Interview faite par mail par Braindead

Véritable révélation de ce milieu d’année, The Way I am possède un univers à part, un véritable bain de jouvence, un vent de fraîcheur aux compos travaillées. Le label Klonosphere ne s’y est pas trompé et mise beaucoup sur ceux qui ont déjà joué aux côtés de Zuul Fx, Loudblast, Crucified Barbara ou encore Biohazard.  Rencontre…

The Way I Am est né de la rencontre artistique entre Saturne et J-War, pouvez-vous nous en dire plus sur votre décision commune de fonder un groupe, l’évolution que vous lui avez donné pour aboutir à ce qu’il est aujourd’hui, à savoir les décisions thématiques, la ligne directrice adoptée pour constituer le line-up... ?

J-War (batterie) : C’est un peu guimauve mais pourtant bien réel : Saturne et moi avons littéralement enfanté ce groupe ! Quand nous nous sommes rencontrés au tout début, on avait beaucoup bourlingué artistiquement, alors on a mis en commun pas mal de sons et d’images. Puis très vite on a développé une complicité hallucinante, on est devenu un couple et c'est à partir de là qu'on a vraiment commencé à travailler en symbiose... On s'est mis à créer plein de nouvelles choses, on a vraiment tout assemblé en couple à partir de zéro et c'est devenu notre EP  "Apocalypse ? No Way !". On rêvait de développer notre univers avec une totale cohésion entre la musique, les textes et l'image. Concernant les lignes directrices et thématiques, on n'a pas franchement beaucoup réfléchi à ça. Fondamentalement, nous sommes tous les deux des grands tourmentés, on s’est attaché à exorciser et laisser les choses sortir spontanément sans trop se poser de questions. En ce qui me concerne, en tant que compositeur du groupe, j'avais profondément envie de laisser parler mes racines sans les cloisonner : le rock anglais, le metal américain et les compositeurs de musiques de film.

Pouvez-vous nous parler du background de chacun des membres ?
Saturne (chant) : Très tôt, je suis devenue peintre et dessinatrice. J’ai connu des années très prolifiques, et c’est devenu mon métier. Mais aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours chanté, seule dans mon coin. En rejoignant THE WAY I AM en tant que chanteuse et frontwoman, c’est là que j’ai su que j’étais totalement faite pour ça. Grâce à notre projet, je fais maintenant coexister ces deux nécessités viscérales.
J-War : Je suis 100% autodidacte, à la base je suis batteur et guitariste avec le même investissement et j’ai commencé à composer à l’époque de la scène "demo maker" sur ordinateurs Amiga et MSX.
Victor (guitare) : Bonjour ! je suis Victor, guitariste. Avant de jouer chez TWIAm, j’ai évolué au sein du groupe de metal alternatif 9 Fake Reasons, et ai enregistré un album ("Days Of Downfall") sorti en 2014 chez Dooweet Records. Avant cela, j’ai joué avec Careless Institute, groupe de thrash metal underground. Je fais aussi de la session studio de temps en temps.
Meek (guitare) : Avant de rejoindre THE WAY I AM, j'ai fondé en tant que guitariste-compositeur le groupe Ianwill, groupe de metal avec lequel nous avons sorti un EP 6 titres "This Day". J’ai rencontré Saturne à l’ATLA en 2012-2013 où nous avons étudié ensemble. J’y ai donc fait la connaissance d’une amie et la découverte d’une excellente chanteuse et d’un projet très intéressant. Donc c'est bien évidemment avec énormément plaisir que j’ai intégré TWIAm.
Sam (basse) : Salut ! Moi c’est Sam, le bassiste. Je suis passé dans diverses formations metal : dans le groupe corse Vindetta, puis à Paris, dans la formation black’n roll Azgaal, les groupes de death mélodique Fallen Joy et Nemost, ainsi qu’un court passage chez Serenius pour une tournée européenne.

Il existe de plus en plus de combos à voix féminine et depuis une décennie, l’hexagone n’échappe pas à la règle, le résultat n’étant que très peu transcendant car se limitant à un éternel mélo / sympho. Vos compos sont beaucoup plus travaillées, plus recherchées et mieux produites que ce que l’on peut entendre en général, comment définissez-vous votre style de musique, quels sont vos sujets de prédilection, en un mot, vos axes de recherches pré-créatives ?
J-War : C’est un beau compliment, je suis touché, merci. D’un point de vue musical, notre style est un mélange -entre autres- de rock anglais, metal américain et de musiques de films. Je précise que chez nous le côté "musique de films"» ne se retrouve pas systématiquement dans des orchestrations symphoniques mais plutôt dans des ambiances, ainsi qu’une façon de composer certains passages. J’ai vraiment hâte que vous puissiez écouter notre futur album prévu pour début 2016, on s’y est tellement investis que peu importe le succès qu’il aura, ce sera un IMMENSE accomplissement artistique pour nous !
Saturne : Mes sujets de prédilection se ressemblent  dans le trait et dans les textes : les tourments du cœur et de l’esprit humains prennent une grande place dans ce joyeux (ou pas) bouillon créatif. Dans l’album actuellement en pré-enregistrement, j’ai été très inspirée par l’Amour sous toutes ses formes : sentimental, romantique, impossible, physique, refoulé… Ce sujet c’est un peu le sac de Mary Poppins, on en voit jamais le fond !

