Le groupe
Biographie :

Si les membres de Black Cobra ne sont que deux, le volume sonore de leur musique équivaut bien à celui de groupes où ils sont cinq. La raison en est toute simple : metal, sludge, doom, stoner... s'associent en vue d'atteindre une puissance de feu apocalyptique. Originaires de Los Angeles, Jason Landrian (guitare / chant) et Rafael Martinez (batterie) composent des morceaux qui plairont aux fans de High On Fire, de Mastodon ou d'autres formations aux riffs exacerbés.

Discographie :

2006 : "Bestial"
2007 : "Feather And Stone"
2009 : "Chronomega"
2011 : "Invernal"
2016 : "Imperium Simulacra"


Les chroniques


"Imperium Simulacra"
Note : 15/20

Pour nous Black Cobra, c'est "Bestial" (2006) et "Feather And Stone" (2007). Et aussi l'EP sans nom de 2004. Point final. Certes, les albums parus après sont bons et renferment d'excellents titres mais nous ne pouvons nous empêcher de penser que Black Cobra a perdu son essence depuis. Jamais ce qui a fait le charme de ses premières réalisations n'est réapparu : ce côté primaire, chaotique, urgent. Ces structures imprévisibles, ces compos enragées, complètement barges, au feeling hardcore pur, ce chant hurlé salvateur. Ce son boueux, bordélique, cru, sauvage. Parti, évaporé. A la place, juste du "très bon" sludge metal. Ce qui fait une différence majeure dans notre cœur mais cela ne nous empêche pas d'attendre chaque nouvelle sortie, non avec une impatience démesurée, mais avec une grande curiosité.

Et il aura fallu patienter cinq ans pour se mettre sous la dent du matos bien frais. Cinq révolutions planétaires entre deux albums studio, c'est une éternité pour le duo californien Black Cobra, lui qui nous avait habitué à un rythme de parution régulier de deux ans entre chaque sortie. Rien à mettre sous la dent depuis "Invernal" paru en 2011 donc, ce qui n'a pas empêcher le Cobra Noir de tourner intensivement jusqu'à plus soif avec des tournées européennes annuelles. Pour les louper ceux-là, faut-le faire ! Le groupe a donc pris son temps pour achever ce "Imperium Simulacra", première sortie pour le label Season Of Mist, et on comprend vite pourquoi.

Black Cobra publie aujourd'hui son album le plus long (48 minutes alors que les petits frères ne dépassait jamais la barre des 38 minutes), certaines compos, "Fathoms Below" et "Dark Shine" présentent des longueurs folles pour le groupe avec respectivement 8'26 et 7'20 au chrono. "Imperium Simulacra" est aussi son effort le plus chouchouté et qui a bénéficié d'une production soignée. Album le "mieux" produit du duo, il est doté du son le plus puissant et clair possible pour ce style. Cela signifie également lisse, poli à l'extrême et finalement creux. Autre aspect pouvant expliquer le long délai entre "Invernal" et "Imperium Simulacra" est le travail évident qui a été fait sur les arrangements des morceaux : lignes de chant (on y reviendra) plus longues et plus mélodiques qu'auparavant, soli de guitares étudiés, passages à deux guitares (pour un groupe n'ayant qu'un gratteux, euh, comment dire... ça le fera pas en live), structures étirées... Autant de nouveautés plus ou moins subtiles démontrant que Black Cobra cherche à progresser tout en conservant son style.

Cela fait longtemps que nous avons cesser de croire à un "retour aux sources" (l'expression est un peu trop forte pour le cas présent). Nous nous contenterons de prendre ce nouvel album pour ce qu'il est. Mais ça nous fait tout de même un petit pincement au cœur quand on voit la nouvelle approche vocale de Jason Landrian qui a abandonné ses gueulantes d'halluciné échappé d'un laboratoire de savant fou pour un chant plus posé, saccadé, détaché et au caractère narratif. Cette nouvelle approche a le mérite de mettre en valeur les longs textes, qui autrefois étaient minimalistes, mais s'avère être un peu lassante à la longue et manquant de hargne. Ce côté narratif est accentué par ces longs morceaux aux structures très claires et rigides, où chaque partie est amenée de façon très attendue (les développements de morceaux suivent des schémas très classiques, là où ils étaient plus lunatiques par le passé) et peuvent durer très longtemps, apposant ainsi des ambiances voulues, laissant au chant tout l'espace nécessaire pour narrer son histoire. Black Cobra prend donc son temps pour développer ses chansons et malheureusement, se montre très rébarbatif.

