Interview faite par Skype par Zemurion

Salut les gars, merci à vous d'accorder cette entrevue à French Metal. Comment se porte Psygnosis en ce moment ?
Jérémy (basse) : Au calme. Il y a trois concerts qui se sont annulés au mois de Novembre qu'on n'a même pas eu le temps d'annoncer. Du coup on s'occupe du prochain album. Et c'est bien parce que, de toute façon, il fallait qu'on s'en occupe.

Où en est le prochain album ?
Raphaël (violoncelle) : Il est quasiment composé entièrement ; toutes les structures sont là mais il manque des parties de violoncelle notamment. On va dire qu'il en manque la moitié. Disons qu'il n'y a pas encore de vision globale pour le violoncelle.
Jérémy : De toute façon, ça va pas sortir avant 2016 ou 2017.
Raphaël : Pas 2017 quand même !
Jérémy : Quand t'as fini un truc, ça sort toujours six mois après...

Est-ce que vous avez revu votre façon de composer maintenant que Raphaël a intégré officiellement le groupe avec son violoncelle ?
Rémi (guitare) : Absolument pas. Déjà avant, je ne pensais pas à composer avec du chant. Pour moi, quand je compose, il faut déjà que ce soit bien sans qu'il y ait le chant ou sans qu'il y ait le cello. Donc ça ne change absolument pas ma façon de faire.
Raphaël : Il y avait déjà une partie de l'album qui était composée avant que je rejoigne le groupe.
Jérémy : PSYGNOSIS doit se suffire à lui-même avant le chant ou avant le violoncelle qui ajoutent une touche en plus. On a fait le choix de passer en instrumental parce qu'on faisait déjà en sorte que ça nous plaise sans chant. Il y a toujours une ambiance dans les compos. D'ailleurs, sur le premier album avec notre premier chanteur, il y avait certains passages où il était très bons et certains passages où il était très nul, et ça faisait un peu chier parce que les compos sont intéressantes au niveau instrumental.

Le violoncelle est donc pensé comme quelque chose qui vient se greffer en plus ?
Raphaël : Oui. Pour ce troisième album et pour l'EP "AAliens" ça a été un petit peu ça. Je digère un peu le morceau qu'a composé Rémi et puis, plus tard, je viens poser mon violoncelle dessus et travailler la musique comme ça.
Rémi : De toute façon, dans n'importe quelle composition c'est ça. S'il faut ajouter un synthé quelque part, le synthé est ajouté après la musique et la musique a pas été pensée pour ajouter le synthé. Et c'est pareil dans beaucoup de groupes. Il y a beaucoup de groupes qui composent d'abord en instrumental et qui pensent pas forcement à l'intégration du chant.
Jérémy : On le sait qu'il y a du violoncelle, on sait qu'il y a du chant, mais on peut pas se mettre à la place de l'autre. C'est compliqué de composer à plusieurs. Quand je compose ma basse, je le fais pas avec Rémi. Je le fais tout seul devant mon PC. Il a déjà pensé une basse au préalable mais il sait pas non plus ce que je vais balancer à la fin. Au violoncelle c'est pareil, sauf que là c'est vraiment particulier parce que c'est quelque chose qui est vraiment mis en avant comme le chant. C'est un peu comme un frontman cette place-là.
Rémi : Ce qui n'est pas habituel pour du violoncelle.
Raphaël : Cela dit, l'album a en partie était composé avant que je rejoigne le groupe, donc ça se fait comme ça. On verra pour l'album qui se fera encore après. Peut-être que je serai moteur de certaines choses parce que j'aime proposer aussi. Après, il y aura sûrement un partage qui se fera avec Rémi. Tout est possible.
Jérémy : Ceci dit, je pense que ce n'est pas très intéressant d'ajouter une touche de violoncelle qui soit rythmique ou en dessous, comme la basse par exemple. Je pense que le violoncelle a l'avantage de pouvoir avoir une vraie place, une vraie présence, autant sur scène qu'au niveau des compos. Il ne doit pas être mis en retrait, même si, parfois, s'il suit un peu la rythmique c'est sympa.

