Interview faite par mail par Vince

Pouvez-vous présenter Mezcla ? Histoire de commencer en douceur cette interview.
Alexis Munoz (chant / guitare) : MEZCLA est un projet né en 2003. Il est issu de la rencontre entre Geoffroy et moi-même, deux guitaristes particulièrement passionnés par le metal avec des influences un peu différentes mais avec le même appétit pour la composition et la mélodie.

Pourquoi avoir choisi comme nom de groupe Mezcla ? Qu'est ce que cela signifie pour vous ?
Alexis : Ce nom évoque mes origines espagnoles. Il signifie "mélange", et traduit une large ouverture à toutes les influences. En outre, nos compositions intègrent de nombreuses harmonies flamencas, un style que j'apprécie tout particulièrement. Le mot Mezcla n'a aucune connotation particulière et nous évite d'être contraints stylistiquement.

Comment définiriez-vous votre style ?
Alexis : Difficile de définir soi-même son propre style... Je crois que nous sommes plutôt issus de la veine metal européenne avec cette approche très mélodique qui lui est propre. Beaucoup de groupes outre-Atlantique nous inspirent également sans êtres majoritaires il me semble. Pour ce qui est de nos solos, par exemple, ils sont très lyriques et très épurés. J'utilise pour ma part, naturellement et presque exclusivement, des gammes flamencas avec un phrasé très inspiré par Paco de Lucia ou Sabicas.

Comment composez-vous ?
Guillaume Poyet (basse) : Nous composons chacun de notre côté et nous nous envoyons des maquettes par Internet, mais seulement si ces dernières sont un minimum abouties, c'est-à-dire avec des riffs et une structure cohérents, puis nous en discutons au cours de nos répétitions. Cette façon de travailler nous permet de ne pas perdre trop de temps et d'avoir une ligne directrice dans nos recherches. Une fois la structure en place, les paroles et les solos viennent compléter le tout.

De quoi parlent vos textes ? Qu'est-ce qui vous inspire ?
Alexis : Nos textes abordent des sujets très variés tels que l'environnement, l'actualité ou bien encore les évènements historiques. J'aime beaucoup l'Histoire, la planète Terre et ses habitants me fascinent dans ce qu'ils sont et ce qu'ils font.

Comment avez-vous abordé la création de ce nouvel album ?
Alexis: Cette création s'est faite tranquillement avec l'intégration en 2012 de Guillaume et Thibaud à la basse et à la batterie. Tous deux ont rejoint le groupe en cours de route et ont fait évoluer l'esthétique musicale de MEZCLA. Nous avons également pu, grâce à eux et à leur investissement personnel, créer un répertoire acoustique qui nous tenait à cœur depuis longtemps avec Geoffroy, et en faire un album avec de nombreux concerts à la clef. Cette transition acoustique nous a permis de mettre encore plus en avant nos influences flamencas tout en développant de nouvelles techniques dans nos jeux respectifs. Nous voulions que "Metalmorfosis" soit plus court et plus contrasté que "Salir Sin Pagar" en y intégrant plus de passages en son clair.

Pourquoi l'utilisation de l’espagnol ? Pour la musicalité de la langue peut-être ?
Alexis : Tu as tout bon concernant la musicalité de cette langue. Mais c'est aussi, et surtout, ma langue maternelle et je la maîtrise plutôt bien. Je ne me prive pas pour l'utiliser. La plupart des groupes de metal chantent en anglais bien que cela soit en train de changer depuis quelques années. Quoi qu'il en soit, je trouve que le Castillan sonne très bien avec notre musique.

Mezcla est-il pour vous un moyen pour faire passer des messages ? Ou un simple exutoire voire défouloir ?
Alexis : Pas plus l'un que l'autre à vrai dire. Il y a bien sûr des messages dans nos morceaux et j'attache un soin très particulier à essayer de les transmettre. Cependant, nos compositions doivent d'abord nous plaire instrumentalement. C'est le premier critère d'importance et par ailleurs je ne suis pas un maître à penser et ne tiens pas absolument à véhiculer mes idées. Il y a des prises de positions dans beaucoup de textes, cependant cela s'est fait de façon inconsciente, c'est seulement en les reconsidérant avec Guillaume que nous nous en sommes rendus compte. Nous préférons en premier lieu essayer de faire voyager, à travers notre musique, ceux qui nous écoutent. Concernant la seconde partie de ta question, la musique est à mon avis un défouloir pour n'importe quel musicien, quel que soit le style qu'il pratique, et tant mieux d'ailleurs.

