Le groupe
Biographie :

Architect Of Seth est né à Caen et fait du death technique avec des influences 90's (Death, Theory In Practice, Pestilence, Coroner, Atrocity, Nocturnus, Emperor, Martyr, etc...) Le groupe a sorti 2 démos en 2006 et 2007 et présente son premier album, "The Persistence Of Scars", mixé par David Thiers au Secret Place Studio et masterisé par "Mobo" au Conkrete Studio (Gorod, Minushuman, Otargos, Lokurah, Warattah, Simplixity, Dungortheb, Plug-In...), et sorti sur le label Great Dane Records.

Discographie :

2006 : "Eldorado" (Démo)
2007 : "Pax-Labor" (Démo)
2013 : "The Persistence Of Scars"


La chronique


Il est des albums pour lesquels une sortie de fin d'année n'est pas toujours de bon aloi, en effet sortir un CD début Décembre la veille des fêtes, peut bien évidemment être un moyen de s'engouffrer dans l'engouement et l'effervescence des achats de Noël, et subséquemment faire en sorte qu'on offre celui-ci en même temps que le reste... les ailleuuu-pod-pad-phone de consommation ou autres tablettes et consoles dernier cri... Mais d'un autre côté cela peut s'avérer joueur parce que justement comme les badauds sont occupés à chercher ce qu'ils vont offrir ou ce qu'ils vont manger voire qui ils vont manger, une bonne partie de l'audience peut passer à côté... et cela porterait préjudice à cette étoile, que dis-je, comète intersidérale, supernova de fin d'année...

Mais de toute façon Architect Of Seth a bien fait les choses, parce qu'avant de signer chez Great Dane Records unanimement élu meilleur label de l'année chez les barbares, le duo Paul Rousseaux et Yohann Kochel, respectivement papa et maman de AOS (cherchez qui a porté l'enfant...), ont fait de la bonne promo en amont avec un trailer qui mettait l'eau à la bouche, même si l'on ne pouvait percevoir que quelques micro-bribes... Des bribes qui laissaient malgré tout transparaître la qualité indéniable de cette entité musicale, et qui donnaient envie de découvrir ce premier album "The Persistence Of Scars" de long en large, de fond en comble, de l'extérieur vers l'intérieur... Rien que les premières notes étaient savoureuses et suscitaient une véritable curiosité, ainsi qu'un intérêt plus que certain pour le death metal de la grande époque avec une musicalité prononcée et exacerbée grâce à une technique au service de la mélodie et non pas au service de la démonstration (masturbation intellectuelle moderne du talentueux guitariste qui voit des équations mathématiques à la place de notes de musique.) Architect Of Seth a écrit avec ce premier album quelque chose qui rend honneur au death metal technique des Death, des Pestilence effectivement, des Atheist d'avant la reformation, et autres Sadist avec cette particularité qu'ils ont su mettre en avant leur dextérité accumulée au fur et à mesure des années de frustration de ne pas sortir d'album, et s'en servir pour que leur musique garde cependant une sincérité et de la mélodie aussi ; et que cette technique ne soit pas balancée à outrance dans la tronche de l'auditeur juste pour l'éblouir et finalement l'endormir...

