à la rythmique très solide de "Mocked,
Scourged And Shit Upon", pendant que la voix hurle des paroles qui abordent des thèmes
pas vraiment catholiques (si, si, je vous jure…) grâce à un timbre rauque et saturé au
possible. "Tithing Cunt" renoue avec ces trémolos malsains à la guitare, tout en alliant des
riffs death pur jus pour séduire, ainsi que quelques ambiances oppressantes, tout comme
sur "Rotting Incarnation Of God", le titre éponyme. Et c’est à nouveau grâce à une basse
vrombissante que le groupe nous écrase littéralement sous sa rythmique, avant d’y inclure à
nouveau une guitare tranchante et une batterie effrénée. Lorgnant également du côté d’un
doom / death du début de carrière du maître, le groupe reste très efficace, jusqu’au larsen
final. Eucharist est un titre plutôt court mais ces riffs très orientés black sont ravageurs, et
c’est rapidement que l’on se retrouve à hocher la tête en rythme avec les blasts tout en se
laissant lacérer par cette guitare folle. Dernier morceau de l’album, "In My Kingdom" a pour
but d’enfoncer le clou du blasphème un peu plus profondément pour marquer définitivement
dans notre esprit la qualité de l’album.
Bien qu’un peu court, "Rotting Incarnation Of God" est un album qui suit parfaitement la
logique de Profanatica. La recette ne change pas, mais elle est sublimée par une qualité
malsaine qui conviendra aux amateurs de metal extrême de tous les bords. Et en live, la
formation délivre également des shows très qualitatifs.
"The Curling Flame Of Blasphemy"
Note : 15/20
Profanatica est un groupe de black metal... américain ? Tiens donc, ce doit être la première fois que j’ai des Américains à chroniquer. Je ne vais pas cacher la vérité, j’ai tendance à être une grosse eurocentriste et à ignorer totalement ce qui se passe de l’autre côté de l’Atlantique. Je n’ai donc jamais été curieuse à propos de Profanatica, ni même essayé de les écouter. Ca sera donc une grande innovation !
Dix titres composent cet album. Nous commencerons donc avec "Ordained In Bile", un titre qui ne fait déjà pas dans la délicatesse et qui affirme déjà que le groupe veut se donner un côté crade. Et dès ce premier morceau, Profanatica veut envoyer la confiture et annonce la couleur avec la subtilité d’un éléphant lancé au galop. La ligne directrice est donnée : on est Profanatica, et on ne vient pas pour faire de la dentelle mais pour la déchirer, la brûler, la violer, la rebrûler et la revioler.
Le titre suivant, "March To Golgotha", permet également de mettre à un jour un concept très important pour le groupe : l’anti-chrétienté. En prenant connaissance des informations de sortie d’album, j’ai d’ailleurs été surprise de voir que le groupe était toujours véhément dans son rejet des chrétiens. Bon, je ne vais pas non plus faire l’innocente, je sais parfaitement que dans le black on se doit de leur cracher dessus (et non, je ne parlerai pas de unblack, je m’y refuse d’accord ?), mais je voyais plutôt la chose comme un code qu’on continue de perpétuer au travers des années sans y accorder grande importance. Mais après tout, la situation aux Etats Unis ou même en Amérique du Sud est différente et les bigots y sont légion. Au final, Profanatica s’explique très simplement. Et le groupe semble vraiment habité par le concept. C’est assez surprenant d’ailleurs, cette colère et haine nourrit véritablement leur musique. Car colère, haine et violence seront les maîtres mots de cet album comme le confirmera d’ailleurs le titre suivant "Magic And Muhr".
J’avoue d’ores et déjà avoir du mal à accrocher à cet album. Il y a quelquebchose qui me déplaît un peu. Peut-être que ce sont les vocaux qui donnent vraiment l’impression d’être vomis, ou les influences death metal vraiment évidentes à l’écoute ? Je ne sais pas encore, et j’y réfléchis durant l’écoute de "Black Hymna". Il y a aussi un aspect très lourd, comme si plusieurs poids étaient brutalement lâchés sur le sol, et cela me dérange un peu. Mais je pense que cela fait partie des objectifs du groupe, et que mettre l’auditeur mal à l’aise ne leur déplaira pas le moins du monde, bien au contraire ! Cette même lourdeur est décelable dans "Host Over Cup" ou encore "Rotten Scriptures".
Et quand je parlais de subtilité, le titre "Yahweh Rejected" achève de me donner raison. Parlons néanmoins un peu musique et soulignons le mariage parfait de la guitare et de la basse, qui donne une intensité dramatique à la musique qui monte en puissance crescendo. Et ces vocaux, qu’on y adhère ou pas, sont tout à fait remarquables et apportent en crédibilité au propos du groupe. Ils ont quelque chose d’effrayant quand on y pense. Suit "Bleed Heavily Kingdom" qui en remet une couche, "Vile Blessing" qui reste strictement dans la lignée de cette dernière, tant et si bien que j’ai cru qu’il ne s’agissait que d’un seul titre, et la conclusion "Curling Flame" qui m’a littéralement fait l’effet d’une tronçonneuse dans le cerveau tellement Profanatica voulait enfoncer le clou.
Je ne peux pas nier une chose : Profanatica est foutrement intense. Le groupe ne lâche rien, est là pour s’imposer, et refuse de vous laisser le moindre moment de répit dans une vague incessante de violence musicale. Je suis restée un peu sur ma faim, peut-être parce que je privilégie d’ordinaire des atmosphères plus travaillées, mais je reconnais sans souci que les Américains donnent sacrément la pétée. Les amateurs seront enchantés, je n’en doute nullement.
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