Nous vous avions déjà parlé du premier album de Jirfiya en 2020, groupe français de metal progressif qui n'hésitait pas à aller chasser à la fois sur des terres plus rock et subtiles d'un cÖté et plus metal et agressives de l'autre. Le groupe est de retour avec son deuxième album "W" et promet de nous bousculer une fois de plus !

Il ne prend d'ailleurs pas de gants en nous accueillant avec "Asylum" et ses neuf minutes puisqu'en plus d'être long ce premier morceau ne perd pas de temps avec une quelconque introduction et envoie de suite des riffs typés heavy metal sur fond de double grosse caisse. A peine est-on arrivé que l'on se prend déjà des mélodies accrocheuses et épiques et des riffs puissants qui nous amènent à entendre ensuite quelques cordes qui laissent penser que l'ambiance va se poser un peu. Ce qui n'est pas du tout le cas puisque Jirfiya va prendre un malin plaisir à alterner ces passages posés, mélodiques et aériens et des riffs plus agressif sur un rythme bien plus nerveux. Les voix de Jérôme et d'Ingrid croisent le fer et se montrent aussi énervées toutes les deux, on retrouve donc les deux chants croisés qui fonctionnaient déjà très bien sur "Still Waiting". Si Jérôme est le seul à growler Ingrid n'est pas en reste quand il s'agit de faire passer de la rage dans sa voix et elle passe toujours aussi bien d'un registre à l'autre, ce qui est assez impressionnant quand elle enchaîne une ligne de chant énervée après un passage tout en douceur ! Une fois de plus, le groupe propose un metal progressif qui ne se refuse rien mais qui ne devient jamais décousu, le cap est fixé sur l'accroche et l'efficacité et même si Jirfiya tente régulièrement des choses, il ne perd jamais en impact. Ces neuf premières minutes en sont un très bon exemple puisque l'ambiance change plus d'une fois et le morceau garde tout de même une cohérence à toute épreuve ainsi qu'une intensité qui fait que le temps passe vite. "Sister In Blood" en profite pour poser une ambiance plus sombre et plus menaçante tout en gardant la même efficacité, on passe du coup à un format plus compact de quatre minutes. Un format que la plupart des morceaux suivent en dehors de trois exceptions dont "Asylum" justement.

Quelques nouveautés se font entendre notamment ces cordes qui interviennent plusieurs fois sur ce nouvel album et ajoutent un cachet dramatique aux ambiances que développe "W". Elles créent d'ailleurs une ambiance orientale sur "The Path Of Hate" reprise ensuite par les guitares, de quoi varier encore les sonorité avec là encore des riffs plus puissants qui ajoutent une dimension à une musique déjà riche. "The Factory" prend la suite et constitue le deuxième long morceau avec ses huit minutes, le groupe en profite pour y développer des mélodies et lignes de chant plus mélancoliques même si là encore des passages plus nerveux et agressifs trouvent le moyen de se faire une place avec quelques passages sur lesquels Ingrid ne se ménage pas et s'arrache bien la gorge ! Comme sur "Still Waiting", l'équilibre entre les deux univers est très bien géré et la musique de Jirfiya est toujours dynamique, et même quand le groupe lève un peu le pied, il y a toujours suffisamment de variations ou des mélodies suffisamment prenantes pour maintenir l'attention. Que l'étiquette metal progressif ne repousse pas les détracteurs du genre, il n'y a aucune démonstration technique par ici pas plus qu'il n'y a de morceaux outrageusement complexes. La musique de Jirfiya est profonde mais garde un impact et une efficacité redoutables avec des mélodies percutantes et plusieurs points d'accroche pour ne perdre personne en route. D'ailleurs, après avoir eu droit à des cordes, ce sont les cuivres qui reviennent avec une trompette sur "An Endless Journey", une trompette que l'on entend aussi sur "Asylum" et qui contribue elle aussi à apporter d'autres couleurs à la musique du groupe. Comme sur le précédent album, on a aussi droit à plusieurs très bons soli de guitares eux aussi loin de la démonstration, toujours mélodiques et gorgés de feeling.

