"The Judas Paradox"
Note : 18/20
God Dethroned nous présente sa nouvelle offrande. En 2024, le groupe néerlandais
composé d’Henri Sattler (guitare / chant, ex-Grand Supreme Blood Court), Jeroen
Pomper (basse, ex-Icons Of Brutality), Dave Meester (guitare, Facelifter, ex-Apophys) et
Frank Schilperoort (batterie, ex-Grand Supreme Blood Court, ex-Haliphron, ex-Shining)
signe avec Reigning Phoenix Music pour la sortie de "The Judas Paradox", son douzième
album.
Les premières notes de "The Judas Paradox" nous emportent en un rien de temps dans une
noirceur hypnotique rapidement renforcée par des parties vocales furieuses, créant une
dualité intéressante sur toute la durée du morceau, et que l’on retrouvera également sur "Rat
Kingdom" où le blast rencontre les mélodies ténébreuses. Le son abrasif et la batterie rapide
se retrouvent à la perfection dans les passages accrocheurs ou les refrains saccadés, puis
le groupe s’ancre dans une sauvagerie assumée sur "The Hanged Man" qui sera à nouveau
nuancée par les parties lead travaillées et entêtantes de la deuxième partie. Le final renoue
avec la violence pure, puis "Black Heart" nous autorise un moment de pause avec des
claviers planants pour présenter la majestueuse "Asmodeus" où rage et beauté coopèrent
pour créer ces riffs époustouflants. Le flux de la rythmique semble sans fin, nous abreuvant
en permanence tout en rencontrant quelques choeurs avant de cesser brusquement, laissant
"Kashmir Princess" prendre la suite avec une dynamique plus vive, notamment au niveau des
guitares au groove accrocheur.
Des éléments plus dissonants viennent perturber la
rythmique avant que le groupe ne s’enflamme à nouveau pour la furieuse "Hubris Anorexia",
dont le break surprendra par sa douceur, si opposée à sa rage première qui reviendra pour
nous accompagner jusqu’à "The Eye Of Providence". Le groupe nous entoure une fois de plus
de ses harmoniques lancinantes avant de laisser libre cours à la violence, sans oublier les
pointes mélodieuses travaillées des guitares avant que "Hailing Death" ne prenne la suite en
faisant honneur aux sonorités oppressantes du black metal. Quelques choeurs rejoignent
parfois la composition, ainsi que des leads relativement doux sur la fin, puis la dévastation
reprend avec "Broken Bloodlines" qui arrive comme un véritable raz-de-marée à l’exact
opposé des derniers instants du morceau précédent. Les vagues déferlent en apportant de
temps à autres des parties plus apaisantes, puis l’album se referme avec "War Machine" où
les harmoniques criardes se joignent au tumulte général, avec une approche légèrement
martiale.
Avec ce nouvel album, God Dethroned nous montre une approche plus mélodieuse du
black / death, osant les tonalités planantes et douces. "The Judas Paradox" est à mon sens
l’un des albums les plus diversifiés du combo, et son rythme permet de l’apprécier à sa juste
valeur.
"Illuminati"
Note : 18/20
God Dethroned vient de frapper à nouveau. Après sa création en 1991, un premier split en 1993, puis une reformation en 1996 jusqu’en 2012 et le grand retour en 2014, ce sont onze albums que les Néerlandais ont signé. Et "Illuminati", le dernier né, est digne de cette longue épopée. On retrouve toujours Henri Sattler (chant / guitare, Grand Supreme Blood Court, Winter Of Sin), Michiel van der Plicht (batterie, Winter of Sin, ex-Apophys, ex-Prostitute Disfigurement…) et Jeroen Pomper (basse, ex-Absorbed, ex-Icons of Brutality) aux commandes, mais également Dave Meester (guitare, Facelifter, ex-Apophys), le nouveau venu. Les claviers sont assurés par Dirk van der Plas, mais nous retrouvons également les voix de Kevin Quilligan (Erebus, Temple, ex-Apophys, ex-Toxacara) et Remco Smit (Overruled) sur cet album.
L’album commence en grande pompe avec le titre éponyme, "Illuminati". Les claviers prennent une part importante dans le mix, mais les riffs sont massifs ! Déchaînant toute la puissance de son blackened death metal, le groupe compte aussi sur des choeurs pour nous écraser avec un son majestueux. Difficile de se remettre de la puissance de ce morceau, mais "Broken Halo" prend la suite, avec cette noirceur et ce climat inquiétant que le groupe se plaît à instaurer régulièrement. Et la violence refait surface avec des riffs à la fois perçants et imposants. Les claviers s’invitent régulièrement dans la rythmique, et les hurlements du chanteur enfoncent de plus en plus le clou. On reste dans ce contraste entre son majestueux et riffs puissants pour "Book Of Lies", avec toutefois une rythmique qui accélère régulièrement tout en restant entraînante.
