Après l'EP "Devices" en 2015 et le premier album "To The Concrete Drifts" en 2017, les Américains de Fell Ruin reviennent avec leur deuxième album "Cast In Oil The Dressed Wrought". Se situant à cheval entre le black, le death, le doom et quelques inspirations progressives, le groupe balance une musique personnelle et torturée qui promet un voyage agité.

Ce nouvel album ne présente que six morceaux pour trente-trois minutes, on sait donc que Fell Ruin n'a pas prévu de s'attarder et va frapper fort même si les morceaux sont assez longs. En dehors des deux instrumentaux qui dépassent à peine la minute, on atteint plutôt les six ou huit minutes. Un format que faisait déjà entendre "To The Concrete Drifts" donc si vous connaissez ce premier album vous ne serez pas dépaysés avec "Cast In Oil The Dressed Wrought" et vous retrouverez avec un plaisir masochiste ces fameuses ambiances inquiétantes, très torturées et cette alternance de lourdeur et de violence brute. L'instrumental "Fixation" ouvre l'album et se charge d'installer une ambiance justement très noire et oppressante qui laisse clairement deviner que quelque chose de sinistre va nous tomber dessus très vite. Un peu plus d'une minute plus tard c'est effectivement le morceau-titre qui nous tombe dessus et on se prend déjà des riffs dissonants sur un up-tempo déconstruit et imprévisible. Le groupe nous replace assez rapidement un passage très doom, écrasant et là encore oppressant avec des riffs sales et malsains. On retrouve donc ce mélange de froideur tirée du black, de riffs gras et brutaux venus du death et de passages très lourds en provenance directe du doom. Le tout avec une teinte expérimentale et progressive qui amène des cassures rythmiques et des dissonances au milieu de tout ça. Quelques mélodies plus planantes se font entendre dans un break plus mélodique en plein milieu du morceau sans jamais se départir de cette noirceur qui va imprégner tout l'album.

La production ajoute encore en froideur et en inhumanité avec un son propre, puissant et une batterie sèche qui claque comme un coup de trique. "Stain The Field" commence de façon très death metal avec des riffs puissants, brutaux et toujours aussi noirs. Les tapis de double grosse caisse broient toute résistance et les leads dissonants qui débarquent ensuite achèvent d'installer une ambiance une fois de plus torturée et à la limite de la folie. "The Burning Spire" y plonge d'ailleurs totalement avec une bonne volée de blasts en guise de comité d'accueil et des riffs encore plus dissonants posés sur des structures régulièrement brisées. Comme sur son premier album, Fell Ruin sort des sentiers battus et mélange plusieurs scènes extrêmes pour créer un univers torturé, violent et noir souvent proche du point de rupture. Sans blaster en permanence, loin de là, le groupe arrive quand même à faire sentir une agressivité sous-jacente. Cela passe plus par les dissonances, les structures imprévisibles et les ambiances sombres et oppressantes mais quelques explosions de brutalité se font entendre de temps en temps et l'impact n'en est que décuplé. Dans l'esprit, on pourrait éventuellement citer Akercocke pour la volonté de proposer un metal extrême expérimental et glauque mais les similitudes se trouvent éventuellement plus dans le fond que dans la forme.

Fell Ruin reste fidèle à lui-même et revient avec un deuxième qui marche dans les pas de "To The Concrete Drifts" et comme lui ne plaira pas à tout le monde. Sans être hermétique ou inaccessible, la musique du groupe est suffisamment particulière pour demander un minimum d'ouverture d'esprit, mais à part ça il y a ce qu'il faut en violence, en ambiances noires et en riffs malsains.