Fort d'une excellente réputation depuis sa formation en 2003, le quatuor anglais ne jouit pourtant pas d'une forte reconnaissance dans le milieu et surtout en France. Faut dire que le style est plutôt hybride pour le métalleux lambda, à savoir un savant mélange entre le post-punk apocalyptique de Killing Joke ou encore de Voivod, le noise rock et le hardcore. Un cocktail que l'on peut taxer d'opportuniste, si October File n'avait pas reçu la bénédiction de pontes du genre à savoir Jaz Coleman, himself, qui avait poussé la gueulante sur le deuxième album du groupe "Holy Armour..." ou encore Justin Broderick (Godflesh, Jesu...) qui s'est chargé de remixer entièrement leur troisième album "Our Souls To Tou". Au vu de telles références, l'on s'imagine October File lorgner vers l'indus, toutefois le groupe a su garder un esprit rock très organique, ne puisant dans l'indus que son côté rythmique, hypnotique et direct.

Dès le premier titre "I Fuck The Day", on est sidéré par le riff ultra massif, l'accroche est directe, prenante, rappelant le brûlot qui a déjà incendié nos oreilles avec le "Green Killing" de Napalm Death. Un groove et une science du riff en upercut que l'on retrouvera tout au long de l'album ("Heroes Are Welcome" en est le couronnement ou encore le tonitruant et épique "Elation"). La section rythmique, quant à elle, ajoute un aspect mécanique qui renforce un certain aspect lancinant, fusionnel notamment avec cette basse qui remue les boyaux ("The Water" qui dépasse les 11mn). Le chant bestial de Ben Hollyer est tout aussi redoutable, entre Burton C. Bell (Fear Factory) et Al Jourgensen (Ministry), il apporte une hargne et une amplitude émotionnelle pour mieux servir le discours du groupe. Faut relire le titre de l'album que le groupe a choisi, on est d'accord... c'est tout un programme et pas une mince affaire. October File réussit pourtant ce challenge à parcourir tout un panel d'émotions avec une même force sans jamais fléchir et sans complexes (le très beau titre acoustique "Upon Reflection").

"The Application Of Loneliness..." est produit par Jamie Gomez aux Orgones Studio (Cathedral, Ulver, Altar Of Plagues) et bénéficie d'un son monstrueux, obligatoire pour un rendu apocalyptique. Pour conclure, cet album est une excellente surprise qui mérite toute votre attention, à partir du moment où vous êtes fans de Killing Joke et du "Diatribes" de Napalm Death, de plus les Britanniques ne lésinent pas sur leur pochette depuis le début en faisant appel à Victor Safonkin qui fait ici un clin d'oeil à Magritte. Preuve encore qu'October File ne laisse rien au hasard !

"A Long Walk On A Short Pier"
Note : 13/20

October File nous balance un metal torturé mais qui ne va pas à l'extrême, il reste accessible à tous les amateurs de metal, des riffs saccadés mais très rapides dans un univers assez sombre, peu de place à la fantaisie ou à la blague. Les October File ne sont pas des rigolos, ni même des parodies du metal, c'est un groupe engagé et percutant comme en témoigne le titre "God Hates America". On remarque une grande place laissée aux intros debasse, ces musiciens possèdent une très grosse distorsion qu'ils utilisent perpétuellement autant sur la guitare que la basse, ce qui nous donne une ambiance assez torturée mais aussi mélodique dans la "torturation". La voix, quant à elle, me fait penser à un groupe comme Crowbar mais en version plus aiguë et speedée dans les intonations. A 99% la voix est criarde sauf sur le morceau "Landslide" où elle est mélodique. 11 titres de qualité assez bien produits, le tout sonne assez déjà vu, comme de nombreux groupes dans le style, après il est très dur de se différencier des autres, pourquoi écouter plutôt ce groupe qu'un autre, là est le problème... A défaut d'innovation dans le style, les October File font du très bon metal légèrement torturé, si vous aimez le style ou vous voulez le découvrir, écoutez les October File.

Keish Octobre 2004