Le groupe
Biographie :

Kylesa est un groupe originaire de Savannah (Georgie) évoluant entre le sludge, crust punk et psychédélisme. Formé en 2001 avec d’anciens membres de Cobra Kai et The Mugshots, le groupe ne cesse de surprendre depuis par ses albums aux styles inconditionnels où chacun a une chance de trouver chaussure à son pied. Composé de Laura Pleasants et Phillip Cope au chant / guitare, Corey Barhost à la basse / chant, et Jeff Porter et Carl McGinley à la batterie, le quintuor est de retour en 2010, avec un cinquième album, un an après le renversant "Static Tension", à savoir "Spiral Shadow" signé chez Season Of Mist. En Mai 2013, sort le sixième album "Ultraviolet". Le septième album, "Exhausting Fire", sort en Octobre 2015.

Discographie :

2002 : "Kylesa"
2004 : "No Ending" (EP)
2005 : "To Walk A Middle Course"
2006 : "Time Will Fus Its Worth"
2009 : "Static Tension"
2010 : "Spiral Shadow"
2012 : "From The Vaults, Vol. 1" (Compilation)
2013 : "Ultraviolet"
2015 : "Exhausting Fire"


Les chroniques


"Exhausting Fire"
Note : 16/20

Kylesa revient avec son septième album studio, chiffre divin s'il en est. Et pour le coup, le trio de Savannah ne s'est jamais autant approché des hauteurs. Bon, même si le groupe a plus prié Marie Jeanne que la mère du Seigneur, le résultat se trouve tout de même très, très mystique. Kylesa, même s'il conserve un pied dans son style originel, le sludge, sa musique gagne d'autres perspectives. Le prog et le psyché se sont taillés une bonne part des volumes des derniers disques. Aujourd'hui, le groupe de Laura Pleasants plonge sans maillot dans les eaux du psyché ; on pourrait qualifier sa musique, non plus de sludge metal psyché mais carrément de pyschedelic metal sludgy.

S'il y a matière à confusion dans cette phrase et si cela fait un peu trop masturbation intellectuelle pointilleuse, la nuance est néanmoins à établir. Le sludge n'est qu'un détail, un élément certes encore présent, mais n'ayant plus la mainmise sur le son du groupe. Ce psyché metal est à la fois cosmique et terrestre, ses mélodies vocales, ses effets de synthé hallucinés provenant directement de Neptune et ses guitares vaporeuses côtoient, dans un équilibre absolument parfait (rien ne dégouline, les deux facettes se complémentent à merveille), la gravité terrestre avec des riffs de mammouth surplombés par des percussions tribales assommantes. Le fantastique "Crusher", le frappadingue "Inward Debate" et le chef d'œuvre "Blood Moon" en attestent.

Parachevant ce tableau haut en couleurs, les voix ne sont autres que des instruments supplémentaires avec leurs propres lignes mélodiques, créant des morceaux riches, flamboyant et raffinés. Un dynamisme singulier est opéré par le choix de placement des voix, interdépendantes, de Laura Pleasants, sensuelle et évanescente, et de Phil Cope, abrasive ; la première intervient sur les morceaux les plus légers, le deuxième sur les compos les plus dures. Cette séparation stricte (à l'exception de "Lost & Confused"), trop prévisible, est à notre sens le seul défaut de l'album, la grande liberté musicale dont fait preuve "Exhausting Fire" aurait pu être plus démesurée si les chanteurs s'étaient lâchés sur la répartition vocale et ainsi donner lieu à des sentiments insolites et décalés.

La batterie couvre un espace immense et conquiert sans mal aucun chaque mètre cube que compte nos trois dimensions auxquelles s'ajoute à n'en pas douter une quatrième que seul le groupe est capable d'entrevoir. Chaque coup de caisse claire sonne comme un claquement de fouet ; son rendu rappelle le son du dernier album de Pentagram, en plus naturel et en moins surproduit, chose qu'aurait dû faire le groupe de Bobby Liebling. Un système stéréo vous fera découvrir toute l'intelligence de sa production mais aussi de ses arrangements subtils : chaque haut-parleur met l'accent sur des éléments spécifiques du kit sans produire de réelle séparation, créant ainsi un effet de dédoublement ou de superposition. Magistral !

