Le groupe
Biographie :

En 1997, Ebonylake enregistrait la démo "As Ghosts We Dance In Thrashing Seas", rapidement cette autoproduction gagna l'attention de la scène avant-garde pour sa furieuse mixture de metal extrême et néo classique mêlée à des éléments de musique de film. Employant des structures non conventionnelles et des ambiances claustrophobes et horribles, complété par une section de 6 chanteurs, "As Ghosts We Dance In Thrashing Seas" s’apparente à un culte. Impressionné, le fameux label Anglais Cacophonous Records (Bal Sagoth, Cradle Of Filth, Dimmu Borgir, Gehenna, Primordial, Sigh ...) les signa et le travail intensif commença alors sur le premier album "On The Eve Of The Grimly Inventive". Les séances de composition menant à l'enregistrement ont été le fruit d’explorations artistiques avec de nombreux points de références, Oscar Wilde, Pendereki, Prokofiev et Poe pour n'en nommer que quelques-uns. Enregistré en 1998 aux Studios Académie en Angleterre, l'album ne laissa personne indifférent. A l'opposé de la scène metal de l'époque, il a été soit encensé pour son pur géni, soit dénigré pour son manque de conformité. Baignant dans un univers anxiogène, nerveux et désespéré, sa personnalité schizophrénique poignante et autiste a été une pilule difficile à avaler. Le feu a brûlé avec une telle intensité qu’Ebonylake a disparu aussi vite qu'il est apparu. Une décennie plus tard, après un long chemin de croix, Mass et Ophelius retrouve la foi.

Discographie :

1999 : "On The Eve Of The Grimly Inventive"
2011 : "In Swathes Of Brooding Light"


La chronique


Il y a quelques années en arrière, en 1999 pour être précis, un groupe Anglais qui m’était totalement inconnu a sorti un premier album nommé "On The Eve Of The Grimly Inventive" et 2 morceaux dudit album sur des samplers de mags metal en France. En feuilletant les mags en question, je tombe sur une interview du groupe dans laquelle ses membres prétendaient que leur musique était influencée par des esprits frappeurs et farceurs qui habitaient leur demeure. Bon des discours promo tordus on en a tous vus quelques uns, mais celui là il fallait oser. Enfin, c’est ce que je me disais avant d’écouter ce que ça donnait ! Parce que ce côté cinglé vous sautait à la gorge dès la première écoute de l’album.

Influencée par d’éventuels esprits je n’en sais rien, mais la musique d’Ebonylake sur cet album était totalement dérangée et dérangeante, un mélange entre mélancolie et folie furieuse à tous les étages. Ce premier méfait est malheureusement passé quasiment inaperçu à l’époque, et les rares personnes à l’avoir écouté ont dû prendre un stock d’aspirine pour s’en remettre. Il semble qu’il soit maintenant de plus en plus reconnu à sa juste valeur, il faut dire que le sortir sur Cacophonous Records déjà au bord de la disparition à l’époque n’a pas dû aider. Ce sont aujourd’hui les Acteurs de l’Ombre qui les ont recueillis et j’espère que le groupe tiendra le coup parce qu’il a manifestement encore beaucoup de choses à nous raconter.

Bref tout ça pour dire que ces Anglais fous sont de retour en 2011 avec une nouvelle galette, qui répond au doux nom de "In Swathes Of Brooding Light". Je me demandais encore il y a peu ce qui avait bien pu arriver au groupe, et si ses membres avaient créé d’autres projets. En fait des 7 personnes du line-up d’origine il n’en reste que 2, Ophelius et Matthew "Mass" Firth. On peut légitimement se demander si le groupe pourrait être aussi créatif avec 5 personnes de moins et 12 ans d’absence. Je vais casser le suspense tout de suite, vous pouvez attacher votre ceinture tout de suite parce que ça va secouer. Les Ebonylake ne se sont pas assagis avec le temps, loin de là même ! Et même si on reconnaît de temps en temps la patte et la façon de composer qui nous est familière depuis le premier album, vous allez voir que vous n’êtes malgré tout pas au bout de vos surprises.