Au plan musical stricto sensu, le Cobra Noir n'a jamais autant sonné High On Fire que sur "Imperium Simulacra". C'est un autre point qui nous chagrine, toute la personnalité musicale du combo s'en est allée, partie rejoindre le venin et la hargne mentionnés plus tôt. En revanche, si le duo est devenu plus convenu, son inspiration riffesque est toujours d'un haut niveau et s'y entend toujours pour nous écraser avec des riffs gras comme des porcs et poilus comme des chenilles et des roulements de toms mastocs. En gros, le serpent mord toujours et fait très mal mais ne terrasse point comme à la grande époque. Pourtant, on est dupé par le titre d'ouverture "Challenger Deep", attaque frontale et sournoise carrément thrash. Une surprenante et excellente façon d'entamer le disque. Le très High On Fire "Imperium Simulacra" continue sur la lancée du premier titre avec un tempo soutenu et un pont briseur de nuques, tout en roulements et en rythmiques parpaing.

La découverte continue avec un autre surprise : "Fathoms Below", compo la plus longue de la carrière des Californiens. Ce titre vertigineux et fangeux repose sur une première partie sludge / doom classique suivie d'un pont atmosphérique où une guitare glauque installe une ambiance désertique avant que les toms de Martinez, telle une armée de pachydermes, viennent s'abattent sur notre carcasse. Le travail d'ambiance y est important même si on voit très bien où le groupe veut en venir dès la moitié de la chanson. C'est néanmoins un bel effort et une marque évidente d'ambition. Pour contrebalancer l'ambiance, "Eye Among The Blind" déboule sans aucun tact et annihile toute avec ses martèlements de toms et sa grosse rythmique surheavy. La ligne vocale se veut assez hypnotique et la voix de Landrian un peu plus acide. Ce morceau belliqueux est transpercé un bon solo de guitare, qui achève d'en faire l'un des meilleurs titres de ce cinquième album. "The Messenger" est un bon titre mid-tempo pourvu de bon riffs groovy et grassouillets mais n'a rien de spécial en soi.

Et soudain vient une déflagration, un cyclone supersonique avec le court "Obsolete", une chanson qui ne le sera jamais dans le répertoire de Black Cobra. Rafael Martinez se lance dans du blast beat, chose quasi-inédite pour le groupe (il l'avait déjà employé sur "Invernal" et le morceau "Obliteration", mais pas de cette manière !). "Dark Shine", à l'intro claire en mode lunaire typique du duo, est un autre morceau pachydermique, fonctionnant sur une alternance riff doom / accélérations hardcore. Le morceau est plus réussi que "Fathoms Below", car à travers une structure longue, la dynamique interne du morceau est équilibrée et le groupe demeure dans une exécution intense, ne relâche jamais sa prise. La version régulière de l'album se referme sur "Sentinel (Infinite Observer)", un morceau lorgnant encore une fois du côté du groupe de Matt Pike, mais concluant le disque de façon honnête avec un solo déchirant et une paire de riffs sinueux et malsains. L'édition limitée contient le titre "Technical Demise", morceau speed ressemblant au second morceau éponyme du disque.

Si "Imperium Simulacra" est un très bon album de metal, au sens large du terme car les dénominations sludge, doom ou core sont un peu inutiles dans le cas de Black Cobra, renouvelant assez le style du duo et contenant de nombreux moments forts, il peine à se hisser aux sommets des premiers albums qui restent à nos yeux indétrônables. On se console en se disant que le duo est toujours en forme, qu'il livre de bons disques et qu'on les reverra à coup sur lors d'un prochain périple européen.


Man Of Shadows
Mars 2016




"Invernal"
Note : 16/20

Dans la lignée des groupes post-hardcore des années 2000, je demande l’un des dignes actionnaires depuis 2002 nommé Black Cobra. Vous aimez Baroness, Kylesa, Mastodon ? Vous affectionnerez alors tout particulièrement "Invernal" , quatrième "full-length album" des deux gars de Californie. Peut-on souligner qu’à deux, ils en font un sérieux désordre ?

Chant quasi parlé alterné de vocalises gutturales régurgitées sans pitié, Jason Landrian épate de conduire aussi bien sa six cordes alarmiste en simultané. Entre mélodies et dissonances de mise dans le type de jeu, riffs de guitare / basse font la part belle à la batterie avec des temps décalés en veux-tu-en-voilà, Rafael Martinez s’en donnant à cœur joie pour foutre un joyeux bordel entre deux coups de caisse claire nettement mis en avant. Les mélodies passent de l’envoûtement, appuyée par un jeu de basse austère, à la confusion la plus frénétique ("Beyond") dans laquelle les allers-retours sur cordes à vide s’exécutent sans relâche. Les titres peuvent se vouloir quasi instrumentaux comme sur "Erebus Dawn" où la puissance phonique s’utilise avec parcimonie juste pour accentuer l’atmosphère malsaine engendrée.

Une très belle réussite que ce nouvel opus signé sur le label indépendant Southern Lord qui s’achèvera sur "Obliteration" dans un fracas suffocant aux accents deathcore qui mettra le point final à huit titres acharnés et terminera de nous achever ; merci !


Angie
Mars 2012


Conclusion
Le site officiel : www.blackcobra.net