"Happy"
Note : 18/20
Replongeons dans l’univers d’Oceans. Deux ans après leur triptyque d’EPs, Timo
Schwämmlein (chant / guitare, ex-Sintech, ex-Varg), Patrick Zarske (guitare, ex-Sintech,
ex-Varg), Thomas Winkelmann (basse, Mathyr, ex-Varg) et J.F. Grill (batterie) annoncent
la sortie d’"Happy", leur troisième album.
L’album s’ouvre avec "Parasite", où le son saturé et oppressant du groupe est complété par
des parties vocales diversifiées avant de rejoindre des riffs énergiques et saccadés, mais le
titre est relativement court, et "Spit" prend rapidement la suite, nous ramenant dans la fureur
que l’on connaît du groupe. Des leads mélodieux apparaissent de temps à autre en
arrière-plan pour donner un côté accrocheur aux refrains, puis le groupe enchaîne avec
"Click Like Share" en adoptant des influences indus pesantes qui renforcent la virulence
de ses parties les plus rapides et abrasives. Les racines death metal ressortent sur le final
brutal, puis le groupe s’oriente vers une approche parfois plus planante sur "Let It Burn",
plaçant des passages en voix claire et des moments véritablement apaisants, renforçant
encore plus le contraste avec ceux qui sont explosifs. On repart dans un groove imposant
avec "Self Doubt 24/7", mais les parties vocales les plus lancinantes lui donnent des teintes
étranges, tout comme ce court passage trap, puis le groupe nous met face à "Happy", le titre
éponyme, qui nous permet de respirer pendant que le vocaliste nous transmet son message
pessimiste.
L’instrumentale prend peu à peu de l’ampleur jusqu’à s’embraser et nous mener
à cet étrange final au saxophone, puis c’est aux réseaux sociaux que le groupe s’attaque sur
la vindicative "Slave To The Feed", qui reste lourde et inquiétante et nous propose un duo de
rap qui colle étrangement bien à l’atmosphère. Le groupe revient bien évidemment à sa
rage initiale sur "Breed Consume Die", profitant de chaque étincelle d’agressivité et
d’éléments hardcore pour confirmer sa furie avant de nous emporter dans "The Birth Of
Death" qui revient à certaines tonalités plus accessibles sans renier sa férocité, créant un
contraste encore plus important. La section rythmique prend un rôle beaucoup plus
important en guidant l’intense et émotionnelle "Father?", composition suivante sur laquelle le
vocaliste se déchaîne à nouveau avant de rejoindre "In The End There's Always Pain", le
dernier morceau, qui va tout au long de ses sept minutes, serpenter entre toutes les
influences de la formation, alternant chaos et quiétude avec un naturel grisant.
Avec ce nouvel album, Oceans continue d’exploiter l’intégralité de ses influences, créant un
son toujours aussi rythmé et unique. "Happy" n’est pas empli de pur bonheur comme on
pourrait le croire, il est au contraire un véritable cri de détresse qui doit être entendu.
"Hell Is Where The Heart Is"
Note : 18,5/20
Oceans sort en cette fin d'année 2022 un nouvel album intitulé "Hell Is Where The Heart Is", qui sort chez Nuclear Blast et qui fait suite à trois EPs et un album sortis par Timo
Schwämmlein (chant / guitare, ex-Sintech, ex-Varg), Patrick Zarske (guitare, ex-Sintech,
ex-Varg), Thomas Winkelmann (basse, Mathyr, ex-Varg) et J.F. Grill (batterie).
