Et un retour discographique de groupe légendaire, un ! Eh oui, comme Carcass, At The Gates, Celtic Frost, Pestilence et les autres, Morgoth, groupe allemand de death metal des 80's succombe à la tentation et revient aux affaires avec un nouvel album. Attendu depuis presque 20 ans par des fans n'ayant plus beaucoup de cheveux sur le crâne, ce quatrième album officiel voit enfin le jour.
Du line-up fondateur, plus personne ne subsiste et c'est là le point le plus regrettable. Présents à la reformation de la bande en 2010, le guitariste Carsten Otterbach et le superbe (par le talent) growleur Marc Grewe ont déserté les rangs. Ce qui nous faisait vraiment flipper, avouons-le, car Grewe était la VOIX de Morgoth, cette voix déchirée, aiguë typique des années 80, une putain de voix de malade, naturelle et enragée, qui foutait les jetons (les deux EPs "Resurrection Absurd" et "The Fall" de 1989/1990 ainsi que l'album "Cursed"), chose que beaucoup de gruikeurs modernes semblent ignorer.
Heureusement, du line-up classique ayant accouché des référentiels "Cursed" et "Odium", il demeure deux survivants, le guitariste Harald Busse et le bassiste, ici reconverti à la seconde guitare, Sebastian Swart. Renforcé par Karsten Jagger de Disbelief au chant, Marc Reign (ex-Destruction) aux fûts et Sotirios Kelekidis à la basse, Morgoth nous replonge en plein dans cette période dorée du death metal. Oublié l'expérimental (mais très intéressant) "Feel Sorry For The Fanatic", album ayant précédé le split du groupe et laissé un amer goût d'inachevé aux fans de la première heure, les Teutons nous proposent une sorte de chainon manquant entre le puissant "Cursed" et le plus atmosphérique "Odium".
Majoritairement mid-tempo, les morceaux destructeurs sont des pépites d'efficacité et de simplicité (preuve que la simplicité a du bon, la chanson "House Of Blood", constituée d'un seul riff mais décliné de différentes façons, est monstrueuse; le talent de Morgoth fait que l'on ne s'ennuie absolument pas à l'écoute de ce titre), comme des tanks réduisant en miettes, centimètre après centimètre, les corps de milliers de soldats agonisants. C'est paradoxalement en écoutant ce genre de death que l'on se sent vivant. La patte Morgoth, immédiatement reconnaissable, est toujours là : ces riffs sinueux, groovy et ravageurs font un tabac. La face plus atmosphérique des Allemands se dévoile lors de morceaux comme "Nemesis", brute et à la ligne de gratte pernicieuse, ou lors de deux instrumentaux : "Ungod", placé en milieu de disque s'étire sur plus de 6 minutes, captivant, hypnotisant, dynamisant la structure de l'album ; et "The Dark Sleep" placé en clôture, plus convenu mais tout aussi habité.
Les choix d'intégration de Karsten aux vocaux et Marc à la batterie sont judicieux. Le premier annihile nos inquiétudes quant au caractère irremplaçable de Marc Grewe, éructant des paroles intelligibles comme un Saint-Bernard enragé (il y a une certaine similitude physique il faut dire), assurant comme un diable et donnant de sa personne (les textes semblent plutôt personnels et son interprétation est pleine d'engagement). Son timbre convient parfaitement au groupe et se mêle facilement à la musique. Le second, explose tout sur son passage, influant une grosse dose de dynamisme et de technique dans ce bloc compacte de saturations grasses et venimeuses. C'est un vrai plaisir que de le suivre et se perdre dans ses martèlements diaboliques et fascinants.
Morgoth, avec "Ungod", n'entache pas sa carrière passée et retrouve sa place perdue il y longtemps sur la scène death européenne. Un excellent retour aux sources.
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