Dans le précédent album, il y avait quand même le morceau "Silent Part 2" qui avait été composé à partir du violoncelle.
Raphaël : Celui-là c'est l'exception. A l'époque je n'étais pas encore dans le groupe et PSYGNOSIS m'a donné carte blanche...
Jérémy : Je vais corriger : Raphaël a toujours été dans PSYGNOSIS mais en musicien additionnel.
Raphaël : C'est vrai.
Jérémy : C'est pas qu'il était pas dans le groupe ; il a toujours été crédité en tant que musicien additionnel, même sur Facebook.
Raphaël : Et puis on se voyait quand même assez régulièrement.
Jérémy : On n'a pas intégré Raphaël, on l'a juste mis à plein temps. Il a toujours été là et pas que sur l'album d'avant ; sur l'EP "Sublimation" il apparaît trois fois et sur "Anti-Sublime" il apparaît aussi.
Raphaël : Et donc, pour "Silent Part 2" c'est moi qui ai composé le violoncelle et la guitare a été ajoutée par dessus.

L'album sera 100% instrumental ou est-ce qu'il est prévu d'inviter des chanteurs sur certains morceaux ?
Jérémy : Il n'y a rien de prévu pour l'instant. Si on devait prévoir quelque chose, ce serait avec Renato du groupe Flayed qui nous a rendu un fier service en remplaçant Yohan quand il a eu ses soucis avant qu'il soit obligé d'arrêter. De toute façon, je pense qu'il y aura une intégration de Renato mais plutôt dans un clip et pas forcément de manière musicale. On va essayer de le mettre un peu en avant pour le remercier de nous avoir un peu sauvé la mise.
Raphaël : Pour l'instant, la majorité de l'album est prévue pour être instrumentale.
Jérémy : En tous cas, nous on veut proposer un PSYGNOSIS instrumental aujourd'hui et il n'y a pas de chose qui se présente pour l'instant qui pourrait nous amener à changer d'avis.
Raphaël : Vu qu'il y a des choses à prouver avec cet album, ce serait mal venu d'intégrer un chanteur pour dire : "Regardez, il peut peut-être y avoir... du chant !". Il faut faire le truc à fond dans l'instrumental.
Jérémy : Même toi tu l'as dit comme les autres chroniques : "Qu'est-ce que ça va donner sur l'album ?". Et c'est le rôle de l'EP d'ailleurs ; c'est de faire un entre-deux entre l'album d'avant et l'album d'après pour dire : "Attention il va y avoir quelque chose de différent donc on vous balance vingt minutes pour vous dire que ça va être comme ça". On fait aussi des concerts dans ce sens là, avec de l'instrumental, pour mettre un peu en haleine sur quoi on va partir pendant une heure ou une heure et quart sur l'album.

J'ai lu que vous ne validiez qu'une partie de vos compos pour les mettre sur album. Sur quels critères vous basez-vous pour faire votre sélection ? C'est quoi un bon morceau pour Psygnosis ?
Rémi : Déjà, à la base, ils entendent que 10% des morceaux que je compose. Dans tous les cas.
Jérémy : Après, il y a une barrière : c'est à dire que moi, j'aime bien quand il y a une ambiance science-fiction. Depuis le début, tu remarqueras que dans tous les morceaux de PSYGNOSIS il y a un peu cette ambiance... on va dire Alien, même si c'est au final un peu un hasard qui n'a rien a voir avec ça si l'EP s'appelle "AAliens". Mais s'il n'y a pas cette ambiance un peu science-fiction ou extraterrestre, en général ça passe même pas. Jusqu'à présent, il y a toujours un peu cette cohésion là dans le fond. Un petit peu cette ambiance futuriste. Après, je pense que c'est Rémi qui fait le tri tout seul. Des fois, aussi, il y a des trucs que je trouve un peu trop taillés que pour le live ou alors qui n'apportent pas grand chose de nouveau. Si c'est trop du répété, si c'est trop du PSYGNOSIS vu et revu... T'as des groupes qui ont des formules qu'ils répètent tout le temps. Rémi cherche toujours à innover, à trouver une nouvelle manière de faire même s'il y a une façon de faire de base, une patte... Avec les samples par exemple. Les samples ça reste un élément présent depuis le début.

