Interview faite au téléphone par MissGayelles

Quelques jours après la sortie de leur nouvel album et sixième album après pas moins de 20 années d'existence, nous avons l'honneur de recevoir Patrice qui représente le groupe Stille Volk.

Salut Patrice, pour commencer peux-tu nous présenter Stille Volk pour ceux qui ne vous connaissent pas encore ?

Patrice Roques (instruments à cordes) : Bonjour, STILLE VOLK est formé en 1994 en France, dans les Pyrénées Centrales, par trois musiciens issus de la scène metal. Nous avons cherché à créer une musique mystique, primitive et païenne, acoustique et ancestrale puisant ses sonorités dans la musique médiévale, celtique et occitane tout en gardant le souffle du metal underground, sombre et radical dont nous sommes issus. Nous avons choisi de créer cette musique à partir d'instruments provenant de tous horizons et de toutes époques (vielle à roue, nyckelharpa, cornemuses, boudègue, bouzouki...) mais aussi avec des éléments modernes (samplers). Cette année, année de nos 20 ans sort donc notre nouvel album, chez Holy Records.

Et pour ce nouvel album ("La Pèira Negra"), il y a toujours une âme mystique, on ressent très nettement au niveau de la musique mais aussi au niveau du visuel, un esprit relié à la terre, est-ce que je me trompe ?
Bien sûr qu'il il y a toujours du mysticisme dans notre musique, sinon nous aurions arrêté il y a très longtemps. les thèmes du groupe n'ont pas forcément changé depuis 1994 : on reste dans un paganisme tellurique, lié aux archétypes fondamentaux et à la mythologie de la terre. Le visuel qui est l'œuvre d'Arexis (avec qui j'avais monté le groupe, qui est parti en 1998 et revenu l'an dernier) rentre effectivement dans cette thématique. La cover montre la pierre dont il est question dans le disque au terme de sa transformation, elle s'est humanisée mais pas complètement ; pour cela elle conserve des éléments végétaux et elle participe aussi du monde du sauvage. Ce n'est pas complètement un humain, mais une sorte de chimère avec un caractère divin, sorcier. On est sur un digibook très rupestre empreint de sacré.

Sur cet album, il y a quelque chose d'assez frappant également, surtout à côté du paysage metal actuel frappé de gros son saturé, c'est qu'on a l'impression que vous faites une musique metal sans pour autant utiliser les instruments typiques de ce genre mais sans que ce soit flagrant, est-ce quelque chose de purement réfléchi, une réelle envie de faire sonner différemment des vieux instruments ?
Je n'aime pas l'idée de parler de vieux instruments, ce qui impliquerait quelque chose d'obsolète. Nous ne sommes pas un groupe de metal, nous faisons de la musique acoustique, ce qui ne l'empêche pas d'être puissante. Un festival dans lequel nous allons jouer dans quelques mois a dit que nous faisions du metal sans que ce soit du metal. En élément de comparaison, il y aurait éventuellement le deuxième album d'Ulver. Nous sommes des métalleux qui pratiquons une musique acoustique donc obligatoirement, on sonne aussi différemment d'autres groupes folk.



Donc c'est une réelle volonté de faire de la musique acoustique avec une certaine puissance, et est-ce qu'il n'est pas trop difficile de faire ressortir une telle puissance d'instruments non-amplifiés ?
Tout dépend du sonorisateur et du matériel utilisé, une musique n'a pas besoin d'être saturée pour être puissante.

D'où puisez-vous toute cette inspiration ?
Elle est le fruit de multiples lectures et musiques et de films. Nous avons fait un syncrétisme de tout ce que l'on reçoit conjugué à nos multiples personnalités !!

Comment se passe la composition pour Stille Volk ? Chacun amène quelque chose ?
En fait, ma manière de composer est toujours la même depuis le début du groupe. Tout part d'une ligne mélodique et après on greffe les arrangements. Étant donné que nous jouons d'instruments différents, l'approche musicale peut ainsi être d’autant plus variée. Par exemple, pour cette première ligne musicale, c'est la mandoline qui a été utilisée pour "Dementis" et "La Pèira", la nyckelharpa pour "En Occulz", "Forêt Gorgone" et "Litanie Du Pétrifié", le bouzouki pour "L'Eveil Du Spectre" et la guitare pour "Sous L’Oeil De La Lune". J'enregistre cette première ligne, je joue après par dessus pour les différentes mélodies et j'envoie le tout à Lafforgue qui fait de même. Quant aux textes, je les lui envoie et il choisit lui-même les musiques sur lesquelles il va les placer.