On retrouve donc le Jirfiya que l'on avait déjà apprécié sur "Still Waiting" mais avec quelques nouveautés en plus. "W" ne devrait donc pas décevoir ceux qui étaient déjà tombés sous le charme de ce groupe qui trace sa propre voie tranquillement. Quant à ceux qui n'auraient pas encore écouté la musique du groupe, quelle meilleure occasion que la sortie d'un nouvel album pour s'y pencher ?

Continuons notre exploration de la scène française avec un jeune groupe nommé Jirfiya et déjà auteur d'un EP en 2019 qui nous revient cette fois avec un album dans sa besace, "Still Waiting". A la croisée de chemins entre metal et rock, le groupe nous envoie une musique assez riche, profonde et finalement bien difficile à ranger dans une case précise.

C'est "Silently" qui nous accueille en acoustique avec de bien belles mélodies juste avant que les gros riffs n'arrivent et que les growls se fassent entendre. Dès le départ, le groupe joue l'équilibriste entre mélodie et agressivité à tous les niveaux, musicalement d'abord avec ce mélange d'acoustique et de grosses guitares électriques mais aussi vocalement puisqu'aux growls de Jérôme répond le chant clair d'Ingrid qui donne des allures de la belle et la bête à ce premier morceau somme toute très efficace. Entre les gros riffs, la douceur de l'acoustique et les mélodies ou lignes de chant accrocheuses, on a tout ce qu'il faut pour que Jirfiya frappe dans le mille. D'autant plus que la production est de très bonne qualité et que le son est clair et puissant, exactement ce qu'il fallait pour donner de la patate et permettre en plus de faire entendre toutes les subtilités de ce premier album. Si la musique du groupe est accessible, ce mélange de gros riffs et de mélodies offre une profondeur indéniable à ce premier album et les émotions se font une bonne place au milieu de ces growls et de ces gros riffs. Le chant d'Ingrid en fait d'ailleurs passer une grosse partie et sa voix sait se faire aussi chaleureuse que colérique voire même franchement énervée comme en témoigne ce cri qui termine "The Right Side Of The Border" ! Même si on peut noter quelques influences progressives disséminées discrètement çà et là, Jirfiya ne s'étale pas outre mesure et garde une optique assez directe. Le côté progressif se sent dans la variété des sonorités utilisées et des ambiances posées et dans la profondeur des morceaux de "Still Waiting", sur la forme par contre on entend plutôt un metal puissant croisé à un rock moderne et mélodique.

D'ailleurs, ce premier album atteint seulement les trente-huit minutes et permet au groupe de multiplier les sonorités et de brouiller les pistes sans jamais se perdre en cours de route. Pas de temps laissé à l'ennui et des morceaux qui vont à l'essentiel en restant accrocheurs quoiqu'il arrive. "This Is My Home" nous refait d'ailleurs un croisement des genres assez déroutant avec des leads assez méchants sur fond de growls bien énervés contrebalancés par des passages mélodiques et mélancoliques surmontés du chant tout en finesse d'Ingrid. Un contraste saisissant qui fonctionne plutôt bien et fait passer les émotions au premier plan en évitant soigneusement toute surenchère. "We'll Spill Some Blood" présente lui aussi un visage assez moderne et énergique avec là encore les growls et le chant clair mêlés sur un groove imparable qui devrait faire remuer pas mal de monde le jour où le live pourra reprendre. Jirfiya a tout ce qu'il faut pour faire mal : le groove, les mélodies, un large spectre sonore et deux chants aussi différents qu'efficaces. En moins de quarante minutes, on a droit à de bonnes mélodies, un groove omniprésent et une accroche imparable qui trouve en plus le moyen de laisser de la place aux émotions. "Still Waiting" montre déjà un groupe qui ne s'embarasse pas de barrière stylistique et on s'attend à l'avenir à avoir droit à quelques autres surprises. Rock, metal, growls, cris, mélodies aériennes, gros riffs puissants, le groupe souffle le chaud et le froid et fait mouche dans tous les cas.

Un premier album qui laisse entendre de belles choses et qui confirme que Jirfiya a un certain potentiel qui ne manquera pas d'être exploité. Le groupe n'aime pas les carcans et ne se prive pas de mélanger rock, metal, voire même quelques sonorités un peu plus dures. Une démarche qui laisse penser qu'en évoluant Jirfiya va encore nous distribuer quelques petites baffes et qui fait qu'on va garder un œil attentif, ou plutôt une oreille attentive, sur ce groupe.