Le groupe
Biographie :

Formé en 2002 en Islande, Einar Thorberg (Eldur), Fortið fut d’abord un projet solo s’inspirant de la littérature Asatru pour commémorer les temps passés. En 2003, le premier volet de la trilogie sort chez No Colours Records. Suite à de nombreux contretemps, le deuxième volet "Völuspá Part II : The Arrival Of Fenris" n’est sorti qu’en 2007. Fin 2008, Eldur partit pour la Norvège et forma pour la première fois un groupe live. Il prit le temps également de sortir "Völuspá Part III : Fall Of The Ages", le troisième volet de la trilogie. Suivent les albums "Pagan Prophecies" en 2012 et "9" en Mars 2015, tous deux chez Schwarzdorn Production. Le sixième album, "World Serpent", sort en Décembre 2020 chez Prophecy Productions.

Discographie :

2003 : "Völuspá Part I : Thor's Anger"
2007 : "Völuspá Part II : The Arrival Of Fenris"
2010 : "Völuspá Part III : Fall Of The Ages"
2012 : "Pagan Prophecies"
2015 : "9"
2020 : "World Serpent"


Les chroniques


"World Serpent"
Note : 12/20

Après cinq longues années d’absence, Fortíð, la formation islandaise, fait son grand retour. L’album "World Serpent" se présente aussi comme un énorme melting pot de beaucoup de genres différents, mêlant riffs épiques à des tempos très rapides rendant un effet presque thrash dans un morceau tout en gardant un chant très power metal dans toute la première partie de l’album, ce dernier effectue ensuite un virage à 90° vers les ambiances et riffs plus agressifs et dépouillés du black metal, une réelle surprise pourtant bienvenue sur la première écoute. C’est ainsi avec une étonnante sensation de ne pas savoir vraiment ce que l’on a écouté que l’on ressort de l’album. Malgré tout, quelque soit le genre exploré, on ne trouve pas de réelle innovation de style, seulement un hybride de ce qui se fait souvent dans les genres explorés.

L'album évoque toujours la mythologie nordique mais cette fois en la transposant dans un contexte plus actuel comme l’indiquent les titres de morceaux comme "Pandemic" ou encore "AI 2020". On a également un signe de cette modernité apportée au contexte mythologique à travers des mélodies très mécaniques et très droites comme dans "The True Awakening", là où on s’attendrait plus à des riffs épiques et autres accords plus puissants, ce qui peut totalement troubler mais n’est finalement pas déplaisant, on perçoit une réelle volonté d’innovation et de changement dans toute cette dynamique bien injustement appelée "viking metal" et cela fait plaisir de ne pas retrouver un énième clone d’Amon Amarth.

On retrouvera tout de même des morceaux avec un format plus prévisible aux riffs classiques et efficaces qu’on pourrait presque trouver chez une formation de thrash metal au vu de la rapidité d’exécution. Cependant, les nombreux trémolos qui viennent agrémenter les riffs nous rappellent rapidement que ce n’est pas le cas, et c’est presque dommage car les morceaux seraient vraiment plus efficaces s’ils se plongeaient totalement dans cette dynamique comme on peut le voir dans certaines parties de "Controlled Pattern Mental Process" qui vient plus finalement s’inscrire dans un registre death mélodique / power. Au fur et à mesure que l’album passe, les morceaux se défont même totalement de ces idées un peu plus innovantes pour proposer des riffs extrêmement convenus et tomber dans les écueils qui avaient réussi à être évités en début d’album, ce qui est très dommage. Il est clair que l’album est très hétérogène entre tous les morceaux, plus ou moins originaux, et le chant ne fait pas exception à la règle. Ce dernier, empruntant clairement aux tonalités du power metal dans la première partie de l’album, changera radicalement sur la suite à partir de "Son Of A Barren Land" et à l’image de l’album s’orientera largement plus vers du black metal mélodique, empruntant ça ou là quelques riffs et solos épiques à la première partie de l’album, à travers des trémolos beaucoup plus blackisants et un blast plus constant et largement mis en avant par la production.