Ce que je retiens c'est qu'il faut qu'il y ait une patte Pysgnosis, avec l'ambiance "extra-terrestre", sans qu'on ait l'impression de se répéter en apportant quelque chose de nouveau.
Rémi : Il faut que notre attention soit présente tout au long du morceau. Si à un moment l'attention se relâche, ça veut dire que le morceau est un échec et je passe à autre chose. Ou alors, si à un moment dans le morceau on me dit : "Ah, là, à ce moment c'est un peu bof...", généralement je dégage tout. C'est rare que je réutilise un bout de morceau ou un riff pour un autre truc. Les morceaux sont toujours fait en entier et ont un sens en entier. C'est très rare que je puisse prendre un petit bout par-ci et un petit bout par-là. C'est toujours un seul bloc a chaque fois, et j'essaie à chaque fois que ce soit cohérent avec les autres morceaux de l'album.
Jérémy : Il y a une autre patte aussi vachement importante à noter, c'est les respirations. On fait vachement respirer nos morceaux. Des fois ça s'énerve, des fois c'est mid-tempo, des fois c'est calme... Et c'est là qu'on peut varier les ambiances et qu'on est un peu différents. On est pas obligés de taper toujours dans le style death metal ou dans le style trip hop pour que ça pète. On peut vraiment être éclectique dans tout ça.



Donc vous jetez 90% de vos compos tandis qu'il y en a certaines sur lesquelles vous n'arrêtez pas de retravailler depuis les débuts du groupe. Je pense notamment au morceau "FIIIX" qui en est à sa troisième version. Quel est l'intérêt pour vous de présenter de nouvelles versions de ces morceaux ?
Raphaël : Une chanson n'est jamais vraiment terminée. C'est à dire qu'à un moment Rémi se dit : "Ce morceau il pourrait devenir ça" et finalement il devient autre chose.
Jérémy : Il y a une explication sur "FIIIX" qui ne vient pas que de nous. Ça vient plus des concerts. C'est le public qui décide. "FIIIX" on en est un peu victimes parce que c'est la seule chanson sur laquelle on a vu des spectateurs polonais ou allemands chanter dessus. Quelque part on est obligé. Quand je dis "on est obligé", c'est pas comme si on était des stars comme Slayer, mais si on le fait pas, on sent bien que les gens qui suivent vraiment le groupe tirent la gueule. On se pose même pas la question de l'enlever parce que, dès qu'on le joue, les gens sont contents. On le voit tout de suite. Alors, pourquoi avec le violoncelle on a beaucoup suivi les lignes de chant (et au final pas tant que ça si tu écoutes vraiment) ? C'est parce que les gens chantent encore en concert, même avec le violoncelle. Et on savait que ça allait se passer comme ça. Même nous, des fois, ça nous manque de chanter sur "FIIIX". C'est donc très bien qu'il ait suivi le chant de Yohan dans les grandes lignes - c'est même moi qui lui ai demandé - parce que ce morceau il est taillé pour ça. Et en live, il est tellement efficace que l'enlever, ce serait vraiment compliqué. C'est même pas possible. C'est pour ça qu'on a encore retravaillé ce morceau. Mais il y a aussi d'autres morceaux 2.0, comme "Loozing Zeppelin", parce que des fois les choses ne sont pas finies.
Rémi : Non, c'est pas qu'elles sont pas finies. C'est qu'elles sont finies à un "instant T" et deux ans après on se dit : "Ah mais il peut aussi y avoir ceci ou cela".
Jérémy : Et il y aura probablement une version 4 de "FIIIX".
Raphaël : On a pas de problèmes à retoucher une chanson. On l'amène autre part. On essai de proposer autre chose avec.
Jérémy : L'intérêt dans l'EP c'était de la présenter pour le live. Si on avait changé de chanteur, on aurait pas ressorti "FIIIX" mais là, c'est du violoncelle, on est en instrumental, donc la question c'était : "Qu'est-ce que va donner "FIIIX" en instrumental ?". Et ça, on pouvait pas le mettre sur un album. Sa place était sur un EP.

