Les amateurs de Crystal Eyes sont sans doute les plus patients de la métalosphère (si on exclut bien entendu ceux de Tool…). En effet, la formation suédoise apprécie particulièrement prendre son temps entre chaque sortie d’album, six ans en moyenne. Les langues sales diront sans doute que ces délais sont difficilement explicables vu le genre proposé par Crystal Eyes. Je ne serais pas entièrement en désaccord, si produire de la musique ne se résumait qu’à composer des chansons. Plusieurs facteurs peuvent entrer en ligne de compte, incluant les changements de personnel, les coûts et bien sûr le manque d’inspiration. Peu importe les raisons derrière les longues périodes de silence du groupe, concentrons-nous sur leur huitième album en carrière.

Nier que le mouvement NWOBHM, Iron Maiden en tête, fait partie des influences principales de Crystal Eyes serait de la pure folie, ou une totale méconnaissance du metal en général. En effet, dès les premières notes de "Gods Of Disorder", difficile de ne pas faire le lien avec la bande à Steve Harris. Il ne va pas sans dire que le son power metal européen à la Helloween est aussi au rendez-vous, comme en témoigne la double attaque de guitares sur l’excellente "Extreme Paranoia", qui d’ailleurs met de l’avant l’une des plus solides performances vocales de la part de Mikael Dahl, se permettant au passage des envolées proches de la stratosphère, tout en conservant sa tonalité rappelant un certain Peavy Wagner de Rage. Sans réinventer la roue, le groupe ressort du lot tout de même en proposant toute une variété d’influences, allant même jusqu’à s’immiscer dans l’univers d’un certain Van Halen avec la hard rockeuse "Paradise Powerlord".

Certaines pièces n’ont pas exactement le même impact, et c’est plutôt dommage de constater que l’une des chansons les moins attirantes de l’album est l’éponyme de celui-ci. Et cette tendance se poursuit malheureusement en deuxième partie d’album, comme si le groupe naviguait sur le pilote automatique. Le résultat est une suite de pièces difficilement mémorables qui auraient clairement gagné à être un peu plus peaufinées. Un travail colossal a été consacré à la production qui, pour un album de metal traditionnel, ne sonne pas du tout vieillotte. Certainement l’emphase fut mise sur le chant et les guitares, mais la section rythmique est bien présente et appuie avec dynamisme le reste du groupe. Bien entendu, comme tout bon album de metal traditionnel qui se respecte, la basse est encore une fois reléguée aux oubliettes, ce qui est bien dommage selon mon humble opinion.

Dans son ensemble, "Starbourne Traveler" se veut un solide hommage au passé, un salut avec respect aux plus grands du genre. Je le répète souvent, le metal ne peut que sortir gagnant avec des formations comme Crystal Eyes, qui trime dur pour maintenir notre style vivant.

Il aura fallu 6 ans à Crystal Eyes pour donner un successeur à l'excellent "Chained", délai principalement dû à plusieurs changements de line-up. Mais ces changements ont permis le retour au sein de la formation auprès du fondateur Mikael Dahl de Niclas Karlsson et de Martin Tilander, respectivement à la guitare et à la batterie. Ces retrouvailles entre anciens membres ont semble-t-il dopé le groupe qui débarque avec un album on ne peut plus solide !

Comme je l'ai déjà dit, le prédécesseur "Chained" était très bon, mais il est largement surpassé par "Killer". J'y ai retrouvé tous les groupes qui ont accompagné mes années lycée… Iron Maiden, dans "Killer" (étrange coïncidence ce titre) ou "Solar Mariner", Gamma Ray dans "Forgetten Realms" mais aussi un peu de Helloween et de King Diamond dans "Spotlight Rebel" et "Hail The Fallen". Crystal Eyes, fidèle à son habitude livre ici une très bonne galette rendant hommage aux heures glorieuses du heavy metal !

Le groupe a centralisé ses efforts pour que ses compos soient old school à souhait, tout en y enlevant la production old school qui faisait le charme de la formation. L'album est parsemé de breaks plus que bien sentis, de soli magnifiques comme on n'en entend plus, de chœurs porteurs, et d'un chant d'une grande qualité. Et c'est là le principal progrès du groupe. Par la force des choses, notamment du départ d'Adamsen, Mikael Dahl, maintenant simple vocaliste, a pu se concentrer sur sa voix, et atteindre le niveau qu'il mérite, poussant maintenant dans des aigus très maîtrisés. Alors pour qui aime le style comme moi, "Killer" est un must have ! Les effets produits sont la preuve de la qualité de cet album : de l'entrain, du plaisir à écouter, et une certaine touche de mélancolie… Tout y est !