L'album s'écoute facilement d'une traite, la séparation en plusieurs pistes n'était pas indispensable. "Exhausting Fire" est une sorte de voyage vers des paradis artificiels mouvementés où les deux chanteurs servent de guides sous influence. L'édition limitée contient un morceau supplémentaire en guise de bonus, et non des moindres. Il s'agit d'une reprise ralentie, psychée et assurément originale du mythique "Paranoid" de Black Sabbath. Réussie et tout à fait dans le ton de l'album, cette version dopée au LSD est une sorte de fusion inédite entre le morceau original et "Planet Caravan". Cette chanson aurait pu figurer dans la version régulière en plein milieu de la tracklist que ce serait passé comme une lettre à la poste.

Le trio réalise, depuis "Time Will Fuse Its Worth", une évolution logique et une ascension méritée, à grands coups d'albums géniaux et inspirés, surpassant à chaque sortie son prédécesseur ou élargissant sa palette sonore Un sans-faute discographique depuis presque 10 ans culminant en 2015 à ce "Exhausting Fire" de toute beauté.


Man Of Shadows
Octobre 2015




"Ultraviolet"
Note : 17/20

Cinq albums, des splits et démos en tous genres ; en 10 ans de carrière, Kylesa ne cesse de multiplier les productions. Quelques mois après un "From The Vaults, Vol.1" réunissant quelques raretés et nouveautés accueillies avec exaltation, le groupe de stoner sludge géorgien revient le 24 Mai dernier sur les chapeaux de roues avec son sixième full-length : "Ultraviolet", sorti pour la troisième fois sur l’excellent Season Of Mist. Onze titres dans la fidèle lignée du son à la Kylesa, les mêmes ingrédients font mouche. Vous savez, cette atmosphère engorgée d’éléments cosmiques sur lesquels grondent les instruments au rythme militaire dans une cadence graduelle qui finit tôt ou tard par exploser. Dans "Ultraviolet", la recette reste intacte et bon sang, sacrement efficace.

Bien que l’impression de déjà entendu sur de nombreux riffs plane sans trop de mal ("What Does It Take"), rien ne gâche l’esprit de composition vers lequel les cinq artistes tendent depuis leur début. Les voix de Laura Pleasants et Phillip Cope plus présentes que jamais excellent dans un jeu de question / réponse apportant ce petit plus qui créa entre autre la patte du groupe. Alternant généralement phrasés chantés et vociférants, quelques morceaux se veulent complètement aériens avec un chant purement clair ("Steady Breadown" et "Low Tide" qui se suivent parfaitement), en quelque sorte les berceuses de l’album.

En termes de substances sonores, theremin et synthétiseurs s’invitent allègrement sur les morceaux, tenus par les différents membres du groupe. D’après Phillip Cope, aucun des membres n’a simplement tenu son poste de batteur ou de guitariste. Une liberté d’expression et un confort de création qui a su payer. Le groupe a également fait appel à quelques artistes supplémentaires sur l’enregistrement de "Exhale", "Quicksand", "Drifting" et "Low Tide", on notera Jay Matheson à la basse, Steve Sancho aux percussions et Brett Kent aux claviers.

L’artwork signé Shaun Beaudry, illustrateur de Savannah, dont le travail tend principalement vers la représentation de la nature et de l’occulte, représente trois scarabées qui auraient un rapport avec la création de l’album, la façon dont cet animal naît en sortant de la bouse comme l’album à pu naître après tri des bons et mauvais morceaux, d’après les musiciens.

Certainement l’opus le plus complet de leur carrière, à se procurer d’urgence pour tout bon fan du style qui se respecte.