Il est vrai qu'on pourrait dire que j'exagère beaucoup en disant que cet album est un chef d'oeuvre pour toutes les raisons que l'on veut, mais j'ai découvert Architect Of Seth grâce au grogneur indécrottable Laurent de Nephren-Ka qui surnommait, et à juste titre d'ailleurs, Paul, de "Paulo Mameli"... Ce qui est quelque part assez vrai car le sieur présente de très bonnes similitudes avec la voix de Patrick Mameli de Pestilence. Et comme référence on peut trouver pire... Et donc pour terminer le début de ma phrase sans fin, j'ai découvert AOS comme un touriste qui débarque et qui assiste à un spectacle de rue. D'abord est venue la surprise, puis le plaisir du moment et finalement aujourd'hui, au-delà du spectacle de rue, c'est comme un fan, non plutôt, en tant que fan du groupe, que j'écoute, et que l'on écoute tous cette future référence du death metal technique français. Car en un seul album, avant même qu'il ne soit sorti, et aujourd'hui depuis qu'il l'est, AOS se doit d'être sur toutes les lèvres, car "The Persistence Of Scars" (et non of "time" comme dirait Anthrax) sait s'imposer par sa personnalité musicale, visuelle et populaire. Populaire parce que comme certains avaient commencé à le faire sur le web avec des pochettes de vinyles jouant sur l'effet d'optique pour intégrer le décor à l'artwork, il est apparu une tradition rapide de se prendre en photo avec l'album de AOS pour remplacer son visage. Et donc en plus d'avoir une personnalité musicale, Architect Of Seth devient une pandémie musicalo-visuelle grâce à cette signature d'achat de l'album, et ça c'est très très fort.

Beaucoup d'années ont été mises à profit pour la réalisation d'une telle œuvre, et ceci n'aura pas été vain, car AOS propose aujourd'hui un album qui possède une telle puissance d'impact, dont la musicalité de son compositeur n'a d'égal que sa simplicité, qu'il serait vraiment impensable que l'on y reste indifférent. Yann de The Losts expliquait il y a peu, et beaucoup sont de cet avis, qu'avant on ne parlait pas de la qualité de la production mais uniquement de celle du talent d'écriture. Ceci pourrait tout à fait être possible avec AOS mais il serait également dommage de ne pas parler du travail de mixage réalisé par David Thiers au Secret Place Studio et de celui du mythique El Mobo et son Conkrete studio pour le mastering, parce que les deux ont réussi à donner une couleur à l'album de Architect Of Seth très singulière. Une couleur qui ne laisse pas découvrir que AOS est français, comme beaucoup de groupes aujourd'hui qui visent juste la propreté, la clarté et la puissance, sans véritable charisme dans la production. Je ne suis pas ingé son, mais en tant qu'auditeur, on remarque que l'album a une individualité dans le son qu'il propose. Oui "The Persistence Of Scars" possède cette saveur automnale dans sa production qui donne à la voix de Paul cette raucité particulière (même si le mérite en revient à ses cordes vocales à la base), et qui donne aux guitares et à l'ensemble cette sensation de spleen que l'on peut percevoir également sur l'artwork très angoissant (qui rappelle énormément la jaquette du film Les nerfs à vif sorti en 1991 avec Robert De Niro ou ce serait le monstre de Enemy Mine sorti en 1985 avec Louis Gosset Jr et Denis Quaid qui aurait donné son visage) réalisé par le duo Paul et Yohann, avec le design et les photos. Une saveur automnale en totale adéquation avec la période de sortie de l'album et l'imagerie de la pochette. Ceci montre que les gars ont mis leur cœur, leur âme et leur temps dans la construction de cet album.

En plus d'être de bons voire excellents guitaristes, on s'aperçoit qu'ils possèdent plusieurs cordes à leur arc, si l'on s'attarde sur la partie piano de "Embrace Of Anguish". Un titre d'ailleurs beaucoup plus brutal que ses confrères placé au centre de l'album, et qui donne l'impression de ne pas avoir été composé en même temps que les autres, tellement il taille sévèrement dans le bois dur. La batterie est au taquet, les guitares éructent leur notes par rafales de trois mais à la vitesse d'un missile M51 et les chiens n'ont pas le temps de pisser après les roues tellement c'est violent.

AOS arrive au-delà de leur technicité death, à créer de véritables ambiances sur l'album, c'est pour cela qu'il était soulevé leur capacité à mettre cette technique au service de la mélodie. Dès le départ de "Live Fast Die Young" (j'ai compris !!!), on sait que cet album est une perle, il y a des signes qui ne trompent pas, et l'introduction de ce titre, tout aussi spleenante que ce dont on a parlé en est le premier exemple. C'est avec une rapidité phénoménale qu'on se sent emporté, emmené, projeté même, dans l'univers de Architect Of Seth avec "LFDY". Mélancolie en fond de toile constante sur tout l'album, mélodie perceptible dans un death metal toujours très technique mais bigrement et savamment dosé pour ne pas tomber dans l'inaudible et le prétentieux. Non au contraire, Architect Of Seth offre son cœur.