A ce sujet, avez-vous des influences, des groupes qui vous ont donné envie de vous lancer ? Les arrangements sonnent très new british pop.
J-War : Tu as complètement raison ! Je suis fan de Radiohead, Muse, Coldplay, Steven Wilson... On est aussi à fond sur Deftones, Meshuggah, Karnivool, Incubus, Rage Against The Machine, Flyleaf, Paramore... Je suis personnellement très attaché aussi à Jerry Goldsmith, James Horner (R.I.P) et plein d'autres compositeurs de musiques de films...
Saturne : Je suis complètement fan de l’énergie d’Hayley Williams de Paramore, du chant passionné et tourmenté de Lacey Sturm (ex-Flyleaf), mais aussi celui de Chino Moreno de Deftones avec qui j’ai commencé à écouter du metal au lycée… et dernièrement je suis tombée littéralement amoureuse de Klone et de la voix de Yann Ligner (et promis ce n’est pas une phrase "corporate" (rires)), j’ai écouté leur dernier album en boucle pendant 6 mois. Maintenant je scotche sur le précédent. Mais ce ne sont que quelques exemples parmi tant d’autres !



Que pensez-vous du fait que l’on cherche absolument à étiqueter les groupes sans vraiment leur demander leur avis, les enfermant ainsi dans une identité musicale dont certains ont du mal à se défaire et au risque de déstabiliser les fans les plus hardcore en cas de changement créatif… ?
J-War : C’est une logique purement mercantile ! Tout a été cloisonné et étiqueté pour faciliter le marketing et entrer dans une logique "produit de consommation".
Victor : Je vois dans ce mécanisme une peur viscérale des artistes / auditeurs / intervenants  dans le petit monde du metal, celle de ne PAS appartenir à une caste, un clan bien défini. On est toujours rassurés quand on entre dans une petite case, ça donne du volume à ton discours.
Sam : Les étiquettes de genre c’est vraiment pour caser les groupes afin que tout le monde s’y retrouve, à but commercial évidemment…mais pas seulement, socialement aussi. Les genres de musique, surtout dans le metal, je les compare souvent aux fringues. On s’habille tous de manière différente, les bouts de tissu qu’on a sur le dos veulent souvent dire pas mal de choses sur nous et ça permet aussi de se sentir appartenir à un groupe d’individus. C’est grosso merdo la même chose pour les genres, les sous-genres et autres sous-sous genres de musique, et particulièrement dans le metal. Néanmoins, puisque l’habit ne fait pas souvent le moine, on peut passer à côté de belles rencontres musicales et humaines. Il faut cultiver son ouverture d’esprit et sa curiosité pour ne pas rester prisonnier de ses préjugés.

Je suis toujours intrigué par la manière dont composent les artistes. Pourrais-tu nous expliquer qui compose ou intervient et à quel moment, si le groupe procède à un brainstorming post-création, si chacun de vous à son lieu de prédilection pour composer... ?
Saturne : J-War compose toute la musique, enregistre tous les instruments pour faire une ébauche la plus proche possible de ce qu'il a en tête, puis il me transmet le résultat. Si ça m'inspire, je crée la mélodie et le texte, si je n'ai pas écrit ce dernier en amont. Ensuite j'envoie l'ébauche avec la voix au reste du groupe, avec qui l'on arrange le morceau. Suite à cela j’attaque les illustrations. C’est en effet en écrivant les paroles que les images me viennent.