Expliquez-nous un peu le concept du petit dernier en date, le très bon "Metalmorfosis" ?
Alexis : Merci beaucoup pour le compliment. Le fil conducteur de cet album est incarné par les insectes, hormis pour les titres "Sangre y Arena" et "L’Usurpateur". Ce n'est pas un documentaire ni un exercice de style mais juste une fantaisie amusante qui m'a permis d'aborder différents sujets avec des métaphores et des comparaisons inspirées par l'entomologie, science qui a toujours attisé ma curiosité. Mais l’évocation du monde des insectes ne constitue qu'un prétexte pour parler de sujets concernant directement l’Être humain. Dans le titre "Luciérnaga" par exemple, les lucioles représentent des Êtres chers qui ont choisi de quitter ce monde. Je compare leurs âmes à de petites lumières qui scintillent comme un repère bienveillant quand je me sens un peu perdu. C'est une forme d'hommage que j'ai essayé de leur rendre. Cela a été très enrichissant et m'a permis d'apprendre énormément de choses.



"Metalmorfosis" possède un visuel particulièrement beau, ainsi qu'un grand soin en ce qui concerne l'illustration du livret, à qui devons-nous le travail de cette création ? Comment s'est passée votre collaboration ?
Alexis : C'est Stève Juretig, graphiste auxerrois, qui s'est chargé de la totalité des illustrations. Nous nous sommes rencontrés plusieurs fois et Stève nous a très rapidement proposé un croquis qui correspondait parfaitement à nos attentes. Il nous a par la suite envoyé très régulièrement les différentes étapes de l'évolution de son travail.

On y retrouve énormément d'images liées au monde des insectes, devons-nous y voir un rapport avec "la métamorphose" de Kafka ?
Alexis : Tu n'es pas le premier à nous mentionner cette nouvelle, même si elle n’est pas la seule de nos influences littéraires. Pour moi, le point de départ a été une nouvelle de l'excellent Dino Buzzati, auteur italien du vingtième siècle, qui a écrit une histoire incroyable de cinq ou six pages dans un recueil de nouvelles intitulé "Le K". La nuit, la faune, et notamment les insectes, se livrent des batailles d'une férocité inouïe. Ce monde parallèle fascinant échappe totalement à notre perception. Cette nouvelle plonge le lecteur dans un univers extrêmement oppressant, impitoyable et d'une grande sauvagerie.

Le son de "Metalmorfosis" est très bon, où a-t-il été enregistré et produit ? Est-ce que le fait d'enregistrer dans un studio a été bénéfique pour vous ?
Guillaume : L’album a été enregistré, mixé et masterisé à Audun-le-Tiche en Moselle au Mon Studio  de Yann Klimezyk, ancien guitariste de Mypollux. Cela a été une expérience très enrichissante aussi bien sur l'aspect musical qu'humain. Nous avons beaucoup appris sur l'arrangement, la manière de faire vivre un riff et sur notre technique grâce aux conseils avisés de Yann. C’était un réel plaisir de pouvoir enregistrer notre album aux côtés d'un très bon ingé son mais également excellent guitariste. Il a su tirer le meilleur de nous-mêmes pendant ces dix-huit jours d'enregistrement. De plus, le fait d'être partis tous les quatre durant trois semaines dans un gîte loin de tout constituait déjà un défi en soi. Il faut dire que nous avons des modes de vie totalement différents les uns des autres et il nous a donc fallu nous adapter. Cette épreuve nous a appris à accepter les qualités et les défauts de chacun. Nous en sommes sortis renforcés.

Avez-vous des dates live afin de soutenir "Metalmorfosis" ?
Alexis: Oui, nous avons pas mal de dates prévues d'ici cet automne. Actuellement nous travaillons sur un concert que notre association organise sur Auxerre intitulé "Noche Infernal" au cours de laquelle nous nous produirons le 21 Mai aux cotés de deux autres groupes icaunais (Chien Vert et Tarvos Project), nous serons également présents sur le festival alternatif des K-Cow Phonies en Juillet. Le reste des dates est visible sur notre site.

Mezcla sur scène, ça donne quoi ? Comment préparez-vous un concert ?
Alexis : Sur scène nous nous engageons totalement. Nous nous livrons et nous donnons au maximum à chaque fois. Nos sets sont intenses, nous terminons bien crevés et nous aimons ça. Musicalement, nous sommes très "live" car nous n'utilisons presque aucun effet de production même si cela pourra être amené à évoluer prochainement. Nous préparons nos concerts comme nous le pouvons en jonglant avec toutes les contraintes que cela représente. Nous sommes contraints par nos emplois du temps respectifs, et notre situation géographique éloignée, à ne répéter parfois que deux heures par semaine. On nous demande également régulièrement de jouer notre répertoire acoustique, alors nous faisons au mieux. Nous avons cependant été amenés à devoir refuser des dates à plusieurs reprises car il nous était impossible de répéter dans les deux styles sur une même période.
Guillaume : Concernant le jour J, nous aimons nous retrouver tous les quatre au calme, si possible, afin de nous échauffer ou bien de nous reposer. Nous essayons toujours de prendre vingt minutes entre nous, afin de faire le vide et d’être le plus détendu possible avant de monter sur scène.