"Spirit Of Beelzebub" démarre en trombe, et la tornade ne se calmera pas, même lorsque des choeurs en voix claire surgiront, donnant une ambiance bien différente. Mais le groupe enchaîne rapidement avec des harmoniques sombres et des parties lead inspirées, alors que l’on se sent littéralement oppressé par "Satan Spawn". Une rythmique bien lourde, une guitare lead ultra rapide, des claviers en retrait… Le groupe est revenu à ses origines, flirtant avec le death old school grâce à cette qualité de mix qui caractérise l’album. On passe à des sonorités un peu plus aériennes, qui contrastent avec la solide rythmique de "Gabriel". Et ce morceau nécessite pour moi deux écoutes. Une première pour saisir l’essence de la musique, et une deuxième en lisant les paroles pour comprendre les enchaînements et lui donner une richesse supplémentaire.
Les sonorités mystiques continuent avec "Eye Of Horus", un morceau qui lorgne vers le prog avec son introduction prenante. Et même si les instruments s’intensifient par la suite, les choeurs, les ambiances… tout est fait pour nous laisser hocher la tête en fermant les yeux. Et ça marche. "Dominus Muscarum" vient couper légèrement le rythme avec des claviers d’église et des choeurs avant le final, intitulé "Blood Moon Eclipse". Et c’est une réelle descente aux enfers que le groupe nous envoie en pleine face ! La rythmique énervée a tendance à s’apaiser, mais les accents black demeurent, et les parties lead sont cohérentes avec les riffs du groupe. Une excellente manière de clore cet album.
Si God Dethroned est de retour, ce n’est pas pour enfiler des perles, et "Illuminati" va le prouver à ceux qui en doutaient encore. L’album précédent était déjà très bon, mais celui-ci va à coup sûr marquer leur discographie d’une pierre ensanglantée, et j’ai hâte de le découvrir en live.
"The World Ablaze"
Note : 18,5/20
Après l'annonce de leur reformation pour quelques concerts en 2014, tous les fans de God Dethroned étaient pleins d'espoirs. Et ces espoirs se sont matérialisés avec l'annonce de "The World Ablaze", leur nouvel album. Formé en 1991 aux Pays-Bas par Henri Sattler (guitare / chant, officiant également dans Grand Supreme Blood Court et Winter Of Sin), le groupe se dissout en 1993 un an seulement après son premier album, puis se reforme en 1996. Jusqu'en 2012, le groupe enchaînera les albums, les tournées et la reconnaissance mondiale ne se fait pas prier. Pourtant, le groupe jouera son "dernier concert" en 2012. Mais deux ans plus tard, quelques autres concerts sont annoncés, et Henri s'entoure de Michiel van der Plicht derrière les fûts (jouant avec lui depuis 2009, mais également dans Apophys et Winter Of Sin), Jeroen pomper à la basse et Mike Ferguson à la deuxième guitare (aussi dans Detonation, Doghouse Gallows, Kutschurft et M-90's). Ensemble, ils travaillent alors sur les riffs de "The World Ablaze"... Vous avez déjà vu le monstre à l'oeuvre et vous n'allez pas être déçus !
L'album débutera avec une introduction de toute beauté. "A Call To Arms", c'est sans exagérer l'un des titres les plus prenants et envoûtants que j'ai entendu depuis des années. Un riff atmosphérique avec une simple voix samplée, mais qui m'a emporté loin... Très loin... Et la retombée avec "Annihilation Crusade" est maîtrisée à la perfection. Largué en plein champ de bataille, les riffs et la double pédale tombent de toute part, impossible de savoir exactement où nous sommes. La voix d'Henri nous guide jusqu'à un solo qui récupèrera l'aspect aérien de l'introduction, puis repartira dans les tranchées. "The World Ablaze" reprendra une rythmique old school avec cette touche black qui les caractérise si bien depuis des années. "On The Wrong Side Of The Wire", dont le clip est disponible depuis le début du mois d'Avril, est une nouvelle démonstration de la puissance de feu de God Dethroned. Un mélange imposant d'une rythmique travaillée et lourde à souhait, avec une touche d'harmoniques sur une voix puissante.
Vous trouvez que ce titre est passé trop vite ? Moi aussi. Vous trouvez que ça manque de violence pure ? Moi aussi. Et le groupe est visiblement du même avis, puisqu'il a choisi "Close To Victory" pour lui succéder. Ce titre, en plus d'avoir un tempo nettement plus rapide, laissera Michiel van der Plicht se déchaîner autant que possible alors que les musiciens placeront tout de même un passage atmosphérique entre deux rafales. Königsberg (à ne pas confondre avec la bière qui porte presque le même nom) est une nouvelle introduction hypnotisante qui nous amènera lentement jusqu'à "Escape Across The Ice (The White Army)". Des riffs plus lents mais tout aussi profonds qui soutiendront une guitare lead mélangeant sonorités épiques avec une réelle impression de progression, alors que les influences doom / death resurgiront lors du début de "Breathing Through Blood". Un retour au son tranchant et sans aucun compromis sera observé sur la suite de la composition cependant. "Messina Ridge" reviendra sur le son que le groupe avait lors des premières compositions et qui nous avait tous séduits, mais avec le mix impeccable de Dan Swanö qui rend hommage au style et à ses riffs techniques ! Le dernier titre, "The 11th Hour", sera également plus lent. Plus long aussi (près de sept minutes) que toutes les autres compositions, mais d'une intensité palpable. J'ai peut-être tout faux quand à l'idée derrière ce titre, mais à la première écoute, je me suis imaginé dans un marais boueux, entouré de brouillard, et avançant péniblement avec mon paquetage sur le dos tout en regardant constamment autour de moi pour éviter de me prendre une balle par un soldat adverse. Grisant...
