Le groupe
Biographie :

Ôros Kaù est un one-man band de black metal belge formé en 2018 dans lequel opère CZLT (instrument, chant / Bonepipe, Oath Okrana, Vorax Virosus, AKSU, CZLT, Jenny Torse, Neptunian Maximalism, Sir A&W, Sol Kia). Ôros Kaù sort son premier album, "Imperii Templum Aries", en Juin 2020 chez Epictural Production, suivi de "Thanatos" en Septembre 2023 chez I, Voidhanger Records.

Discographie :

2020 : "Imperii Templum Aries"
2023 : "Thanatos"


Les chroniques


"Thanatos"
Note : 17/20

Après un premier album brutal et occulte à souhait, le one-man band belge Ôros Kaù mené par CZLT (aussi membre de Neptunian Maximalism entre autres dont nous avions parlé en ces pages) nous amène un deuxième manifeste de black metal chez les fous furieux de I, Voidhanger Records. Il se nomme "Thanatos" et sera visiblement bientôt suivi d'un autre album appelé "Hypnos", donc vous pourrez garder votre scaphandre après cette première plongée dans les abysses puisque vous en aurez bientôt besoin à nouveau.

C'est "Nephtys" qui se charge d'amorcer la descente avec déjà des riffs malsains au possible et tout en dissonances. Comme sur "Imperii Templum Aries" et le split "Theosulphuros" avec Precaria, le black metal d'Ôros Kaù tout occulte qu'il est ne laisse pas la violence de côté et assène des rafales de blasts impitoyables. La production moins grasse permet de cette fois de mieux discerner les mélodies qui parsèment ce nouvel album, des mélodies noires qui installent une ambiance oppressante au possible. "Let Neptune Strike Ye Dead" se fait un peu plus aéré et laisse plus de place aux ambiances malsaines, là où le premier album avait des airs de pilonnage constant soutenu par ce son volontairement gras et baveux qui donnait une impression de chaos total. Cette fois, Ôros Kaù laisse passer un peu d'air par moments, mais si cela permet de lever le pied sur les blasts, sa musique n'en devient pas plus facile à encaisser pour autant. C'est surtout pour amplifier encore l'ambiance générale déjà bien poisseuse et oppressante, logique pour un album basé sur la personnification de la mort. Tout aussi logique est sa suite qui doit s'appeler "Hypnos" puisque dans la mythologie grecque ce dernier est le frère de Thanatos. On peut discerner quelques influences dans le propos, que ce soit Blut Aus Nord pour l'utilisation des dissonances ou Aosoth pour le côté malsain et occulte jusqu'au bout des ongles. Si l'on reconnaît évidemment les racines du black metal, ce projet en évite tous les clichés et propose quelque chose de personnel, une vraie virée dans les abîmes de la conscience. "Thanatos" ne va rien faire pour vous faciliter le voyage et les six morceaux qu'il contient sont autant d'étapes initiatiques à passer dans la douleur. "Baal" fait d'ailleurs lui aussi entendre une lourdeur que l'on connaissait pas encore à ce projet, ce qui en fait un morceau bien plus rampant et tout aussi oppressant et malsain que ses collègues.

Sur ce genre de titres, les dissonances trouvent tout un terrain pour s'exprimer, posant des ambiances d'autant plus inquiétantes et évocatrices. Les morceaux présents sur le split "Theosphorus" présentaient certes déjà un visage plus aéré avec une production plus sèche, mais ils ne poussaient pas le bouchon aussi loin. On y trouvait "Solve" qui expérimentait avec une patte plus noise et ambiant mais rien de comparable avec ces riffs lents, gras et épais qui évoquent quelque chose de bien plus dur et funèbre. Cette fois, le projet plonge vraiment dans des passages très lourds, carrément doom voire drone par moments, notamment sur le pavé d'un quart d'heure "Bios-Phos-Metis" qui ferme l'album. Un album qui reste tout de même très violent et d'une intensité qui va en mettre plus d'un à genoux tant les blasts frappent forts le reste du temps. C'est une boîte à rythmes certes mais la production aide à ne pas trop s'en rendre compte, le côté synthétique est noyé dans les couches de sons et dans le gras qui reste sur les guitares et la basse même s'il est moins appuyé que sur "Imperii Templum Aries". Pour en revenir sur le dernier morceau, c'est une fois de plus le visage le plus expérimental du projet qui s'exprime ici, comme sur "Solve" pour le split "Theosphorus" mais dans une veine différente. Cette fois, c'est quelque chose de plus rampant avec un côté drone doom, sans jamais devenir aussi bruyant que les maîtres de cette scène. Ôros Kaù se sert de ces sonorités pour donner plus de puissance d'évocation à ce pavé. Ces quinze minutes prennent des allures de palier de décompression après l'agression que le reste de l'album nous a fait subir, pourtant l'ambiance y est tout aussi noire et inquiétante. Mais il y a comme l'impression d'être arrivé au bout du voyage, tout en bas au plus profond des abysses là où très peu ont mis les pieds.

