Drofnosura célèbre ses quinze ans avec une signature. Recruté par Transcending Obscurity Records, le groupe canadien composé de W.L.F. (guitare / chant / clavier), D.A.S. (batterie / chant / clavier) et M.A.D. (basse / chant / clavier) dévoile son deuxième album, "Ritual Of Split Tongues".

La cérémonie débute par "Selection Of A Corpse", un titre assez court comparé à ce qui nous attend, et qui nous écrase rapidement sous une rythmique épaisse dont sortent des parties vocales mystérieuses, autant en voix claire qu’en grognements. Les claviers et autres harmoniques donnent un ton assez pesant et chaotique au morceau qui finira par s’éteindre pour laisser "Kapala Kriya" nous accorder un moment de répit avec quelques notes plus douces, mais qui se laisseront peu à peu corrompre par la noirceur. Des murmures apparaissent pour finalement se transformer en râles pendant que la saturation gagne du terrain, puis on se retrouve enfin en plein cauchemar avant que tout ne disparaisse dans le néant pour rejoindre "The Ritual Of Split Tongues" qui s’installe très lentement. Les éléments se révèlent progressivement pour nous présenter ce nouvel enfer étouffant et dissonant rempli de voix angoissantes, conservant l’atmosphère irrespirable même lorsque le silence s’impose avant de faire renaître les bruits pour que la rythmique ne s’enflamme, ne se coupe brusquement, puis reparte avec un imbroglio guitaristique vers "ἐ γεί ρω (egeirô)".

Signifiant “dresser”, “lever”, “ériger” ou encore “s’éveiller” en grec ancien, il nous convie à prendre part à ce moment de répit qui s’intensifie calmement, atteignant un climax avant de laisser retomber la pression pour permettre à The Well of Seven Heads de créer la sienne et d’en amplifier la terreur avec une facilité déconcertante. Je ne peux que vous confirmer de fermer les yeux et d’écouter le morceau au casque pour profiter pleinement de l’amas sonore que le groupe tisse habilement tels des spécialistes des crises psychotiques, orchestrant changements de rythme et éruptions de lourdeur ou de vociférations, puis c’est avec "Desounen" que le groupe nous convie à son rituel mortuaire vaudou où la mélancolie joue un rôle important, contrebalancée par l’approche bruitiste en arrière-plan qui vont finalement s’allier pour teinter le paysage sonore d’un voile étrange, presque même apaisant pendant que le groupe déverse son oppression jusqu’au dernier moment.

L’expérience Drofnosura est définitivement hors du commun. Bien qu’ancré dans un sludge sombre et poisseux, "Ritual Of Split Tongues" profite d’influences angoissantes pour créer un véritable tableau d’étrangeté nourri au malaise et qui nous transporte aux portes de la schizophrénie.