En général, quels ont été vos retours sur cet EP ?
Jérémy : Pour l'instant c'est cool. A part les retours qu'on a du fait que les gens sont vraiment réceptifs à l'intégration du violoncelle, c'est qu'ils sont sur leur faim parce qu'il n'y a que vingt minutes. Mais c'est un EP ! (rires) Nous c'est pareil : présenter vingt minutes ça nous fait chier, mais c'est un EP.
Raphaël : De toute façon les gens sont jamais contents ! (rires)
Jérémy : En règle générale ils en veulent plus et nous aussi, on a envie de présenter l'album tout de suite. D'ailleurs, en live, on joue déjà deux morceaux du prochain album ; ça veut dire qu'on a vraiment envie de le montrer. Le truc, c'est que l'album a une cohésion ; "Man Ov Seel" n'avait pas vraiment sa place dans ce prochain album, "FIIIX" n'avait pas du tout sa place, donc on s'est dit : "Vingt et une minutes, il y a déjà de quoi faire un bon EP qui apporte vraiment quelque chose de différent". A part quelques personnes comme toi, ce qu'on a reçu sur "Man Ov Steel" c'est que c'était vraiment innovant.

Ce que je disais, dans ma chronique, c'est qu'il me semblait que le violoncelle avait du mal à trouver sa place dans les parties violentes de Psygnosis, là où on avait auparavant un gars qui hurlait.
Jérémy : Moi je trouve que dans "Man Ov Steel", c'est justement le violoncelle qui fait tout exploser sur le dernier riff après le blast. C'est là qu'il prend tout son sens. Je ressens vraiment l'inverse de ce que tu expliques.
Raphaël : Pour moi, ces parties les plus extrêmes sont les plus délicates à composer en termes de violoncelle. C'est pas évident du tout parce que je dois en effet me positionner par rapport à ça. Il y a plusieurs solutions. Tu nous as peut-être pas entendus en live, donc tu ne sais peut-être pas comment on reprend "Resurrection" par exemple...

Si, j'ai vu une vidéo live que vous avez publiée et je dois dire que j'ai trouvé la version violoncelle vraiment chouette.
Jérémy : Nous aussi, c'est pour ça qu'on a voulu immortaliser ça en vidéo.
Raphaël : Le blast c'est galère. Mais, du coup, je trouve des solutions. On a nos standards du mec qui gueule avec du blast dessus mais, ce qu'il faut se dire ici, c'est que c'est peut-être plus ça. C'est moins de l'expression de la violence.
Jérémy : En fait, il y a tout à créer. "Man Ov Steel" ce n'est qu'un premier jet quelque part.
Raphaël : C'est pas Apocalyptica. Apocalyptica c'est que des violoncelles ; ils ont jamais de blast aussi violent que ça. On a jamais entendu du blast comme ça avec du violoncelle dessus. En tous cas, moi, j'ai jamais entendu ça.
Jérémy : Oui, c'est pour ça qu'on lui laisse du temps pour composer le violoncelle. C'est une place qui n'est pas encore prise. C'est un chemin à tracer. Pour l'instant je suis très contant et je pense qu'on est tous satisfaits de ce qu'il a fait, mais ça prend du temps. Et c'est vrai que le premier jet de "Man Ov Steel" est peut-être encore un peu maladroit sur certains passages - ou on peut le ressentir comme ça - parce que ça va sûrement devoir mûrir.
Raphaël : Et puis, les gens sont pas habitués surtout.
Jérémy : Même nous.
Raphaël : Les gens sont habitués à entendre un mec qui cri comme un cochon, qui exprime son énergie. Du coup, je trouve que ça crée un effet beaucoup plus cinématographique et moins violent. On part vers quelque chose de différent.
Jérémy : C'est plus du metal extrême au sens propre du terme. Ce qui dérange les gens qui n'écoutent pas du metal - c'est à dire la voix – avec nous c'est fini. Quelque part, on devient plus mainstream en faisant ça. Même pour nous c'est compliqué, au niveau de l'étiquette par exemple. On sais pas du tout où on va mais c'est vachement intéressant, justement.