Le deuxième titre "Engender Of Confusion" est celui qui a eu les honneurs, en sortant le premier pour prendre la température auprès des fans, chanson la plus courte de l'album et par voie de conséquence la plus directe. Celle qui doit toucher et faire mouche tout de suite pour servir d'appât et d'accroche. Et c'est ce qui est arrivé, avec son intensité et son allure excessive dans les guitares. Cependant on se rend tout de suite compte que AOS aime jouer avec les émotions en nous bringuebalant dans tous les sens sur des breaks incessants, ou ça change de tempo, de rythme, en gardant la vitesse de la lumière tout au long de ses 3'15. Mais une des pattes de AOS, c'est d'y injecter par endroits, des petites notes de claviers décelables, qui, lorsqu'on prête mieux l'oreille, accompagnent parfaitement cette nappe mélancolique. A partir de ces deux titres on sait que les cinq autres qui vont suivre seront de la même trempe que le déroulement de l'écoute ne sera que pur plaisir solitaire. Les nappes de claviers sont anecdotiques, mais toujours là pour adoucir un passage qui demande à ce qu'on lui fasse reprendre cette couleur d'automne, cette sensation de dépression au beau milieu de cette violence mélodiquement death.

C'est un véritable tableau de maître qui se dessine à l'écoute de cet album. La longueur de certains titres comme "Embrace Of Anguish" qui avoisine les six minutes ou bien "Teacher Of Nocturna" (7'29) qui s'autoproclame en seigneur démoniaque de l'album avec des vocaux encore plus noirs et graves, ne se sent aucunement. On n'a jamais l'envie de regarder sa montre ou de connaître la durée du morceau finalement, car c'est juste le plaisir d'appréciation qui devient l'unique envie. Un "Teacher Of Nocturna" très pesant dans son ambiance ou l'on sent que le rythme s'est ralenti pour faire place à la profondeur, tandis que la batterie garde son élan, offrant ainsi un paradoxe impressionnant tandis que les guitares se jouent de nous entre soli irrévérencieusement complexes, riffs imbriqués dans des labyrinthes de thèmes où même le Minotaure en aurait perdu le nord. Avec des chansons très violentes malgré tout, telles que "Hybrid Consuming Flesh" ou vraiment chirurgicales comme le début de "Tears Empty Of Sadness", on devine aisément quel death metal a bercé les créateurs de cet album. Un death metal qui a découlé du heavy et du thrash mélodique qui sont encore dans la tête et la mémoire des trentenaires nostalgiques d'une époque révolue...

AOS propose un album de trente sept minutes ce qui est parfaitement dosé là encore puisque outre ces mélodies angoissantes et cette technique, plus long aurait été lassant et plus court frustrant. Et la fin de "Teacher..." aussi belle que l'a été l'introduction de l'album avec un côté tribal et peut-être très humainement terrien, nous informe que le voyage est terminé et que nous sommes arrivés en terre promise au bout de ces sept chansons. Nous le savons tous la perfection n'existe pas, mais beaucoup tendent à s'en approcher. On cherche quel est le meilleur album de death metal de l'année, il n'y a plus à chercher. Il fallait juste attendre la fin de l'année pour que "The Persistence Of Scars" ne vienne à nous. Il est là, ultime hommage au vrai death metal, celui de Schuldiner, celui de Mameli ou de ce cher Mike Browning, "The Persistence Of Scars" est un classique en devenir, alors n'hésitez plus, ça fait quelques semaines que l'on savait qu'il serait somptueux et c'est ce qu'il s'est révélé être...


Arch Gros Barbare
Décembre 2013


Conclusion
Note : 18,9/20

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