Le groupe
Biographie :

Mayhem est un groupe de black metal norvégien, originaire d'Oslo. La carrière de Mayhem fait grandement polémique, en particulier en raison de la violence des prestations scéniques, mais aussi suite au suicide du chanteur Per Yngve Ohlin (Dead) en 1991, et à l'assassinat du guitariste Øystein Aarseth (Euronymous) par l'ancien membre Varg Vikernes (Count Grishnackh), de Burzum. À ses débuts, le groupe sort une démo et un EP qui devinrent très influents, et parviendront à les populariser aussi bien de manière positive que négative. Le groupe se sépare après le meurtre d'Aarseth, quelque temps avant la parution du premier album "De Mysteriis Dom Sathanas", considéré par la presse spécialisée comme un classique du genre black metal. Les anciens membres restants Jan Axel Blomberg (Hellhammer - batterie), Jørn Stubberud (Necrobutcher - basse) et Sven Erik Kristiansen (Maniac - chant)) se réunissent deux ans plus tard aux côtés de Rune Eriksen (Blasphemer), le remplaçant d'Aarseth. Maniac et Blasphemer ont depuis été remplacés par Attila Csihar pour l'un, et Teloch et Ghul pour le second.

Discographie :

1987 : "Deathcrush" (EP)
1994 : "De Mysteriis Dom Sathanas"
1997 : "Wolf's Lair Abyss" (EP)
2000 : "Grand Declaration Of War"
2004 : "Chimera"
2007 : "Ordo Ad Chao"
2008 : "Life Eternal" (EP)
2014 : "Esoteric Warfare"
2019 : "Daemon"
2021 : "Atavistic Black Disorder / Kommando" (EP)


Les chroniques


"Atavistic Black Disorder / Kommando"
Note : 15/20

Mayhem est de retour avec un EP, "Atavistic Black Disorder / Kommando" de son petit nom, pour combler l'attente en cette période trouble et il nous réserve quelques petites surprises que peu ont dû voir venir. Si le groupe balance un indéit et remet à disposition les deux inédits disponibles sur l'édition digibook de "Daemon", il nous envoie aussi quatre reprises de punk.

Ce qui est finalement moins surprenant quand on repense aux débuts du groupe avec "Deathcrush" qui certes se faisait bien plus extrême que du punk classique mais qui gardait la même urgence et le même côté primitif. On retrouve donc ici des reprises de "In Defense Of Our Future" de Discharge, "Hellnation" des Dead Kennedys, "Only Death" de Rudimentary Peni et "Commando" des Ramones. Des reprises plutôt fidèles aux versions d'origine, même au niveau du chant d'Attila qui prouve que ces morceaux font partie de ses influences. Il faut d'ailleurs prendre la présence de ces reprises comme un manifeste, une façon de dire que ça aussi ça fait partie de l'héritage Mayhem d'une façon ou d'une autre. Pour le Mayhem pur et dur d'ailleurs les hostilités commencent avec l'inédit "Voces Ab Alta" qui nous fait entendre dès les premières secondes des arpèges bien malsains typiques du groupe. On retrouve donc un Mayhem proche de ce que l'on pouvait entendre sur "Daemon" avec une orientation plus dissonantes et plus proche du black metal que ne l'étaient les chaotiques (et excellents d'après moi) "Ordo Ad Chaos" et "Esoteric Warfare". Un morceau une fois de plus assez malsain et plus direct que ce que le groupe nous avait donc proposé sur les deux albums cités et qui confirme que Mayhem a décidé une fois de plus de brouiller les pistes en changeant de visage pour la énième fois.

Ce qui est tout à son honneur, entendre un groupe là depuis aussi longtemps tenter autant de choses, se remettre constamment en question et n'en faire qu'à sa tête est assez réjouissant. Même si certaines de ses expérimentations ne sont pas passées chez tout le monde (on retiendra l'accueil assez mitigé réservé à "Grand Declaration Of War"), la démarche est clairement respectable. De toute façon, le groupe a prouvé à de multiples reprises qu'il ne faisait que ce qu'il voulait et qu'il se foutait de ce qu'en pensent les autres, il a d'ailleurs bien raison. Pour en revenir à ce nouvel EP, les deux morceaux suivants sont donc les deux morceaux bonus présents sur l'édition digibook de "Daemon" : "Black Glass Communion" et "Everlasting Dying Flame", ce qui est un bon moyen d'avoir ces titres sous la main pour ceux qui auraient manqué l'édition en question. Le premier se montre parfois étonnamment groovy (rappelant par là même les origines du groupe) mais reste évidemment toujours aussi malsain, le second, quant à lui, se fait plus froid, plus dissonant et plus méchant, et du coup parfois presque plus proche de "De Mysteriis Dom Sathanas" dans l'esprit. Là encore c'est du Mayhem dans la lignée de ce que propose "Daemon" et ces deux-là sont eux aussi très bons donc rien que pour ces trois morceaux-là "Atavistic Black Disorder / Kommando" vaut le coup. Après c'est votre goût plus ou moins prononcé pour le punk qui décidera.