La voix samplée de "Love" nous ouvre lentement les portes de l’univers du groupe tout en
proposant quelques sonorités inquiétantes en arrière-plan, juste avant qu’"Awaken" ne vienne
nous faire remuer le crâne. Les hurlements bestiaux et le groove accrocheur laissent place à
une voix claire sombre, tout en restant dans ce style contrasté aux diverses influences entre
mélancolie et puissance brute. Mais la rage refera rapidement surface pour alimenter le
mélange, qui s’enflammera avec "Sulfur" et sa rythmique agressive. Blast et hurlements se
répondent pendant que l’énergie brute ne cesse d’exploser avec des sonorités modernes en
arrière-plan, créant une tornade de lourdeur. Les cris du vocaliste cessent uniquement pour
laisser l’enfer s’ouvrir sur le break, puis l’inquiétante voix claire nous rejoint avant qu’un
passage terriblement lancinant ne nous accompagne jusqu’à "Skin" Les
tonalités douces et entêtantes nous portent jusqu’aux refrains ravageurs, envahis de cette
noirceur qui perdure en permanence, reliant entre eux les deux aspects du morceau, qui
cesse soudainement.
On poursuit sur Longing, un court interlude qui laisse les voix samplées nous expliquer
le concept du groupe, puis "Home" vient nous enchanter avec un chant clair épuré suivi par
une rythmique accrocheuse. Les riffs proposent une certaine simplicité efficace qui n’hésite
pas à s’enflammer ou à se parer de claviers entêtants tout en laissant le vocaliste nous livrer
des hurlements viscéraux. "I Want To Be Whole Again" prend la suite, exposant sa mélancolie
avec un groove progressif et une fausse quiétude qui sera écrasée par les riffs lourds,
accompagnant les parties vocales. Le mélange sombre se renforce peu à peu avant de
laisser le final imposant nous conduire à "Living=Dying" et son agressivité abrasive. Le titre
nous propose un contraste intéressant entre les cris accompagnés par le blast et les
couplets plus doux mais tout aussi intenses, avant de laisser la rythmique s’éteindre dans le
vide, après un dernier hurlement de peine.
On continue ce voyage intérieur avec "Clarity", un interlude qui prend tout son sens
après avoir enduré la déferlante entière, qui prenait fin avec "Living=Dying". Et si vous pensiez
que le groupe nous offrait un moment de répit, vous vous trompez, car la voix s’enfonce
dans le désespoir, surmonté de quelques effets cybernétiques qui nous mènent à la
saisissante "If There's A God She Has Abandoned Us" et à ses tonalités calmes mais
mélancoliques. On ressent immédiatement toute la tristesse dans la voix du chanteur,
seulement accompagné par un piano assez doux avant que la batterie ne fasse son
apparition, suivie après un petit moment par les guitares et la basse pour une explosion
aussi intense que profonde. Mais le son finira par s’apaiser pour s’enflammer à nouveau, et
nous guider jusqu’à "I Sing Alone" et ses tonalités emplies de noirceur qui rejoignent une
lourdeur écrasante et agressive. On retrouve une énergie brute et sincère complétée par
des hurlements bestiaux, quelques effets entêtants et cette rage brûlante qui contraste avec
la froideur des parties claires et qui atteindra son paroxysme sur le final, juste avant que "Hell
Is Where The Heart Is", le titre éponyme, ne vienne nous frapper avec des sonorités vives et
énergiques qui font appel à toute la haine, toute la puissance et toute la violence que le
groupe peut déployer par vagues de lourdeur saccadées pour appuyer leur message avec
une fois de plus cette sincérité abrasive et impressionnante.
Ce nouvel album permet à Oceans de continuer à alimenter son univers
entre lourdeur et désespoir. "Hell Is Where The Heart Is" laisse les musiciens
nous exposer une réalité blessante, mais également un espoir qui semble perdurer malgré
les épreuves.
Bravo Oceans !
"The Sun And The Cold"
Note : 18/20
Pour créer un groupe, il n’y a désormais plus besoin de vivre dans la même ville ou le même
pays, comme le prouve Oceans. Créé entre l’Allemagne et l’Autriche en 2017, le groupe
nous offre son premier album après avoir sorti deux EPs en 2019. Intitulé "The Sun And The Cold", il est le fruit du travail de Thomas Winkelmann (basse, Mathyr, ex-Varg), J.F. Grill
(batterie), Patrick Zasch (guitare, Sintech, ex-Varg) et Timo Schwämmlein (chant / guitare,
Sintech, ex-Varg) dans un registre orienté post-metal / metalcore. Intéressant, n’est-ce pas ?
