"How Do We Want to Live?"
Note : 16/20
Vous les connaissez probablement déjà, mais Long Distance Calling reviennent avec "How Do We Want to Live?", leur septième album. Depuis leur formation en 2006, David Jordan
(guitare), Janosch Rathmer (batterie), Florian Füntmann (guitare) et Jan Hoffmann
(basse) nous abreuvent régulièrement de leur musique entre post-metal, ambient et metal
progressif. Bienvenue dans leur univers.
Limiter le style du groupe à quelques étiquettes serait une erreur. Une énorme erreur. Et
pour cause, les quatre musiciens n’ont pas de limites, ils font ce qu’ils veulent. Des samples,
des rythmiques alambiquées, des riffs aériens, des passages plus simples mais tout autant
efficaces… Le quatuor modèle son monde à son image, et son image est très souvent
instrumental. Pour moi, un album de Long Distance Calling est la bande-son d’un moment,
la bande originale d’une partie de la vie. Et ce n’est probablement pas anodin que les deux
premiers titres soient nommés "Curiosity". Hommage au rover qui parcourt Mars ? Très
probablement, et on le confirme avec ces samples vocaux ainsi que ces sonorités
modernes.
Puis l’album s’enchaîne, titre après titre, ambiance après ambiance. Des
passages electro, des passages acoustiques, des samples, une rythmique lourde, un riff
calme et prog, tout y est. Et si les quatre instruments accompagnés de samples ne vous
suffisent pas, des cordes sont également au programme pour "Fail / Opportunity", ainsi que le
chant de Eric A. Pulverich (Kyles Tolone) sur "Beyond Your Limits". Comparé aux autres
albums, il est pour moi plus calme et plus doux, ce qui se justifie par un climat figé par
rapport à la crise du Covid-19, ce que confirme le groupe, mais également plus de
découvertes et d’explorations musicales, ce qui est suggéré par la pochette.
Pour moi, la description de la musique de Long Distance Calling est simple : n’attendez
rien, car tout peut arriver. Et "How Do We Want to Live?" ne déroge pas à cette règle. Les
différentes influences du groupe virevoltent en permanence, et le dépaysement est total.
"Boundless"
Note : 16/20
Si le metal est souvent caricaturé par des hurlements et des rythmiques violentes, certains
groupes, comme Long Distance Calling, échappent à ces clichés. Créé en Allemagne en
2006, le groupe a terminé la composition de "Boundless", son sixième album. Si le groupe n’a
plus de chanteur depuis deux ans, il peut compter sur David Jordan et Florian Füntmann
aux guitares, Jan Hoffmann à la basse et Janosch Rathmer à la batterie, pour créer des
riffs qui mêlent habilement post-metal et metal progressif pour des ambiances à couper le
souffle. Nombre de samples sont présents, mais le groupe va vous faire voyager.
"Out There" aura la lourde responsabilité de débuter cet album. Alors que l’on sent une basse
rocailleuse et résolument metal qui gronde au loin, la batterie tempère le tout pour l’arrivée
des guitares. Si la rythmique semble sur le point d’exploser, c’est par des riffs
atmosphériques et mélodiques que cette explosion se traduira. Le groupe aura beau
reprendre un son plus imposant, c’est l’aspect mélodique qui domine le tout. Après un (très)
long passage en son clair, les Allemands reviennent progressivement à leur rythmique de
base grâce à un solo criard au possible avant "Ascending". Autre titre à l’aspect imposant, il
est en fait très axé sur la technique et des riffs qui mélangent sonorités psychédéliques et
ambiantes. Si ce titre produit un son beaucoup plus alambiqué, il n’en reste pas moins
entraînant, et très différent d’"In The Clouds", la composition suivante. La où la première usait
d’une grande technicité, la deuxième abuse de riffs répétitifs hypnotisants pour séduire
l’auditeur et le transporter littéralement au niveau de la stratosphère via une rythmique qui
se durcit au fur et à mesure. On continue sur "Like A River", qui prendra le temps d’arriver
jusqu’à nous, mais qui capture progressivement notre attention jusqu’à nous captiver dans
des mouvements qui semblent répétés, mais qui diffèrent en fait légèrement.