Un nouvel EP qui permet de remettre la main sur deux morceaux bonus avec un inédit en cadeau et quatre reprises punk, un registre sur lequel on ne voyait pas forcément Mayhem s'aventurer. Une nouvelle surprise pour un groupe qui en a décidément pas mal dans les poches en attendant un nouvel album dans un futur plus ou moins proche.


Murderworks
Octobre 2021




"Daemon"
Note : 17/20

On aura lu tout et son contraire sur Mayhem. Entre ceux qui aiment, ceux qui détestent, ceux qui les prennent pour des guignols suite aux pitreries scéniques d'Attila, ceux qui trouvent que le groupe est mort avec Dead et Euronymous, il y a autant de sons de cloches différents que de personnes. Sauf que le groupe se fout de tout ou presque et ne s'est pas privé d'expérimenter à tout-va depuis le fondateur "De Mysteriis Dom Sathanas". Une expérimentation qui continue sous une forme différente avec "Daemon", nouvel album de la bête que l'on va examiner de plus près.

Cette fois, les anciens sont allés enregistrer leur album dans l'antre des jeunes loups à savoir le studio Necromorbus qui n'est autre que l'antre de pas mal de groupes de black orthodoxe. Mayhem aurait t-il donc succombé à la vague en question en adoptant tous ses codes ? Si vous connaissez bien la musique des gaillards, vous vous doutez bien que non. Seulement comme ces gars-là ne se refusent rien, ils se sont dit qu'ils allaient encore mixer d'autres éléments à leur musique histoire qu'elle reste en mouvement constant. Je fais partie de ceux qui ont aimé "Ordo Ab Chao" et "Esoteric Warfare" avec leur folie déconstruite et leurs accents psychopathes qui montraient un groupe prêt à aller n'importe où n'importe quand pourvu que cela sonne sale, vicieux et taré. "Daemon" emprunte une autre voie et apparemment le groupe voulait cette fois retrouver quelque chose du Mayhem old school sans jamais faire un retour en arrière pour autant. Plutôt retrouver une forme de primitivité, d'agression brute, en bref simplifier le propos après des albums techniques, tortueux et bien trop barrés ou décousus pour certains. "The Dying False King" ouvre donc le bal et on sent effecitvement un black metal bien plus proche des origines avec des riffs toujours aussi malsains, sales, dissonants et tarés. Le son est lui aussi moins magmatique et plus froid, plus sec et tranchant histoire de coller à cette orientation plus directe. La patte Mayhem est immédiatement identifiable dans les riffs, les leads, les arpèges. Le groupe n'est plus non plus dans cette agression quasi constante à coups d'accélérations ravageuses et innattendues, cette fois il n'hésite pas à lever le pied pour plomber l'ambiance et vous lâcher une enclume sur le coin de la tronche sans prévenir. Pour autant, cet album sonne clairement méchant, sale, vicelard, tordu, Mayhem quoi !