"Thanatos" est donc un nouveau voyage dans les tréfonds de la conscience, une nouvelle étape initiatique qu'il va falloir encaisser et qui en va en laisser quelques uns sur le carreau comme tout ce qu'à produit ce projet jusqu'à maintenant. Ôros Kaù pratique un black metal occulte qui présente une personnalité affirmée qui n'aura aucun mal à se démarquer du reste de la scène.


Murderworks
Novembre 2023




"Imperii Templum Aries"
Note : 18/20

Ôros Kaù cultive le mystère, inconnue au bataillon, cette formation belge s’introduit dans la sphère métallique du jour au lendemain avec un premier album au visuel somptueux, et interprète un black metal radical et de grande classe. "Imperii Templum Aries" est un disque qui se décline en 8 titres aux noms étranges, excepté le dernier track : "Set The Controls Of The Heart Of The Sun", qui est une reprise de Pink Floyd extraite du deuxième album de ces dieux du prog. Que nous réserve ce groupe qui entretient le mystère jusqu’au bout puisque aucune information n’est donnée sur ses membres ?

Déjà, on peut aisément penser qu’Ôros Kaù est un one-man band, car la seule photo apparaissant sur le Bandcamp du groupe dévoile une personne floutée, les mains en avant sur lesquelles est superposé le logo du groupe. Celui-ci, très esthétique, fin, est tout en tracés géométriques et cet aspect soigneux épouse parfaitement le design du digipack rouge vif, qui expose de multiples symboles associés à une imagerie démoniaque si chère au black metal. Musicalement, on a droit à un metal primitif, qui, malgré les apparences, se trouve être beaucoup plus nuancé et réfléchi que ce que l’on pourrait s’imaginer au premier abord. Dès les premières notes de "Zepar", titre d’ouverture, Ôros Kaù balance une musique dense et compacte de laquelle s’échappe une noirceur pénétrante. On pense aux frenchy d’Aosoth lorsqu’on écoute "Imperii Templum Aries", surtout en ce qui concerne le traitement sonore qui privilégie les sons graves aux aigus, créant de cette manière une opacité qui colle parfaitement au climat. Quelques dissonances paraissent çà et là, émergeant du chaos, ajoutant ainsi une touche supplémentaire de malaise à l’ensemble.

Le travail des voix est exemplaire, nous avons droit à de nombreux timbres vocaux. D’un chant profond presque death, certains grognements laissent entendre de subtiles harmoniques à la Attila Csihar, mais on peut aussi entendre quelquefois des vocalises indescriptibles, entre le souffle et le hurlement du vent, le genre de truc qui brouille encore plus les pistes et déshumanise de belle manière le rendu global. Tous ces éléments donnent à la musique d’Ôros Kaù un feeling occulte et incantatoire bien oppressant, tout comme la gestion des différentes strates sonores, car au-delà de l’apparente violence qui s’étend, des éléments discrets, en fond, incrémentent le sentiment d’instabilité, comme ce solo de guitare sur "Belial", autonome dans sa construction, il sévit sans aucune attache au reste de la musique. Un autre point non négligeable est le drumming. Celui-ci, intense et implacable est très varié, et même si le mix ne permet pas de déceler les moindres subtilités des parties de batterie, celles-ci sont bel et bien au rendez-vous et ajoutent à la violence de la variété et de la nuance.

Entre hystérie, occultisme pénétrant et black metal sauvage et incisif, Ôros Kaù parvient grâce à "Imperii Templum Aries" à démontrer que le black metal peut conjuguer traditionalisme esthétique et éléments plus modernes, devrais-je dire "post", sans toutefois sonner cliché. Ce que l’on recherche dans ce genre musical extrême, c’est l’oppression, la tension, le voyage vers des mondes angoissants et mornes et les 8 titres présents sur l’album synthétisent tous ces éléments grâce à un agencement simple et efficace.


Trrha'l
Septembre 2020


Conclusion
Le site officiel : www.facebook.com/oroskau