"Esto Es Brujeria"
Note : 16/20
Brujeria reprend du service. Créé au Mexique en 1989, le combo masqué mené par Juan
Brujo (chant), Pinche Peach (samples / choeurs), Hongo (guitare / basse, Napalm Death,
Insidious Disease, Lock Up, Venomous Concept…) et Fantasma (basse / chant),
complété par El Sangrón (chant), El Criminal (guitare, Criminal, Lock Up, Pentagram
Chile) et La Encabronada (Alekhine's Gun) renouvelle en 2023 sa collaboration avec
Nuclear Blast et annonce la sortie de son sixième album, "Esto Es Brujeria".
La batterie a été enregistrée par Hongo Jr (Shining, ex-Ancient, ex-Cradle Of Filth,
ex-Dimmu Borgir…) et quelques pistes de basse par El Cynico (Carcass).
L’album débute par le flash info chaotique de "Esto Es", puis l’ouragan vient frapper à coup de
blast et de cris vindicatifs, mais également avec des samples beaucoup plus joyeux qui
amènent un contraste… unique. "El Patrón Del Reventón" prend immédiatement la suite en
offrant un grindcore brut et efficace fait de riffs simples mais accrocheurs et des habituelles
vociférations menaçantes en espagnol, avant de se faire réanimer pour un dernier sursaut,
suivi d’"Estado Profundo" qui place ses tonalités old school motivantes propices au mosh
sauvage. Les voix inquiétantes donnent au son une noirceur pesante avant que "Bruja
Encabronada" ne présente la nouvelle vocaliste qui apporte sa touche viscérale à une
instrumentale ravageuse, alors que "G A-K" s’oriente vers des influences death metal groovy
et écrasantes. "Tu Vida Loca" repart dans ses racines agressives et fédératrices taillées pour
la scène, créant un son abrasif et lourd que le groupe fera ralentir pour laisser place à
"Mexorcista" et à son ambiance oppressante. Quelques vagues plus vives apparaissent entre
les patterns saccadés, puis "Bestia De La Muerte" rassemble ses troupes avant de frapper
avec des riffs saccadés et quelques choeurs qui accompagnent le chant principal.
Le groupe
conserve son approche brutale sur "Politicamente Correctos" et son message évident soutenu
par des riffs puissants, avant de laisser "Mochado" débuter avec une dispute samplée,
rapidement suivie de la puissance de feu habituelle qui va aisément nous molester. La
section rythmique ralentit à nouveau pour alourdir "Perdido En El Espacio" et lui offrir des
tonalités mystérieuses, qui se mêlent parfaitement aux sons les plus agressifs ainsi qu’au
final étrange, qui nous mène à "Odio Que Amo", une composition assez courte qui se place
également dans des sons massifs. "La longue Testamento 3.0" nous entraîne dans des
sonorités impies avant de finalement revenir à ses vagues de rage brute tout en conservant
la noirceur, qui disparaîtra sur "Covid-666", un hymne vif et entêtant sorti il y a trois ans. Le
groupe continue avec "Lord Nazi Ruso" qui fera à nouveau exploser les foules pendant que
les vocalistes se déchaînent, que le rythme soit rapide ou lent, puis "Cocaína" vient mettre un
point final à l’album avec des riffs dissonants mais relativement entêtants.
On le sait, un album de Brujeria se doit d’être chaotique. "Esto Es Brujeria" ne déroge pas à
la règle, et propose seize compositions à l’identité marquée, sur lesquelles des voix
puissantes nous motivent à nous briser la nuque.
"Pocho Aztlan"
Note : 15/20
Il y a deux sortes de fan. Le premier, c'est celui qui aime un groupe, qui l'écoute, le critique, l'oublie, passe à autre chose, et ainsi de suite. Le second, c'est la groupie, le fan inconditionnel, celui qui aimera dans tous les cas, même si ça change, même si ça évolue dans un sens contraire (les fans de Slipknot se reconnaîtront). Personnellement, quand on parle de Brujeria, je suis cette seconde catégorie de fan. J'ai découvert ce groupe il y a à peine trois ou quatre ans, et j'ai dû m'écouter des dizaines et des dizaines de fois leurs albums, tant leur musique me fait rigoler autant qu'elle me donne envie de danser en foutant le feu à tout ce qui bouge (surtout aux chatons).
Après des années d'absence, les voilà de retour avec "Pocho Aztlan", qui risque d'en décevoir plus d'un (cf. première catégorie de fan). Indéniablement, Brujeria a pris quelques rides, ce qui est tout à fait normal après plus de 25 ans de carrière. Alors certes, on a eu droit à quelques modifications de line-up, dont je vous conseille d'aller étudier les détails, tant le CV de certains est impressionnant. Mais Brujeria étant un groupe tellement particulier, avec un style tellement propre (même Anal Vomit reste en-dessous, selon moi), que les expériences extérieures de ses membres ne changent pas grand-chose à mon goût.
Bon, assez perdu de temps : oui, c'est un bon album, bordel de brosse à chiottes. Brujeria fait moins dans le bourrin pur et dur, certaines pistes sont clairement ratées ("Satongo") alors que d'autres sonnent bien trop déjà-vu (une bonne partie d'ailleurs). En fait, je pense que ce groupe m'a toujours tellement scotché, même lorsque je connais leurs albums par coeur, que je m'attendais à retrouver les mêmes sensations. Loupé. Enfin, en partie.
Il faut être honnête, ça commençait pourtant bien : deuxième piste, "No Aceptan Imitaciones", son refrain qui ne part plus de notre tête, ça c'est le bon gros metal mexicain comme on l'aime. Entre death et thrash (mais si, écoutez "Angel De La Frontera"), Brujeria a parfois tendance à ne pas se décider, à proposer quelque chose de moins original que dans le passé ("Bruja", morceau très chiant par excellence). Mais bordel, au moment où tu t'y attends le moins, paf, "Codigos" et ses riffs ultra puissants qui t'explosent à la gueule, comme ça, sans prévenir, bim. Côté humour, on peut regretter l'absence de leur dernier single, "Viva Presidente Trump !", mais on se consolera avec "Plata O Plomo", qui nous parle de ce bon vieux Pablo Escobar... Brujeria se veut toujours aussi engagé, comme en témoigne "Culpan La Mujer", aka "bienvenue chez Féminisme et Sécateurs".
Mais le paroxysme de l'ultime bon goût est atteint par nos amis de chez Nuclear Blast sur le dernier morceau, "California Uber Aztlan", reprise de "California Über Alles" des Dead Kennedys. Une boucherie, entre punk et death, typiquement ce qu'on aime écouter lors d'une dernier rappel afin de tout donner pour montrer son amour épicé au groupe. C'est beau. Bref, Brujeria a vieilli, mais n'est pas mort. "Viva Zapata, Viva Chiapas Viva Mexico, Viva la Revolucion !"
|