Les Néerlandais ont frappé un grand coup pour leur retour. Ils se devaient de s'imposer à nouveau
dans un style qu'ils maîtrisent sur le bout des doigts depuis si longtemps, et c'est chose faite à grand coup de power chords. Messieurs, si vous ne savez pas par où faire passer votre prochaine tournée,
j'ai mes suggestions !
"Under The Sign Of The Iron Cross"
Note : 16/20
Peu de temps après un "Passiondale" de grande qualité, God Dethroned revient avec "Under The Sign Of The Iron Cross" sur une thématique qui lui tient à cœur : la Première Guerre Mondiale !!! Mais cette fois-ci, le groupe a décidé de durcir le ton en proposant, à l'image de la pochette, un album plus sombre et plus guerrier que jamais. Le pari est-il réussi pour la horde Hollandaise ? Vous le saurez en lisant ces lignes... Mais surtout, n'oubliez pas votre casque car je vous emmène maintenant sur le champ de bataille !!!
Car oui, il n'est pas aberrant de voir ce nouvel album comme un champ de bataille !!! "Under The Sign Of The Iron Cross" sent définitivement la poudre et nous emmène dès les premiers riffs en un lieu dévasté où terre et sang ne font qu'un et où plane l'odeur nauséabonde de la mort... God Dethroned n'est pas là pour parler de la guerre mais pour nous la faire vivre à grand renfort de blasts !!! Et le résultat est impressionnant, comme si un char passait à toute vitesse entre vos deux oreilles, mais avec la majesté d'une attaque du Baron Rouge !!!
En effet, ce "Under The Sign Of The Iron Cross" est tout cela à la fois !!! Une puissance de feu incroyable avec une section rythmique imparable alliée à un génie mélodique qui saura asservir vos esprits afin de vous faire capituler... Voilà vraiment la patte God Dethroned, mais qui est ici poussée à son extrême avec des guitares furieuses qui nous servent sur un plateau autant le chaos d'une bombe que le désespoir d'un soldat au fond de sa tranchée voyant ses camarades mourir les uns après les autres : un chant du cygne tellement beau dans son infinie tristesse !!!
Et c'est exactement ce que l'on peut ressentir sur le morceau éponyme avec l'intervention d'un magnifique chant clair signé Marco Velde de The Wounded sur fond de blast dévastateur et de lead guitare mélancolique !!! Voilà exactement le genre de morceau qui nous permet de mieux saisir toute la complexité de God Dethroned qui dissimule aisément un véritable savoir-faire musical, acquis tout au long de quelques 20 années d'existence, derrière un incroyable mur sonore aussi puissant que cataclysmique capable de détruire en un riff l'intégralité de l'aviation ennemie !!!
Toujours entouré de musiciens impeccables malgré quelques changement de line-up, Henri nous propose ici un formidable album de black / death metal comme on en a peu entendu ces dernières années, un album où guitares et batterie (quel batteur que ce Michiel, plus connu pour ces contributions aux albums de Toxocara et Prostitute Defigurment !) rivalisent d'efficacité pour créer ce chaos savamment orchestré de main de maître. Fin stratège, il sait tirer le meilleur parti de ses soldats et autant vous le dire, mieux vaut être AVEC eux que CONTRE eux car ils n'auront aucune pitité !!!
Si l'on considère cet album comme la bande son d'une période peu glorieuse de l'Histoire, le choix du SoundLodge Studio s'avère une nouvelle fois judicieux. Il offre à "Under The Sign Of The Iron Cross" un son tout en sobriété, froid et puissant comme il se doit afin de mieux retranscrire l'atmosphère générale des morceaux et des textes. Loin du cliché des productions modernes actuelles, on se retrouve face à un son assez "raw" avec une dimension chaotique parfaitement travaillée qui renforce le concept tout en permettant de tout entendre distinctement.
Une vraie prouesse donc que cet album qui montre à quel point God Dethroned est toujours bien vivant même si le groupe est toujours plus ou moins resté dans l'ombre des plus grands... La bande à Henri maîtrise son sujet sur le bout des doigts et fort est de constaté que l'âge ne les a pas calmé, bien au contraire. Les Hollandais sont plus énervés que jamais et il veulent nous le faire savoir de la meilleure manière qu'il soit : en nous offrant un concept album mâture, puissant, brutal et mélodique comme on les aime à côté duquel il serait vraiment dommage de passer !!! Pari réussi haut la main donc... Comme quoi les anciens ont encore beaucoup à nous apprendre en matière de metal !!!