A travers un chant globalement aussi accessible en première partie d’album, qui soutient des mélodies parfois plus violentes et dépouillées même si globalement toujours très mélodiques, on tient ici une bonne porte d’entrée aux musiques extrêmes pour un néophyte mais une constance qui s’essoufflera rapidement pour ceux qui sont déjà passés plus loin dans le genre. Fort heureusement, la deuxième partie de l’album a la bonne idée de changer radicalement et devient beaucoup plus intéressante pour un public déjà averti car plus dépouillée et agressive, aussi bien dans l’instrumental que dans le chant, comme le morceau "Pandemic" ou "Beyond The Grisps Of Odium", morceau qui voit malgré tout revenir un chant clair dans son introduction, ce dernier étant mis en parallèle avec le chant crié sur des riffs beaucoup plus agressifs. L’intro comme l’outro, eux, empruntent au domaine de l’ambiant, ce qui n’est pas rare dans la scène metal. Pas de chants et des mélodies extrêmement minimalistes pour poser les bases ou clore un album déjà bien empli de multiples mélodies, c'est un ressort très efficace et pas déplaisant mais qui devient malheureusement de plus en plus commun. Cependant, dans "Last Line Of Defence", l’outro de l’album, on a une réelle progression musicale plutôt qu’une ambiance stagnante, qui laisserait presque imaginer une suite à cette album.

La formation islandaise que l’on ne peut donc définitivement pas associer à un genre particulier nous propose donc un album assez unique tant il va explorer différentes ambiances, ce qu’il fait avec plus ou moins de réussite. La première partie empruntant largement au death mélo et au power finit par s’essouffler très rapidement faute d’originalité, malgré quelques louables tentatives de se démarquer. La partie black metal, qui reste tout de même assez classique, se démarque un peu plus en conservant quelques éléments de la première moitié de l’album mais sans pour autant tomber dans la lassitude qu’elle peut engendrer, ce qui donne un souffle nouveau à l’album qui est plus que bienvenu et qui le sauve définitivement de tomber dans l’oubli.


Praseodymium
Janvier 2021




"9"
Note : 13/20

Découvert avec l'excellent album "Pagan Prophecies", véritable joyaux de pagan black metal, Fortið fait ainsi partie de ces groupes qui m'ont tapé dans l’œil et dont j'attendais avec impatience le nouvel opus !!! Après 3 ans d'attente, me voilà exhaussé avec l'arrivée du sobrement intitulé "9"... Reste maintenant à savoir si je serais autant comblé par cette musique dont les racines puisent dans le black metal norvégien des années 90, froide, sombre et épique à vous dresser les poils sur tout le corps !!! La horde a-t-elle continué sur la même lancée ou a-t-elle préféré explorer de nouveaux horizons ??? Qu'importe si c'est pour le meilleur me direz-vous... Verdict dans ces quelques lignes !!!

Fortið entame donc ce nouveau voyage à travers le temps avec le titre "Hrafnar" qui bénéficie d'une formidable intro quasi stellaire !!! S'ensuivent d'excellentes saccades très bien amenées et parfaitement exécutées avant d'arriver sur un riff des plus épiques... Longue montée en puissance pour voir le morceau véritablement commencer au bout de 2 minutes 40, mais moins d'1 minute plus tard, place à un passage planant mettant en valeur de très belles lignes de basse... Individuellement, chaque passage est particulièrement léché, mais l'ensemble paraît au premier abord quelque peu décousu, comme si le morceau ne démarrait jamais vraiment... Heureusement, le final d'une puissance évocatrice rare mettra tout le monde d'accord, me rappelant, tant dans la musique que dans le chant, les Lituaniens d'Obtest !!! Ainsi, la machine a eu un peu de mal à l'allumage, comme un vieux diesel qui a besoin de chauffer, mais maintenant que la vitesse de croisière est atteinte, espérons que le groupe ne faiblisse pas...