Angie
Juin 2013




"From The Vaults, Vol. 1"
Note : 16/20

Groupe désormais mythique de Savannnah au line-up régulièrement transformé évoluant depuis maintenant une dizaine d’années, Kylesa a su se poser comme l’un des escadrons les plus influants de sa catégorie. Deux ans après la déferlante de "Spiral Shadow", les voici de retour avec un "From The Vaults, Vol. 1" se posant comme le premier acte d’une série qui je l’espère sera concoctée avec autant de soin dans sa continuité.

Assortiment de vieilleries jamais recensées jusque là et de morceaux revisités, le dernier écrin de la bande à double batterie suit la mode de la compilation quasi obligatoire en milieu de parcours.

Les amateurs ne pourront que s’en féliciter, des sympathiques réinterprétations de "111 Degree Heat Index" aux (re)découvertes de quelques raretés libérées des malles du grenier qui prédominent le recueil, aucun titre n’est intégré au hasard et le best semble avoir été trié pour nous garantir la crême des morceaux de choix . La cosmique "Between Silence And Sound" de "Time Will Fuse Its Worth" (2006) connaît sa deuxième version écourtée, retranscrite plus ou moins à l’octave supérieure, tandis que "Bottom Line" de "To Walk A Middle Course" (2005) voit ses légers contrastes dans ses accords d’intro à l’aigu également plus prononcés et au tempo un poil accéléré. Pas de grandes disparités sur les titres déjà popularisés mais des réécoutes originales dont on ne se lasse pas, placées avec cohérence dans l’ensemble de la production.

Après une intro d’une minute sur fond de fûts réverbérés et d’expérimentations aérospatiales, l’énergique "Inverse" expose ses premiers coups de caisse claire militaires qui retentissent comme des projectiles sur les accords de guitare compacts et étouffés et les mugissements débridés de Phillip Cope qui prédominent ici sur ceux de la demoiselle. La rapide "Paranoid Tempo" aux rythmes plus rock’n’roll et entraînants laisse place aux intonations des chromosomes XX dans un duo féminin / masculin aux enchaînements et répétitions performants.

Stoner céleste et notes magnétiques, le ton de l’unique nouveau morceau "End Truth" est donné par un croisement de passages apaisants puis spontanés aux structures éclatées, rappelant fortement l’univers de l’autre groupe en K, Kyuss ayant fait de ce fusionnement sa marque de fabrique.

L’agressivité de "Wavering" interrompu dans sa trajectoire par les doux vocalises de Laura Pleasants rejoint la singularité d’un "Drained" repris de Buzzov•en au résultat bien plus doomesque, apocalyptique. S’ensuit "Set The Control For The Heart Of The Sun", remarquable reprise des Pink Floyd à l’atmosphère épurée envoûtante jusqu’à l’explosion provoquée par l’effervescence rythmique, dont les intonations phoniques sont exploitées au plus grave.

Du Kylesa pur et dur, avec son lot de riffs rentre-dedans simplifiés au maximum, sableux puis ésotériques, de "poum tchak" tapageurs et de solos bien cousus, enveloppés d’une ambiance astrale qui les assoient sur les bancs analogues de quelques Melvins, Neurosis ou autres Cult Of Luna sans trop de difficulté. Final obligatoire sur un set de double batteur à la performance et au carré incontestable. Un jeu tribal de quatre minutes dompté avec classe qui pose le mot de la fin à cet honorable cadeau de fin d’année.


Angie
Janvier 2013




"Spiral Shadow"
Note : 14/20

La nouvelle galette de Kylesa commence avec l’intro tout en douceur de "Tired Climb" et ce pour un court instant, avant que Kylesa ne revienne sur les valeurs sûres de sa musique avec cependant un morceau ici trop bateau à mon goût et ce, bien sûr, comparé à ce qui va suivre, il est efficace certes mais loin d’être The morceau de "Spiral Shadow", toujours adepte de leur guitare envoûtante au morceau dérangeant et tout à la fois planant, voici "Cheating Synergy" annonçant la nouvelle vague que propose Kylesa pour nous esgourdes, un jeu très agréable à la guitare de Laura et Phillip, un tantinet progressif et rentre dedans à la fois, et on ressent ici l’efficacité de deux batterie dont le but n’est pas de donner de la puissance mais une réelle efficacité dans leurs compos, le chant reste assez plat malgré tout, après il faut être très clair Kylesa surprend par les variations de tempo et leur génie à la composition de chaque morceau, le chant étant loin d’être ce qui est la marque de fabrique chez Kylesa.

