"Rose Thorn Necklace"
Note : 17/20
Ghost Bath dérive lentement vers son nouvel album. Toujours signé chez Nuclear Blast, Dennis “Nameless” Mikula (chant / guitare / claviers, If I Could Kill Myself), accompagné par Mike Heller (batterie, Amahiru, Black Hole Deity, Malignancy, ex-Fear Factory…) annonce la sortie de son cinquième album, "Rose Thorn Necklace".
L’album débute avec "Grotesque Display" une douce introduction au clavier qui nous laisse réintégrer la mélancolie du groupe avant que le titre éponyme, "Rose Thorn Necklace", ne vienne nous faire plonger dans ses sonorités ténébreuses. Si les leads sont d’abord assez calmes, ils s’embraseront avec la rythmique et l’apparition des parties vocales toujours aussi terrifiantes, tissant un tableau presque effrayant mais captivant où growl caverneux répond aux hurlements de détresse, mais la fin du titre nous autorise à nouveau un moment de calme avant de rejoindre "Well, I Tried Drowning". Le titre revient aux racines du DSBM et place des riffs pesants sur des patterns parfois plus vifs, renforçant le contraste omniprésent avec les moments d’effroi, mais la quiétude refait surface sur "Thinly Sliced Heart Muscle" où une guitare nous berce lentement, rejoignant quelques claviers pour finalement nous laisser dériver jusqu’à "Dandelion Tea" qui ajoute de la saturation à cette complainte.
Le vocaliste s’étouffe, mais la composition prend des teintes différentes, plus pesantes mais aussi plus agressives, créant une sorte de danse un peu folle et saccaadée avant d’atteindre "Vodka Butterfly" qui reste dans cette optique abrasive avant d’intégrer des tonalités plus modernes assez déroutantes. Des pleurs nous autorisent à souffler avant que le cauchemar ne reprenne, toujours plus invasif jusqu’à ce qu’il soit brisé par la noirceur de "Stamen And Pistil" qui nous fait replonger dans son océan de douleur, et on se retrouve à nouveau pris au piège entre ses riffs, ses hurlements, et surtout sa viscéralité. Rafael "Chewie" Dobbs (Detraktor) rejoint le duo pour un interlude instrumental au piano nommé "Needles", qui s’ancre dans une tristesse assez douce avant que "Throat Cancer" ne nous saisisse à son tour pour nous traîner une dernière fois vers le fond, alternant les cris et samples sous une rythmique oppressante pour effacer définitivement toute trace de joie dans notre esprit, nous laissant finalement regagner la surface avec une mélodie fantomatique qui s’éteint dans le néant.
Ghost Bath a toujours proposé un univers particulier ancré dans un DSBM saisissant, et bien que les racines soient toujours observables, "Rose Thorn Necklace" est différent, proposant une ouverture plus profonde, comme une plaie qui ne se referme jamais vraiment.
"Self Loather"
Note : 19/20
Après le silence, Ghost Bath se réveille. Créé en 2012 aux Etats-Unis (et non en Chine,
comme déclaré précédemment), le groupe se compose de Dennis “Nameless” Mikula
(chant / guitare / clavier, If I Could Kill Myself), Josh Jaye (basse, Stone Marrow), Jason
Hirt (batterie, Nothingness), Tim Church (guitare, Stone Marrow) et John Oliver (guitare,
Stone Marrow). "Self Loather", leur quatrième album, sort en 2021, accompagné par
quelques invités, dont Chewie (Detraktor) au piano.
On débute avec "Convince Me To Bleed", une composition qui dévoile immédiatement
noirceur, dissonance et des leads aériens malsains, ainsi que des hurlements fantomatiques
que l’on peut parfois comprendre, mais également ces pleurs déchirants. Les larmes de
Yasmyn Bonifacio s’intensifient sur la pesante "Hide From The Sun", où le groupe accueille
CJ McMahon (Thy Art Is Murder) au chant, en faisant l’un des morceaux les plus
saisissants et impénétrables de l’album. Les harmoniques entêtantes laissent parfois place à
une rythmique saccadée étouffante, alors que "Shrines Of Bone" fait rapidement émerger un
nuage de noirceur qui nous entoure et nous assomme avec des riffs lancinants sur un blast
fou. Les seuls moments où le morceau ralentit, il devient plus angoissant, tout comme
l’écrasante "Sanguine Mask", une composition aux saveurs d’apocalypse qui place la lourdeur
au premier plan. Les harmoniques dissonantes font également partie de ce paysage désolé,
tout comme les violons angoissants de John Ryan (Cruachan) sur la partie finale, puis
l’énergie refait surface sur "A Crystal Lattice", un titre aussi abrasif que mélancolique.