"The Far Side" tire sa puissance des samples qui réussissent à embellir des passages que le
groupe aurait laissé vides, grâce à des claviers au son très prog qui raviront probablement
les fans de ce style, mais qui me laissent personnellement de marbre, du moins jusqu’à la
moitié du titre, ou quelque chose m’interpelle, alors qu’"On The Verge", un titre extrêmement
lent, peut captiver l’attention dès le départ avec des sons presque éthérés. Les riffs qui
viennent se greffer à ces nappes de claviers sont remplis d’harmoniques qui offrent à l’esprit
de l’auditeur de vagabonder. A chaque coup d’harmonique, on sent que la rythmique est sur
le point de partir, mais ce ne sera finalement pas le cas, malgré une tension palpable.
"Weightless" arrive à point nommé pour gérer la frustration, mais ce titre qui aurait pu être
prometteur souffre du contre-coup que nous a infligé la composition précédente. Je suis alors
incapable d’accrocher aux riffs magnifiques que les Allemands nous offrent. Le dernier
morceau, "Skydrivers", laisse une place évidente à la basse. Sous des riffs qui sonnent
comme une bande-son d’un western futuriste se cache finalement la rythmique la plus
martiale de l’album, avec des guitares rapides et mélodiques à la fois, mais qui finiront par
s’évaporer dans le néant.
Je déteste le metal progressif. Mettre autant de temps à arriver pour finalement profiter
quelques secondes, voire minutes si on a de la chance, d’une rythmique intéressante, et
finalement la voir s’effilocher est pour moi très frustrant. Mais cet album possède quelques
sons, quelques accroches, quelques riffs qui me parlent. Il ne sera probablement pas
l’album de l’année, mais il est certain que Long Distance Calling a retenu mon attention.
"Trips"
Note : 18/20
C'est au milieu de l'enregistrement de "Trips" que le chanteur et claviériste Marsen Fischer décide de quitter le groupe. Long Distance Calling recrute alors Petter Carlsen en guest pour assurer le chant sur cet album à moitié instrumental aux influences prog.
Long Distance Calling nous prend par la main avec "Gateway", un morceau assurément electro, mais dans le bon sens du terme, nous faisons face à un morceau bien construit aux ambiances multiples, appuyées par des sonorités sorties de nulle part. On aime se perdre dans ce morceau qui coupe d'ailleurs au beau milieu de la deuxième minute pour laisser pleinement place à la batterie, la basse et les guitares ainsi qu'à une voix totalement inhumaine, robotique, qui n'est présente que très brièvement mais juste suffisament longtemps pour prouver que l'on peut utiliser l'electro et les voix modifiées avec un but artistique et sans faire des bouses auditives (dédicace à David Guetta et Jul). Dans un document fourni par Long Distance Calling, M. Ward affirme : "Une des grandes choses à propos de la musique est sa capacité à voyager dans le temps". Eh bien avec ce premier titre, le groupe nous emmène déjà dans le futur. Et ce n'est que le début.
C'est avec le second morceau "Reconnect" que l'on découvre la voix du chanteur qui colle parfaitement au genre progressif et qui rappelle celle de James LaBrie du groupe Dream Theater. Un autre morceau non-instrumental marque la suite de l'album avec un duo piano-voix mais c'est avec "Trauma" que revient la facette instrumental de l'album. Cette fois, plus rien à voir avec "Gateway", tout est plus metal (sans jamais toucher aux sous-genres extrêmes) mais le groupe impose toujours une ambiance, qui, cette fois, semble plus dystopique.
L'album se termine avec le géant de douze minutes "Flux" qui impose un ambiance aquatique, et la seule voix arrive à la fin avec ce speech qui nous servira de conclusion puisque c'est celle que le groupe a choisie : "Si l'univers arrivait à sa fin à chaque fois qu'il y avait une incertitude sur ce qui se passe en lui, il ne serait jamais passé au-delà de la première picoseconde. Et bien sûr, beaucoup ne le font pas. C'est comme un corps humain, vous voyez, quelques coupures et ecchymoses par ci par là ne le blessent pas. Pas même la chirugie importante si elle est faite correctement. Les paradoxes sont le tissu cicatriciel. Le temps et l'espace s'auto-régénèrent et les gens se souviennent seulement d'une version d'évènements qui a autant de sens qu'elle ne le nécessite..."