Interview faite par mail par Jillian

Pour commencer la question à laquelle on ne peut échapper : Peux-tu présenter à nos lecteurs les principales formations dont tu es à l'origine, à savoir Mirrorthrone et Weeping Birth ?
Vladimir : J'ai fondé WEEPING BIRTH en 1999 dans le but de pratiquer un metal extrême radical sans concession. J'ai rapidement enchaîné une démo et un premier album, "A Painting Of Raven and Rape", puis ai mis un temps plus conséquent à sortir le second album, "Anosognosic Industry Of The I", l'oeuvre la plus brutale que j'ai écrite à ce jour. J'ai créé MIRRORTHRONE en 2000 dans le but de diversifier mon travail en ajoutant une touche romantique à mes compositions. Cette note plus légère n'a pas duré très longtemps: le projet, tout en restant massivement symphonique, s'est orienté vers un metal plus sombre et baroque. J'ai sur cette lignée sorti "Carriers Of Dust", puis "Gangrene" dernièrement.

Il y a peu sont sortis "Gangrene" de Mirrorthrone et "Anosognosic Industry of the I" de Weeping Birth. Comment se sont déroulées leur élaboration ?
La composition du WEEPING BIRTH s'est étalée sur plusieurs années et regroupe des morceaux d'époques très différentes. A travers les années, j'ai en effet traversé plusieurs paliers dans mes méthodes de travail. L'enregistrement a été un moment un peu étrange où j'ai tenté d'actualiser une partie des anciens morceaux. "Gangrene" a été composé sur une période beaucoup plus brève et a été en réalité enregistré durant la même session que l'album précédent, "Carriers Of Dust". Je l'ai en revanche mixé juste avant sa sortie, d'où un son relativement différent.

Le titre du dernier opus de Weeping Birth, "Anosognosic Industry Of The I", est plutôt intriguant... Peux-tu nous dévoiler sa signification ?
L'anosognosie est une attitude pathologique que l'on observe chez certaines personnes malades qui n'arrivent pas à reconnaître leur affection. Le motto de WEEPING BIRTH est un refus de l'hystérie reproductrice, considérée comme un acte dont l'intérêt est avant tout personnel et ne prend aucunement en considération la lourde question qu'est la génération d'un ego. En ce sens, WEEPING BIRTH la taxe de maladie et d'industrie : une industrie du "je" anosognosique.

Tes textes alternent tour à tour Français / Anglais voire une pointe d'Allemand si je ne m'abuse ("Der Tanz Der Totem" de Weeping Birth). Pourquoi ce choix ?
J'ai fait usage une ou deux fois d'une pointe d'Allemand, mais de manière très marginale. Le Français et l'Anglais s'enchaînent en revanche de manière régulière d'un morceau à l'autre. Il est vrai que la question semble se poser légitimement de savoir ce qui me fait opter d'une langue ou de l'autre, mais je dois avouer mon incapacité à répondre. Généralement, une fois une mélodie composée, des bribes de paroles jaillissent spontanément et je poursuis ensuite sur cet élan, qu'il soit en Français ou en anglais. Le Français étant ma langue maternelle, je suis par son usage nettement plus à même d'articuler une pensée qu'avec l'Anglais qui est un véritable frein. Néanmoins certaines de ses consonances propres sont particulièrement musicales, d'où son usage en dépit des désavantages dont je viens de parler.

Tes textes sont très recherchés et d'une grande finesse. D'où te vient ce goût de l'écriture et quels sont les thèmes qui t'inspirent ?
Merci. Je ne lis aujourd'hui que des ouvrages philosophiques, ou des écrits scientifiques peu éloignés du domaine philosophique. J'ai depuis quelques temps perdu le goût des autres oeuvres littéraires dont je regrette généralement une absence de profondeur et un satisfaction dans la description superficielle. L'intérêt purement esthétique ne m'y suffit pas et les pseudo questions qui y sont posées m'ennuient généralement. Les thèmes qui m'inspirent sont donc certaines réflections d'ordre philosophique, replacées quand nécessaire dans un contexte actuel.

Malgré de nombreuses ressemblances, Mirrorthrone et Weeping Birth sont deux projets bien distincts. Quels sont selon toi les différences fondamentales entre eux ?
Au départ, les textes étaient de nature radicalement différente. La barrière entre les deux projets s'est petit à petit brouillée. La différence réelle qui sépare MIRRORTHRONE de WEEPING BIRTH est essentiellement esthétique : la musique n'est pas la même, et ce en dépit de certaines similarités. Bon nombre de personnes qui apprécient MIRRORTHRONE sont incapables de procéder à une écoute prolongée de WEEPING BIRTH. Le premier est très mélodieux, l'autre et plus noir, rapide et violent.

