Le groupe
Biographie :

Johansson & Speckmann est un groupe de death metal en provenance de République Tchèque, de Suède et de Norvège, composé de : Brynjar Helgetun (batterie / Axeslasher, Crypticus, Liklukt, The Grotesquery, ex-Megascavenger, ex-Ribspreader, ex-The Skeletal, ex-Those Who Bring The Torture, ex-Down Among The Dead Men), Rogga Johansson (guitare, basse / Down Among The Dead Men, Fondlecorpse, Graveyard After Graveyard, Necrogod, Paganizer, Putrevore, Revolting, The Grotesquery, ex-Bloodgut, ex-Carve, ex-Dead Sun, ex-Demiurg, ex-Foreboding, ex-Humanity Delete, ex-Megascavenger, ex-Ribspreader, ex-Severed Limbs, ex-Swarming, ex-Terminal Grip, ex-Those Who Bring The Torture...), Paul Speckmann (chant / Cadaveric Poison, Death Strike, Master, ex-Abomination, ex-Funeral Bitch, ex-Martyr, ex-Solutions, ex-Speckmann Project, ex-Walpurgisnacht, ex-Krabathor, ex-War Cry, ex-Assault) et Kjetil Lynghaug (guitare / Echelon, Mordenial, Paganizer, Stass). Johansson & Speckmann sort son premier album, "Sulphur Skies", en Juin 2013 chez Vic Records, suivi de "Mask Of The Treacherous" en Février 2015, de "Edge Of The Abyss" en Septembre 2016 chez Soulseller Records, de "From The Mouth Of Madness" en Mars 2018, et de "The Germs Of Circumstance" en Octobre 2020.

Discographie :

2013 : "Sulphur Skies"
2015 : "Mask Of The Treacherous"
2016 : "Edge Of The Abyss"
2018 : "From The Mouth Of Madness"
2020 : "The Germs Of Circumstance"


Les chroniques


"The Germs Of Circumstance"
Note : 18,5/20

Non mais sans dec’, ils s’arrêtent jamais les deux, là ? Leurs femmes respectives vont se barrer, c’est pire que des bidasses, ils sont jamais à la maison. Avec leur emploi du temps de ministre, les Mc Fly et Carlito du death metal (j’aurais pu dire aussi les Charlie et Lulu, ou les Laurel et Hardy mais faut se mettre à la page) trouvent quand même le temps de se réunir pour pondre un nouvel opus de leur projet commun. Duex ans après "From The Mouth Of Madness", très "Obituarien", avec cette belle pochette gore mais qui veut rien dire, on se retrouve avec un disque finalement bien différent aujourd’hui. Plus sobre dans le design, avec cet artwork qui aurait pu être utilisé pour Blasphemy, Impiety ou Grotesque, le diable et du noir et blanc, vous l’aurez compris, le nouvel album crée la fracture avec son prédécesseur, non seulement visuellement, mais musicalement puisque là, autant l’opus précédent proposait différents climats et approches riffesques en privilégiant la lourdeur, autant ici, c’est sans compromis. Les deux camarades ont enclenché l’hyper vitesse et se sont délestés de tout l’attirail mélodique pour engendrer un véritable déluge de metal bien incisif.

Honnêtement, c’est quand même fou parce que, malgré le fait que ces deux chevelus soient atteints de la bougeotte, avec leurs vingt-huit millions-cinq-cent-milles-trois-cent-douze projets, ils arrivent à se renouveler. Là, l’énergie délivrée est carrément punk hardcore, avec cette riffaille hyper rapide et ces toupas toupas qui se déclinent parfois en blasts. Ce disque, c’est 26 minutes intenses de titres aux messages courts pour que ça rentre dans la tête, à l’instar d’un Max Cavalera qui pond des textes avec trois mots. Là c’est plus évolué mais pas trop loin de ça non plus, forcément faut remplir le vide, surtout que ça trace derrière. Tu aimes faire des tours en bulldozer et tout ravager sur ton passage ? Mets-toi ce disque, ça va exciter tes penchants de petit berzerker en herbe ! Les morceaux se caractérisent par une structuration efficace, très courte intro, "pam" engagement sauvage et incisif, une petite variation en guise de refrain, d’ailleurs, celui de "Take the Lion Share", c’est pas un peu le refrain de "Hepatic Tissue Fermentation II" de Carcass, hein ? Bon, on va pas en vouloir à un des fondateurs du mouvement death metal et à un fournisseur de metal de la mort qui produit 20 disques par an de s’inspirer, consciemment ou inconsciemment d’autres groupes. Surtout que "The Germs Of Circumstance" n’a pas la prétention de créer du nouveau, bien au contraire, ce disque a pour vocation de vous faire transpirer comme à la belle époque.