Changement de dimension avec "Drop Out", au chant poussif, et avec la basse de Corey des plus efficientes sur ce morceau aux allures Dandy dans les deux premières minutes, efficace c’est sûr mais qui se relance réellement vers la fin avec un break de nos deux chers batteurs Eric et Carl dans un duo où chacun montre qu’ici le jeu à deux batteurs tient plus du côté d’une performance que pour imposer du gros sons lourd qui au final se révélerait usant à écouter dans le style musical de Kylesa, là, ça a du punch, ça sonne et c’est intense sans déborder de décibels. "Crowded Road", nous amène vers un côté pseudo-oriental des guitares sans rentrer dans des amas de riffs soûlants et ennuyants, ça monte constamment en puissance avec cependant un petit bémol sur la voix qui semble répétitive par rapport aux premiers morceaux, instrumentalement chaque titre renverse le précédent mais les vocalises restent un peu trop dans une monotonie sans réelle originalité au fil des morceaux. "Don’t Look Back", apparemment le morceau le plus à part de "Spiral Shadow", mais bon dieu que c’est bon de voir et de ressentir une cohésion musicale de la part de l’ensemble des instrumentistes ! "Don’t Look Back" sonne comme une pléthore de riffs que chacun aurait apporté sans réelle cohésion initiale, le tout passé avec brio au mixeur, une pointe de transition très bien gérée, quelques pincées de talents et nous voici avec un morceau que les fans seront surpris d’entendre mais non pas sans en être envoûtés.

En parlant d'envoûtement, "Distance Closing In" et "To Forget", seront classés facilement parmi les titres les plus poignants de "Spiral Shadow", ça nous porte, on se laisse aller sous une basse prenante, la voix de Laura nous emmène dans une spirale psychédélique, avec ces riffs de guitares en montagne russe, ces batteries qui nous submergent, ces deux titres se suivent, il est difficile de s’imaginer autrement, l’un étant comme un morceau de l’autre, une symbiose s’applique ici, et ce n’en est que plus appréciable lors de l’écoute de "Spiral Shadow". "Forsaken" et "Spiral Shadow" se posent tous deux comme des morceaux en opposition de riffs, mélodiques à souhait et malgré tout en continuelle bataille rythmique, comme si chacun se trouve en désaccord avec l’un de ses compères pour au final se retrouver à l’unisson, on sent sur "Spiral Shadow" des batteries qui veulent monter face aux guitares voulant nous envoûter à nouveau, et le tout se pose progressivement dans un mélange naturel où ces opposés semblant initialement se contrer, finissent par s’unifier pour nous offrir un des meilleur morceau de la galette "Spiral Shadow", avec ce morceau au titre éponyme et synomyme d’un concentré de leur talent d’une efficacité redoutable.

Dernier morceau de la galette et semblant parmi les meilleurs à l’écoute "Dust", avec son chant très posé, ses guitares tantôt psyché, tantôt plus classique, on a une fois de plus l’impression que Kylesa joue sur les oppositions, et une fois de plus avec brio, "Dust" nous submerge, ce morceau nous englobe totalement, ça nous prend au bide, comme pour nous mettre notre dose et nous donner envie de relancer la galette avec ces quasi quatre minutes de concentré de riffs, d’originalité se finissant sur un goût de trop peu, et on redemande. Kylesa nous offre ici un nouvel album détrônant les précédents de par son originalité, son côté pesant et mélodique, avec un jeu empli d’opposition et malgré tout en symbiose totale, les fans seront peut-être déroutés au premier abord mais loin d’être déçus par "Spiral Shadow".


Phenix
Décembre 2010


Conclusion
Le site officiel : www.kylesa.com