La musique subit une crise majeure, ne pensez-vous pas que le salut passe par le live dans la mesure où le processus de production semble inversé, à savoir des concerts et peut-être un album si succès, alors qu’il y a 10/20 ans les concerts servaient à promouvoir un album ?
Saturne : Je pense que c'est toujours le cas pour les "stars". En revanche, pour les groupes qui démarrent ou qui ont une notoriété moindre, tout ou presque se passe en live en effet, puisque les maisons de disques / labels sont devenus frileux et ne prennent plus de risques. Ils ne parient plus sur les artistes, sauf rares exceptions. Et chacun sait que c'est le budget promotion et communication qui détermine en grande partie le succès commercial d'un groupe. Budget autrefois alloué par lesdits labels. Maintenant, tu construis ta barque tout seul, pièce par pièce, à fortiori en France ET dans la branche musicale que nous avons choisie...
Victor : À mon sens, il faut toujours la double casquette. Le live, pour vivre (merchandising, vente de CD, et surtout performance, on délivre un spectacle), et le support CD en bacs pour rassurer les grosses écuries qui font marcher l’industrie du milieu de tableau.  Ce qui a changé, c’est d’où vient l’argent, le live rapporte plus…  Quant à cette inversion dont tu parles, je ne suis pas sûr de ressentir cet inversement  du processus de production, avec les technologies actuelles et un peu d’argent de côté, tu peux enregistrer un album avec un son décent tout en ayant des concerts. Le vecteur principal sera alors les réseaux sociaux, véritable architecte de ta communication.
Sam : Il y a 10/20 ans nous n’avions pas accès aussi facilement aux biens culturels. Aujourd’hui si tu veux écouter l’album d’un artiste ou en découvrir de nouveaux, tu te balades sur une plateforme de streaming ou sur YouTube, et tu fais ton marché. Alors forcément, avoir accès gratuitement à la musique fait vendre moins d’albums, mais en contrepartie plus de personnes peuvent découvrir des artistes, et donc, aller à leurs concerts et acheter leurs goodies, voire même leurs musiques. C’est exactement ce qu’il se passe en ce moment. Même David Guetta (alors on aime ou pas, mais ça reste une figure importante du marché musical) a récemment dit "qu’il était pour que les gens piratent sa musique", puisque grâce à ça, ils viendront à ses shows.

Vous être labellisé Klonosphere et distribué par Season Of Mist, deux structures reconnues pour la qualité des projets qu’ils soutiennent au sein de leur league. Que vous ont-ils apporté en termes de professionnalisation ?
Saturne : Guillaume Bernard nous a apporté énormément, puisque c'est LUI qui nous a convaincus de sortir cet EP sur un support physique, alors que nous voulions nous dématérialiser. Ses arguments étaient sages et avisés et grand bien nous a pris de l'écouter. Grâce à lui, nous bénéficions en effet de la belle aura de la Klono et de Season, avons récoltés plein de superbes chroniques, avons réalisé des ventes, possédons désormais un sérieux carnet de contacts, etc. Grâce à cet EP, nous avons ouverts les portes de nombreux professionnels qui nous attendent maintenant au tournant sur l'album. J'en profite pour le remercier encore mille fois pour son soutien et son aide précieuse.

Comment expliquez-vous la difficulté qu’ont les formations françaises à se faire reconnaître à l’étranger, à part quelques contre-exemples bien sûr ?
Saturne : Parce que c'est déjà extrêmement difficile de percer en France quand on fait du rock, et a fortiori du metal ! On peut remercier Shaka Ponk d'ailleurs, qui, qu'on aime ou pas leur musique, ont réussi à rappeler qu'il n'y a pas que des amateurs de rap dans ce pays... Ça faisait longtemps qu'un groupe français avec de la guitare saturée qui avoine un peu n'avait pas gagné de victoire de la musique. Et en plus ils chantent en anglais. Quelle avancée ! Pour en revenir à ta question, je pense que pour percer à l'étranger, il faut déjà qu'on croie en toi dans ton propre pays, pas forcément en termes de public ou de succès commercial, mais ne serait-ce qu'en termes d'accompagnement par des structures pro qui ont du poids, et qui peuvent te faire traverser les frontières grâce à leurs succursales.

Que pensez-vous justement de la scène rock / metal actuelle, partagée entre les légendes qui reviennent la plupart du temps pour des raisons économiques et les jeunes formations qui pullulent et reproduisent sans réelle identité, ce qui a déjà été fait ? Comment comptez-vous apporter du sang frais, vous diversifier ?
J-War : Je pense que c’est une erreur de juger si durement la qualité et l’originalité des jeunes formations ! On navigue dans un secteur ou tout ne fonctionne plus que selon une logique mercantile : ce qui est valorisé aujourd’hui c’est l’uniformisation,  les étiquettes bien délimitées, on recherche avant tout "la forme" et l’attitude plutôt que le "fond". On fait plus de la psycho-acoustique que de la musique : on favorise et fabrique des produits musicaux que nos cerveaux pourront assimiler avec le moins de résistance possible. Quand les nouvelles formations arrivent, l’urgence c’est d’exister, de gagner de l’argent et malheureusement souvent les artistes s’adaptent à cette logique de "produits de consommation". Comment les blâmer quand tu sais que tout le monde, à tous les niveaux, joue ce jeu-là ? Ce ne sont pas les jeunes formations qui créent les règles…
Saturne : Comment comptons-nous apporter du sang frais ? Eh bien tout d'abord grâce au soin extrême que l'on apporte à nos compos, au fait que l'on reste fidèles à ce que nous sommes viscéralement malgré les compromis nécessaires, grâce à l'énergie et l'amour que l'on insuffle et que l'on transmet dans chacun de nos lives, aussi. C'est un aspect extrêmement important  pour nous. Comme on l'a dit précédemment, c'est sur scène que tout ou presque se passe maintenant. Enfin, en apportant un vrai univers, fort, sans concessions. Mon style graphique est unique et très reconnaissable. J'ai beaucoup de choses à dire par ce biais et cela aussi fait de THE WAY I AM un projet artistique complet et viable sur le long terme. Nous sommes en train de créer un véritable édifice musico-visuel pour l’album, où aucun aspect ne sera laissé au hasard : chansons, illustrations, photos, live, expos, etc.