Ces mecs ont le AC/DC syndrome, c’est-à-dire qu’ils ne proposent rien de réellement innovant, mais le truc fonctionne. Autant le précédent opus était réellement encré dans une démarche ricaine, entre Obituary et Autopsy, avec cette recherche de groove bien particulier, autant là, l’orientation artistique lorgne plus du côté de l’Europe, genre Entombed et Dismember pour le côté suédois de la force, mais on perçoit aussi des relents grindcore, genre comme on en trouve dans les vieux Napalm. Ajoutons à cela la petite touche hardcorisante dont je parlais, et parsemons sur l’ensemble une petite dose de thrash crossover , là, ça résume assez bien le trip de ces deux boulimiques de boulot. Il est presque impossible d’associer tel ou tel titre à tel ou tel style tellement le mélange est homogène. Les huit tracks font office (au fist) de suppositoire, ils partent comme une fusée avec une énergie débordante, comme je le disais, on est bien loin du précédent skeud. Mention spéciale au drummer qui tartine méchamment, et aux solos de guitare qui sonnent vraiment thrashy à souhait, en étant à la fois précis et avec du lâcher-prise.

Si Johansson & Speckmann avait sorti ça en 1989, il serait rentré dans la légende, ces mecs transcendent par le biais de ce nouvel opus le death metal, il y a une fougue thrash omniprésente, une patate incroyable de "gars qui se régalent de jouer", ça lâche les chiens direct pour notre plus grand plaisir masochiste. Le seul truc que je peux reprocher à cette nouvelle réalisation, c’est que, vu qu’elle est courte, on est obligé de se la repasser plusieurs fois d’affilée, et quand on est over busy, appuyer à nouveau sur Play, ça peut vite faire perdre du temps.


Trrha’l
Mai 2021




"Edge Of The Abyss"
Note : 16/20

Il y en a eu des duos mythiques, Stone et Charden, Sonny and Cher, Charlie et Lulu, Andreas et Nicolas, David et Jonathan, Pif et Hercule, etc. Depuis 2013, Rogga Johansson et Paul Speckmann, nos deux comparses, icônes du death metal sans compromis, prouvent que le travail en binôme, ça paye. Réaliser en tout juste 5 ans d'existence, 4 albums et un split, c'est plutôt pas mal !

Paul Speckmann, monsieur Master, américain d'origine et tchèque d'adoption, croise le fer avec Rogga Johansson, véritable hyperactif du death au CV encore plus riche que la liste des épisodes des Feux de l'Amour. Le résultat de cette union poilue : un death thrashy puissant mâtiné de rock'n roll. Speckmann, véritable Lemmy Kilmister des catacombes, éructe son chant comme un buffle en rute pendant que derrière, ça tranche dans le lard avec autant de grâce que Gérard Depardieu sur des rollers. Bref, je fais de l'humour mais Johansson-Speckmann, c'est du sérieux ! En effet, le résultat de cette association de malfaiteurs est très stimulant. Le groove pachydermique côtoie la saleté rock'n roll et laisse entendre le meilleur du death. Rythmiques à la Obituary et Autopsy, relents de chez Master, harmonies qui sentent bon le Carcass de la période "Swansong", quelques leads de guitares à la "Symbolic" de Death, vous mélangez tout ça et vous y mettez beaucoup d'huile, de manière à ce que ça dégouline encore plus, vous remuez et vous enfoncez la mixture au fin fond de vos esgourdes.

Il est clairement identifié ici la volonté de ces messieurs à redorer le blason du death metal en s'appuyant sur ce qui a fait la gloire du style : l'énergie et la crasse ! D'éternels ados ces deux-là ! Au moment où le death devient plus urbain, avec l'apogée du slam, et où "l'émo-mèche" a investi depuis quelques années ce genre de metal, Johansson-Speckmann s'impose en messie du genre, et délivre la bonne parole enrouée à toute une génération qui a tendance à s'égarer. Fuck off la technique, la rapidité, ou encore le guttural "évier qui dégorge" à 23 hertz, ici, c'est une leçon de brutalité primitive, bestiale et foutrement entraînante, qui nous est imposée par nos camarades. C'est la guerre à la hache rouillée, et non avec des armes automatiques ou à tête chercheuse. En effet, je pense que, peu importe l'accueil de leurs productions, avec ce "From The Mouth Of Madness", Speckmann et son pote prouvent que la musique sert avant tout à se faire plaisir, et, par extension, satisfaire les autres. C'est le cas ici, ça sent l'éclate, à grands coups de rythmiques basiques mais terriblement efficaces. La basse est ultra présente et ronronne comme le chat du film Simetierre, les guitares, avec la superprod' du disque, réactualisent le riff de la vieille époque et la batterie, bien en avant, parvient à mettre tout le monde d'accord avec juste un "toupa toupa".

