Le groupe
Biographie :

Abduction est un groupe français de black metal fondé en 2006. La première démo, "Heights' Shivers" est publiée en Octobre 2010. Depuis 2011, Abduction est constitué de quatre corbins : l’archiatre Guillaume Fleury (guitare), le morticole François Blanc (chant), le mège Mathieu Taverne (basse) et le carabin Morgan Velly (batterie). La volonté des corbins d’Abduction est de développer une atmosphère nostalgique en réveillant les souvenirs d’heures grandes et moins grandes d’une Histoire complexe et fascinante dont les fantômes planent encore aujourd’hui. Une manière d’illustrer l’implacable pouvoir qu’exerce le temps sur nos âmes.

Discographie :

2010 : "Heights' Shivers" (EP)
2016 : "Une Ombre Régit Les Ombres"
2018 : "À L’Heure Du Crépuscule"
2020 : "Jehanne"
2023 : "Toutes Blessent, La Dernière Tue"


Les chroniques


"Toutes Blessent, La Dernière Tue"
Note : 18/20

Abduction reprend la route. Créé en 2006 en Île de France, le groupe attendra dix années pour sortir son premier album. En 2023, soit trois années après leur troisième album studio, Guillaume Fleury (guitare, live pour Angellore), Mathieu Taverne (basse), Morgan Velly (batterie) et François Blanc (chant, Angellore, Impending Triumph) annoncent la sortie de "Toutes Blessent, La Dernière Tue", leur quatrième album.

"Toutes Blessent, La Dernière Tue", le titre éponyme, nous renvoie sans attendre dans ce mélange entre black et death metal old school aux mélodies entêtantes complétées par des vociférations furieuses. Le groupe ne met pas longtemps à nous captiver à nouveau, laissant chant clair prendre le dessus sur les refrains, tout comme sur le break qui confirme les influences progressives, renforçant le contraste avec la saturation que l’on retrouve aussi sur la glaciale "Disparus De Leur Vivant" et ses leads cinglants. Les différentes parties vocales servent à merveille la poésie des musiciens, qui n’hésitera pas à nous offrir un moment de répit avant de s’enflammer pour devenir plus virulente et déchirante avant que "Dans La Galerie Des Glaces" ne dévoile son introduction entêtante. Elle est suivie par les habituelles vagues de sonorités tranchantes vives entrecoupées de moments plus planants qui débouchent sur "Les Heures Impatientes" et à son lot de mélodies dissonantes sur lesquelles la voix nous envoûte lentement, avant de nous laisser parcourir le tableau mélancolique. Les parties violentes restent ancrées dans une tristesse ténébreuse, rejoignant finalement "Par Les Sentiers Oubliés", une composition relativement courte et mystérieuse qui laisse ses éléments arriver un par un.

La saturation les unifiera naturellement avant qu’ils ne s’éteignent d’eux-mêmes pour laisser "Carnets Sur Récifs" se dévoiler, laissant les racines black metal mener la danse macabre jusqu’à ce qu’elle se brise pour mieux repartir, entraînant avec elle le vocaliste. L’ouragan s’apaisera avec les premières notes imprégnées de tristesse de "Cent Ans Comptés" qui prendront toute leur ampleur avec l’arrivée des paroles, qu’elles soient claires ou hurlées, contribuant à l’accélération infernale du morceau. Il prendra fin dans la douceur, qui sera à nouveau effacée par "Contre Les Fers Du Ciel" et sa charge virulente, contrastée par les voix, qui font vivre la chanson en lui donnant parfois des tonalités épiques, voire viscérales avant de s’achever. En tant que dernier titre, le groupe a fait le choix surprenant de reprendre "Allan", titre de Mylène Farmer qui fête cette année ses quarante ans. Après écoute du morceau original et de la reprise, on ne peut que constater à quel point le passage au style du groupe est naturel, presque évident et pourtant si intense.

Abduction continue sa route avec "Toutes Blessent, La Dernière Tue", un album aussi brut et saisissant que travaillé et planant. Il fera grincer les dents des amateurs de black metal pur, mais ravira les mélomanes ouverts d’esprit.


Matthieu
Janvier 2024




"Jehanne"
Note : 18/20

Rien n’arrête les conteurs français d’Abduction. Toujours inspirés par un passage sombre de l’Histoire de France, les Franciliens nous offrent "Jehanne", leur troisième album. Côté line-up, rien ne bouge. François Blanc (chant, Angellore), Guillaume Fleury (guitare, ex-Crystal Wall, Angellore en live), Mathieu Taverne (basse) et Morgan Velly (batterie) ont cette fois choisi l’histoire de Jeanne d’Arc pour donner vie à leurs riffs de progressive black / death metal, à nouveau mixés par Déhà et qui sortent sur Finisterian Dead End.