Pensez-vous que le live est un moyen de partager avec le public ? Est-ce un élément d'importance pour vous ?
Alexis : Évidemment, c'est toujours très agréable et excitant de voir des personnes se déplacer pour ton concert, de voir ta musique à travers leurs réactions, tu peux ainsi apprécier les morceaux auxquels le public est le plus réceptif et en jouer afin de les faire se déchaîner. De plus, cela peut devenir une zone de test afin de jouer de nouveaux morceaux. Puis tout simplement, c'est cool de pouvoir être sur scène.

Avez-vous du merchandising ? Lors de vos concerts, tenez-vous un stand pour celui-ci ? Et cela vous permet-il de vous rapprocher de votre public ?
Guillaume : Oui nous nous déplaçons toujours avec notre merch que nous avons diversifié au fil des années en éditant différents modèles de sweat-shirts et de t-shirts. Dernièrement nous avons fait faire par Amandine Clerc, des coffrets en bois artisanaux pour la sortie de "Metalmorfosis". Mais le petit plus qui fait la différence, c'est le porte-clés décapsuleur, il m'a sorti plus d’une fois de mauvaises situations.
Alexis : C'est également le moment pour nous de pouvoir recueillir les impressions de ceux qui ont assisté à ce que tu as fait. Le stand de merch devient un lieu de rencontre et de discussion et c'est aussi pour ça qu'on fait de la musique. Quand en plus on te demande de faire des petits gribouillis sur tes disques ou sur tes affiches...

Donnez-vous une grande importance au live ou plutôt au studio ?
Alexis : Les concerts sont très importants mais pas plus que tout ce qui concerne notre musique, c'est-à-dire les répétitions, la composition et tout le reste. Pour ma part, je n'ai jamais fait de la musique dans le seul but d'être vu sur scène. Je prends autant mon pied quand une compo est en phase de finalisation, ou quand nous faisons une bonne répète que quand notre public donne de la voix et nous applaudit à nos concerts. Ce sont des plaisirs différents mais tout aussi agréables les uns que les autres.
Guillaume : C'est une question plutôt complexe. Pour nous, ce sont deux expériences très différentes. Le studio est un moment très personnel, on se retrouve vraiment face à soi, à son type de jeu, à son niveau. Cela peut même devenir très perturbant, on en arrive même à remettre en question son niveau technique et ses habitudes de jeux développées depuis des années. Là où le live garde un aspect vivant, l'enregistrement, lui, grave l'instant présent. On peut toujours modifier un morceau sur scène mais lorsqu'on l'enregistre, on le fixe dans le temps. Le live, quant à lui, demande l’apport une dimension scénique en plus de la musicalité. Après, nous aimons autant faire un concert qu’enregistrer, ce sont pour nous deux façons de travailler aussi différentes que complémentaires.

Et apportez-vous plus d'importance au physique ou au numérique ?
Alexis: Nous apportons tous beaucoup plus d'importance au physique qu'au numérique. Un CD ne prend pas tant de place que ça et il contient parfois beaucoup d'informations dans son livret. Un disque ça se regarde, ça se touche, ça se sent et ça s'écoute, il y a une sensualité incroyable là-dedans non ?

Mezcla a-t-il un antre, un lieu, où vous retrouver, où vous répétez ?
Guillaume : On se retrouve chaque semaine pour répéter au sein des studios La Cuisine à Auxerre. Le lieu est cool, bien équipé et vraiment très abordable. De plus nous sommes juste à coté de la SMAC le SileX ce qui est pratique pour aller voir des concerts et rencontrer d'autres musiciens.

Et Mezcla a-t-il une équipe autour de lui ?
Alexis : Oui nous sommes soutenu par l’association Macondo depuis 2008, pour préparer nos concerts, nous aider à nous promouvoir, et gérer notre merchandising et nos ventes d’albums.



Vous êtes en totale indépendance, est-ce un choix ou cherchez-vous un label ?
Alexis : C'est un peu les deux. Nous aimerions bien trouver un label mais pas à n'importe quel prix. Cela peut être intéressant à condition de nous permettre de tourner un peu plus sinon nous n'en voyons pas trop l'intérêt. De plus nos disques se vendent déjà très bien malgré leur distribution limitée c'est-à-dire sur les concerts et dans quelques points de vente indiqués sur notre site. Néanmoins nous restons ouverts à toutes les propositions.