Place maintenant à "Hugur" et son intro tout en douceur qui vous emporte petit à petit vers un morceau plutôt black metal dans l'âme, aux guitares mélodiques et au chant écorché... Autant le son était de bon augure jusqu'à présent, autant l'arrivée de passages rapides met en péril notre compréhension musicale !!! En fait, c'est surtout la batterie qui pose problème... Le son n'est pas assez percutant et précis sur les pseudo blasts, et le batteur semble même presque en difficulté par moments !!! Rien de très grave ou de rédhibitoire, mais on perd ainsi en cohésion et en efficacité... Heureusement, un très bon passage en chant clair nous fait vite oublier ces quelques désagréments !!! Il semble bien que ce soit sur les passages les plus mid-tempo que le groupe est le plus à l'aise, et c'est d'ailleurs là que Fortið prend toute sa dimension païenne... Reste maintenant à voir de quel côté pencheront les morceaux suivants !!!

Le prochain s'intitule d'ailleurs "Nornir" et est plutôt du genre à foncer tête baissée !!! Il apparaît d'emblée comme basique et plutôt efficace, à l'image de l'excellent deuxième riff thrashy, suivi d'un formidable solo, divinement inspiré... Ce titre comporte de véritables morceaux de bravoure qui ne vous laisseront pas de marbre et qui je pense sont vraiment taillés pour la scène !!! Un morceau tout en puissance, mais qui sait ne pas mettre de côté la touche émotionnelle propre au groupe à l'aide de leads mélodiques et d'accords composés et joués avec une grande intelligence... Une vraie réussite et pour l'instant le moment le plus intéressant de l'album !!! "Viska", lui, est un long titre de 10 minutes qui prend une dimension astrale avec l'apport de quelques notes de clavier majestueuses qui vous transporteront aux temps anciens où les hommes vivaient connectés aux esprits... Et que dire de ce chant typiquement viking qui vous fera sentir la présence des Dieux à vos côtés ??? Bref, une bien belle réussite que ce titre tout simplement classieux...

"Leit", lui, est peut-être pour moi le titre le plus surprenant et probablement le meilleur de l'album... Ce morceau fait la part belle au chant clair et à l'émotion, puisant sûrement dans les origines Islandaises du groupe !!! On a bel et bien affaire à un titre intelligent, exécuté avec passion et conviction qui saura vous envoûter du début à la fin... En comparaison, le morceau éponyme semble bien terne et fade !!! Encore une fois, la batterie du début semble à la limite de la rupture, rendant l'ensemble malheureusement assez bancal... Il faut attendre 2 minutes pour retrouver un passage atmosphérique vraiment inspiré pouvant, par ses quelques notes de piano, rappeler Nordic Giants !!! Un bel instant de douceur au cœur des 9 minutes du morceau, un peu longues à mon goût, les passages purement black metal ne servant en fait que de faire valoir aux moments les plus évanescents, qui plus est renforcés par un excellent chant clair, une fois n'est pas coutume... Bref, un titre inégal ou le médiocre côtoie l'excellent. Dommage !!!

Heureusement, vient maintenant "GaldurPierre, un des meilleurs morceaux de l'album avec ses influences rappelant discrètement Windir... Les riffs sont justes parfaits, black metal au possible, renforcés en cela par un chant écorché, mais aussi par de formidables leads mélodiques !!! Le mélange est tout juste jouissif et je retrouve là le Fortið que je connais et que j'aime... Le genre de titre inspiré qui vous prend aux tripes car joué avec une sincérité à toute épreuve !!! Une réussite que "Runir" ne parviendra pas à égaler... Pourtant, ce morceau tout en légèreté parviendra quand même à tirer son épingle du jeu par son aspect planant et ensorcelant, aidé encore une fois par un chant viking sans faille, et ce malgré quelques longueurs !!! C'est sur "Hof" que se refermeront les portes du temps... Encore un titre assez lent et tout en émotion, où les mélodies vous transperceront le cœur et où le chant clair pourra même vous décrocher une larme !!! Une bien belle fin pour ce deuxième album de l'ère norvégienne du groupe...