Il y a dix ans, la com  via les réseaux sociaux semblait être le Saint Graal pour tous ces groupes qui n’avaient pas de présence dans la presse spécialisée, ces dernières années la donne serait plutôt "trop d’info tue l’info" avec nombre de formations prometteuses noyées dans la masse. Quelles sont pour vous les solutions à appliquer afin de se différencier et ne pas devenir un bon groupe parmi tant d’autres ?
Saturne : Cela rejoint la question précédente. Si tu as un réel univers bien marqué, qui tatoue les oreilles, les yeux et les esprits, avec une musique de qualité, un message fort et une vraie présence scénique et humaine, je pense que tu as tous les ingrédients nécessaires pour attirer l’attention. Mais évidemment, il y a toujours le paramètre chance qui entre en ligne de compte, hélas… Malgré son génie, Vermeer est mort inconnu et dans la misère la plus totale ! 

A ce titre, quels sont vos objectifs à court et moyen terme, démo, EP, album ? Clip, concerts, promo ?
Saturne : Comme nous l’avons dit plus haut, nous travaillons d’arrache-pied sur notre album actuellement. Nous possédons un vingtaine de pré-prods et nous en sommes à l’étape horrible du choix final des chansons. Un dilemme cornélien ! Ce premier album nous inspire et nous motive à un point extraordinaire. Les idées fusent pour les clips, la scène. Ne manquent que les moyens ! Mais on va trouver ! Sinon je ne m’appelle pas Saturne ! Nous sommes également en pourparlers pour différentes grandes étapes comme de l’endorsement, du booking, du management. De plus en plus de professionnels nous suivent et souhaitent rejoindre l’aventure, et c’est un véritable bonheur pour nous de sentir que notre projet suscite tant d’intérêt.

Quels sont pour vous les groupes les plus prometteurs sur la scène rock / metal actuelle et avec qui aimeriez-vous partager l’affiche ?
Saturne : La première question est très difficile pour moi puisque je ne suis pas une énorme consommatrice de nouveautés... Je dirais Mantric, groupe dont le cœur est composé des deux anciens gratteux d’Extol qui avaient écrit le fantabuleux album "The Blueprint Dives". Sinon, des groupes avec qui j’aimerais partager l’affiche, il y en a pas mal ! En France je dirais Klone, évidemment, et à l’international je rêverais de jouer avec Karnivool, Paramore, Deftones, Chevelle, Seether… Tous ces groupes qui m’ont donné envie de faire ce métier, m’ont fait rêver et continuent de le faire.
J-War : Mantric, Karnivool, Deftones, Meshuggah, Army Of Anyone, Steven Wilson, Hacride… Il y en a tellement… Avec certains ce ne serait pas simple de partager l’affiche vu la différence de style ! Ahhh les étiquettes ! 
Sam : Smash Hit Combo ! Leur metal bien violent mélangé au rap énergique du frontman… je trouve ça énorme ! J’ai un peu de mal avec leur côté "metal moderne", mais le tout marche tellement bien que c’est un détail. Je rêverais vraiment de jouer avec Psychostick…ces mecs sont des grands malades et leur musique est géniale ! Mais il y en a tellement d’autres… Kataklysm, Insomnium, Korn, P.O.D, Opeth, etc.

Pour finir un mot, une pensée qui vous sert de leitmotiv ?
J-War : Oui ! Avec Saturne, on se met tout temps la pression sur le fait de ne pas réfléchir, de garder en tête la philosophie de groupes comme Nirvana, de faire du rock et de laisser sortir les choses comme elles viennent.
Saturne : "THE WAY I AM" en est un, en fait ! Le nom de ce groupe nous rappelle à chaque instant de rester fidèle à ce que l’on est et ce que l’on souhaite ardemment. De manière plus personnelle, la phrase qui ne me quitte jamais est : "Fais, et tu Seras".
Sam : "Eiginn máttr ok megin".
Saturne : Ah ben on se rejoint Sam, alors ! (rires)


Le site officiel : www.thewayiam.net