Chroniquer un disque peut s'avérer être bien difficile et en certains cas, le chroniqueur se voit confronter à de sérieux dilemmes. Aujourd'hui, notre bien humble devoir nous amène à chroniquer un disque plutôt unique en son genre. Autokrator nous présente son premier album éponyme. Avec un patronyme et un visuel pareils, on ne s'étonnera guère de voir la formation se parer d'un concept tournant autour de la glorieuse Rome antique, sa puissance martiale, son histoire politique tumultueuse et ses grands personnages militaires. On sait peu de choses sur cette entité française, si ce n'est qu'un membre des sulfureux N.K.V.D. se cache parmi les membres de ce Sénat occulte.

Le collectif présente un son et un style radicaux et non-orthodoxes. Sous une base black / death crue et bestiale à la Revenge, il développe son concept à l'aide de percussions martiales égrenées tout au long de l'album et de nombreux samples en latin, donnant solennité et caractère à sa musique. Mais cette approche industrialisée, somme toute fréquente (à l'échelle de l'underground bien sûr), se veut davantage radicalisée. La musique est complètement noyée sous des basses fréquences à en faire mal au crâne. Nous avons ainsi une sorte de black / death / drone metal, la rencontre inattendue entre Sunn O))), Revenge et Arditi.

L'écoute à un volume élevé est vite pénible et nous sommes obligés de baisser sensiblement le volume pour pouvoir apprécier au mieux le disque. Les morceaux, au nombre de huit pour un total de 33 minutes, sont des barbaries sonores où blasts, vocaux déchirés et riffs plus sales qu'une décharge publique se déversent sur nous, écrasant et annihilant toute forme de vie. Les percussions martiales renforcent le pouvoir de destruction de cette inexorable marche guerrière. Couvrant une bonne partie du spectre sonore, les boucles de basse surnagent de cette masse et filent le vertige. L'aspect rythmique de ces nappes dronesques confèrent un côté intéressant mais la répétition ad nauseam de cette démarche sur tous les titres metal de l'album fait qu'il est difficile, dès le début, de trouver un intérêt au-delà de deux ou trois titres. L'intention est vite assimilée et le disque est ainsi très rébarbatif.

Deux titres que l'on qualifiera de "martial industrial" coupent cette débauche de décibels et de basses fréquences, aèrent et redynamisent l'album avant que l'assaut physique (terme non exagéré en l'occurrence) reprenne et engloutisse l'auditeur dans un vortex noir et oppressant. La courte durée de l'album est en soi un bonne chose car, comme dit plus haut, on tourne assez vite en rond. Le drone est clairement une musique d'initiés (et de mecs au système nerveux à toute épreuve) qui restera à jamais un style nébuleux et difficilement accessible et compréhensible. Mais si nous sommes personnellement accoutumé à ce style, nous ne pouvons trancher sur la qualité intrinsèque de cet album.

La démarche artistique d'Autokrator mérite un effort de compréhension et se doit d'être respectée. Seule une poignée de personnes pourront aimer l'album à sa juste valeur. Attribuer une note à "Autokrator", bonne, mauvaise ou mitigée, ne signifierait absolument rien, aucune ne lui rendrait justice ni pourrait aiguiller l'auditeur sur la qualité intrinsèque du disque ou sur la consécration ou non de l'intention artistique des musiciens. Cet album est clairement à prendre ou à laisser. Pas de note donc pour ce disque déstabilisant et imperméable à dessein.