L’album débute avec "Aux Loges Les Dames", un premier morceau qui mélange cette ambiance moyenâgeuse avec un black metal aux influences diverses. Des hurlements, du chant clair, une rythmique torturée aux accents épiques… les Franciliens alternent ces sonorités violentes avec un break au son clair enchanteur avant de repartir de plus belle puis de nous lâcher sur "Par Ce Coeur Les Lys Fleurissent". Un morceau de douze minutes, qui nous conte l’histoire que le groupe infuse de son savoir-faire musical, et qui fait se heurter un black metal impie, un death metal martial et des sonorités plus douces. Quelques passages mélangent également ces deux univers, qui se développe à merveille. On continue avec "La Chevauchée De La Loire" et ses harmoniques perçantes, qui s’apaisent par moments. Mais l’univers du groupe reste sombre, et c’est à grands coups de sonorités épiques que le groupe nous raconte cet épisode de l’Histoire de France. Blast et double pédale se succèdent également, alors que les mélodies avancent jusqu’à la guerrière "Dieu En Soit Garde". A la fois mélancolique et lourde, cette composition est également plus sombre, ce qui est confirmé par les paroles. Même les passages en son clair sont imprégnés de cet aspect planant mais inquiétant.

Beaucoup plus court, "Foi En Ses Murs Jusqu’Aux Rats" nous offre une première partie instrumentale ambiante et qui sera suivie d’une deuxième plus axée black metal sur un black metal effréné et malsain avant de s’éteindre brutalement pour laisser place à "Battue Par Les Flots Jamais Ne Sombre". Plus lente, plus mélancolique, mais également très profonde, cette composition dévoile à nouveau un aspect aérien et violent de la formation. "Très Fidèle Au Roi Et Au Trône", le titre suivant, flirte avec un post-black aux accents prog puis revient rapidement à un black metal glacial que les Français contrastent avec ces choeurs clairs qui leurs sont propres. On note également une touche de technicité dans la batterie. Dernier morceau, "Aux Marches De La Lorraine" clôt ce chapitre en beauté grâce à des riffs virulents et qui faiblissent à peine, même lors des atténuations. Les passages lead sont aussi tranchants que l’acier, et le final truffé de percussions résonne.

Même si Abduction nous a habitués à une qualité sonore clairement au-dessus de la moyenne, "Jehanne" pousse le concept encore plus loin. Les contrastes schizophréniques que les Français développent dans leurs riffs doublés du chant en français en font un groupe à part qu’il faut absolument écouter.


Matthieu
Avril 2020




"À L’Heure Du Crépuscule"
Note : 17/20

Pour certains groupes, il faut laisser quelques années entre deux albums, histoire de laisser le son mûrir, mais d’autres ont la possibilité d’enchaîner. Abduction a fait les deux. Guillaume Fleury (guitare) fonde le groupe en 2006 avec Jean-Jacques Herrera (guitare) et Guillaume Roquette (guitare / chant). Rapidement, Jean-Jacques quitte le groupe, mais l’année suivante Mathieu Taverne (basse) et Morgan Vely (batterie) rejoignent le line-up en 2008. Les quatre Franciliens travaillent sur un premier EP, qui voit finalement le jour en 2010. Evoluant dans un black / death chiadé et réfléchi, ils rencontrent un petit succès dans la scène underground, mais Guillaume Roquette quitte le groupe l’année suivante. Ses trois camarades trouvent alors un nouveau chanteur en la personne de François Blanc, qui décide de chanter en français plutôt qu’en anglais. Ils signent chez Finisterian Dead End, puis réfléchissent et composent alors pour leur premier album (avec la participation de Guillaume Roquette) qui sort en 2016. L’album accroît alors leur réputation, mais les Franciliens ne s’arrêtent pas là puisque "À L’Heure Du Crépuscule", leur deuxième CD, sort fin Mars 2018. Je vous laisse le découvrir…

Le premier titre, "Sous Les Cendres Et La Pierre", est une véritable histoire à lui seul. Le plus long de l’album, et qui alterne entre un black / death massif, des choeurs planants et une rythmique presque progressive. Cependant, la diversité du chant permet de ne pas du tout voir le temps passer, et on croirait même que plusieurs chansons défilent. J’apprécie également la place qui est laissée à la basse, loin d’être en retrait comme dans pas mal de groupes du style. Une petite transition instrumentale est faite avec "Les Visiteurs Du Soir". Pas de saturation, seulement quelques notes en son clair, mais qui permettent d’enchaîner à merveille avec le titre éponyme, "À L’Heure Du Crépuscule". Retour sur un black metal pur et dur. Les choeurs sont toujours présents pour adoucir la musique torturée du groupe, mais leur style me plaît, moi qui n’aime pourtant que très peu le chant en français à la base. Leur composition se dessine autour de nous, puis se termine sur un sample et une outro en son clair.