Pourtant, à l'écoute de ces 9 titres, mes sentiments sont plutôt mitigés !!! Malgré quelques moments de bravoure purement black metal rappelant la période "Pagan Prophecies", ce nouvel album semble bien trop inégal à mon goût... Quelques longueurs, des passages rapides qui manquent de cohésion, et finalement, une orientation émotionnelle et atmosphérique plutôt surprenante et assez loin du Fortið que je connais... En prenant du recul, on s'aperçoit que là où Fortið excelle, c'est sur les passages black mid-tempo ou sur les passages lents et planants, ce qui est plus qu'étonnant !!! En tout cas, en 2015, les passages rapides sont plus que dispensables... Quand on fait abstraction de ces faiblesses, l'ensemble reste plutôt sympathique, et même si le chant clair domine le chant black, la puissance évocatrice de l'ensemble reste forte... Un album émotionnellement riche, parfois intensément épique qui, malgré maturité et intelligence, passe à côté de la perfection !!! Comme si la horde venue du froid n'avait pas su quelle direction donner à ce nouvel opus, au final décevant malgré d'indéniables qualités... Bref, un album en demi-teinte : dommage !!!


Carcharoth
Mai 2015




"Völuspá Part III : Fall Of The Ages"
Note : 15/20

Tout droit venu d’Islande, Fortið est à la base un projet solo qui puise ses sources dans la littérature nordique. Composé de deux volets, "Völuspá Part III: Fall Of The Ages" est le dernier de la trilogie et autant vous dire que je suis curieuse de jeter une oreille sur les deux premiers. "Völuspá Part III: Fall Of The Ages" est un album magique qui nous fait voyager à travers les différents univers de la mythologie Nordique, Eldur empruntant çà et là aux différents registres du metal extrême pour mettre en forme son projet.

Unique compositeur du groupe Fortið, Eldur mêle avec talent le clavier caractéristique d’un black metal atmosphérique à une batterie puissante. Le point fort de cet album est cette capacité à utiliser toutes les textures et les plans que l’on retrouve dans la plupart des styles qui composent le metal extrême. Fortið nous assassine avec ses blasts, nous transportent avec ses nappes de clavier venant du Nord, et la guitare sèche nous rappelle le folklore typique des pays du Nord. "Ragnarok Army From The East" exprime parfaitement cet état d’esprit. Ce morceau est d’une richesse et d’une intensité troublantes. Au chant, Eldur nous fait part de son large éventail de sonorités : chant clair très épique et guerrier, cris profonds et pénétrants. La guitare, elle, se fait grinçante et inquiétante. Sur ce morceau, Fortið se joue des contretemps et nous ravit de parties qui sortent des classiques du genre. Car il s’agit bien là d’un projet intemporel qui explore toutes les facettes du metal extrême. "Fall Of The Ages" est encore plus épique que le précédent titre. L’intro me fait étrangement penser à un morceau d’Hegemon. Rapide, incisif et accrocheur. "Equilibrium Reclaimed" s’apparente à une véritable ballade fantastique. On se rapproche d’un Ensiferum, notamment avec cette mélodie à la guitare qui persiste. Sur "Heltekinn", Fortið empreinte les codes du black metal mélodique pour nous offrir un titre survolté aux blasts frénétiques. Interprété à la guitare sèche et au chant clair "New Dawn" est comme une ode magnifique à la tradition nordique.

Le dernier titre de l’album est aussi celui le plus sombre. Le tempo se fait plus lent et plus lourd, le chant plus douloureux et torturé. On se rapproche de l’ambiance amenée par l’intro de cet album, mais le temps nous rattrape doucement vers notre destin funeste qui est la fin. Seulement on en redemande, on n'est pas totalement rassasié et on n'a pas fini de voyager, alors on se met l’album en boucle. Les 7 morceaux qui composent l’album passent à une vitesse folle et on en redemande encore et encore…


Célin
Avril 2010


Conclusion
L'interview : Eldur

Le site officiel : www.facebook.com/fortid