Attila utilise toujours ses techniques d'opéra pour nous placer des lignes de chant clair possédées et habitées qui rendent la musique de Mayhem définitivement malade. Certains pointeront ces fameuses dissonances dans les rifs qui peuvent effectivement rappeler la scène orthodoxe mais Mayhem s'est approprié tout ça et en a fait sa tambouille. "Bad Blood" pourrait presque débarquer d'un croisement entre "De Mysteriis Dom Sathanas" et "Wolf's Lair Abyss" avec ce black metal brutal et malsain aux riffs dissonants. D'ailleurs, ce morceau bénéficie d'un excellent solo et voilà une chose que l'on n'attend pas d'un groupe comme Mayhem ! "Malum", quant à lui, nous sort des riffs qui sentent fort l'époque "Deathcrush", ce qui prouve en passant que Mayhem a vraiment voulu retrouver un feeling plus cru et sauvage sur ce nouvel album. Le groupe a une fois de plus évolué et changé de forme mais adopte cette fois un visage peut-être plus accessible pour les puristes. Ceux qui avaient fui les deux derniers albums trouveront peut-être quelque chose à se mettre sous la dent avec "Daemon", mais qu'ils ne prennent pas cette nouvelle orientation pour acquise parce qu'on sait pertinemment qu'avec Mayhem il faut s'attendre à tout. Le groupe ne s'est quasiment jamais répété et chaque album amenait quelque chose de différent, que ce soit la technicité et la brutalité de "Wolf's Lair Abyss", les expérimentations parfois hasardeuses de "A Grand Declaration Of War", le visage plus direct de "Chimaira" ou le pétage de plomb des deux précédents méfaits le groupe a toujours un moyen de nous en coller une derrière les oreilles et d'emmerder les soit-disant piliers du genre qui prétendent savoir ce que le black metal en général et Mayhem en particulier doit être. A noter que l'édition limitée de l'album en CD propose deux morceaux supplémentaires qui sont de vrais inédits et non pas des reprises, remix et autres versions live ce qui n'est pas négligeable.

Mayhem nous livre donc cette fois un album plus direct, plus old school dans l'esprit sans jamais revenir en arrière pour autant. Le black metal du groupe est toujours aussi malade, malsain, violent et froid et malgré les multiples changements de visage depuis ses débuts, sa folie est bien reconnaissable et se fait une fois de plus sentir sur "Daemon".


Murderworks
Novembre 2019




"Esoteric Warfare"
Note : 12/20

Il y a sept ans de cela, "Ordo Ad Chaos", le précédent méfait des Norvégiens, m'avait sidéré. Pour saisir l'esprit particulier de cet opus, à la fois labyrinthique et sombre, il était clair que de simples écoutes superficielles n'étaient pas suffisantes, ne serait-ce que pour oublier le son "carton pâte"... Le retour d'Attila n'y était pas pour rien, et a véritablement contribué à rendre l’œuvre la plus abstraite et noire du groupe : un  véritable cauchemar aussi oppressant qu'énigmatique à l'image de son histoire !! Mais le départ de Blasphemer (guitariste et principal compositeur), quelques temps plus tard amorçait un nouveau cycle pour Mayhem qui les collectionnent... Et cet "Esoteric Warfare" arrive donc cette année, pile poil pour couronner les 30 ans d'existence du groupe.

Les premiers titres mis en ligne par Season Of Mist m'avaient plutôt refroidi.... ce que je considère comme bon signe ! A l’exception du single "PsyWar" dont la seconde partie, monstrueuse, transcende carrément un début convaincant mais sans surprise. "Esoteric Warfare" s'avère plus "accessible" niveau prod', le groupe ne ressent pas cette fois-ci le besoin de se démarquer. Préférant jouer des codes de ses précédents albums, des plans biscornus aux estafilades guitaristiques, des crises de grindcore aux parades militaires, le tout plongé dans une ambiance mystique et malsaine, Mayhem se dégonfle à nous surprendre... jusqu'à nous lasser. Composé en grande partie sur un même modèle (gros blasts schizo / mid tempo vénéneux), les Norvégiens s'en tirent assez bien en jouant la carte du suspens sur "MILAB" ou encore "Posthuman", aux ambiances glacées... mais plutôt prévisibles. Alors Mayhem a-t-il atteint ses limites ? Ou alors la "faute" au remplaçant de Blasphemer, Teloch, qui n'arrive pas à s'imposer et reste dans l'ombre de son prédécesseur ? En tout cas, la bête se fait bien moins menaçante et imprévisible qu'elle n'a pu l'être auparavant, n'en déplaise à Hellhammer qui fait le boulot "sagement" ou encore à Attila qui semble un peu tout seul à se décarcasser avec son arsenal de voix improbables, à vouloir transcender l'ensemble de l’œuvre.

Passée l'excitation d'avoir dans les oreilles le nouveau Mayhem, cet "Esoteric Warfare" déçoit forcément et étrangement au bout de plusieurs écoutes... semble se désintégrer. Toutefois, s'il l'on considère la discographie des Norvégiens comme inégale et donc organique, il n'est pas exclu que le groupe nous revienne une prochaine fois avec un chef d’œuvre.


Boris
Juin 2014


Conclusion
Le site officiel : www.thetruemayhem.com