Comment ça se passe sur scène sans chanteur ?
Jérémy : C'est excellent !
Raphaël : Moi je peux pas comparer parce qu'avant, j'étais monté qu'une fois sur scène quand il y avait un chanteur et que, maintenant, c'est moi qui le remplace.
Jérémy : Moi, je trouve que c'est encore mieux. Comme tu le sais, on n'a pas de batteur : c'est un choix artistique assumé et il n'y a pas de volonté à ce qu'on en ait un un jour, pour l'instant. Du coup, il y en a beaucoup qui, en voyant ça, cataloguent : "Bon c'est d'la merde". Mais maintenant : pas de batteur, pas de chanteur et un violoncelle... On est plus encrés dans le côté ovni, le côté bizarre et décalé qui pousse gens à la curiosité.
Raphaël : Cela dit, on le fait pas pour ça. On cherche pas à faire original, c'est juste que ça s'est présenté comme ça.
Jérémy : En tous cas, c'est une originalité qui pousse à la curiosité et, du coup, on a plus de monde dans le public ainsi qu'une plus grande tolérance au fait qu'on ait pas de batteur. Ou plutôt, on a une plus grande écoute à pourquoi on a pas de batteur. Lors du premier concert qu'on a fait avec Raphaël, on a même eu un gars qui s'est excusé parce qu'il avait lui aussi un groupe a peu près dans notre délire mais qu'ils avaient un batteur ! Ça, avant, ça ne nous était jamais arrivé. Avant on en prenait plein la gueule tandis que, maintenant, les gens s'excusent presque parce qu'ils ont un batteur dans leur groupe ! C'est bien, on fait du chemin...
Raphaël : Pour revenir au fait de ne pas avoir de chanteur, je me dis que souvent le chanteur a un côté frontman. Là, il n'y a plus de chanteur donc on est un peu quatre frontmen en fait. On est un peu chacun au même niveau. Jérémy est à l'aise sur scène, il prend beaucoup de place. Moi je suis un peu l'originalité du groupe, donc je pense que je prend aussi de la place. Mais il n'y a pas de mec qui canalise un peu tous les regards. On est là tous les quatre et on donne tous les quatre équitablement.
Jérémy : Je suis assez d'accord, c'est plus homogène au niveau du bloc qu'il y a sur scène. Ça veut pas dire qu'avec un chanteur c'était nul ; c'était très très bien. La question qu'on peut se poser par rapport à ça c'est que quand il y a un chanteur, tu peux chanter en même temps. Moi j'aimais beaucoup ça, même sans micro. On joue cinquante / cinquante cinq minutes sur scène, c'est beaucoup pour un groupe de notre envergure (normalement, à notre place, c'est trente cinq minutes, il faut faire un caprice pour avoir cinquante minutes, c'est impressionnant, des fois ça demande une heure et demi de négociations) et du coup on pourrait se dire que c'est longuet mais, au final, tout au long c'est une ambiance où on donne plus. Plus de notre instrument et de nous.
Raphaël : Les gens écoutent plus la musique du coup.
Jérémy : Les gens ferment plus les yeux qu'avant. Il y a plus un partage de musique où les gens peuvent peut-être plus s'imaginer leur délire à eux. Ça leur laisse plus une place pour eux que si tu leur imposes du chant. Ça pousse plus à l'imagination de tout le monde. Ça, je l'ai vraiment découvert par le live.



