"Voidkind"
Note : 16/20
Dvne est de retour avec un nouvel album du nom de "Voidkind"et tout aussi dense que ses prédécesseurs, une bonne heure de musique et des morceaux globalement assez longs qui vont une fois de plus exiger un minimum de concentration et d'attention. Pour le précédent album et pour situer la bête vite fait à ceux qui sont passés à côté, j'avais cité les noms de Baroness, Mastodon et Intronaut.
Dvne a bien évidemment sa patte mais cela permet de savoir où on met les pieds et d'avoir une vague idée du style pratiqué. De toute façon vous commencez à savoir que les étiquettes sont toujours utilisées faute de mieux et parce qu'il faut bien au bout d'un moment donner un minimum d'indications. Sinon on range tout dans "rock" et celui qui aime le dit rock'n'roll va avoir une belle surprise quand il va tomber sur du goregrind... Mais revenons-en à nos vers des sables avec ce troisième album de Dvne ! "Summa Blasphemia" ne perd pas de temps et ouvre l'album de manière assez dynamique en posant de suite son ambiance et en balançant de bons gros riffs qui confirment que le groupe suit le chemin tracé par les deux précédents albums. On y retrouve donc les influences citées plus haut et le groupe n'a pas perdu sa puissance d'évocation en cours de route. Le fait d'avoir trois personnes au micro permet une fois de plus de passer d'un chant clair à un autre plus crié en passant par le growl, de quoi appuyer les différentes ambiances que Dvne s'amuse à placer sur "Voidkind". C'est bien entendu sur ses morceaux les plus longs que le groupe arrive à se détacher de ses influences à développer ses ambiances, comme sur "Eleonora" par exemple qui fait entendre de bien belles choses sur ses neuf minutes. C'est le seul petit défaut que l'on pourrait encore pointer dans la musique de Dvne d'ailleurs, le fait que les influences s'entendent encore assez clairement par moments. Mais cela ne pèse pas lourd face à la capacité du groupe de faire naître des images qui ne manqueront pas de danser devant vos yeux. Les ambiances sont toujours aussi fortes, les mélodies toujours aussi efficaces et "Voidkind" rate rarement sa cible.
L'équilibre entre puissance et mélodie est bien géré et dès que l'on commence à se dire que ce serait bien de remettre un peu de patate au milieu de ses ambiances plus planantes, le groupe ressort les crocs et les gros riffs qui vont avec. Pas le temps de s'ennuyer malgré une bonne heure au total et le groupe a clairement travaillé ses nouveaux morceaux. Certes un titre comme "Reliquary" ne pourra pas cacher son influence Mastodon et "Samatae" sent fort le Cult Of Luna par moments mais bon, vu la qualité des morceaux on ne va pas trop râler. Mais ce serait quand même mieux que Dvne arrive à digérer ça à l'avenir parce que sur "Abode Of The Perfect Soul" je n'ai pu m'empêcher de me dire à certains moments "Ah tiens ça c'est Tool, ça c'est Cult Of Luna", ce qui est un peu dommage quand on sait à quel point le groupe peut frapper fort quand il arrive à développer son univers. Tout groupe a ses influences et elles s'entendent forcément dans la musique qu'il produit c'est évident, mais disons que ça s'entend encore un peu trop à certains moments. Que cela ne vous empêche pas de jeter une oreille à l'album puisque comme ses deux prédécesseurs il a largement de quoi faire passer un bon moment. D'ailleurs, "Pleroma" enchaîne avec des mélodies bien plus accrocheuses, une approche plus directe et amène encore quelque chose de différent dans un album déjà assez riche. Quant à "Cobalt Sun Necropolis", il ferme l'album sur une note plus sombre, plus dure et plus poignante. Là encore les mélodies et les ambiances sont efficaces et font entendre quelque chose d'un peu plus personnel qui prouve que Dvne en a sous le pied et que tout ça devrait encore se développer à l'avenir.
"Voidkind" continue donc sur la lancée des deux premiers albums et Dvne continue son chemin tranquillement avec par conséquent des influences parfois assez flagrantes. Rien de très grave puisque la qualité est là, mais si le groupe arrive à l'avenir à développer un univers encore plus personnel, on ne dit pas non.
