Le groupe
Biographie :

Eyehategod émerge en 1988 à la Nouvelle-Orléans, Louisiane. Le groupe entame sa carrière en tant que quatuor, lequel est composé de Michael Williams (chant), Jimmy Bower (guitare), Joe LaCaze (batterie) et Steven Dale (basse). Fraîchement signé chez Century Media, Eyehategod livre son premier album, "In The Name Of Suffering", en 1992. Renforcés par un second guitariste officiant chez leurs voisins de Soilent Green, Brian Patton, les Sudistes remettent le couvert un an plus tard avec "Take As Neened For Pain". Leur renommée va alors croissant, ce qui leur permet de partager l'affiche avec Napalm Death, Godflesh, ou Corrosion Of Conformity, mais aussi de figurer sur de nombreux splits. En 1996, sort "Dopesick" avec un nouveau bassiste, Vince LeBlanc. En 2000, sort "Confederacy Of Ruined Lives" avec de nouveau un autre bassiste, Daniel Nick. Après avoir changé une énième fois de bassiste avec l'arrivée de Gary Mader, le groupe traverse alors une période de sorties diverses chez Emetic Records, de concerts, de festivals et de frasques (Mike Williams passera 91 jours en prison pour possession de drogue). En Août 2013, le batteur Joey LaCaze décède d'une insuffisance respiratoire. Il sera remplacé par Aaron Hill à partir d'Octobre 2013. Eyehategod revient finalement chez Century Media pour la sortie de son cinquième album en Mai 2014. En 2016, Mike Williams se fait opérer pour une transplantation de foie. Le groupe fait son retour en 2021 avec l'album "A History Of Nomadic Behaviour".

Discographie :

1992 : "In The Name Of Suffering"
1993 : "Take As Needed For Pain"
1996 : "Dopesick"
2000 : "Confederacy Of Ruined Lives"
2014 : "Eyehategod"
2021 : "A History Of Nomadic Behaviour"


Les chroniques


"A History Of Nomadic Behaviour"
Note : 14/20

Sept ans après leur précèdent opus (lequel s’intitulait sobrement "Eyehategod"), les légendes du sludge des années 90 sont de retour avec un nouvel album qui sent bon le bayou de Louisiane. Toujours fidèle à son style punk dans l’esprit de Black Flag, Poison Idea ou GG Allin, le quatuor de la Nouvelle Orléans ne s’est - de toute évidence - pas assagi avec le temps. On retrouve le son brut qui fait la spécificité des sudistes dès les premières notes du morceau "Built Beneath The Lies", lequel ouvre ce disque au parfum d’apocalypse.

Malgré son titre à rallonge et plutôt énigmatique, ce dernier ne fait pas la dentelle, comme en témoigne la voix d’écorché vif du vocaliste Mike IX Williams et ses compositions dissonantes qui font le lien entre doom metal et hardcore. Le magnifique artwork qui orne la pochette ne trompe pas : si les morceaux sont plutôt mid-tempo et lancinants dans l’ensemble, cela n’empêche pas le groupe de se donner à cœur joie avec quelques morceaux bien chaotiques et rentre-dedans comme "Fake What’s Yours", "Three Black Eyes" ou "Current Situation".

Certes, Eyehategod revendique en premier lieu l’héritage de Black Sabbath (comme en témoignent des morceaux comme "Anemic Robotic" ou "The Trial Of Johnny Cancer") mais on sent néanmoins l’influence de groupes plus récents comme Pantera, Crowbar, Unsane ou Down. A grand renfort de larsens et de riffs noisy et entêtants, les Américains gardent ce petit côté déglingué et agressif que l’on apprécie tant - et ce malgré le temps qui passe. On rappelle à ce propos que le groupe existe tout de même depuis 1988 et qu’il n’a jamais cédé aux modes passagères qui se sont succédées depuis 30 ans !

Après un interlude instrumental presque psychédélique ("Smoker’s Piece"), le groupe en remet une couche avec deux morceaux aux riffs bien affûtés et à la production brute à souhait : "Circle Of Nerves" suivi de "Every Thing, Every Day". C’est d’ailleurs ce dernier qui clôt ce qui est sans doute des meilleurs albums de sludge de 2021. Cultissime !


