"Dread Reaver"
Note : 18/20
Abbath, figure légendaire du black metal, refait surface avec son nouvel album. Depuis
2015, Olve “Abbath” Eikemo (guitare / chant / basse, Bömbers, ex-Immortal, ex-I, ex-Old
Funeral) opère sous son propre nom, et c’est accompagné par Ukri Suvilehto (batterie,
Vermivore), Mia Wallace (basse, Nervosa, Niryth, ex-The True Endless) et Ole André
Farstad (guitare, Ilti Milta) qu’il sort "Dread Reaver", son troisième album.
L’album débute avec "Acid Haze", un titre assez martial et accrocheur qui laisse les musiciens
placer des leads aux racines heavy dans cette base solide. L’ambiance glaciale et agressive
est parfaite pour accueillir ce chant reconnaissable qui nous guide au travers des
harmoniques tranchantes, puis "Scarred Core" prend la suite avec un son légèrement plus
groovy et planant. On retrouve une certaine diversité vocale pour accompagner le son qui
devient pesant sur la fin, puis "Dream Cull" nous dévoile une introduction inquiétante sans
saturation. Elle reviendra bien vite pour accompagner un chant pesant, développant des
sonorités pessimistes et lancinantes, puis les leads perçants nous annoncent la fin du titre,
juste avant que "Myrmidon" ne propose ce son dissonant et aérien. L’ambiance oppressante
assez old school est extrêmement prenante, tout comme sur "The Deep Unbound" et ses
tonalités très agressives.
La rythmique effrénée se pare de leads endiablés qui encadrent le
chant, puis un cri d’horreur ouvre "Septentrion", nous laissant avec une rapidité brute et des
harmoniques criardes. Le morceau fait partie des plus agressifs que le groupe a composés,
mêlant un blast ravageur avec des riffs dissonants et ininterrompus, puis les musiciens
s’attaquent à une reprise de Metallica avec la légendaire "Trapped Under Ice". L’addition de
du voile black metal à cette composition thrash est une réussite, puis le groupe revient
dans la dissonance avec "The Book Of Breath" et ses tonalités pesantes. Si la première partie
du morceau est axée sur une rythmique explosive, les riffs seront amenés à freiner pour
nous amener à un son plus imposant avant que "Dread Reaver" ne referme l’album, non sans
une dernière dose de ce mélange de black metal accrocheur aux influences heavy criardes.
Le son froid laisse tout de même une certaine aura majestueuse l’enrober, et le final soudain
nous laissera errer dans le vide.
Abbath n’a plus besoin de présentation depuis de nombreuses années. Acclamé pour ses
anciennes productions, le musicien nous prouve avec "Dread Reaver" que sa base de black
metal couplée à des influences heavy et une voix unique est très efficace et extrêmement
accrocheuse. A écouter d’urgence.
"Outstrider"
Note : 18/20
Après un procès pour garder la paternité du nom de son projet le plus célèbre, Abbath est
revenu et nous offre "Outstrider", un album au nom original. Comment ? Vous ne savez pas
qui est Abbath ? De son vrai nom Olve Eikemo, Abbath Doom Occulta est un
multi-instrumentiste norvégien qui s’est notamment illustré au poste de guitariste / chanteur
d’Immortal, mais également dans Bömbers, un cover band de Mötörhead. Il a également
participé à de nombreux projets dont I et Old Funeral. Mais il n’est pas seul dans cette
aventure, car Ukri Suvilehto (batterie), Mia Wallace (basse) et Ole André Farstad (guitare)
se tiennent à ses côtés pour ce deuxième album du nouveau projet. A noter également la
participation aux guitares du producteur Endre Kirkesola.
L’album commence avec la douce "Calm On Ire (Of Hurricane)". Après un riff très
atmosphérique, Abbath commence à chanter. Sa voix puissante et rocailleuse n’a pas
changé, et ce qui donne toute une atmosphère particulière au morceau, qui semble être le
coeur d’une tornade : la rythmique est planante, mais la violence est tout autour. Et cette
impression se confirme avec "Bridge Of Spasms", bien que résolument axé sur des riffs
martiaux. Le titre est plus puissant, plus appuyé, mais les éclats de guitare lead rappellent
ces sonorités sombres et qui se rapprochent de plus en plus jusqu’au final. On enchaîne
avec "The Artifex", qui combine les deux aspects de la musique du groupe : un côté sale et
imposant, tout en gardant ce côté planant et des harmoniques dissonantes sous un blast
glacial. A noter l’accélération due au solo, qui re-dynamise tout le morceau.
"Harvest Pyre", que vous connaissez sûrement déjà, puisqu’un clip est sorti pour promouvoir
l’album, fait également la part belle aux deux aspects d’Abbath avec des riffs qui sont de
véritables machines à headbanguer. Les hurlements du chanteur sont également à glacer le
sang, et c’est tout naturellement que ce titre s’enchaîne avec "Land Of Khem". Jouant à la fois
sur une batterie appuyée et des riffs saccadés à la sauce black metal, ce morceau est
également une excellente solution pour forcer une audience à headbanguer en rythme. Les
passages plus rapides relient les riffs à cette partie intransigeante du black metal norvégien.
On passe sur le titre éponyme, "Outstrider", et ses guitares acoustiques en introduction, pour
arriver sur quelque chose de plus épique. Si vous souhaitez connaître la signification de ce
mot-valise, je vous invite à jeter un oeil à l’interview réalisée avec les musiciens sur le site,
mais concentrons nous sur ce son très sombre et à la fois très entraînant, qui réduit à
quelques instants les cinq minutes et demie de ce superbe titre.
