Le groupe
Biographie :

Si l’on veut saisir la musique de Përl, il faut se frayer un passage au croisement de plusieurs dimensions. Trio de rock metal ambiancé, la formation cherche à manipuler dans ses créations trois entités : la force du rock et du metal, la beauté des textes et l’étrangeté des sons. Dans cet espace sonore, la langue d’Aragon et de Cioran fusionne dans une alchimie de mots violents dont surgit un tremblement tantôt onirique, tantôt écorché. Le groupe choisit comme alliage à cette architecture textuelle un précieux assemblage où musique puissante et abrasive côtoie l’instant surprenant d’une ambiance inattendue.

Discographie :

2011 : "Monochrome" (Démo)
2013 : "R(a)ve"
2017 : "Luminance"
2021 : "Les Maîtres Du Silence"


Les chroniques


"Les Maîtres Du Silence"
Note : 17/20

Përl nous avait surpris en 2017 avec le mini album "Luminance" qui montrait un visage plus metal, plus dur et plus puissant tout en gardant ce côté poétique et mélodique des débuts. Le groupe est cette fois de retour avec un véritable album nommé "Les Maîtres Du Silence" et le voyage promet une fois de plus d'être agité.

"Varulv" confirme que le groupe a gardé les grosses guitares et pose déjà une ambiance bien sombre dans un style proche du post-core ou du post-rock comme sur "Luminance". Përl continue à se faire plus dur et le climat qui règne sur ses sept premières minutes est assez menaçant et froid, assez loin de l'onirisme du premier album. On retrouve en tout cas des mélodies mélancoliques et le chant d'Aline qui est toujours aussi gorgé d'émotions et qui prend une fois de plus à la gorge. On y ressent cette poésie à laquelle Përl nous a toujours habitué malgré le fait que sa musique s'est durcie. Les métalleux purs et durs n'y trouveront toujours pas leur compte mais je doute que le groupe s'adresse à eux, il y a une fragilité et une poésie onirique qui risque de leur échapper. D'ailleurs, le passage brutal sur lequel Aline se met à hurler est d'autant plus violent qu'il débarque après un de ces passages tout en douceur, l'art du contraste dans toute sa splendeur. Il y a un sens de la mélodie, une authenticité dans les émotions qui font que la musique de Përl frappe en plein cœur, et ce peu importe le style abordé. Et si les influences des scènes post se font sentir, le groupe arrive à créer un univers bien à lui, appuyé cette fois par une superbe pochette poétique signée par Raphaëlle Monvoisin. Il va falloir être un minimum ouvert d'esprit comme d'habitude avec Përl mais les émotions contenues dans "Les Maîtres Du Silence" peuvent parler à tout le monde, il suffit de ne pas se laisser freiner par de vulgaires barrières stylistiques. On en entend assez râler sur l'uniformisation du metal, le manque d'originalité, l'opportunisme de certains qui s'engouffrent dans des scènes à la mode. Là, pour le coup, vous avez un groupe qui a une âme, qui met ses tripes sur la table et qui sort clairement du lot, ce serait quand même malheureux de passer à côté, non ?

Il est une fois plus difficile de classer la musique de Përl et tant mieux pour nos oreilles, c'est pour en faire une chronique que ça pose problème par contre. Mais comme le but est de vous faire écouter cet album, je vais donc vous y inciter, ne serait-ce que pour vous faire une idée plus précise de la chose. Surtout que ce groupe a un don pour éviter tous les pièges dans lesquels nombre de groupes sont tombés, en premier lieu le fait de sombrer dans le pathos quand on joue avec la poésie et la mélancolie. Pas de ça sur "Les Maîtres Du Silence" qui frappe juste à tous les coups et qui fait ressentir une sincérité désarmante qui vous cueille systématiquement. Il y a peut-être quelque chose de shoegaze dans cette sensibilité, ces mélodies empreintes de romantisme noir. En tout cas, impossible de comparer la musique du groupe à celle d'un autre, sa patte est identifiable et ce mélange de noirceur, de brutalité sporadique et de mélancolie est propre à Përl. Du coup oui, ce nouvel album est exigeant et va demander plusieurs écoutes attentives, mais tout est justement fait pour que vous vous laissiez aller. Ces huit morceaux appellent au lâcher prise, ils vous incitent à vous plonger dans leur monde. Une fois de plus, la musique du groupe est un voyage mouvementé, torturé, dur et cathartique. Il y a toujours cette part de poésie et d'onirisme qui passe à travers les voiles noirs mais l'ensemble reste émotionnellement éprouvant. Dans une époque où la musique en arrive presque à s'industrialiser et à devenir un produit comme un autre, Përl a choisi de garder quelque chose d'humain et se livre sans concessions. C'est ce qui donne toute sa puissance à la musique du groupe, au-delà des riffs, du son, des grosses guitares, c'est cette sincérité qui frappe.

Avec "Les Maîtres Du Silence", Përl nous livre comme à son habitude un uppercut en plein cœur, difficile et éprouvant mais beau et authentique. Que ce soit du metal ou non n'a finalement pas d'importance, le groupe donne tout ce qu'il a et attend de vous que vous vous livriez à lui de la même façon.


Murderworks
Juillet 2021




"Luminance"
Note : 17/20

Une fois n'est pas coutume, l'ouverture d'esprit va être de mise puisqu'on va parler du nouvel album de Përl, groupe français officiant dans un style bien difficile à catégoriser mais pas entièrement metal. Les plus obtus sont donc invités soit à fuir soit à ouvrir bien grandes leurs oreilles parce que "Luminance" n'a rien d'un album immédiat.

