Le groupe
Biographie :

Beyond Grace est un groupe de death metal anglais formé en 2014 (anciennement Threnody et Bloodguard) et actuellement composé de : Andrew Workman (basse / ex-Taken By The Tide, ex-Threnody, ex-Bloodguard), Ed Gorrod (batterie, chant / ex-Taken By The Tide, ex-Threnody, ex-Bloodguard), Tim Yearsley (guitare / ex-Threnody, ex-Bloodguard), Andrew Walmsley (chant / Apathy Noir, Twilight's Embrace, ex-Threnody, ex-Bloodguard) et Chris Morley (guitare). Beyond Grace sort son premier album, "Seekers", en autoproduction en Juillet 2017, suivi de "Our Kingdom Undone" en Septembre 2021 chez Prosthetic Records.

Discographie :

2014 : "Monstrous" (EP)
2017 : "Seekers"
2021 : "Our Kingdom Undone"


La chronique


Beyond Grace brouille les pistes, car entre le death metal insolite que la formation de rosbifs propose, l’artwork qui fait assez power metal dans le délire et le logo assez propre à la Abysmal Dawn, avant de poser une oreille sur le produit, le doute subsiste. Mais une fois la galette bien calée dans le lecteur de disque, là… rien ne change, le doute subsiste toujours. "Our Kingdom Undone" est un disque qui va demander à l’auditeur un petit temps d’adaptation car même si la base de leur développement musical, c’est le death metal, le fait d’y incorporer des éléments modernes, des moments alambiqués et d’autres plus basiques, le melting pot proposé ici fait office de curieux mélange et déconcerte à la première écoute. C’est assez drôle parce que, autant on va critiquer les formations qui persistent parfois trop dans les clichés stylistiques et qui pour le coup ne se démarquent jamais suffisamment, mais également, dès qu’il y a une tentative de mixer des genres ou de rendre les compositions plus personnelles, on tire la tronche. On a cette réputation, nous les Français, de n’être jamais contents et de nous plaindre sans cesse, aussi, tentons de démontrer qu’il n’y a aucune raison de s’en prendre à "Our Kingdom Undone", un longue durée qui mérite un peu d’attention tout de même.

Ce disque, dont la pochette magnifique représente une guerrière sexy sur un cheval et avec les yeux bandés (elle m’inspire Eir Stegalkin du jeu vidéo Guild Wars), au milieu d’un champ de bataille, est le deuxième album de ces furieux musiciens de Nottingham, actifs depuis 2014. Ils ont réussi en sept ans d’existence à se fixer stylistiquement, et le résultat est pour le moins assez surprenant. Même si la trame principale reste assez basique, à savoir que 70-80% de la musique est façonné sur les bases d’un death metal somme toute assez old school, particulièrement dans le son, on a droit, cependant, à une multitude d’autres éléments qui font qu’à terme, entre la première écoute et le moment ou l’album se termine, nous n’avons plus la même sensation à l’égard de Beyond Grace. Parfois le groupe dévie sensiblement vers le deathcore, sur certains passages, on sent l’ombre de Meshuggah planer au-dessus de nos têtes, quelques leads de guitare peuvent perturber l’équilibre en ajoutant une touche heavy à l’ensemble et les compositions peuvent adopter une tournure progressive lors de passages plus ambitieux et alambiqués. Tout ce joyeux bordel pourrait rendre la soupe indigeste, mais fort heureusement, le son global est assez distinctif, peut-être pas forcément adapté lors des passages plus modernes mais en tout cas, il solidifie l’ensemble.

Niveau production, on est sur quelque chose de compact mais qui manque un peu de puissance quand le groupe lâche les chiens. Tout est clair et précis, on entend bien les guitares qui ont un son distinct mais qui pêche un peu par son manque de puissance, la batterie fait le taf malgré le fait qu’elle aurait mérité des cymbales un poil plus devant. La basse est présente, elle possède un équilibre qui fait bien le lien entre la drum et les guitares et ajoute du claquant mais aussi de la profondeur à l’ensemble, et le chant comble l’espace tout en respectant le reste des instruments. De ce fait, on a une production bien paramétrée, mais cette qualité engendre un résultat poli, dans les deux sens du terme, celui de la politesse car on sent que le groupe ne veut pas froisser nos oreilles, et poli dans le sens où de ce fait, le résultat est un peu lisse. La puissance est là mais on est dans un entre-deux sonore qui laisse un poil perplexe. Soit une production plus crade aurait ajouté un grain plus caractéristique, soit un son plus bourrin, incisif et moderne aurait permis au groupe de se mesurer aux poncifs du genre tels Abysmal Dawn, Beyond Creation, Obscura, The Black Dahlia Murder, etc. Il faut admettre que ce n’est pas facile de mixer de manière cohérente des éléments musicaux qui empruntent quelques ambiances au black metal, quelques dissonances à Ulcerate ou à Dillinger Escape Plan, quelques mélodies macabres à The Black Dahlia Murder, des parties saccadées qui rappellent Meshuggah et bien d’autres petits gimmicks à droite et à gauche. Finalement, vu le son beaucoup moins dense que ce qui se fait actuellement, le groupe possède une touche qui tend vers le post-metal mais comme la majorité des riffs sont organisés de telle manière qu’on entend majoritairement des influences plus death metal traditionnel, on ressent les apports actuels mais on les perçoit comme des ajouts complémentaires, et non comme des composants dilués dans l’ensemble. Comme l’eau et l’huile, ça a du mal à se mélanger parfois, mais le résultat global n’en souffre pas pour autant. Comme précisé au début de la chronique, cela déconcerte à la première écoute et va demander à l’auditeur plusieurs passages dans les cages à miel avant de pouvoir s’en faire un avis plus objectif.

Le commentaire d’un auditeur sur le Bandcamp du groupe résume assez bien la situation, en gros il dit : "On ne sait pas si Our Kingdom Undone est simple ou complexe et délivre une impression trompeuse". Le groupe lui-même précise à son égard sur sa page Facebook : "Brutalité intellectuelle, technicité subtile, intensité punitive", c’est un peu poussé voire prétentieux mais pas forcément éloigné de la vérité. Ainsi donc, pour ce second méfait de 8 titres pour presque 50 minutes de musique, Beyond Grace nous lance une invitation à la découverte. Le death metal des Anglais est ambitieux et personnel, quelque part un poil instinctif, et ne va pas se fourvoyer dans la convenance vis-à-vis de l’auditeur. Si vous aimez les productions actuelles hyper puissantes, passez votre chemin, ici, point de sensation synthétique mais plutôt une chaleur organique et surtout un metal qui prendra le temps de vous délivrer tous ses petits secrets.


Trrha'l
Décembre 2021


Conclusion
Note : 14,5/20

Le site officiel : www.facebook.com/wearebeyondgrace