J'ai vu que vous vous êtes amusés, sur votre bannière Facebook, à reprendre des commentaires assassins sur votre musique. J'ai l'impression qu'il y a un paradoxe dans le metal où on aimerait toujours plaire à un maximum de gens possible tout en gardant une certaine fierté de ne pas plaire à tout le monde. Est-ce que vous vous retrouvez dans cette analyse ? Quel est votre point de vue là-dessus ?
Raphaël : Je vais ressortir une phrase que Jérémy m'a dit l'autre jour parce que je suis un peu sensible là-dessus. Il m'a dit : "Tu sais, Raphaël, plus il y a de haters, plus il y a de gens qui aiment". En général c'est ça. Bon, après il y a aussi des groupes vraiment nuls où il y a plus de gens qui n'aiment pas que de gens qui aiment... (rires)
Jérémy : Après, on l'a pas fait dans ce sens-là. On l'a pas fait pour dire : "Regardez, on est des true méalleux authentiques et on a pas vendu note âme, du coup on met en avant le fait que y'a des gens qui nous détestent...". Si on a mis en avant le fait qu'on a des détracteurs, c'est parce que ça nous saoule de voir dans la promo des trucs du genre : "Metallian a dit que c'était 5/5 et que c'était l'album de l'année !". Les "albums de l'année" il y en a quatre-vingt par mois, c'est incroyable. Moi je déteste les concours dans la musique, je trouve ça exécrable. On est dans l'artistique ! Ça voudrait dire : "Tiens, toi t'es meilleur en art que moi" ? Pffff ! Ça n'a rien à voir ! On parle d'émotions, on parle pas de performance ! C'est complètement illogique. Mettre en avant les commentaires de nos détracteurs, c'est déjà montrer qu'on respecte les avis et les goûts de tout le monde. Tant pis si on nous aime pas, ça nous pose pas de problème. Et en plus, on peut inviter les gens à se faire leur propre avis plutôt que de se baser sur celui de Metallian. C'est à dire qu'on ne prend pas les gens pour des moutons, parce que je ne pense pas que les gens soient des moutons (même si ça arrive souvent de croire ça, surtout en ce moment avec les trucs bleu blanc rouge...). Je pense que tout le monde essaie de réfléchir et de se forger un propre avis. Du coup, fonctionner comme ça c'est les respecter en les invitant à se forger leur propre avis. Et c'est pas grave si on nous aime pas ; peut-être aussi que c'est momentané. Peut-être que dans cinq ans ou dans dix ans leur oreille sera adaptée à écouter ce qu'on fait. Peut-être que ça va évoluer, peut-être pas du tout... Comme pour nous. Moi, maintenant, j'écoute du rap américain alors qu'il y a dix ans tu pouvais pas m'en parler. Tout le monde évolue. Tout le monde a sa personnalité. Donc il y en a qui peuvent nous dire que c'est de la grosse merde, comme Cédric Sultana a pu le faire, ou même Guillaume Bernard en nous respectant pas du tout... On a été assez étonnés de la conversation qu'on a eu avec lui. A la base on avait la possibilité de faire quelque chose ensemble et puis, après un mois et demi d'attente où je lui avait envoyé l'album, où je lui avais envoyé des messages et des messages, où en parallèle j'avais organisé des concerts où j'avais fait jouer Hypno5e et d'autres groupes de la Klonosphere, je pensais avoir mérité un certain respect dans la réponse. Et le jour où je lui annonce ça, il me répond : "Ah ben j'ai écouté. Salut". Enfin, le truc qu'il a répondu quoi. Ça a un côté un peu vexant. T'es étonné. Tu te dis : "Qu'est-ce qui s'est passé ?". On a voulu mettre ça en avant. Le fait qu'on puisse ne pas plaire et qu'on puisse subir des échecs dans la recherche de label ou de relations de travail. Mais même si c'est compliqué, même s'il y a des échecs, c'est pas grave, on continue d'essayer de plaire à d'autres personnes.
Raphaël : D'ailleurs tu remarqueras que sur "Human Be[ing]", PSYGNOSIS a partagé toutes les chroniques, même celles de ceux qui ont pas aimé. On partage tout sur la page Facebook, il n'y a pas de souci.
Jérémy : Mais c'était amusant de faire ça. C'était très amusant parce que ça a fait rire beaucoup de gens. Beaucoup de gens n'ont pas compris, mais beaucoup ont compris quand même et c'est là que tu te dis qu'ils ont un cerveau et qu'ils réfléchissent. Tout le monde a un cerveau, tout le monde réfléchit et c'est trop bien ! C'est prendre moins les gens pour des cons de leur montrer : "Rgardez, on nous prend pour des merdes, qu'est-ce que vous en pensez ?".

Curieusement, on vous compare plus souvent à Gojira qu'à Hypno5e. Certainement parce qu'ils sont moins connus. Pourtant, quand on connaît les deux groupes, les similitudes sont frappantes. Qu'est-ce que représente Hypno5e pour Psygnosis ? Un géniteur ? Un grand frère ? Un maître ? Un simple collègue ?
Rémi : C'est un peu tout ça en même temps. C'est difficile à expliquer. Ça fait partie des nombreux groupes qui m'ont influencé. La première fois que j'ai écouté Hypno5e, je me suis dit : "Putain, c'est exactement le genre de truc que j'ai envie de faire !". J'ai toujours aimé ce genre de groupes qui ont cette dualité, qui mélangent les parties plus calmes avec les parties plus vénères. C'est toujours quelque chose qui m'attire beaucoup et, quand ils ont sortie leur premier album en 2007, il n'y avait pas grand monde qui arrivait à mélanger aussi bien ces deux aspects. Après il y a d'autres groupes qui ont suivi la mouvance, mais Hypno5e ça a été la première claque dans ta gueule à dire : "Regardez, on peut le faire !".
Jérémy : On a déjà fait des scènes avec eux et on va en refaire. Là, on sait qu'on en a au moins une à venir sur un festival. Il y a une attitude un peu collègue, ouais. On fait un peu la même sauce. Par contre Gojira, c'est vrai qu'on aime tous et que, si tu aimes le metal moderne, ce serait dommage de pas écouter Gojira mais...
Rémi : J'ai surtout l'impression que ceux qui nous comparent à Gojira, c'est surtout ceux qui ont pas assez écouté Morbid Angel. Je trouve qu'on ressemble beaucoup plus à Morbid Angel qu'à Gojira pour les passages death.