Concernant ton troisième projet, Unholy Matrimony, dont on n'entend que peu parler pour le moment, peux-tu nous en présenter les principales caractéristiques ? Quelle est donc son actualité ?
Lui présente un visage plus black metal. Les débuts étaient très mélodieux et leurs tempos cataclysmiquement rapides. Un nouvel album, "Croire, Décroître", est sur le point de voir le jour sur le label américain Deepsend Records. La musique s'est passablement ralentie et assombrie, les atmosphères sont plus noires et pesantes. La production n'a rien à voir, non plus.



Au sein de chacun de tes projets musicaux tu as la charge de tout les instruments. On peut donc se demander quel est ton parcours musical qui te permet aujourd'hui une si grande maîtrise ?
J'ai commencé la guitare durant ma quatorzième année, les autres instruments et techniques de programmation ont suivi naturellement avec les ans. J'ai pris des leçons de guitare à mes débuts durant quelques temps, puis j'ai travaillé seul. Pour le reste je suis autodidacte. La musique est un vecteur émotionnel, il faut travailler au feeling. La technique n'est qu'un outil au service de l'expression.

On retrouve dans ta musique, plus particulièrement avec Mirrorthrone, un son unique qui possède une multitude d'influences et des plus variées. Peux-tu nous en dire davantage à ce sujet ?
J'ai toujours écouté de la musique de bords différents, allant de la musique classique à la musique bruitiste, en déclinant bon nombre de genres intermédiaires. Tout ce que tu peux entendre t'influence, directement ou indirectement. Avec MIRRORTHRONE, je ne voulais pas m'imposer la moindre ligne de conduite, la moindre barrière infranchissable.

Quels inconvénients ou au contraire quels avantages le fait que tout tes projets soient des one-man-bands t'apportent-ils ?
L'avantage le plus évident est le contrôle. Si quelque chose doit être fait, je n'ai pas à attendre sur quelqu'un d'autre. Étant le seul responsable à bord, je ne peux prendre que sur moi si quoi que ce soit n'est pas à la hauteur, et je n'ai plus qu'à travailler pour parvenir à mon but. Sinon je ne vois pas de réel désavantage à cette formule pour les trois projets dont on parle en ce moment, elle me convient parfaitement.

Quelle est la nécessité pour toi d'avoir différents projets, en quelque sorte complémentaires, à ton actif ?
Je crois que tu donnes la réponse dans ta question : ils sont complémentaires. Rester bloqué dans un seul genre serait frustrant à la longue. Je me sens appelé par diverses choses et je me sentirais appauvri si je ne répondais pas à cet sollicitation.

Tu commences à avoir une discographie importante mais ce n'est pas pour autant que nous avons l'occasion de t'apercevoir sur scène. Peux-tu nous en expliquer les raisons ?
Je ne souhaite pour l'instant pas exporter la musique que je pratique avec ces trois projets sur scène. Je prends plaisir à l'élaboration de mes morceaux en studio, et je ne ressens aucun besoin de les présenter sous une autre forme que celle que je produit de cette manière. J'apprécie la sobriété d'un album et suis moins tenté pour l'heure par l'exubérance scénique.

Pour ceux qui l'ignorent il est nécessaire de rappeler que tu vis en Suisse. L'occasion pour toi de nous présenter un peu ta scène locale et les formations que tu estimes les plus intéressantes...
Je ne connais pas spécialement bien la scène Suisse. Je suppose qu'elle est comme toutes les autres, avec une poignée de formations intéressantes et d'autres redondantes. Les groupes que je préfère sont Life As War, qui officie dans un hardcore à la New-Yorkaise, A Thousand Years Slaver, plus metalcore / deathcore, Knut et Shora, évoluant dans un hardcore original et barré.

Un dernier message à faire passer ? C'est le moment...
Merci pour l'interview. A ceux qui sont intéressés par les albums sus-mentionnés, vous trouverez l'essentiel des productions de MIRRORTHRONE, WEEPING BIRTH et UNHOLY MATRIMONY sur le site conatusrecords.com


Le site officiel : www.mirrorthrone.com