"Scythewinder", le titre suivant, est basé sur l’aspect plus assommant du son des Norvégiens,
et les harmoniques ainsi que les cymbales ne font que donner plus de relief à une rythmique
déjà très riche. Dernier morceau composé par la formation, "Hecate" démarre en trombe
après une introduction inquiétante et brève. Quelques influences plus heavy metal et autres
samples se glissent intelligemment dans la chanson, qui est à mes yeux l’une des plus
dynamiques de l’album, malgré les changements de rythme. Et c’est "Pace ‘Till Death", une
reprise du légendaire Bathory, que le groupe a choisi pour terminer cet album. A nouveau,
l’explication exacte se trouve dans l’interview, et c’est grâce au son de la formation
désormais éteinte avec son fondateur, que cet album s’achève en beauté.
Abbath n’a clairement pas dit son dernier mot à la scène black metal, et "Outstrider" est la
pour le prouver au monde entier. Bien que parfois catégorisé en tant que clown, l’homme est
parfaitement capable de rester sérieux lorsqu’il s’agit de metal. Performances scéniques
parfois hasardeuses, mais c’est le feu sacré qui habite Abbath, et je lui fais parfaitement
confiance pour nous donner envie de retourner le voir jouer.
"Abbath"
Note : 11/20
Ha. Cet album. Que dire ? Je vais être très honnête, je redoutais vraiment cet album. Tant que je suis dans l’honnêteté, je vais développer le fond de ma pensée. Pour moi, ce projet était foireux. Trop précipité, bancal et reposant en majorité sur les démarches marketing déployées pour nous vendre cet album. Et puis, il y avait eu l’affaire Immortal. Je vais finir par croire que ce genre de drama n’arrive que dans le milieu black norvégien. Et franchement, ça m’avait déjà énervé. C’est donc crispée que j’ai entamé ma première écoute. Voulant être neutre, je me suis refusée à me faire une opinion dès cette écoute. J’ai donc laissé l’album reposer dans un coin, et j’ai attendu de voir Abbath en live. Parce que oui, j’ai eu la chance de pouvoir assister au Blastfest à Bergen, et de voir donc le rendu live de ce projet. Et... j’y reviendrai plus tard. J’ai donc depuis réécouté cet album, et cette fois, je vais lâcher mes conclusions pour de bon.
On démarre donc avec "To War !". Et là déjà, on peut comprendre une chose : cet album ne fera pas dans l’originalité. Abbath a typiquement repris la structure "à succès" de Immortal et a refait la chose à sa sauce. Encore, et encore. Au moins, les fans ne seront pas dépaysés pour un sous ! Mais c’est là que j’ai commencé à entrevoir un premier problème : ça sonne comme d’habitude, certes, mais il y manque de la passion. Une véritable intention. Et là, je vais mettre le blâme sur le caractère précipité du projet. L’album avait probablement des délais à tenir, délais qu’on ne pouvait plus modifier et voilà le résultat.
Pas convaincue donc. Je poursuis avec "Winterbane" qui relève un peu le niveau avec un léger moment de bravoure sur la fin du titre, mais qui ne m’emballe pas pourtant davantage. Avec "Ashes Of The Damned", je pense que je peux enfin admettre que mon impression lors de ma première écoute ne changera plus : pour moi c’est tout simplement un projet pour faire plaisir aux fans. Alors évidemment, réjouissances et confettis mais si on gratte un peu la surface, on ne trouve pas grand-chose en dessous. Aucune originalité au niveau des guitares ou de la basse, et les vocaux... c’est du Abbath. Donc on aime ou on n’aime pas.
Suit "Ocean Of Wounds" qui suit à la lettre la même recette, et sur lequel je n’ai au final pas grand-chose à commenter. La pluie de Bergen qui nous accueille au début de "Count The Dead" et le son qui se veut tranchant de "Fenrir Hunts" ne parviennent pas à sauver le navire qui coule. Honnêtement, cet album fait une quarantaine de minutes et j’ai eu l’impression, sauf en de rares d’occasions, d’écouter la même chose. Et c’est un peu ça quand on y pense. C’est la même chose structurée exactement de la même manière pendant 40 minutes. Et ça commence à m’ennuyer. Cette sensation de tourner en rond et de répétitivité m’empêche d’apprécier les quelques moments courageux de l’album. Et que dire de "Root Of The Mountain" ? La passion n’y est plus. Tout simplement. Je ne ressens pas du tout le vent glacé et les frissons qui habitaient chaque morceau d’Immortal. Et évidemment, j’étais soulagée d’en arriver à "Endless" qui malgré son nom, ne fut pas une histoire sans fin.
On l’aura compris, ce projet m’a laissé de marbre. Et pire que ça, il m’a mise en colère. J’ai eu l’impression d’être une cible marketing à qui on lancerait des titres qui "ressemblent à Immortal parce que vous aimez Immortal hein ?". Tout est fait pour que la patte d’Abbath soit reconnaissable entre mille, tout est fait pour qu’on y retrouve la structure des morceaux que nous avons tant apprécié. En fait, soit ce projet a été totalement bâclé et l’album est sorti effectivement trop vite, soit c’était voulu et dans ce cas ça m’inquiète. Parce que je ne ressens AUCUNE passion chez Abbath qui fait le job sans vraiment s’impliquer. Et le travail de ses musiciens est remarquable aussi, techniquement il n’y a rien à redire. Mais où est la passion ? L’intensité ? L’envie ? Pour en revenir à cette histoire de Blastfest, je voulais voir ce qu’il en était en live. Et autant le dire franchement, le passage au live ne m’a pas plus réjouie que l’album. J’aurais tendance à dire que c’était même encore pire. Bref, une véritable déception qui me fait penser avec nostalgie à l’époque où Abbath était véritablement un monument qui ne se déclinait pas uniquement en boules de Noël et autres goodies.
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