Est-ce que Psygnosis a vocation à ressembler à Hypno5e, comme si vous cherchiez à créer une sorte d'école française de metal d'avant-garde, ou est-ce qu'au contraire, vous allez chercher à vous en éloigner ?
Tous : Ni l'un, ni l'autre.
Rémi : On fait notre truc. Et puis surtout pas "scène française". Je suis pas pour dire que tel pays doit avoir une scène ou pas. On fait juste notre sauce. Et j'ai envie que tous les groupes fassent leur sauce et surtout pas qu'ils fassent du sous-Hypno5e ou du sous-Gojira ou du sous-In Flames ou du sous-machin...
Jérémy : Hypno5e, c'est juste cool qu'ils soient là ! On le vit vraiment comme ça. Quand on joue avec eux, c'est trop cool ! Raphaël fait du violoncelle sur le prochain Hypno5e pour des micro-parties mais c'est pas une "scène française". Je pense qu'on a juste le même ressenti. T'es pote avec ceux qui te ressemblent, mais c'est pas plus que ça.

Mais ça ne vous a jamais mis en difficulté de passer après Hypno5e ?
Rémi : Non. Comme tu l'as dit les gens nous comparent plus à Gojira qu'à Hypno5e, donc non. D'ailleurs sur les affiches on joue plutôt avant eux !
Raphaël : Chacun a sa place.
Jérémy : Ils ont plus d'expérience que nous mais on passe pas "après eux". On a tous notre carrière, on a tous des fois la chance, des fois les opportunités, l'entourage... On est très très indépendants tandis qu'Hypno5e le sont beaucoup moins. On gère tout, tout seuls, de A à Z : de la recherche de concerts aux clips en passant par le visuel... Tout est fait au sein de PSYGNOSIS. Pour Hypno5e, il y a plus une équipe de pros derrière avec la Klonosphere, The Link Prod... C'est pas la même approche. Et puis ils en sont sûrement à un niveau un peu plus élevé que nous ; sûrement le niveau qu'on aura dans cinq ou six ans. Donc c'est normal. Ça nous fait pas chier de jouer avant eux sur les affiches, c'est logique. Ce serait prétentieux de dire qu'on joue après eux. D'ailleurs, ça me ferait presque peur de monter sur scène après.
Raphaël : Cela dit, je suis très curieux de voir, avec le prochain album instrumental et le violoncelle, s'il y a encore ces comparaisons qui persistent. Forcement, il y aura sûrement Apocalyptica à cause du violoncelle. Mais est-ce que ça va être du "Gojira-Hypno5e de l'Apocalyptica" ?
Jérémy : A mon avis il y aura aussi Igorrr avec les passages plus electro.

Cette entrevue touche à sa fin, je vous remercie encore de la part de French Metal pour le temps accordé à cette interview. Qu'est-ce qu'on peut vous souhaiter pour la suite ?
Jérémy : Qu'est-ce que t'as envie de nous souhaiter, toi ?

Je vous souhaite de nous pondre un troisième album encore meilleur que les deux précédents et de nous surprendre agréablement.
Jérémy : Merci. C'est cool de nous faire confiance. On va tenter. Sinon, ce qu'on pourrait demander ? L'indépendance commence à devenir un petit peu lourde et je crois qu'on a un petit peu besoin d'aide pour le booking. S'il y a des gens qui se sentent un petit peu la flamme de nous aider à ça... ça commence à devenir compliqué pour PSYGNOSIS parce qu'il y a beaucoup de travail et qu'on a tous une vie. A un moment, il va falloir faire un choix entre le groupe ou notre vie donc si on pouvait être une équipe un peu plus grande, avec des pros autour, ce serait pas mal. Ce qu'on pourrait nous souhaiter, ce serait que quelqu'un s'intéresse à nous pour booker des dates et faire un peu ces parties qui nécessitent beaucoup de temps et d'énergie.


Le site officiel : www.psygnosis-music.com