M.B.
Mai 2021




"Eyehategod"
Note : 18/20

Eyehategod. Quintette maître pionnier du sludge made in New-Orleans depuis près de 30 ans qui s’érige depuis son aube en groupe chargé d’histoire. De la création d’un style musical formant la plus intelligente des cacophonies aux nombreuses frasques qui leur valent cette réputation de furieux spécimens si attachants, une dernière note prend la forme de tragédie lorsque le groupe perd le 24 Août 2013 son batteur d’origine, fondateur du projet en 1988 avec le guitariste Jimmy Bower. RIP Joey LaCaze. Dès fin 2012, le band s’attaquait à l’édifice d’un nouvel album sur lequel les parties de drum furent parfaitement enregistrées, une dernière fois, par Mr LaCaze.

14 ans après leur dernier full-length "Confederacy Of Ruined Lives", c’est le 27 Mai 2014 que sort le nouvel éponyme du groupe via Housecore Records aux Etats-Unis, le 26 Mai en Europe, Australie, Nouvelle-Zélande par Century Media, le 21 par Daymare au Japon. 14 ans, une attente démesurée pour les aficionados qui pour combler leur frustration se délectent depuis lors de concerts quasi annuels dans lesquels est repris le meilleur de leur carrière. Des fameuses lignes jumelles de "Jack Ass In The Will Of God" / "Southern Discomfort" au groove bordélique des "Sister Fucker", il y a de ces titres intemporels qui ne lassent pas. Aujourd’hui, l’heure est à l’exaltation, l’empressement de déballer son œuf de Pâques un peu après l'heure, la redécouverte d’une formation sur laquelle personne n’aurait parié quant à la création d’un nouveau marmot.

Un nouvel album - il me semble dès à présent important de le préciser - sans véritables nouveaux parti-pris musicaux. Fans de la première heure, vous retrouverez dans cet Eyehategod dernière génération les sonorités de vos premières berceuses bluesy. Fidèle à ses prémices amoureux, Eeyehategod est de ces (rares) groupes dont la notoriété ne fait pas dévier des sentiers battus originaires. Si ce n’est qu’une fusion de titres à l’ancienne mixés dans la meilleure des qualités de production, une sorte de résumé de ce qu’ils auraient pu créer de mieux en presque 30 ans avec leurs quatre autres prods, il est clair que rien n’a changé. Dissonances démesurées par lesquelles larsens et autres nocifs sont sublimés et deviennent parties intégrantes de la compo d’un morceau, Jimmy Bower et Brian Patton perpétuent la création de riffs sludgy / bluesy robustes, guitares plongées dans les marécages du Mississippi, les sonorités pilent comme pas d’autres, sans paradoxe si sales et carrées à la fois. Joey LaCaze et Gary Madder immortalisent quant à eux un duo de groove évident.

Histoire de mettre en appétit, le Housecore Records de tonton Anselmo - qui contribua dans sa majeure partie à la production - avait laissé s’échapper fin Mars / début Avril deux extraits du nouvel opus en avant-première, "Agitation! Propaganda !" et "Robitussin And Rejection". Avec le premier (ouverture de l’album) on remonte déjà si loin dans l’authenticité que l’on peut toucher du bout des doigts les intonations d’un Outlaw Order de bonne famille et ses accents pun k /hardcore jusqu’aux premières lenteurs rythmiques où l’ombre d’un doute n’est plus possible quant au nom de la formation. Prête à parier que certains "Parish Motel Sickness" et "Quitter’s Offensive" s’édifieront en titres phares de l’album avec des éléments NOLA certifiés, l’alternation entre passages engourdis corpulents et instants au caractère plus dynamique crée une mixture qui fonctionne - comme toujours. Le début de "Worthless Rescue" rappelle largement Down et ses tonalités guitaristisques sludge / stoner (merci monsieur le producteur), "Flags And City Bonds" le phrasé en récitation de texte de Correction House. Inutile de faire un décryptage précis de chaque morceau, l’outro parachève juste le ton de l’album sur un "The Age Of Boot Camp", broyeur de massivité.

Evidemment, les influences de composition / production ne peuvent ici que s’exprimer à vive allure. Finalement, s’il y avait une nouveauté à faire paraître, ce serait peut-être celle-ci : un mix de la crème du groupe et du meilleur de ses side-projects inexistants auparavant. Mais l’essence même d’un Eyehategod tel qu’on le connaît reste enraciné. Sur ce nouvel opus, "fidélité" restera le maître-mot et toute la lourdeur et la qualité de composition qui en découle depuis trois décennies. Cinquième petite merveille de leur carrière, ce "Eyehategod" crache onze titres qui dès leur sortie ne finiront plus de tourner en boucle dans les chaumières des avisés, en attendant une tournée européenne prévue pour la rentrée prochaine. Un gracieux cadeau 2014.


Angie
Mai 2014


Conclusion
Le site officiel : www.eyehategod.ee