"Etemen Ænka"
Note : 17/20
J'ai tellement de livres à lire que je me dis que me refaire une fois de plus l'intégrale de Dune ne serait pas raisonnable, comme par hasard un nouveau film doit sortir et les Anglais de Dvne ressortent un album ! N'essayez pas de cacher le complot, c'est trop tard, je l'ai repéré. Bref, après un très bon "Asheran" sorti en 2017 et l'EP "Omega Severer" fin 2020, c'est avec "Etemen Ænka" que le groupe revient cette année. Comme vous vous en doutez, Dune est effectivement une des influences extra musicales de... Dvne, c'est fou hein ?
Musicalement, on navigue entre le sludge, le stoner, peut-être un léger zeste de post-rock et le progressif pour un résultat qui pouvait faire penser à la fois à Baroness, à Intronaut et un peu à Mastodon sur le précédent album. On retrouve cette patte dès "Enûma Elis" qui ouvre l'album et entend surtout avec plaisir ces ambiances et ces motifs mélodiques que le groupe développait déjà par le passé et qui sont un régal pour les oreilles. Comme beaucoup de groupes dans le genre, Dvne a une puissance évocatrice impressionnante et au-delà du tricotage de certains riffs se cachent des ambiances prenantes qui donnent instantanément naissance à des images. Les voix de Victor Vicart et Dan Barter n'y sont pas pour rien et quand les deux s'entremêlent, les émotions vous frappent de plein fouet. Pour ceux qui n'auraient pas encore compris, la brutalité n'est évidemment pas la préoccupation principale de Dvne, même si le groupe n'hésite à pas l'utiliser. Le chant est majoritairement clair et les cris ne viennent qu'épisodiquement enrichir le spectre sonore. Ce sont les mélodies qui sont reines ici et tout est fait pour servir les ambiances et enrichir l'univers que crée Dvne, tout comme les passages les plus techniques qui n'interviennent que lorsqu'ils servent le morceau. "Court Of The Matriarch" mélange d'ailleurs admirablement bien toutes ces différentes facettes et balance des riffs puissants sur lesquels viennent se poser à la fois les cris et les superbes lignes de chant clair, le tout créant un morceau aussi direct qu'émotionnellement fort. Si les influences du groupe peuvent encore s'identifier et si leur empreinte se fait encore parfois sentir, on remarque surtout un talent d'écriture indéniable qui fait toute la différence.
Le groupe arrive à nous embarquer dans son voyage pendant soixante-sept minutes sans montrer le moindre signe de faiblesse ou le moindre manque d'inspiration. L'équilibre entre mélodie, technicité et puissance est suffisamment dosé pour qu'il se passe toujours quelque chose malgré des morceaux qui atteignent fréquemment les huit ou dix minutes. Comme son prédécesseur, "Etemen Ænka" a été produit par Graeme Young au Edinburgh's Chamber Studio et bénéficie une fois de plus d'un son chaud et organique qui fait plaisir à entendre et qui en plus sert d'écrin parfait à cette musique riche en ambiances et en mouvements. Les passages les plus mélodiques et planants reflètent plutôt bien l'aura quasiment mystique qui peut imprégner l'oeuvre de Frank Herbert et la mise en avant de détails y faisant référence ne tient pas du gimmick. On ne peut pas dire non plus que l'ambition de Dvne se limite à retranscrire cet univers en musique, il s'en sert mais ses ambiances et le monde qu'il crée vont plus loin que ça. La musique du groupe se nourrit de cette influence littéraire mais n'hésite pas à aller voir ailleurs et ne s'en sert que pour nourrir sa puissance d'évocation et la richesse de ses textures. Le but est de faire en sorte que des images vous viennent en tête à l'écoute de "Etemen Ænka" et celui-ci est atteint sans problème. Encore une fois, on se dit que ce genre d'album retranscrit sur scène doit être un sacré voyage, mais il va falloir malheureusement encore attendre je ne sais combien de temps pour vivre ça. Que cela ne vous empêche pas de vous délecter de notre chère musique sur enceintes pour autant, ce serait dommage de passer à côté de ce genre d'albums.
Dvne continue donc sur sa lancée et suit à peu près les traces laissées par "Asheran" tout en poussant un cran au-dessus. Sa puissance d'évocation, sa qualité d'écriture et ses ambiances toujours prenantes, planantes voire poignantes font de "Etemen Ænka" un album exigeant et profond mais qui récompensera largement ceux qui feront l'effort d'entrer dans son monde.
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