Les retours concernant "Metalmorfosis" sont-ils bons ? (pour notre part, nous avons beaucoup apprécié cette nouvelle offrande musicale)
Alexis : Merci encore. Les retours sont très bons pour le moment et cela nous fait du bien car nous nous sommes beaucoup investis pour proposer la meilleure musique possible. Nous avons vraiment passé beaucoup de temps sur cet album.

Des projets pour Mezcla ? Un troisième album dans le viseur ?
Alexis : Plein de projets bien sûr et déjà une idée conductrice pour le prochain album.

Où peut-on vous suivre, vous soutenir ? Avez-vous un site web, Facebook, Twitter, etc ?
Guillaume : Vous pouvez nous retrouver sur notre site web à l'adresse : www.mezcla.fr
Ainsi que sur :
Facebook : www.facebook.com/mezclagrupo
Twitter : www.twitter.com/mezclagrupo
Et Soundcloud : www.soundcloud.com/mezclagrupo
De plus nous avons aussi une page YouTube avec notre clip :
www.youtube.com/watch?v=bGSO2y1gH_E

Avez-vous une ou deux anecdotes (rigolotes ou non) à partager avec les lecteurs de French Metal ?
Alexis : Il y a un bon paquet d'anecdotes à raconter car nous avons passer cette fameuse période de trois semaines ensemble pour l'enregistrement de l'album. Entre ceux qui ne mangent pas de légumes, d'autres pas de viande ou de fromage, je peux te dire que c’était joyeux de prévoir les repas... Mis à part ces petits détails charmants, voici un événement qui m'a surpris et que j'ai trouvé rigolo : le studio d'enregistrement se trouvait dans l'enceinte d'un café concert : l’Entrepot. Le premier jour, quand nous avons poussé la porte du bar, la première personne que nous avons rencontrée a été le tôlier de l’établissement. Ce dernier nous a immédiatement reconnus et nous a chaleureusement appelé les "Mezcla". Cela a été pour nous une petite excitation très passagère de notre ego. Le fait d’être à plus de 400 km de chez nous et identifié par la première personne que nous voyions était très grisant. Finalement l’atterrissage s'est effectué très rapidement quand il nous a dit qu'il faisait du son sur des festivals, en plus de son boulot au bar, et qu'il nous avait sonorisés lors d'un concert dans notre région. Belle coïncidence en tout cas et excellent présage de bienvenue !

Évoluez-vous également dans d'autres formations ?
Guillaume : Thibaud évolue également au sein du groupe de rock progressif Truth About Elmore. Ils ont sorti un EP intitulé "Episodes" en 2015 et furent même sélectionnés pour participer à la Sélection Bourgogne des Inouïs du Printemps de Bourges 2016.

Vous êtes originaires d’Auxerre, avez-vous des lieux, des groupes à conseiller aux lecteurs de French Metal ?
Guillaume : Au niveau des lieux immanquables de la ville, impossible de faire l'impasse sur la salle de concert le SileX. Nous avons eu l'occasion d'y voir de très bons groupes de metal tel que Loudblast, No Return, L'Esprit Du Clan ou encore dernièrement Le Bal Des Enragés qui ont mis une ambiance de folie ! L'association +2Zik à Chichery organise quelques concerts au cours de l'année, ainsi qu'un festival chaque été dans un cadre "Do It Yourself" très bien géré et convivial. A Joigny, à côté d'Auxerre, il y a aussi L’Escargot de Sab, un super bar / restaurant concert tapissé de pochettes d'album et de couvertures de magazines, dirigé un couple accro au metal. Concernant les groupes de metal, nous ne sommes vraiment pas beaucoup dans le secteur mais s'il y a bien des groupes que l'on vous recommande d'écouter c'est Erazer, groupe de death originaire de Sens, ainsi que Kayan, groupe de post-hardcore.

On vous laisse tribune libre pour le mot de la fin, faites-vous plaisir (dans la limite du raisonnable évidemment).
Alexis : Nous remercions toute l’équipe de French Metal pour son travail. Les chroniques albums sont bien rédigées et très intéressantes. Nous adorons les compilations proposées, qui sont bien distribuées et très instructives. Il y a vraiment de très bons groupes en France et c'est notamment grâce à ce genre d’actions que nous pouvons nous en rendre compte. Le metal n'est pas une musique très lucrative ni très facile d'approche, et nous avons beaucoup de respect pour tout ceux qui contribuent à sa promotion dans notre pays. Bravo et merci à vous, ainsi qu’à tous les passionnés de metal qui ne lâchent rien !

Bonne continuation à Mezcla, à très bientôt chez French Metal !


Le site officiel : www.mezcla.fr