Et après en studio pour l'enregistrement c'est également chacun de son côté, où vous vous rejoignez tous ensemble pour l'occasion ?
Nous avons la chance de pouvoir enregistrer chez Lafforgue qui a son propre studio. C'est donc moi qui me déplace vu que je suis d'une incompétence rare pour tout ce qui est de cette manipulation technique.

On ne peut pas être bon partout, où alors tu serais un surhomme, et tes journées ne serait pas assez longues non plus...
Exactement !!

Du coup vous obtenez le son exact que vous désirez ?
En principe oui, on n'a pas de pression de timing ou d'ingénieur du son, donc on prend notre temps d'où 5 ans pour faire un album. (rires)

On peut dire que chaque méfait de Stille Volk est donc un produit mûrement réfléchi, mais quand est-il de la scène ? Vous la travaillez beaucoup, vous fonctionnez au feeling ?
On n'est pas un groupe qui travaille beaucoup. Avant chaque concert on fait une séance de répétition et si on a de nouveaux morceaux à travailler on fait une séance supplémentaire. L'an dernier, par exemple, on a répété 3 fois. Donc beaucoup de feeling !!



Effectivement ça ne fait pas beaucoup de répèt', mais vous devez vous connaître par cœur pour arriver à faire des concerts en répétant si peu, non ?
L'âge avançant, on se connaît bien et effectivement on peut se permettre d'improviser, de s'amuser un peu pour faire quelque chose qui ne soit pas figé.

Ceci vous évite donc de tourner en rond. Chaque concert de Stille Volk est différent alors, si je viens vous voir sur une date, et que je retourne vous voir à la prochaine, je verrais et entendrais quelque chose de diamétralement opposé ?
Pas forcément non plus, on ne part pas non plus dans des délires d'improvisation mais ce n'est pas forcément identique !!

A l'heure où la plupart des groupes choisissent l'anglais pour leur texte, Stille Volk compose les siens plutôt en français ou même en occitan, c'est une réelle envie de rester cohérent avec les thèmes abordés ou une envie très personnelle ?
Je pense en français donc j'écris en français et en plus je parle très mal anglais. Je n'ai jamais songé écrire en anglais donc la question ne se pose même pas.

Est ce que tu penses que cela vous empêche de vous "exporter" ?
Là aussi, on est dans des considérations qui nous importent peu. On joue de la musique car c'est essentiel à nos existences. De plus la langue ne veut rien dire car là où on a vendu le plus de disques c'est en Allemagne. On passera autant de temps à composer un titre pour un EP vinyle pressé à 36 exemplaires qu'un CD distribué sur EMP.

Le "succès" vous importe peu, ce qui compte le plus pour Stille Volk c'est de vivre sa musique à 100% et les à-côtés sont moins importants c'est cela ?
Bien sûr, sinon on aurait arrêté depuis longtemps. (rires)

Tu parles d'EMP, vous êtes depuis très longtemps en partenariat avec Holy Records c'est donc une affaire qui marche, est-ce que tu penses que cela vous a apporté beaucoup de choses ?
Bien sûr, ils nous connaissent bien et on les connaît bien. Et grand luxe, c'est eux qui s'adaptent à nous et non le contraire. Cela nous a apporté de sortir des disques en toute liberté et dans des conditions très, très correctes.

Vous avez donc avec une totale liberté, ils ne vous imposent pas de musiciens, ni de date butoire, ni de partie musicale, etc...
Non, en gros, ils commencent à travailler sur nos produits quand il sont prêts. Il savent qu'ils ne peuvent pas nous imposer grand chose et c'est pour cela que la complicité perdure.

Et perdura pour la suite sûrement. Est-ce que vous avez déjà envisagé un futur album, où vous préférez déjà écumer celui-ci sur diverses scènes avant d'entrevoir le prochain ?
On ne prévoit rien, pour l'instant quelques concerts et dès que Pan frappera à mon inspiration, on préparera quelque chose. le plus sûr moyen d'avancer est de ne pas avoir de projets !!

Pan le dieu grec, Peter ou encore Panpan ? (rires)
Panpan cul cul bien sûr.

Aurais-tu un message à faire passer, quelque chose à rajouter ?
Merci beaucoup pour l'interview, et que Pan soit avec vous !! Merci pour ton intérêt pour notre musique. Restez authentiques et cessez de suivre les modes.

Merci à toi de nous avoir accordé de ton temps et on vous souhaite encore 20 ans de carrière, et que Pan vous aide à nous servir encore d'autres albums. A bientôt.


Le site officiel : www.stillevolk.org