Eh bien on va écouter ça ensemble !
"The Sun And The Cold", le premier morceau, attaque fort. Une rythmique massive, un son à
la fois lourd et planant. Mais les riffs vont rapidement s’apaiser et laisser place à un chant
clair intense, qui se mue parfois en hurlements profonds. La très accrocheuse "We Are The
Storm" prend la suite, et cette fois la plongée dans le post-hardcore est totale. Le titre est
aérien, un brin technique et surtout intense. Le mélange des deux types de chants passe
parfaitement sur ce titre, et le groupe enchaîne avec un break plus lourd avant de repartir
sur un dernier refrain, plus léger. Comme son nom l’indique, "Dark" est plus sombre, plus
agressive, mais étrangement les passages aériens dissonants sont également plus
prenants. L’oppression sera parfois de mise, mais le morceau freinera à nouveau
brusquement sur la fin pour revenir à sa vitesse de croisière.
Petit passage en douceur avec "Paralyzed" et sa rythmique entraînante plutôt lente fera son
effet. Le son reste assez lourd, et quelques growls se feront entendre, mais on reste sur une
base post / prog de très bonne facture, avant une explosion finale. "Take The Crown" prend la
suite avec une base metalcore plus affirmée que les morceaux précédents. Le morceau est
énergique mais empli de désespoir, et les hurlements nous le font ressentir. Le break
changera radicalement l’atmosphère, avant de nous faire passer sur "Shadows". A nouveau le
contraste est assez saisissant, puisque l’on part sur une rythmique plutôt lourde, qui va
soudainement s’emballer, puis ralentir… Cependant le morceau reste cohérent avec le style
engagé dès le début. L’introduction de "Legions Arise" vient calmer le jeu de manière radicale,
avec des sonorités prog aériennes, mais on sent que la rage revient vite sur le devant de la
scène. Et à nouveau l’ambiance sera douce, mélancolique et emplie de tristesse pour
"Polaris", même lorsque le clavier laisse place aux autres instruments. Mais le titre passe
bien, et on se surprend à hocher la tête.
Retour de la hargne avec "Truth Served Force Fed", et c’est une rythmique presque martiale
qui frappe façon metalcore sur le refrain, avec toujours ces ambiances planantes en fond,
alors que "Water Rising" est beaucoup plus sombre. Une voix inquiétante nous parvient, et le
groupe, qui était jusqu’alors relégué à l’arrière plan, revient à la charge. Une composition
bien étrange, mais qui reste dans l’univers d’Oceans. Dernier titre, "Hope" compte
énormément sur la voix du chanteur et sur une certaine progression dans la rythmique pour
séduire, ce qui sera une réussite. L’explosion est intense, le morceau éclate littéralement et
ne reviendra pas à la normale. Il s’éteindra dans l’air, avec un piano lointain.
La version limitée contient trois titres de plus. Une version beaucoup plus courte de "We Are
The Storm" prévue pour une diffusion radio, ce qui coupe cependant l’intensité du titre en le
raccourcissant, ainsi que deux remix de "Polaris". "Polaris - Born Free Remix" est un titre froid,
brumeux et distant qui jongle avec des sonorités électroniques et des effets, alors que
"Polaris - Don’t Breathe Remix" rejoindrait presque une sorte de techno minimale aux
percussions entraînantes.
Pour une découverte, Oceans est une excellente surprise. Les ambiances de "The Sun And
The Cold" sont intéressantes, riches et parfaitement exploitées par un groupe qui maîtrise
son art. Les remix ne satisferont que les plus gros fans, en tant que raretés à posséder,
mais l’album de base suffit pour comprendre l’univers du groupe.
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