Nous sommes ici en présence d'un disque qui fait l'apologie du "less is more". En même temps, lorsqu'on l'on sait qui est derrière tout ça, il n' y a rien d'étonnant à ce que le résultat soit à la hauteur. Un peu à l'image d'un Chris Barnes avec son Six Feet Under, Johanson-Speckmann parvient à rendre son metal terriblement attractif avec juste 3 vieux trémolos de guitares et 2 riffs en palm muting. Comme le disait le fameux slogan d'une vieille pub de jambon "le plaisir des choses simples", "From The Mouth Of Madness", en plus d'avoir une jolie pochette, vous fera danser jusqu'au bout de la nuit.


Trrha’l
Avril 2018




"Edge Of The Abyss"
Note : 12/20

Johansson & Speckmann est comme son nom l'indique un groupe réunissant Paul Speckmann et Rogga Johansson comme tout le monde devait s'en douter. Déjà auteurs de deux albums le groupe revient avec un troisième méfait "Edge Of The Abyss" et comme vous devez l'imaginer, les deux compères font encore et toujours du death metal.

Là encore ce n'est pas une surprise, on tend vers le death metal old school, le tout mélangé à quelques soupçons de thrash tout de même. Même la durée de l'album est old school puisqu'on dépasse à peine la demi-heure, de quoi faire contraste avec les albums de death de plus d'une heure qui débarquent ces dernières années. Chez Johansson & Speckamnn, la technique n'a quasiment pas un mot à dire, les riffs sont basiques, primitifs, le rythme n'est pas infernal même si quelques petits blasts des familles pointent le bout de leur nez de temps en temps. On reste dans un death lourd, mid tempo, du death basique qui constitue en fait une légère évolution du thrash justement. Ne vous attendez donc pas à une avalanche de notes, à des passages mélodiques à chanter sous la douche ou à de quelconques atmosphères planantes, ici c'est cru et primaire. En même temps, pour ceux qui écoutent du metal depuis plus de six mois il n'y aura aucune surprise, Johansson & Speckmann c'est comme le port-salut, c'est écrit dessus ! On retrouve évidemment le côté putride propre au death des anciens, en particulier sur un morceau comme "Misanthropy" qui balance aussi pas mal de blasts. Bref, les joyeux drilles essaient de varier les plaisirs même si je le redis, on reste en terrain connu, ça permet quand même de dynamiser les morceaux et de ne pas avoir l'impression d'entendre neuf fois le même morceau.

Attention donc à ne pas se tromper, ça reste tout de même relativement basique et primitif, la durée de l'album permet d'ailleurs de ne pas se faire chier parce qu'une heure à ce rythme-là ça aurait commencé à poser quelques problèmes. L'album n'est pas mauvais mais honnêtement les morceaux ne sont pas non plus exceptionnels et quand on voit ces deux noms associés, on s'attend à quelque chose de plus percutant et mémorable. Mais non, "Edge Of The Abyss" est un album de death honnête qui fait assez bien le boulot mais qui ne risque pas de tirer son épingle du jeu au milieu de la masse phénoménale d'albums old school qui nous tombe dessus ces derniers temps. La faute peut-être à la multiplication des projets, parce que ces deux-là ont tendance à partir dans une dizaine de groupes et projets en même temps et l'inspiration finit forcément par se tarir. Encore une fois, "Edge Of The Abyss" passera bien avec des potes, ou sur scène avec des potes mais comparé au reste, il aura du mal attirer votre attention. Quelques mélodies sympas font leur apparition de temps en temps comme sur "Turn It Around" mais ça ne suffit pas à faire tomber l'album dans la catégorie des indispensables.

Niveau son, rien à redire par contre, le son est suffisamment puissant avec une double grosse caisse qui tape bien comme il faut et des guitares bien grassouillettes qui conviennent parfaitement au style pratiqué. Ce troisième album est donc en demi-teinte, pas mauvais mais pas exceptionnel non plus. Il risque donc d'être noyé dans la masse des albums de death old school malgré les deux noms affichés sur la pochette.


Murderworks
Novembre 2016




"Mask Of The Treacherous"
Note : 15/20

Franchement, Rogga Johansson est et demeurera une énigme insoluble. Ce type fait partie d'innombrables combos dont il est le compositeur principal. Il a publié une vingtaine d'albums ces cinq dernières années, tous affilés au death et à ses déclinaisons : death / grind, death / thrash, death old school... Formations qui, à peine formées et auteur d'un disque, la voilà déjà enterrée. Au lieu de ne se consacrer qu'à un seul et unique projet sans limite créatrice... Surtout que, avec une telle production, la qualité n'a pas toujours été au rendez-vous. Et c'est à se demander quand le bougre trouve le temps de dormir... Deathidément, ce mec est un mystère...