Le
chant alterne entre ces cris de désespoir et des rugissements caverneux, puis "Sinew And
Vein", un titre assez lent, débute. Le son pénètre immédiatement notre esprit, puis il finira par
accélérer avant que Graf (Psychonaut 4) ne rejoigne le groupe pour un final glacial, qui
nous laisse avec "I Hope Death Finds Me Well", un interlude au piano qui ne fera que croître
jusqu’à un point culminant qui cesse brusquement pour nous mener à "For It Is A Veil". La
composition est majestueuse, aussi brute que travaillée, et sa rythmique nous hante autant
qu’elle nous émerveille en abritant des leads perçants, puis "Unbearable" vient une fois de
plus nous accabler avec un son pesant. Si la première partie du morceau est très
imposante, le piano qui rejoint les riffs lui donne une touche d’angoisse supplémentaire
avant "Flickering Wicks Of Black", le dernier titre. Plus court, plus brut, plus direct que les
autres, mais tout aussi intense et saisissant.
Sans surprise, Ghost Bath nous délivre l’un des albums les plus noirs de l’année. "Self Loather" dévoile un paysage désolé, une réalité brute et un son qui ferait passer la mort pour
une promenade de santé.
"Starmourner"
Note : 14/20
Ghost Bath est un groupe originaire des Etats-Unis et mené par Nameless. Leurs thèmes oscillent généralement entre mélancolie et dépression, et le nom du groupe aurait été choisi pour évoquer le suicide par noyade. Tout un programme donc, mais un programme qui promet de belles surprises. Je suis glauque ? C’est comme ça, j’assume. Apparemment, le groupe s’est bâti une belle réputation entre fans absolument convaincus par leurs propositions musicales, et ... non-fans qui trouvent le tout overrated, et qui crient au syndrôme de la poudre de perlimpinpin. Voyons donc ce qu’il en est. Un petit mot pour l’artwork cependant que je trouve particulièrement réussi, et qui mérite qu’on aille le voir.
L’album s’ouvre donc sur "Astral", sur une douce mélodie au piano que nous propose Nameless. L’avantage du piano, c’est qu’à mon sens, c’est l’instrument le plus mélancolique au monde et qu’il n’est donc pas difficile d’exprimer ce sentiment en jouant. Mais il faut avouer que c’est une introduction très agréable qui se termine en cris d’horreur dans le noir. Presque aussitôt, et dans un fondu parfait, on enchaîne sur "Seraphic" qui, je pense, va diviser les auditeurs d’une façon très claire : on aime ou on aime pas.
Tout l’album tourne autour d’un affrontement subtil entre le désespoir, exprimé par exemple au début de titres comme "Ambrosial" qui n’ont rien à envier à de grands morceaux de black dépressif (il y a comme un petit côté Austere dans ce titre, et qu’est ce que je peux aimer Austere...), et entre un espoir qui renaît petit à petit avec des mélodies plus chaudes et plus rythmées comme "Ethereal" ou "Celestial".
Mais alors quel est le problème majeur de cet album ? Et bien... ça me peine de le dire, mais c’est très asceptisé. Là où on devrait ressentir des émotions fortes et virulentes, être quasiment pris à la gorge par l’assaut de nos sentiments, on reste la plupart du temps de marbre. A mon sens, le tout apparaît comme trop propre et presque scolaire. Tout est maîtrisé à la perfection, mais le résultat en perd de la saveur. Oui, l’album est très agréable à écouter, oui c’est beau, mais... c’est trop beau ? Je ne sais pas comment exprimer ça. Peut-être que le problème vient de moi ? Peut-être que je suis devenue méchamment aigrie en ce qui concerne ce genre de musique ? Peut-être que mon degré d’exigence a atteint des proportions que plus personne ne peut atteindre ?
Quoi qu’il en soit : je reconnais le travail abattu sur cet album et je le respecte. Mais pour moi, il manquait ce petit supplément d’âme qui aurait apporté la véritable émotion qui manquait à cette démonstration de maîtrise. Ghost Bath c’est beau, c’est propre, ça sonne monstrueusement bien mais... il manque cette flamme. On a beau me présenter des vocaux dépressifs, si je ne crois pas une seconde à ce qu’il y a derrière, ça ne fonctionnera pas. Et c’est ce que je regrette sur cet album qui avait pourtant tout pour me plaire. Dommage.