Le premier morceau nous plonge d’entrée de jeu dans l’ambiance, ça démarre direct sur des claviers totalement tordus et des voix inquiétantes mélangées à des hurlements, le tout soutenu par un blast infernal ! Dans le genre entrée en matière qui défonce tout ça se pose là, et on comprend de suite qu’ils sont encore plus tarés qu’avant. De manière générale ce nouvel album présente un visage plus abrasif et plus agressif et violent que son prédécesseur, je ne sais pas ce qui s’est passé en 12 ans mais ça les a énervés. Le côté déstructuré est encore là bien entendu, il est même renforcé et les morceaux vont avoir encore plus de mal à passer que ceux d’"On The Eve Of The Grimly Inventive". En plus de ça, le groupe a choisi d’avoir une prod' beaucoup moins claire, une sorte de magma d’où ne ressortent aux premières écoutes que quelques éléments et passages pas franchement rassurants.

Il est clair que cette galette va laisser du monde sur le carreau, même les amateurs du premier album risquent d’être totalement déboussolés tant celui-ci est dense, furieux, fou, malsain, violent, déstructuré et dissonant. On pouvait encore déceler quelques passages magnifique sur "On The Eve Of The Grimly Inventive" comme sur le titre "A Voice In The Piano" par exemple (qu’on va retrouver un peu plus tard d’ailleurs), mais sur ce nouveau méfait c’est déjà beaucoup moins fréquent. Tout ou presque suinte le malaise, la dépression et la folie. Là où le premier album était tordu, un peu fou et original, celui-ci se montre oppressant, destructeur et totalement plongé dans la folie et la dépression la plus pure. Sur certains passages dissonants on se dit que ces deux fous ont dû écouter des groupes comme Blut aus nord ou Deathspell omega, et toute la scène qui mélange des sonorités dissonantes à des passages déstructurés. On en entends beaucoup en ce moment, mais là où certains copient ces plans sans imagination, Ebonylake nous apporte son gros grain de folie habituel et tout ce qui l’entoure dans une dimension parallèle pas franchement accueillante.

Je disais tout à l’heure qu’on retrouverait le morceau "A Voice In The Piano", pas pour une raison de recyclage, mais parce qu’Ebonylake a remasterisé sa démo "As Ghosts We Dance In Thrashing Seas" que bien peu de monde avait eu l’occasion d’écouter à l’époque de sa sortie et qui est bien entendu totalement introuvable. Et en plus de 2 morceaux uniquement disponibles sur cette démo on y trouvait déjà 2 autres qui ont atterri sur le premier album : "A Voice In The Piano" donc et "Within Deepest Red (The Opening Of…)". Et si ces deux derniers ne se différencient pas fondamentalement des versions que l’on connaissait déjà, à part peut-être la prod', il est intéressant d’avoir les 2 autres morceaux qui sans ça auraient été perdus dans les méandres des démos underground. Et ça permet de bien ressentir la différence d’ambiances entre les deux époques, de se rendre compte que le côté baroque présent il y a 12 ans par petites touches a quasi-entièrement disparu.

Après tant d’années et la quasi certitude que le groupe avait perdu sa folie et sa créativité, il nous revient avec un album totalement possédé et encore plus éprouvant que son prédécesseur ! Parce que je vous préviens qu’il va falloir avoir l’estomac sacrément bien accroché pour réussir à encaisser une "horreur" pareille. "On The Eve Of The Grimly Inventive" nous avait donné l’occasion d’entrer dans la psyché perturbée de ses géniteurs, cet album là nous fait descendre tout droit en enfer pour subir une torture auditive aussi jouissive que douloureuse. Et même si le groupe doit encore nous faire patienter plusieurs années avant un troisième album, ce "In Swathes Of Brooding Light" saura nous tourmenter l’esprit et nous génocider les neurones.


Murderworks
Novembre 2011


Conclusion
Note : 18/20

Le site officiel : www.myspace.com/ebonylakeofficialuk