Mais aujourd'hui, cette obstination et cette créativité débordante nous amène au cas Johansson & Speckmann. L'association entre le multi-instrumentiste suédois Rogga Johansson (Paganizer, Putrevore, Demiurge et un milliard d'autres...) et la légende Paul Speckmann (Master, Abomination, Death Strike...), le Lemmy du death, sort son deuxième disque tout chaud sorti du brasier de l'Enfer. Pour comprendre l'origine du projet, il faut remonter à quelques années en arrière. Petit rappel des faits, donc : en 2012, Rogga Johansson travaille sur un nouveau projet : Megascavenger. Le but est de composer un album entier, puis, de convier un vocaliste plus ou moins renommé pour chanter sur un titre de l'album et proposer ainsi une sorte d'all star death metal band. Ont figuré sur ce premier album Jörgen Sandström (Grave, The Project Hate, Krux...), Dan Swanö (Bloodbath, Edge Of Sanity, Nightingale), Patrick Mameli (Pestilence) et Paul Speckmann. Depuis, le projet Megascavenger a enfanté un second album (recommandé !) en 2014 avec en guests de luxe Martin van Drunen, Dave Rotten ou encore Kam Lee (ça nous fout la trique un line-up pareil !!!) et a dans la foulée annoncé sa mise au tombeau. Mais nos deux compères Johansson et Speckmann ont gardé le contact et envisagé une collaboration plus sérieuse. Un premier disque a rapidement (pléonasme quand on parle de Johansson) vu le jour. "Sulphur Skies" est un disque de death metal old school, court, basique et frontal ; un disque qui ne faisait aucunement avancer le débat et qui décontenançait certains avec ses riffs simplistes, sa redondance et son style ultra-rabâché.

En ce sens, et connaissant le champ d'expression de Rogga Johansson, il ne vous faudra rien attendre de plus de la part de ce "Mask Of The Treacherous". Mais ce disque est vachement bon. La différence nette entre les autres groupes de Rogga, et ce qui constitue une plus-value majeure, est la VOIX de Paul Speckmann. Cette voix arrachée, grognée, étouffée... unique ! A cinquante-et-un ans, sa voix accuse le poids de l'âge certes (c'est un bon exemple des effets que produit le chant growlé sur les cordes vocales) et a évolué au fil du temps, mais son timbre rugueux, passé au papier de verre, est toujours présent. Hurler come cela à son âge est une vraie prouesse. Nous imputerons également la qualité de l'album aux compos elles-mêmes. Rogga s'est montré inspiré pour le coup et nous propose d'excellents riffs.

Le titre d'ouverture, "Mask Of The Treacherous", est sans doute le meilleur de l'album. Un missile, une grosse branlée. Avec son riff principal ultra-vicieux, sa batterie puissante et véloce, ce bon de basse cataclysmique (dans le bon sens) et Speckmann qui crache son texte avec une dévotion qui fait plaisir à entendre, ce morceau est une réussite de A à Z. Son solo de gratte, mélodique, est détonnant mais excellent. "Inhuman Lust" est dans la même lignée. Ses riffs simplissimes (écriture et et exécution bateau, mais bordel de chiotte, que c'est excellent !) vous transpercent le cerveau. "Through The Filth And Riddled Ages" est un mid-tempo groovy qui fait remuer les cervicales. "The Wicked Marches On", où Speckmann beugle tel un pitbull enragé (ou un cerbère au choix) possède un riff (21ème seconde) à la patate énorme, foutrement jouissif et irrésistible ! "The Bringer Of Pain" continue le massacre avec ses rythmiques thrash et un riff chaloupé sur le refrain, refrain sardoniquement chanté par Speckmann (tendez bien l'oreille, son intonation est vraiment particulière) qui confère au morceau un côté malveillant sous-jacent. "I'll End Your Rotten Life" est du même niveau que "Mask Of The Treacherous", et toujours les beuglements imparables de Speckmann. "Within Reach" est une composition un peu plus nuancée au niveau des tempi mais tout aussi prenante. "Enslaved In Filth" voit le père Speckmann donner tout ce qu'il a et impressionne par sa véhémence. Seul le dernier morceau "A Grave For This World" est plus dispensable.

Nous sommes bien d'accord, Johansson fait du Johansson ad nauseam, c'est du recyclage (une nouvelle dimension du death metal écolo, lancé par Gojira et ses thèmes environnementaux, tiens !), c'est du déjà entendu 1000 fois, mais ça fonctionne et ça poutre. Speckmann pulse le disque d'une façon incroyable. Le jeu de batterie de Brynjar Helgetun dope les morceaux, leur donnant une puissance destructrice. Une brutalité teintée de classicisme et de rugosité qui fait du bien dans un univers metal contemporain très clinquant et aseptisé.


Man Of Shadows
Mars 2015


Conclusion
Le site officiel : www.facebook.com/pages/johansson-speckmann/225899484206206