Alors que je la prenais pour une nouvelle transition, l’introduction de "Souvenir De Lierre" débute. Une voix douce et chaude nous accompagne pendant quelques instants, juste avant de repartir sur une partie très planante. Planant est d’ailleurs le maître-mot de ce titre, que l’on confondrait presque avec du Burzum par moments. Les passages parlés me surprennent, mais ces pauses contribuent à l’atmosphère intimiste du groupe. La fin du titre mène tout droit à "La Grande Illusion", une autre composition qui part sur un son clair. C’est étrange à dire, mais la langue mise à part, il est impossible de douter sur le fait que la composition est française, grâce à ses nombreux passages en son clair, presque acoustiques, qui reviennent à un black / death sanglant. Parfois hurlé, parfois sans aucune saturation, le chant nous transporte et nous fait intégrer de gré ou de force l’univers du groupe, et le blast final nous lâche finalement sur l’outro, suffocante et qui ne nous octroie la délivrance qu’avec "Les Ailes Du Temps", la dernière composition. Encore une instrumentale, mais d’une beauté insoupçonnée. Très Prog, voire même shoegaze, mais qui correspond tout de même au groupe.

J’ai mis du temps à m’habituer au chant en français, mais une fois cette barrière dépassée, il est aisé d’apprécier l’album. Dans Abduction, bien qu’à mon avis réservé à un public déjà conquis par le style, il y en a pour tous les goûts. Le black metal pur et crasseux tranche avec des passages en son clair, qui eux-mêmes contrastent avec un black / death massif. Une très belle découverte.


Matthieu
Avril 2018




"Une Ombre Régit Les Ombres"
Note : 18/20

Quel plaisir de vous présenter une fois de plus une production signée d’un label que j’apprécie tout particulièrement : Finisterian Dead End. Depuis les débuts du label, j’ai le privilège d’en avoir chroniqué toutes les sorties. Eh bien aujourd’hui je ne vais pas déroger à cette règle puisque j’ai la lourde tâche de vous parler de "Une Ombre Régit Les Ombres", le premier album des Versaillais d’Abduction.

Si vous ne connaissez pas Abduction, laissez-moi vous les présenter. Abduction est formé de Guillaume Fleury à la guitare, François Blanc au chant, Morgan Velly à la batterie et enfin de Mathieu Taverne à la basse. Le quatuor versaillais nous distille un black metal automnal alliant à la fois mélancolie et violence et a fait le choix d’exprimer son art noir, obscur et profond en français. Pour le fan de la scène française que je suis, recevoir une telle œuvre est un plaisir certes mais c’est aussi l’occasion encore une fois de constater que chez nous on a de sacrées formations. Je suis également très content de constater que Finisterian Dead End s’ouvre au metal noir de la plus belle des manières. "Une Ombre Régit Les Ombres" compte 6 titres pour près de 55 minutes (soit environ une moyenne de 9 minutes par titre… !). Il n’y a pas à tergiverser, on a bien entre nos et délicates petites mains un album de black metal dans la veine des Celestia, Mortifera ou encore Xasthur.

"Une Ombre Régit Les Ombres", comme dit un peu plus haut, bénéficie de textes chantés en français, je vois déjà d’ici les puristes s’arracher les cheveux mais je puis vous assurer que notre langue se marie à merveille au metal noir. A ce sujet, puisque l’on est dans la "francisation", savez-vous ce qu’est une abduction ? Eh bien sous ce mot se cache, à l’image de la musique, du monde et de l’univers du groupe, plusieurs significations. En effet, l’abduction ça peut-être : en épistémologie, un procédé consistant à introduire une règle à titre d’hypothèse afin de considérer un résultat comme un cas particulier tombant sous cette règle, en anatomie fonctionnelle : l’abduction consiste à porter le membre vers l’extérieur, c’est-à-dire à l’éloigner de l’axe du corps dans un plan frontal, ensuite en psychologie cognitive : l’abduction est une forme de raisonnement intuitif qui consiste à supprimer les solutions improbables et enfin en ufologie : une abduction est l'enlèvement par des extraterrestres d'un être vivant dans un o.v.n.i… A vous de choisir, chers amis, vous qui allez soutenir le groupe et le label et donc écouter et réécouter "Une Ombre Régit Les Ombres". Vous pouvez aussi visionner ici le magnifique clip vidéo réalisé par Nicolas Butin pour le titre "Naphtalgia", et vous faire votre propre idée… Un seul conseil : si vous aimez le black metal, les ambiances obscures, ne passez pas à côté d’une telle œuvre musicale où de plus un soin particulier a été apporté au visuel (signé Mathieu Taverne and Guillaume Fleury et inspiré de l’œuvre de Vincent Van Gogh), mais aussi au digipack (avis aux collectionneurs…) mais surtout au son par une production au cordeau signée par Déhà du HH Studios à Sofia…

N’ayons pas peur de le dire, "Une Ombre Régit Les Ombres" est un édifice d’art et de metal noir somme toute exceptionnel. Quand je dis qu’en France on n’a plus rien à prouver…, "Une Ombre Régit Les Ombres" nous le prouve. On n’est pas le pays des grands bâtisseurs pour rien…


Vince
Novembre 2016


Conclusion
L'interview : François Blanc & Mathieu Taverne

Le site officiel : www.abduction.fr