"Moonlover"
Note : 15/20
Ghost Bath est un groupe de black metal dépressif qui vient d’être récemment signé sur Nuclear Blast. Malgré des recherches de ma part, je n’ai trouvé que très peu d’informations sur ce groupe. Cela va même jusqu’à l’origine du groupe qu’on pensait d’abord être basé en Chine, mais qui au final viendrait du Dakota du Nord ? Encore un mystère non élucidé. "Moonlover", donc, est le premier album d’une trilogie à venir. Une trilogie qui s’avère pleine de promesses juste de par le nom du groupe. Car oui, Ghost Bath est apparemment une référence au suicide par la noyade. On sait déjà à quoi on va avoir à faire.
L’album débute sur "The Sleeping Fields" qui met d’ores et déjà en pratique la théorie proposée par le nom du groupe. Les premiers sons viennent clairement d’un environnement aquatique, et il ne faut pas être savant pour comprendre ce qu’on cherche à nous mettre sous le nez. A peine introduit de la sorte, suit directement "Golden Number". Le titre est génial. Tout ce que je peux attendre d’un groupe de black dépressif avec des vocaux torturés et... des guitares foutrement entraînantes pour le genre. Il y a presque un paradoxe entre les vocaux et ces guitares qui s’avèrent étonnement joyeuses. Ou alors c’est moi qui suis désormais incapable de ressentir vraiment de la musique dépressive. Quoi qu’il en soit, le morceau est vraiment bon. Et le piano qui ferme le titre ne démérite pas.
Suit "Happyhouse" qui propose un son plus lourd. L’ambiance se veut plus étouffante, lente et oppressante, mais j’y ai plus ressenti une sensation d’expérimentation qu’une véritable vague de désespoir. Je trouve que le groupe s’est un peu perdu sur ce titre, en voulant en faire trop mais au final en ne délivrant pas suffisamment d’intensité. Une intensité qui dans le genre est primordiale. Poursuivons avec "Beneath The Shade Tree" qui une nouvelle fois change totalement d’ambiance. On ne pourra donc pas reprocher à Ghost Bath de ne pas avoir voulu expérimenter de nouvelles choses. Le résultat est appréciable, le titre faisant office d’interlude musical sympathique mais... un peu hors-propos par rapport au titre précédent, mais également au titre suivant. Il y a un léger manque de cohérence dans l’ensemble.
Vient "The Silver Flower Pt1" qui pour le coup marque ENCORE un nouveau changement d’atmosphère. Nous voici désormais dans la forêt par une nuit de pleine lune, avec des souches d’arbre recouvertes de mousses fraîches et des insectes qui fourmillent partout dans les herbes. Et j’ai apprécié ce titre. Vraiment. Il y a un aspect onirique très développé et original qui m’a absolument ravi sur ce morceau. Sur "The Silver Flower Pt2", la rêverie prend fin et les guitares s’affirment de nouveau. Mais je pouvais toujours visualiser cette forêt. C’était un peu comme écouter du Coldworld, tu es toujours capable de ressentir la forêt et l’hiver. Et moi, au final, ce genre de choses me plaît. Donc j’approuve totalement ces deux titres qui, pour le peu qu’on accepte de se laisser emporter, peuvent être une véritable invitation au voyage. L’oppression est de retour sur "Death And The Maiden" qui est un ressort thématique assez connu. Pour moi, ces trois titres sont tout simplement les meilleurs de l’album, et donnent un sentiment d’aboutissement que je n’ai pas forcément retrouvé sur les autres morceaux. Et l’album s’achève sur "Ascension" qui ne démérite pas, et permet de clôre l’album sur une note positive.
Au final, je me révèle assez surprise de Ghost Bath. Je vais être honnête, je m’attendais réellement à écouter un groupe de DSBM pur et dur, mais ce n’est pas que j’ai trouvé dans l’album. Je trouve le côté ambiant largement plus développé, et j’y ai trouvé un côté onirique plus soigneusement travaillé. Et cet album a des qualités indéniables, même si parfois j’ai regretté le manque d’une ligne directrice strictement définie, et que j’avais parfois l’impression que Ghost Bath se perdaient eux-mêmes en expérimentations. Mais j’en retire une certaine fascination. L’album ne m’a pas ennuyée, loin de là, et a continuellement renouvellé mon intérêt. J’y ai même parfois retrouvé des côtés folk plus proches par exemple d’un Agalloch. Je reste assez curieuse de voir ce que Ghost Bath nous proposera dans l’avenir.