Nous sommes certes loin d'un avant-gardisme débridé mais pour un amateur de metal pur et dur, l'exercice risque déjà d'être assez compliqué, pourtant Përl a ajouté des guitares bien plus grosses cette fois et présente un visage tout de même plus metal que sur "R(a)ve". "Himalaya (Deval Part 1)" débute de façon presque postcore / rock avec un rythme pesant et des mélodies assez sombres et si le ton s'adoucit peu de temps après, il n'en reste pas moins que ce premier morceau ne respire pas la joie. On a même droit à un passage assez rentre-dedans sur lequel Aline hurle à s'en arracher la gorge, un gros contraste par rapport à la précédente réalisation du groupe qui prouve que Përl n'a décidément que faire des barrières. Certes les hurlements étaient déjà présents de façon fugace sur "R(a)ve" mais le groupe a tout de même considérablement durcit le ton sur "Luminance". Ce qui n'est pas forcément un signe d'une orientation future puisque Përl nous habitue depuis toujours à jongler avec les styles, à faire selon ses envies en ne tenant aucunement compte des codes de qui que ce soit. D'où une personnalité très forte, très marquée, qui laissera inévitablement certaines personnes à la traîne. Mais c'est comme ça quand on propose une musique honnête qui ne cherche pas forcément à entrer dans un moule et ceux qui prendront la peine d'écouter "Luminance" attentivement devraient trouver sans peine ce que cet album a à leur offrir. Pour faire simple, c'est un voyage que le groupe vous propose, peut être pas toujours agréable émotionnellement parlant vu que les ambiances sont sombres mais le dépaysement est garanti.

Il va évidemment falloir vous plonger dans cet album, le laisser vous parler. Malgré la variété des sonorités qui s'entrechoquent ici, on sent une cohérence indéniable, le travail qui a été fait sur les textes, les compositions, les arrangements, confirment que rien n'a été laissé au hasard. Les morceaux se déroulent certes sans structure préétablie, pas de couplet-pont-refrain ici, mais le groupe sait où il veut aller et ne se perd jamais en route. Pour le reste, ce sera à vous de vous accrocher, mais avec un peu d'efforts les mélodies vous toucheront et à partir de là, "Luminance" aura fait son oeuvre. Cet album est exigeant mais pas inaccessible, il demande une implication mais ne vous perdra jamais dans un dédale de morceaux sans queue ni tête. Par rapport à "R(a)ve", la production aussi a pris de l'ampleur, les guitares sont bien plus puissantes et le son en général est bien plus gros, plus metal et plus dur là aussi. En passant, chapeau bas à Aline qui nous met sur le cul une fois de plus avec son chant aussi habité que versatile, changeant de visage plusieurs fois par morceau avec une aisance impressionnante ! Signalons aussi le sublime artwork réalisé par Jeff Grimal qui a décidément beaucoup de talent dans le domaine, une pochette qui contribue elle aussi à créer un univers particulier autour de cet album.

Nouvel album d'une beauté indéniable, une beauté noire, froide mais qui vous saisit à la gorge pour ne plus vous lâcher pendant un peu plus d'une demi-heure. Nous sommes souvent loin du metal pur et dur mais Përl nous livre là un album sincère, fait avec le cœur et avec un peu d'ouverture d'esprit, c'est le vôtre qu'il arrivera à frapper.


Murderworks
Août 2018




"R(a)ve"
Note : 10/20

Etrange, voilà le mot qui me vient à l'esprit après plusieurs écoutes de "R(a)ve" du trio parisien Përl. Premier album, ou plutôt maxi de 8 titres, le groupe propose des chansons à texte avec des paroles ambiancées, balancées en long, en large et en travers.

Les prestations de la chanteuse sont largement mises en avant avec des variations entre les différentes phases de chant qui sont plutot très acceptables. Variant très peu les thèmes des textes, on a affaire à des choses noires, voir très noires. Des textes plaintifs, avec des paroles posées à même les sonorités instrumentales, un peu comme un rap ou un slam. Mélodiquement, du travail a été fait avec des sonorités diverses, une guitare folk, un tambourin et des ambiances. Chaque morceau est une histoire, comme si les instruments étaient au service d'une bande son habillant chaque texte. Post-rock, post-ambiance, difficile de définir le style-même de Përl. Peu de textes se permettent une sortie de ce thème sombre voire apocalyptique. "Parenthèse 56" donne un bon exemple de ce que le groupe propose avec des sons minimalistes se greffant sur des paroles comme une litanie sombre. Après avoir déversé cette litanie, la chanteuse balance un chant guttural sur le refrain montrant et démontrant toute sa maîtrise technique et vocale.

Dans l'ensemble, le cheminement dans "R(a)ve" peut se révéler ardu pour quelqu'un qui n'aurait pas envie de comprendre ou prendre le temps de se plonger dans des textes pleins, plus que dans une déferlante brutale. Bien produit, même si manquant un peu de pêche sur le fond par instants, ce CD peut plaire, décevoir ou repousser. On ne reprochera rien aux parties musicales, intimistes, mais l'accroche peut s'avérer être compliquée sur l'ensemble. Etant plus un concept en lui-même, ce CD donnera ou ne donnera pas satisfaction. Pour ma part je reste mitigé, prenant la qualité des textes, des instrumentales, mais n'adhérant pas au style en lui-même, et me posant la question d'une véritable efficacité live. Une oreille est tout de même à poser sur cette galette le temps de 8 titres.


Sam
Juillet 2013


Conclusion
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